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Agnès Verdier-Molinié, directrice de la Fondation Ifrap et auteure de "Où va notre argent" aux éditions de l'Observatoire, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Ensemble, ils s'intéressent à l'absence de l'immigration légale dans le projet de loi Immigration et aux raisons de l'immigration en France qui sont plus axées sur le regroupement familial que sur l'emploi.
Retrouvez "L'invité actu" sur : http://www.europe1.fr/emissions/l-interview-de-7h40
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Agnès Verdier-Molinié, directrice de la Fondation Ifrap et auteure de "Où va notre argent" aux éditions de l'Observatoire, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Ensemble, ils s'intéressent à l'absence de l'immigration légale dans le projet de loi Immigration et aux raisons de l'immigration en France qui sont plus axées sur le regroupement familial que sur l'emploi.
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NewsTranscription
00:00 Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin la directrice de la fondation IFRAP.
00:04 Bonjour Agnès Verdier-Molinier.
00:06 Bonjour, bonjour à tous.
00:07 Bienvenue sur Europe 1.
00:09 Alors en plein casse-tête parlementaire sur le projet de loi immigration,
00:12 l'IFRAP s'apprête à publier une étude pour comparer la population immigrée en France
00:17 à celle de nos voisins européens.
00:19 Pourquoi les immigrés choisissent-ils la France ?
00:21 Est-ce que c'est pour le travail ?
00:23 Est-ce que c'est pour occuper un emploi dans un secteur en tension,
00:26 comme on l'a beaucoup entendu ?
00:28 Les chiffres ne disent pas tout à fait cela, Agnès Verdier-Molinier.
00:32 Oui, c'est vrai, on s'est intéressé à ces questions en se posant la question fondamentale
00:39 de "est-ce que le travail finalement est un dénominateur commun pour venir s'installer en France ?"
00:45 Et alors en réalité, on se rend compte que ce sont surtout des questions de famille
00:51 qui emmènent en France du regroupement familial.
00:54 41% des entrées sur le territoire français de 2005 à 2020,
00:58 ça nous place en première position en Europe sur le sujet,
01:02 tandis que le travail, ça ne concerne que 10,5% des raisons de venir en France.
01:10 Et ça, c'est vrai qu'on est très très faible par rapport aux autres pays.
01:14 Par exemple, le Portugal est trois fois au-dessus de nous, il est à plus de 29%.
01:20 Et ça prouve que finalement, ce sujet de "est-ce qu'on attire en France pour venir travailler chez nous ?"
01:27 et bien la réponse est plutôt non.
01:29 Et ce qu'on voit, c'est qu'il n'y a pas que le Portugal qui est au-dessus de la France,
01:33 il y a l'Italie qui est à 22%, il y a l'Espagne qui est à 19%, le Royaume-Uni à presque 18%.
01:38 Et donc, il y a un énorme travail à faire sur ce sujet.
01:42 Moi, ce qui m'a frappée dans les débats sur la loi immigration,
01:45 c'est que finalement, on parle beaucoup des travailleurs illégaux,
01:49 mais on ne parle pas tellement des travailleurs qui viennent en France
01:54 de manière légale et de leur proportion.
01:56 Et finalement, on voit que c'est trop faible.
01:59 - Effectivement, c'est vrai que l'immigration légale, vous l'avez dit,
02:02 est la grande oubliée du projet de loi, alors que c'est l'immigration la plus massive,
02:06 un demi-million d'entrées l'an dernier par exemple.
02:08 Mais pourquoi d'après vous, Agnès Verdier-Mollinier, il y a eu ce refus de changer les règles de l'immigration légale
02:14 et de tenter de doper le motif de travail en ce qui concerne les venues en France ?
02:18 - Tout simplement parce que finalement, déjà, notre modèle social,
02:22 au départ pour tout le monde en France, il est de moins en moins axé sur le travail
02:27 et que ça se répercute aussi sur le modèle social qui est proposé à ceux qui viennent dans notre pays.
02:34 Et ce qu'on voit, c'est que finalement, le taux de chômage des non-natifs, il est très élevé.
