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Pierre Bellemare comme vous ne l’avez jamais entendu ! C’est la promesse de ce nouveau podcast imaginé à partir des archives exceptionnelles du Service Patrimoine Sonore d’Europe 1.
Affaires criminelles, true crime, crimes, enquêtes, crimes historiques ou plus récents, crimes crapuleux, crimes familiaux, crimes inexpliqués surtout : Pierre Bellemare est le pionnier des grands conteurs de récits radiophoniques. Dans les années 70, cette voix culte d’Europe 1 a tenu en haleine les auditeurs avec ses histoires extraordinaires. Des histoires vraies de crimes en tout genre qui mettent en scène des personnages effrayants, bizarres ou fous. Des phrases à couper le souffle, des silences lourds de suspense, un univers de polar saisissant et puissant.
Avec un son remasterisé et un habillage modernisé, plongez ou replongez dans les grands récits extraordinaires de Pierre Bellemare.

[ARCHIVE EUROPE 1 - Les récits extraordinaires de Pierre Bellemare] Le roman « Thérèse Desqueyroux » fait partie des œuvres les plus célèbres de l’écrivain François Mauriac. Cette mystérieuse femme accusée d’empoisonnement sur son mari n’est pas qu’un simple personnage de fiction, elle a réellement existé. La “vraie” Thérèse, François Mauriac l'aperçoit pour la toute première fois dans une salle étouffante d’une cour d’assises en 1906. Le jeune écrivain ne peut l’oublier. Il est fasciné et bouleversé par cette épouse d’un grand bourgeois bordelais. Vingt ans plus tard, l’écrivain catholique tourmenté par le péché lui consacre un roman. Tout commence lorsque le mari de Thérèse Desqueyroux est victime de sueur, de spasmes et de paralysie. La proportion d’Arsenic dans son sang est inexplicable. Les médecins sont formels : quelqu’un a tenté de l’empoisonner ! Thérèse Desqueyroux assure pourtant qu’un médecin lui a prescrit cette ordonnance pour soulager son mari de la dépression dont il souffre. Mais plus tard, les graphologues déterminent que cette ordonnance a été écrite… de la main de Thérèse elle-même. A-t-elle empoisonné son mari ? Et si oui, pour quelle raison ? Pourquoi sa famille tient-elle tant à défendre Thérèse ? Sera-t-elle condamnée pour tentative de meurtre ou simplement pour “faux” et “usage de faux” ? Pierre Bellemare raconte cette incroyable histoire, qui mêle fiction et réalité, dans cet épisode du podcast "Les récits extraordinaires de Pierre Bellemare", issu des archives d’Europe 1 et produit par Europe 1 Studio.
Retrouvez "Les Récits extraordinaires de Pierre Bellemare" sur : http://www.europe1.fr/emissions/les-recits-extraordinaires-de-pierre-bellemare

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Transcription
00:00 Bienvenue dans les récits extraordinaires de Pierre Belmar.
00:07 Un podcast issu des archives d'Europe 1.
00:10 Un libraire de la banlieue parisienne m'a dit qu'il vendait tous les jours, je dis bien tous les jours,
00:16 au moins un exemplaire d'un vieux roman paru en 1927, Thérèse Desguerroux de François Mauriac.
00:22 Et, comme je m'en étonnais, ce sont des jeunes qui l'achètent, m'expliqua-t-il, des étudiants, des lycéens.
00:29 Mauriac est au programme maintenant, comme le temps passe.
00:34 Un petit livre d'une centaine de pages qui raconte la vie d'une bourgeoise 1900,
00:39 cette Thérèse Desguerroux vue à travers les barreaux vivants d'une famille bordelaise, est devenu un classique.
00:46 On l'analyse, on l'étudie, et bien sûr la jeunesse ne peut qu'admirer l'héroïne,
00:51 cette femme prisonnière des conventions sociales, esclave de son mari qui se révolte et cherche à le tuer.
