• il y a 11 mois
Pierre Bellemare comme vous ne l’avez jamais entendu ! C’est la promesse de ce nouveau podcast imaginé à partir des archives exceptionnelles du Service Patrimoine Sonore d’Europe 1.
Affaires criminelles, true crime, crimes, enquêtes, crimes historiques ou plus récents, crimes crapuleux, crimes familiaux, crimes inexpliqués surtout : Pierre Bellemare est le pionnier des grands conteurs de récits radiophoniques. Dans les années 70, cette voix culte d’Europe 1 a tenu en haleine les auditeurs avec ses histoires extraordinaires. Des histoires vraies de crimes en tout genre qui mettent en scène des personnages effrayants, bizarres ou fous. Des phrases à couper le souffle, des silences lourds de suspense, un univers de polar saisissant et puissant.
Avec un son remasterisé et un habillage modernisé, plongez ou replongez dans les grands récits extraordinaires de Pierre Bellemare.

[ARCHIVE EUROPE 1 - Les récits extraordinaires de Pierre Bellemare] Julia K. a 17 ans lorsqu’elle entame une double vie. Tout bascule dans un train, un jour de 1927.  Julia est mariée depuis un mois. Ce jour-là, elle rejoint ses parents, des paysans originaires de la région d'Heidelberg en Allemagne. Dans la cabine du train, un homme lui parle mais elle ne le voit pas réellement.
Après ce trajet, Julia ne sera plus jamais dans son état normal. Elle est nerveuse, désorientée, son mari ne la reconnaît plus. Elle consulte un médecin, deux fois par semaine, qui l’aide beaucoup selon elle. Pendant sept ans, Julia va se rendre à ces consultations. Son état ne s’améliore pourtant pas et le coût de ces entretiens a endetté le couple. Son mari s’interroge, il veut rencontrer ce médecin. Mais lorsqu’il la suit au rendez-vous, Julia est incapable de se souvenir de l’endroit où celui-ci habite. Ne sachant plus quoi faire, son mari se rend à la police. Quelque chose d’étrange se passe depuis toutes ces années... Quand les experts s’entretiennent avec Julia, son discours est incohérent. Les conclusions des experts sont formelles : Julia est dans un état hypnotique profond. La jeune femme mène une autre existence, dont elle ne se souvient pas. Elle sent bien qu’une force la pousse à commettre “des choses affreuses”. Un certain Frantz W., éveille les soupçons des enquêteurs mais comment prouver son emprise ? Pour les experts, il s'agit de trouver les “mots-clés” pour débloquer cette hypnose. Parviendront-ils à sauver la jeune Julia de l’homme qui contrôle son esprit ? Pierre Bellemare raconte cette incroyable histoire dans cet épisode du podcast "Les récits extraordinaires de Pierre Bellemare", issu des archives d’Europe 1 et produit par Europe 1 Studio.
Retrouvez "Les Récits extraordinaires de Pierre Bellemare" sur : http://www.europe1.fr/emissions/les-recits-extraordinaires-de-pierre-bellemare

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Transcription
00:00 Bienvenue dans les récits extraordinaires de Pierre Belmar, un podcast issu des archives d'Europe 1.
00:09 Je ne crois pas que vous puissiez imaginer une seule seconde ce que fut la double vie de Julia
00:16 Kranz. Je ne crois pas non plus qu'un être humain ait vécu la double vie de Julia Kranz. Elle a
00:26 duré sept ans. Sept ans de ténèbres. Sept ans pendant lesquels Julia Kranz fut tour à tour Dr.