02:39 Il est de 12,3 %, alors que ça, c'est en 2021,
02:43 dans la population de natifs au niveau national, on était beaucoup plus faible, autour de 7 %,
02:50 et donc cet écart de plus de 5 points entre les natifs et les non-natifs au niveau du taux de chômage,
02:57 eh bien, il est très supérieur à ce qui est constaté au-delà de nos frontières en Europe.
03:03 C'est 4 points de plus que par rapport au Royaume-Uni par exemple.
03:06 Et on a vu dans notre étude que si on ramenait le taux de chômage des non-natifs installés en France
03:12 dans la moyenne européenne, ça ferait 50 000 de non-natifs qui travailleraient en plus,
03:17 et si on le mettait en alignement par rapport au taux britannique, ça ferait 120 000.
03:21 Donc on est quand même sur des proportions de personnes qui devraient travailler
03:28 et qui finalement ne sont pas venues spécialement pour travailler, qui sont très importantes.
03:33 Vous relevez aussi dans cette étude, Agnès Verdier-Mollinier,
03:37 que la proportion des immigrés légaux qui ont plus de 65 ans, c'est-à-dire l'âge de la retraite,
03:43 cette proportion est plus importante que dans l'ensemble de la population française.
03:49 Ah oui, là on est vraiment sur la question du regroupement familial.
03:52 25% de la population non-native avait plus de 65 ans en 2020, contre seulement 15% en Europe.
04:00 Là on voit qu'on a 10 points d'écart.
04:02 Donc la France est un des rares pays où les non-natifs de plus de 65 ans sont supérieurs à celles des natifs.
04:09 25 contre 19.
04:11 Donc on voit que finalement on attire plutôt des personnes plutôt âgées,
04:15 qui ne viennent pas forcément pour travailler, mais qui viennent pour retrouver leur famille.
04:19 Et peut-être, c'est une question aussi qu'il faut se poser pour toucher le minimum vieillesse,
04:24 qui est quand même très élevé en France, un peu plus de 900 euros par mois.
04:28 Et donc là aussi, c'est la question du modèle social français.
04:31 Est-ce qu'il est fait pour attirer des personnes qui viennent travailler,
04:34 ou est-ce qu'il est fait pour attirer des personnes qui finalement ne viennent pas forcément travailler,
04:38 et viennent aussi pour se mettre dans une logique de profiter aussi du modèle social français ?
04:46 Mais alors de quel pays, Agnès Verdier-Mollinier, la France pourrait-elle selon vous s'inspirer
04:51 pour transformer son modèle migratoire ?
04:54 Que font nos voisins pour avoir une immigration majoritairement de travail, que nous ne faisons pas ?
04:59 Alors, on pourrait s'inspirer du Portugal, parce que vraiment,
05:04 ils ont changé beaucoup leur politique ces derniers temps.
05:07 Et à chaque fois, ils se posent la question de "est-ce que la personne vient travailler ou pas ?"
05:13 Et ils ont vraiment mis une priorité à cette question du travail.
05:17 Mais au-delà des frontières de l'Europe, il y a aussi le modèle du Canada,
05:22 qui a doublé sa part de population immigrée avec un seul mot d'ordre,
05:25 priorité aux travailleurs, avec un permis à point.
05:28 Et alors, c'est assez incroyable ce qu'ils ont fait là-bas.
05:31 C'est encore beaucoup plus important que ce qui se passe au Portugal,
05:34 parce que finalement, en Europe, on n'est pas aussi en pointe que ça sur les politiques migratoires.
05:39 60% des arrivés au Canada ont un motif de travail, 26% concernent l'accompagnement d'un travailleur.
05:46 Donc au total, c'est 86% des arrivés qui sont liés à une question de travail.
05:50 Donc on ne peut pas regarder que cette question de l'article 3 et de l'immigration illégale
05:55 et de ceux qui travaillent en étant illégaux.
05:58 Il y a aussi toute la question de l'immigration légale et du travail,
06:01 qui en fait n'est absolument pas posée aujourd'hui.
06:03 Merci beaucoup Agnès Verdier-Molinier, la directrice de la fondation IFRA,
06:08 a pété ce matin l'invité d'Europe 1 Matin. Bonne journée.
06:11 Merci à vous.
06:12 Il est 7h18 sur Europe 1.