00:58 Ce n'est peut-être pas très moral, mais c'est ainsi.
01:01 Les bons sentiments ne font pas toujours la bonne littérature, c'est l'ennemi personnel de Mauriac André Gide qui l'a dit.
01:08 Mais le plus intéressant, Thérèse Desguerroux a réellement existé. Mauriac l'a connue.
01:14 Thérèse, écrit-il, "je me souviens, adolescent, d'avoir aperçu dans une salle étouffante d'assises,
01:20 livrée aux avocats moins féroces que les dames en panaché, ta petite figure blanche et sans lèvres."
01:27 Inquiétante, une jolie femme sans lèvres. Séduisante malgré tout au dire des témoins.
01:33 Thérèse fumait cigarette sur cigarette, ce qui à l'époque, pour une bourgeoise, signifiait l'indépendance,
01:39 l'émancipation, la révolte contre l'ordre établi. L'ordre représenté par le mari, bien entendu.
01:44 Le jeune François Mauriac, écrivain catholique, toute sa vie tourmentée par le péché, ne va pas oublier cette pécheresse.
01:51 Il assiste à Bordeaux en 1906 à son procès. Thérèse le bouleverse. Son souvenir ne le quitte plus. Il la tutoie.
01:59 "Que de foi ai-je admiré sur ton front vaste et beau, ta main un peu trop grande,
02:05 de ton oeil méchant et triste, tu me dévisages et..."
02:10 Au bout de vingt ans, il lui consacre un roman. Et Thérèse Desqueroux devient immortelle,
02:16 immortelle et coupable, comme Mauriac. Car c'est bien un amour coupable en imagination qui lie l'académicien à son héroïne.
02:24 Évidemment, Mauriac a changé le nom de la femme accusée devant les assises de Bordeaux.
02:29 La vraie Thérèse Desqueroux s'appelle... Je ne vous dirai pas non plus son vrai nom, par respect pour sa famille.
02:37 Et puis aussi, parce que c'est sous le nom de Thérèse qu'elle est devenue, et restera, tristement célèbre.
02:44 [Musique]
03:03 Au début du mois de mai 1905, un médecin sonne à la porte d'un immeuble du Quai des Chartons à Bordeaux,
03:09 chez un courtier en vin. Il est accueilli par une vieille dame.
03:13 "Passez-vous docteur, enfin. Je vous attendais avec impatience. Mon fils n'a pas fermé l'œil de la nuit. Il souffre le martyr."
03:19 "Je suis venu dès que j'ai pu, madame. Avec cette épidémie de grippe, vous pensez que c'est la grippe ?"
03:24 "Je n'en sais rien, madame. C'est possible, d'après ce que vous m'avez dit au téléphone. Nous allons voir ça."
03:30 Le médecin examine le malade. Un homme d'une quarantaine d'années, en pleine force de l'âge, bien bâti,
03:35 et pourtant, depuis plusieurs mois, victime de troubles mal définis. Sujet à la dépression, il transpire la nuit.
03:42 Son cœur, sans raison, soudain bat la chamade. Il prend habituellement des calmants. Il suit aussi un traitement.
03:49 Il boit de la liqueur de Foller, un médicament à base d'arsenic.
03:54 Comme toujours, quand on n'explique pas ce qui se passe, on dit "ce n'est rien, c'est nerveux".
04:01 Mais là, aujourd'hui, il s'agit d'autre chose, non plus de troubles passagers, mais d'une maladie.
04:08 Le médecin hésite à formuler un diagnostic. "Une grippe infectieuse, oui, probablement."
04:15 Il rédige une ordonnance. "Nous allons toujours essayer ça. Je repasserai demain."
04:21 Autour du lit se trouve la vieille dame, la mère du malade, qui vit chez son fils depuis qu'elle est veuve,
04:27 et la belle Thérèse, l'épouse. C'est elle qui reconduit le médecin.