00:35 Jekyll et Mr. Hyde. Lorsque vous entendrez la fin de ce dossier extraordinaire, qui que vous soyez,
00:42 regardez-vous dans une glace. Regardez-vous bien. Et demandez-vous très honnêtement ce que vous
00:52 auriez fait ou ce que vous n'auriez pas fait à la place de Julia Kranz. Vous verrez comme ça fait
01:03 peur. Vous verrez comme c'est effrayant de penser que la double vie de Julia Kranz pourrait être la
01:12 vôtre. Julia Kranz a 17 ans en 1927 lorsqu'elle entame sa double vie. Elle en aura 27 quand tout
01:24 sera terminé. À 17 ans, Julia est une jolie fille de la campagne qui va se marier. Un visage rond,
01:33 encore un peu enfantin, des yeux bleus, candides et d'énormes macarons de tresse blonde sur les
01:40 oreilles. Ses parents sont paysans. Ils vivent dans la région d'Heidelberg. Son fiancé est
01:47 employé à la ville. Ce jour de 1927 a une date qu'elle ne peut préciser davantage. Vous
01:55 comprendrez pourquoi tout à l'heure. Julia Kranz est dans un train pour un court trajet qui la
02:03 ramène dans sa famille. Elle est mariée depuis environ un mois. Dans le compartiment en face
02:11 de Julia, il y a sûrement quelqu'un. Ou à côté, à droite ou à gauche, il y a au moins quelqu'un,
02:19 puisque quelqu'un lui parle. Qui est-ce? Il semble que ce soit un homme. Comment est-il? Julia ne
02:32 sait pas. Comment s'appelle-t-il? C'est peut-être Schnee. Pourquoi Schnee? Non, non, c'est Denik.
02:43 Denik. Denik. Non, non, c'est Bergen. Plutôt Bergen. En tout cas, c'est l'un ou l'autre.
02:53 Il est docteur. Ah ça oui, c'est un docteur. Quoi d'autre, Julia Kranz? Rien d'autre,
03:04 dit Julia Kranz. Non, vraiment rien d'autre. Ne m'en demandez pas davantage. Je ne me souviens
03:11 de rien. Mais que s'est-il passé depuis votre mariage, Julia Kranz? Vous avez bien changé.
03:17 Votre mari s'inquiète. Il n'ose pas le dire, mais il a peur. Vous êtes toujours malade,
03:23 nerveuse, bizarre. Par moments, vous faites des choses étranges. Je ne sais pas, dit Julia Kranz.
03:32 Je crois que je suis malade depuis longtemps. D'ailleurs, tout le monde le sait, j'ai toujours
03:39 été malade. On me soigne, mais je crois que je ne guérirai jamais. Voilà peu de choses pour
03:47 vous dire. Après, ce que peut dire Julia Kranz à l'automne 1934, sept ans après son mariage.
03:54 Et justement, monsieur Kranz s'inquiète de l'état de santé de sa femme. Julia,
04:00 cette vie ne peut plus durer. Je veux savoir ce qui se passe. Nous allons nous rendre tous
04:06 les deux ensemble chez ton médecin. Depuis le temps qu'il te soigne, ton état ne s'améliore
04:12 pas. Au contraire. Comment s'appelle-t-il? Comment il s'appelle? Je ne sais pas. Comment
04:20 tu ne sais pas? Enfin, Julia, c'est impossible. Tu y vas deux ou trois fois par semaine. Ne me
04:25 dis pas que tu ignores son nom. Tu deviens folle. Ne me tourmente pas, je t'en supplie. J'ai si mal
04:31 à la tête. Enfin, tu sais au moins où il habite, je suppose, puisque tu y vas seul. Julia, tu m'écoutes?
04:38 Julia Kranz, elle est retirée, se tient le front, semble souffrir beaucoup. Bon, très bien, Julia,
04:48 habille-toi, nous y allons tout de suite. Julia Kranz et son mari Heinrich quittent leur domicile
04:55 à pied pour se rendre chez le médecin. Heinrich se laisse guider par sa femme. Elle se dirige vers
05:03 le centre de la ville. Heidelberg est une charmante petite ville d'Allemagne occidentale. Elle appartient
05:09 au grand-duché de Bad, entourée de forêts et construite autour du château des princes de
05:12 Heidelberg, traversée par deux rivières, eaux calmes et claires. C'est une des plus anciennes
05:17 cités universitaires d'Allemagne. Arrivé sur une petite place ennuy d'une fontaine, Julia soudain
05:24 s'arrête sur le trottoir, hésitante. Je ne sais plus où elle est. C'est tout près d'ici, j'en suis
05:30 sûr, mais je ne peux pas aller plus loin. Je t'assure, Heinrich, ne m'oblige pas à aller plus loin. Je ne peux pas.
05:38 Déconcertée, Heinrich regarde sa femme. Elle est agitée de tremblements nerveux, ses yeux sont
05:46 devenus fixes. Elle ne cesse de répéter. Je ne peux pas, je ne peux pas. Je t'en prie, Julia, fais un
05:53 effort. Reprends-toi. Tu sais où habite ton médecin. Tu le sais forcément, mais dis-le, cherche.
06:00 Et Julia se laisse tomber sur un banc, sanglotant, convulsivement, incapable de parler. Heinrich est
06:10 obligé d'abandonner et de ramener sa femme. À plusieurs reprises, il renouvellera l'expérience.
06:14 Sans obtenir plus de résultats, à chaque tentative, Julia s'arrête pile sur la petite place près de
06:20 la fontaine, incapable d'aller plus loin et à chaque fois victime de la même crise nerveuse.
06:26 À force de ruses et de persuasion, Heinrich n'obtiendra qu'un seul renseignement de Julia.
06:33 Cet homme est le seul à pouvoir me soigner. Il met ses mains sur ma tête et l'horrible douleur
06:41 s'en va. Qu'est-ce qu'il te dit ? Il dit « Calmez-vous, Julia, et dormez ». Je m'endors et je n'ai plus mal.
06:54 En dehors de cela, rien. Julia ne cesse de se plaindre de maux de tête violents. Elle est
07:03 déprimée, pleure la moitié du temps et dit qu'elle va mourir. Dès que son mari a le dos tourné, elle
07:09 disparaît chez ce médecin inconnu dont les honoraires sont si élevés qu'il frise l'escroquerie.
07:14 Heinrich a bien tenté de refuser l'argent nécessaire, mais Julia l'a volée, a vendu ses bijoux et elle
07:20 dépérit de plus en plus. Chaque fois que son mari a tenté de la suivre, il a échoué. Julia a été
07:26 comme avertie et retournée sur ses pas. Les crises étaient si violentes ensuite que son mari a dû y
07:33 renoncer. « Oh, peut-être avez-vous déjà compris ». Heinrich, lui, ne comprend pas. D'un homme simple,
07:40 emprisonné de bureau, une intelligence moyenne. Sa réaction, pourtant, est sûrement la bonne.
07:45 Ne sachant plus quoi faire, il se présente à la police de Heidelberg. « Je viens déposer une
07:55 plainte contre inconnue. Ma femme se fait soigner par un guérisseur depuis sept ans. J'ignore qui
08:02 est cet homme où il se trouve, mais il nous a dépouillé de 3000 marques au moins. » Le policier
08:11 qui enregistre la plainte se montre tellement sceptique que le malheureux monsieur Kranz est
08:18 obligé de faire venir toute la famille, les voisins et le médecin de famille pour confirmer ses dires.
08:23 « Non, il n'est pas fou. Non, il ne connaît pas cet homme et sa femme non plus. Oui, cet homme la
08:28 soigne depuis sept ans. Non, elle ne sait pas où il habite. Non, elle ne sait pas le décrire. Elle
08:32 ne connaît pas son visage. Elle ne sait pas comment il s'appelle, si il est grand ou petit, gros ou maigre. »
08:36 Pauvre Heinrich, il ne sait rien. Et ce qu'il va apprendre au l'espace de quelques mois
08:47 rendrait fou n'importe quel mari, n'importe quel homme.
08:51 Enfin convaincu, la police de Heidelberg, nous sachant par quel bout entamer son enquête,
09:15 décide d'appeler au secours le docteur Meyer, psychiatre réputé et spécialiste, l'un des rares
09:23 à cette époque en 1934, spécialiste, vous l'avez dit vous-même, de l'hypnose. Dès le premier examen,
09:32 les conclusions du docteur Meyer sont formelles. Cette femme est dans un état hypnotique extrêmement
09:38 profond. Elle se trouve actuellement dans ce que nous appelons une situation de refus ou de
09:43 blocage, c'est-à-dire, elle est capable de répondre à toutes les questions qui concernent sa vie
09:49 domestique connue, sans aucun trouble de la mémoire. Par contre, dès qu'on lui parle de sa vie privée,
09:54 de sa vie de malade, de ses pensées ou de ses sentiments personnels et surtout de son médecin,
09:58 le blocage intervient. La personne qui a pratiqué sur elle cette forme d'hypnose a réalisé un
10:06 véritable dressage hypnotique. Autrement dit, Julia Kranz vit une existence consciente avec
10:13 son mariée et son entourage immédiate, mais elle mène une autre existence inconsciente qui
10:19 la perturbe gravement. Je suppose, ajoute le docteur Meyer, je suppose que l'hypnotiseur est très habile
10:24 et qu'il a utilisé des mots clés, ce que l'on appelle des mots de verrouillage, pour empêcher
10:31 le sujet de parler. Ce qui revient à dire que sans connaître ces mots clés, il est impossible de
10:37 savoir ce qu'il a commandé au sujet de faire. Tout ce que je peux tenter moi-même, c'est de
10:44 l'hypnotiser à mon tour, cela demandera du temps, de la patience, mais je pense y arriver. Julia
10:48 Kranz est un sujet facile, peut-être même trop facile. Il est possible que son hypnotiseur ait
10:55 réussi à lui faire accomplir des actes graves. En principe, les cas de ce genre sont rares,
11:00 mais l'état de cette jeune femme m'inquiète, je vous l'avoue. Julia Kranz, désespérée, s'adresse
11:10 alors elle-même au docteur Meyer. Docteur, aidez-moi, je vous en supplie. C'est horrible, tout
11:17 s'embrouille dans ma tête. J'ai parfois le sentiment que cet homme a fait faire des choses affreuses.