04:33 "Vous croyez qu'il y a lieu de s'inquiéter ?" "Non, madame. Si votre mari allait plus mal, vous m'appelez."
04:40 "Remarquez, ce n'est pas moi qui m'inquiète, c'est mon mari, justement. Il pense sans cesse à la mort, et il pleure."
04:47 "Bien, rassurez-le." "C'est ce que je fais, enfin. Je m'y efforce. Car, voyez-vous, docteur,
04:55 ne trouvez-vous pas que la vie que nous menons ici, enfin, je veux dire, la vie des gens de notre monde,
05:01 ressemble déjà terriblement à la mort ?"
05:06 L'état du malade empire très vite. Des spasmes l'agitent. Il vomit un liquide verdâtre.
05:12 Il prétend que ses jambes sont paralysées. On rappelle le médecin.
05:16 Celui-ci, de plus en plus perplexe, demande une consultation.
05:20 Plusieurs de ses confrères, des sommités médicales, arrivent, examinent le quartier en vain,
05:25 un homme fort connu à Bordeaux qui appartient, comme on dit, à l'aristocratie du bouchon.
05:30 Les médecins discutent entre eux. Le pouls est rapide, la température ne monte pas.
05:36 "Pour moi, c'est un empoisonnement. Enfin, je mets de la vie. Il n'a pris aucun produit toxique."
05:42 "Je ne vois pourtant que le poison. Il n'y a pas d'autre explication."
05:46 Les docteurs tombent d'accord, au moins sur un point.
05:50 Il faut transporter d'urgence le malade dans une clinique, procéder à des analyses.
05:54 Curieusement, à peine le quartier est-il séparé de sa famille,
05:58 sans que des soins exceptionnels lui soient prodigués,
06:01 uniquement parce qu'il est hospitalisé, il se sent mieux.
06:04 Son pouls bat à un rythme régulier. Son visage qui était livide reprend des couleurs.
06:09 "Oui, c'est vraiment curieux", dit le médecin-chef infirmière.
06:14 "Vous êtes sûr qu'on n'a rien trouvé au labo ?"
06:18 "Rien d'anormal, monsieur."
06:20 "Il faut refaire des analyses."
06:22 "Mais quelles ?"
06:23 "Toutes. Et puis, tenez, pendant que vous y êtes,
06:26 coupez-lui une mèche de cheveux et quelques poils de barbe.
06:29 Vous me direz quelle est la proportion d'arsenic qu'on y trouvera."
06:33 "D'arsenic ?"
06:34 "Il prend de la liqueur de Foller, avec de l'arsenic dedans."
06:38 "Donc, il y en aura de l'arsenic, obligatoirement."
06:41 "Dans les cheveux et la barbe ?"
06:42 "Bien sûr. Et là au moins, on verra tout de suite en quelle quantité. Vous me suivez ?"
06:46 "Non, monsieur, ça n'a pas d'importance. Faites ce que je vous dis."
06:50 Le médecin-chef a une bonne idée.
06:53 Les résultats sont formels.
06:55 Proportion d'arsenic inexplicable, hors de rapport avec les doses prescrites dans le traitement à la liqueur de Foller.
07:01 25 mg au kilo dans les cheveux, 40 dans la barbe.
07:05 Le pharmacien du Quai des Chartrons, où habite le courtier, est discrètement interrogé.
07:11 "Oui, il a fourni à un domestique envoyé par Thérèse, quelques jours avant l'aggravation de la maladie de son mari,
07:17 trois flacons de liqueur de Foller et d'autres médicaments."
07:21 "Avec une ordonnance, s'il vous plaît ?"
07:23 "Oui, bien sûr, ça va de soi."
07:26 Le médecin de famille est interrogé à son tour.
07:28 "Moi ? Je n'ai pas des livrets d'ordonnance à ce moment-là. Vous en êtes certain ?"
07:33 "Bien absolument. Vous n'avez pas vu mon malade depuis au moins six semaines."
07:39 "Alors, qui a fourni cette ordonnance ?"
07:44 "C'est simple, il n'y a qu'à le demander à Thérèse.
07:47 Celle-ci ne fait d'ailleurs aucune difficulté pour donner une explication.
07:51 C'est un médecin d'Élande, voyez-vous-même."
07:55 L'ordonnance prescrit en effet non seulement de la liqueur de Foller, mais d'autres produits toxiques.
08:00 "Oui, précise Thérèse, j'ai eu l'occasion de rencontrer un chimiste qui en avait besoin pour des expériences,
08:05 mais comme il devait de l'argent à plusieurs pharmaciens de Bordeaux, il m'a demandé si je pouvais lui procurer ces produits-là."
08:11 "Comment s'appelle-t-il ?"
08:13 "Le chimiste."
08:14 "Cela ne vous regarde pas."
08:17 "Bizarre."
08:19 "Un chimiste anonyme ? Et pourquoi parmi les produits dont il a besoin,
08:24 y a-t-il aussi de la liqueur de Foller, le médicament que prend régulièrement le courtier en vin ?
08:30 Pourquoi enfin l'ordonnance est-elle rédigée par un médecin d'Élande ?"
08:36 "Celui-ci est joint par le médecin de famille et déclare sans hésiter,
08:40 mais je n'ai jamais délivré d'ordonnance de cette nature.
08:43 On a abusé de ma signature.
08:45 L'ordonnance dont vous me parlez ne peut être qu'un faux.
08:49 Je porte plainte."
08:52 Voilà donc Thérèse accusée de faux et usage de faux,
08:56 et bien entendu suspectée d'avoir voulu empoisonner son mari.
09:01 Comment va-t-elle se défendre ?
09:03 Comment va réagir son entourage, son mari, sa belle-mère ?
09:07 "Je n'ai pas été empoisonné !"
09:17 déclare avec fermeté le mari de Thérèse maintenant remis de son indisposition.
09:22 Il tient tête à ceux qui accusent sa femme d'avoir voulu le tuer.
09:26 Mais il faut la bassesse d'âme, doisif avide de scandale,
09:30 pour lancer contre un honnête homme et contre une irréprochable mère de famille
09:34 les abjectes calomnies dont nous sommes tous les victimes.
09:38 "Tous ? Qui ça, tous ?
09:42 Eh bien, tous les membres de la famille,
09:46 y compris un ami reçu fréquemment qu'à des chartons et dont nous aurons à reparler.
09:51 La belle-mère de Thérèse prend également fête et cause pour elle.
09:55 C'est une dame âgée, qui a de l'allure, de la distinction,
09:58 une dame de haute vertu, précise le dossier.
10:02 "Je crois, dit-elle, tout à fait fausse l'accusation qui pèse sur ma belle-fille.
10:06 Et elle insiste, elle qui partage la vie quotidienne des époux sur la bonne entente qui règne entre eux.
10:11 Et puis elle témoigne publiquement de son affection à Thérèse.
10:16 Voilà.
10:18 Une famille de la grande bourgeoisie bandelaise ne peut pas, ne doit pas être soupçonnée de mésentente.
10:25 Elle fait front courageusement et avec un certain panache.
10:28 Que Thérèse soit coupable ou pas, c'est secondaire,
10:32 puisque face au monde, elle est, par principe, innocente.
10:37 Après tout, Thérèse est peut-être innocente,
10:42 malgré l'ordonnance fausse avec laquelle elle s'est procurée des médicaments dangereux,
10:46 on dirait aujourd'hui des médicaments marqués sur la liste rouge.
10:51 Nous savons bien, écrit l'éditorialiste du Figaro le 6 juin 1906,
10:56 que la vraie histoire n'est pas celle du procès.
11:00 Probablement, on ne la connaîtra jamais.
11:05 Un rideau de fer est tombé entre le quai des Chartrons et le palais de justice.
11:12 Vous vous demandez sans doute comme moi ce qui a pu se passer.