11:23 J'ai honte de le dire, il me semble que j'ai trompé mon mari, mais je ne sais pas avec qui, comment.
11:29 Aidez-moi à savoir, je veux savoir. La première séance d'hypnose pratiquée par le docteur Meyer,
11:39 la police apprend deux ou trois choses intéressantes. Julia parle avec difficulté d'une voix étrange,
11:46 monocorde. Je suis dans le train, j'ai mal à la tête, un homme me parle. Il dit, je suis médecin
11:58 naturiste et homéopathe. Je suis le docteur Bergen. Il dit que je suis malade, qu'il va me
12:06 soigner. Il m'aide à porter ma valise, il me prend la main, il me regarde. Il me regarde. Il me
12:16 regarde, je n'ai plus de volonté. Il me dit qu'il fait noir autour de moi. Je ne vois plus rien,
12:21 je marche longtemps. Nous entrons dans une maison, un escalier, deux étages. Il y a un bureau de
12:30 bois, une pendule en marbre, une chaise longue, un lit. Je sens sa main se poser sur ma tête,
12:38 il dit, calme, calme. Je ne vois plus rien. Décrivez cet homme. Je ne peux pas, je ne le vois
12:52 pas. Effacez tout cela, pensez à cet homme. Comment fait-il pour calmer les douleurs de
12:58 votre tête ? Il met sa main à gauche sur ma poitrine, la droite sur ma tête, et devant ses
13:06 yeux. Pensez à lui maintenant, que voyez-vous ? Je vois une cicatrice sur la jambe gauche,
13:13 sur le tibia. Je vois un maillot de bain bleu avec une ceinture blanche. Il est grand. Ses
13:23 cheveux ? Il est clair. Son visage ? Une dent en or à droite, une dent en or. C'est tout ce que je
13:35 vois. Je ne vois plus rien. Laissez-moi. Ces renseignements trop maigres pour aider la police
13:48 se complètent petit à petit au fur et à mesure que le docteur Meyer, en associant des mots,
13:53 en limitant les questions, arrive à tourner autour du verrouillage mental créé par l'hypnotiseur.
13:59 Peu à peu, des personnages naissent autour de Julia Kranz, des objets des lieux précis,
14:03 et notamment une chambre d'hôtel qu'elle décrit avec une précision telle qu'on la retrouve
14:08 facilement. Une séance est particulièrement éprouvante pour Julia Kranz, c'est celle où
14:13 elle décrit la scène qui s'est déroulée dans cette chambre d'hôtel. Manifestement,
14:17 l'hypnotiseur la contrainte à devenir sa maîtresse. Julia ne se souvient pas de l'acte
14:23 lui-même et se met à pleurer en prononçant des mots sans suite. Elle cache son visage
14:27 dans ses mains et se débat sur le divan de consultation du docteur Meyer. Le cas est
14:32 rare, mais Julia Kranz fait partie des individus qui acceptent tout d'un hypnotiseur, même les
14:37 choses que l'on refuse normalement. En général, lorsqu'on demande à une femme hypnotisée de se
14:43 déshabiller, elle refuse. Julia Kranz n'a pas refusé. Julia Kranz est une exception et
14:49 l'hypnotiseur est un homme terriblement dangereux. Dangereux, mais guère plus malin que la plupart des escrocs.