11:17 On en est réduit, faute de documents, à l'imaginer.
11:22 Voici l'hypothèse exposée par François Mauriac lui-même dans son roman.
11:27 Thérèse n'appartient pas réellement à cette bourgeoisie jalouse de ses privilèges autant que de sa réputation.
11:34 Elle n'est pas heureuse en ménage.
11:37 Elle aspire à autre chose, à une autre manière d'être, de vivre passionnément si étrangère à son milieu.
11:45 Son mari souffre de dépression.
11:48 Il prend différents médicaments et en particulier cette fameuse liqueur de Foller à base d'arsenic.
11:54 Un soir, alors qu'à chevans de souper il a compté ses gouttes en les versant dans un verre d'eau,
12:01 un domestique vient lui parler d'un incendie qui menace une de ses propriétés.
12:06 Le domestique partit, il demande à sa femme « ai-je bien pris mes gouttes ? »
12:12 Thérèse qui pourtant l'a vue avaler le verre d'eau ne répond pas.
12:16 Son mari se sert alors une seconde dose et il sera malade toute la nuit.
12:23 Le lendemain, Thérèse verse un peu de liqueur de Foller dans le verre de son époux
12:28 avant que celui-ci ne fasse lui-même tomber le nombre de gouttes prescrites pour son traitement.
12:35 « Je veux juste une fois » se dit Thérèse « pour en avoir le cœur net.
12:39 Comme ça je saurais si c'est cela qui l'a rendu malade.
12:42 Une seule fois et ce sera fini. »
12:46 Et bien entendu, le mari est à nouveau malade, de plus en plus malade,
12:52 d'autant que Thérèse continue son manège.
12:57 Mais pourquoi aurait-elle fait ça si elle l'a fait ?
13:01 Puisque je vous le rappelle, je vous raconte là, une hypothèse, celle de François Mauriac.
13:08 Sur le mobile du crime, si tentative de crime il y a,
13:11 Mauriac est d'accord avec la réalité.
13:15 Thérèse a retrouvé depuis quatre ans un ami d'enfance avec lequel elle entretient de tendres relations.
13:22 Nous n'en savons pas davantage.
13:25 Cet ami est reçu qu'il est des chartons, il n'est pas fortuné, on lui prête de l'argent.
13:30 Tout cela sera dit au procès et lui-même avouera
13:35 « Les femmes ont toujours exercé beaucoup d'ascendant sur moi,
13:39 en particulier Thérèse qui est si intelligente.
13:43 « N'avez-vous pas songé à l'épouser autrefois ? » demande le président des Assises, « il y a dix-sept ans. »
13:50 C'est exact.
13:52 « Mais le mari s'insurge.
13:54 « Ce que vous insinuez est ignoble.
13:56 Cet homme est mon meilleur ami. »
13:59 Argument peu convaincant, vous en conviendrez.
14:02 Quand on sait que les femmes trompent de préférence leur époux avec des hommes qu'elles connaissent
14:06 et en qui elles ont confiance, à qui accorder une meilleure confiance qu'un ami de son mari ?
14:13 Au procès qui commence le 25 mai 1906, Thérèse est sauvée par les témoignages de sa famille.
14:18 Elle est irréprochable, tout le monde vient l'affirmer à la barre.
14:23 Et pourtant, non seulement la fameuse ordonnance qui a permis à Thérèse
14:26 de se procurer plus de liqueur de Foller qu'il n'était nécessaire est un faux,
14:30 mais encore, les experts déclarent que c'est Thérèse elle-même qui l'a rédigée de sa propre main.
14:36 Le chimiste qui, soit-disant, avait besoin de produits toxiques, où est-il ?
14:41 Thérèse a donné son signalement fourni des lettres de lui.
14:44 « Des lettres de lui ? Lettres fausses ! Aussi fausses que l'ordonnance est écrite de la même main, »
14:49 disent encore les graphologues.