14:56 Le 27 juillet 1934, à Speyer, la police arrête par hasard un certain Franz Walter,
15:11 ancien employé de banque, qui se fait passer pour un médecin guérisseur et vient d'escroquer un
15:17 malade de quelques centaines de marques. L'histoire de Julia Kranz faisant grand bruit en Allemagne,
15:22 on pense immédiatement à lui et l'on montre sa photo à Julia espérant déclencher dans son
15:26 esprit un souvenir précis. Hélas, Julia ne reconnaît pas l'homme. Elle ne voit dit-elle,
15:33 même hypnotisée par le docteur Meyer, que du noir. Pour le spécialiste, c'est une indication,
15:39 mais pour la police, ce n'est guère suffisant. C'est la confrontation qui va convaincre les
15:45 policiers. Oh bien sûr, Franz Walter nie tout. Il ne connaît pas cette femme. Il n'est jamais venu
15:51 à Heidelberg. Il ne pratique pas l'hypnose, mais... Mais il n'ose pas regarder Julia dans les yeux.
15:57 Il est mal à l'aise. Il tourne la tête à gauche, à droite, parle d'abondance. Le plus extraordinaire,
16:03 c'est que Julia, en face de cet homme, ne le reconnaît pas. Étrange personnage. Grand,
16:09 un visage taillé en lames de couteau, des cheveux pâles, des yeux pâles, que tout le monde fixe,
16:15 avec une gêne évidente. Les policiers, le mari de docteur Meyer. Des yeux pâles et un regard
16:21 bizarre, un regard, comment dire, étranger au personnage, qui semble faire partie d'autre chose
16:26 que du visage. Comme s'il existait tout seul. Bien que les preuves, les détails obtenus de
16:35 Julia Kranz soient largement suffisants pour l'identifier, cicatrices, dents en or, pièces
16:40 de vêtements, portefeuilles et même témoins physiques qu'il avait vus en compagnie de Julia,
16:45 Walter se contente de nier. Et la police est bien embarrassée. De quoi a culpé cet homme? Comment
16:51 obtenir la preuve de son influence néfaste sur Julia? C'est le docteur Meyer qui trouve. À force
16:59 de travail et de réflexion, il trouve un mot. Floxilla. Un mot qui ne veut rien dire, mais
17:07 qu'il a obtenu par association de syllabes successives et selon les réponses de Julia
17:12 Kranz. Et ce mot, c'est l'un des mots clés, l'un des mots verrouillage, qui libère Julia Kranz
17:19 de l'interdiction de parler. Il y en aura d'autres. Kombarus et Filofi. Trois clés pour ouvrir trois
17:31 portes du subconscient de Julia. Trois portes derrière lesquelles enfin apparaît l'autre vie
17:36 de Julia Kranz. Floxilla ouvre la porte des relations sexuelles interdites. Lorsque Walter
17:46 dit "Floxilla", Julia accepte d'être sa maîtresse ou celle de quelqu'un d'autre au gré de son maître.
17:52 Julia accepte toutes les perversités. Et quand Julia voit enfin tout ce qu'elle a fait, qu'elle
17:59 le réalise pleinement, c'est le drame. Pour elle, comme pour son brave homme de mari.
18:06 Floxilla est une Julia prostituée, consentante. Mais aussi épouvantable que soit cette découverte,
18:17 il y a pire. Kombarus ouvre la porte du suicide. Walter dit "Kombarus" et Julia se jette dans le
18:26 fleuve toute seule un soir d'automne 1930. On la sauve de justesse. Elle se débat. Elle veut
18:31 mourir. Son entourage pense à la folie. On la surveille. Elle recommence. Walter dit "Kombarus,
18:37 tout est noir. Tu es calme, Julia. Tu monteras lentement les marches de l'escalier qui mènent
18:42 à ta chambre. Tout est noir. Tu es calme. Tu grimperas sur la fenêtre. Doucement. Tu es calme.
18:47 Tout est noir. Tu sauteras. Tu sauteras, Julia." C'est son mari qui la rattrape et attend.