14:52 Ce chimiste a dû se désintégrer lui-même au cours d'une de ses étonnantes expériences.
15:00 Le jury délivère pendant une heure et demie,
15:04 et Thérèse est acquittée du chef d'empoisonnement,
15:06 mais condamnée tout de même à 15 mois de prison et 100 francs d'amende pour faux et usage de faux.
15:13 La justice a parlé, mais le clan, la famille avec un grand F,
15:18 après avoir obtenu satisfaction aux yeux du monde,
15:22 ne va-t-elle pas vouloir régler elle-même ses comptes à huis clos ?
15:27 Mouriac imagine une scène où Thérèse libérait ce jette au pied de son mari.
15:32 « Laissez-moi disparaître, je vous en supplie. »
15:35 « Quoi ? » répond celui-ci.
15:37 « Vous osez avoir un avis et mettre un vœu ? »
15:41 « Vous n'avez qu'à écouter, qu'à recevoir mes ordres. »
15:47 Thérèse, pour éviter le grand iraton, doit apparaître à la messe en famille,
15:51 assister à des réunions mondaines, et le reste du temps, vivre cloîtrée.
15:57 Ses deux enfants sont envoyés en Angleterre pour y continuer leurs études.
16:01 Les années passent, et les obligations de se montrer à Bordeaux, la tête haute, n'ont plus eux-mêmes intérêt.
16:09 Thérèse va vivre sous un nom d'emprunt à Paris, noyée dans la foule de la capitale.
16:14 Une chose tracasse son mari.
16:17 Il voudrait arriver à comprendre ce qui s'est passé.
16:21 Il n'est pas très intelligent, et les états d'âme de Thérèse, il ne les comprend pas.
16:27 Ce sont pour lui des enfantillages, et pour un enfantillage, n'est-ce pas, on ne songe pas à tuer.
16:36 Selon Mauriac, le mari a cru que sa femme voulait s'approprier sa fortune.
16:43 C'était bien mal connaître sa Thérèse.
16:48 Celle-ci mourra en 1952, la veille de la Toussaint,
16:56 dans une maison de campagne du Bordelais, où elle a tout de même été autorisée à venir finir ses jours.
17:04 A-t-elle emporté son secret dans le au-delà, cette femme mystérieuse qui, aujourd'hui encore, séduit tant de lecteurs ?
17:11 Mauriac imagine qu'à l'époque où elle habitait Paris, son mari venu lui rendre visite se trouvait avec elle à la terrasse d'un café,
17:18 et une fois de plus essayait de la faire parler.
17:21 Quand a-t-elle songé à se débarrasser de lui ? Comment son projet a-t-il pris forme ?
17:25 Pourquoi surtout ? Que voulait-elle ?
17:31 Ce que je voulais, finit par avouer Thérèse.
17:37 Sans doute serait-il plus aisé de vous dire ce que je ne voulais pas.
17:44 Ce jour-là, Thérèse avait un peu bu et beaucoup fumé.
17:48 Son mari partit, elle se mit à errer dans la rue.
17:53 Et François Mauriac conclut,
17:57 « Au moins sur ce trottoir où je t'abandonne, j'ai l'espérance que tu n'es pas seule. »
18:04 [Musique]
18:23 Vous venez d'écouter les récits extraordinaires de Pierre Belmar,
18:27 un podcast issu des archives d'Europe 1 et produit par Europe 1 Studio.
18:32 Réalisation et composition musicale, Julien Taro.
18:36 Production, Sébastien Guyot.
18:39 Direction artistique, Xavier Joli.
18:42 Patrimoine sonore, Sylvaine Denis, Laetitia Casanova, Antoine Reclus.
18:47 Remerciements à Roselyne Belmar.
18:50 Les récits extraordinaires sont disponibles sur le site et l'appli Europe 1.
18:54 Écoutez aussi le prochain épisode en vous abonnant gratuitement sur votre plateforme d'écoute préférée.