18:52 Il y a plus grave encore. Il y a "philophy". Voyons ce que peut faire le génie hypnotique
19:03 de François Walter avec un mot comme "philophy". "Ton mari veut te tuer, Julia. Tu dois le tuer
19:11 avant qu'il ne te tue. Il a un revolver. Où se trouve-t-il?" "Oui, répond Julia. Dans le
19:19 tiroir de son bureau. Tu prendras le revolver. Tu le cacheras sous ton oreiller. Lorsque ton mari
19:26 sera endormi, tu enlèveras le cran de sûreté. Tu approcheras doucement le revolver de sa tempe
19:32 et tu appuieras sur la gâchette. Tu tireras, Julia. Tu tireras. Ensuite, tu mettras le revolver dans
19:39 sa main pour faire croire qu'il s'est suicidé." Julia raconte comment elle a pris le revolver,
19:46 comment elle l'a caché, comment elle a tiré. Son mari précise qu'il avait retiré le chargeur
19:54 car il se méfiait des idées de suicide qui lui tournaient parfois dans la tête. Avec "philophy",
20:00 Julia a essayé les champignons vénéneux. Le mari se souvient. Il n'en a mangé que deux cuillères.
20:07 Ils étaient trop amers. Il a été malade tout simplement pendant deux jours. Toujours avec
20:13 "philophy", Julia a coupé le câble des freins de la moto de son mari. Il a eu un accident et il
20:17 s'en est tiré. Chaque fois qu'il donnait des ordres, Walter utilisait l'un des mots clés
20:20 réservés à un usage particulier en disant "Personne ne pourra vous faire dire cela. Vous ne vous
20:28 souviendrez de rien. Vous ne pourrez parler que si l'on vous frappe sur la main en pliant vos petits
20:34 doigts et en prononçant le mot "philophy", alors seulement vous pourrez parler." "Il faudra des
20:42 un chers amis pour vous compter par le menu tout le rapport fantastique du fantastique Dr. Meyer,
20:47 qui en six mois réussit à reconstituer la double vie de Julia Kranz dans ses moindres détails.
20:52 Je vous dirai simplement en passant et entre autres que Julia fut trois fois enceinte d'œuvres
21:00 diverses et subit trois avortements sans le savoir, car l'ignoble Franz Walter était aussi
21:06 un faiseur d'anges. La seule chose que Julia découvrit elle-même sans l'aide du Dr. Meyer,
21:12 elle le doit au hasard. En passant un jour sur un trottoir, elle aperçoit une boucherie. Guidée
21:21 vers une force mystérieuse, elle y entre et reconnaît celui qui sera le second accusé du
21:27 procès, le boucher. L'hypnotiseur avait vendu Julia ce boucher pour quelques cinq à sept et
21:36 moyennant à chaque fois bien sûr une somme rondelette. Bodemer, le boucher, nia lui aussi.
21:43 Malheureusement pour lui, sa femme était au courant. Le 13 juin 1936, le tribunal régional
21:51 de Heidelberg mit un terme à trois semaines de procès houleux en rendant le jugement suivant.
21:57 L'un des rares que l'on connaisse en matière d'hypnose où la culpabilité de l'accusé ne
22:01 fait aucun doute. Le boucher pour attentat au Bodemer et complicité d'escroquerie,
22:07 quatre ans de réclusion. L'hypnotiseur pour escroquerie, blessure grave et attentat au Meur,
22:13 dix ans de réclusion et la perte de ses droits civiques pendant cinq ans. Pendant cinq ans
22:19 seulement. Dommage. Un grand blond aux yeux bleus avec des bottes, une casquette, un uniforme noir
22:28 à tête de mort. À ce Walter il aurait fait un chef nazi d'une remarquable efficacité.
22:34 Vous venez d'écouter les récits extraordinaires de Pierre Belmar, un podcast issu des archives
23:00 d'Europe 1 et produit par Europe 1 Studio. Réalisation et composition musicale Julien
23:06 Tarot. Production Sébastien Guyot. Direction artistique Xavier Joly. Patrimoine sonore
23:14 Sylvaine Denis, Laetitia Casanova, Antoine Reclus. Remerciements à Roselyne Belmar.
23:20 Les récits extraordinaires sont disponibles sur le site et l'appli Europe 1. Écoutez aussi le
23:26 prochain épisode en vous abonnant gratuitement sur votre plateforme d'écoute préférée.