SMART IMPACT - Des satellites pour dépolluer pour la planète

  • il y a 8 mois
Mardi 2 janvier 2024, SMART IMPACT reçoit Antoine Rostand (Président et cofondateur, Kayrros)

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Transcript
00:00 [Générique]
00:06 Et notre invité aujourd'hui est Antoine Rostand, président et cofondateur de Kéros, spécialiste de la production de données climatiques en temps réel.
00:13 Bonjour Antoine Rostand.
00:14 Bonjour.
00:15 Merci beaucoup de nous accompagner aujourd'hui.
00:17 Vous travaillez aujourd'hui, je le disais, au service de l'industrie, des institutions financières, également auprès des pouvoirs publics.
00:23 Quand l'IA et les technologies géoanalytiques se mettent au service de la transition énergétique, ça va être notre sujet.
00:29 Antoine Rostand, en tout cas, je crois que c'est le vôtre.
00:31 Kéros, petite question, c'est une référence, je crois, à un dieu grec. C'était quoi l'idée derrière ce nom ?
00:36 C'est mon fils qui m'a donné cette idée.
00:39 Kéros, c'est le dieu de l'opportunité.
00:42 Il passe une fois dans la vie de chaque être humain.
00:45 Il a des longs cheveux, il faut l'attraper au moment où il passe.
00:48 Et l'opportunité ici, c'est d'utiliser l'intelligence artificielle et les satellites pour objectiver la démarche de transition énergétique.
00:56 On a besoin d'objectiver l'action climatique et c'est ce que nous faisons avec le satellite.
01:03 Pourquoi vous avez choisi la mesure des émissions liées principalement aux énergies ? Pourquoi les énergies ?
01:09 On mesure toutes les émissions, mais aujourd'hui, ce qui est le plus facile à mesurer, c'est celle liée directement à la consommation d'énergie.
01:17 Le problème que l'on a aujourd'hui dans la gouvernance climatique mondiale, c'est qu'on a des approches par pays alors que les émissions n'ont pas de frontières.
01:27 C'est vraiment le sujet fondamental du manque d'impact de l'action climatique mondiale.
01:33 On a une vision par frontières alors que le CO2 n'a pas de frontières.
01:36 Nous, on casse ce problème-là.
01:38 Quel secteur s'intéresse exactement aujourd'hui ? Est-ce que ce sont des secteurs qui polluent beaucoup ?
01:44 Ça peut être le transport aussi ?
01:47 Nous, on a une mesure indépendante.
01:49 On ne travaille pas pour les industriels, on va travailler pour les secteurs publics, pour les gouvernements,
01:56 les Nations Unies, la Commission européenne, le gouvernement français, qui veulent savoir ce que font les industries pollueurs.
02:03 On va travailler aussi pour les investisseurs qui veulent aussi savoir si la trajectoire climatique des sociétés dans lesquelles ils investissent sont conformes et respectées.
02:12 Vous avez parlé d'intelligence artificielle, vous avez parlé de satellites.
02:16 Quelles sont précisément les technologies sur lesquelles Kéros s'appuie ?
02:21 Derrière cette question, j'espère que vous allez m'expliquer pourquoi l'intelligence artificielle et pourquoi l'imagerie satellitaire.
02:27 La première chose, c'est le satellite puisque le satellite n'a pas de frontières.
02:31 Il y a un traité des Nations Unies qui permet d'observer l'intégralité de la Terre.
02:35 L'Europe a créé des satellites qui permettent de mesurer tous les grands paramètres climatiques.
02:39 C'est un investissement extraordinaire dans la constellation Copernicus.
02:43 Nous allons utiliser tous ces satellites, plusieurs centaines de satellites, pour créer des algorithmes qui vont mesurer les émissions de métal,
02:53 les émissions de CO2, l'utilisation de la forêt, la hauteur des arbres.
02:57 En fait, on compte tous les arbres sur la planète, on mesure leur hauteur.
03:00 Et ça, on ne peut pas le faire à l'être humain. Il faut vraiment des ordinateurs, il faut du big data et de l'intelligence artificielle
03:04 pour être capable de reconnaître un arbre et de mesurer sa hauteur.
03:07 Donc les satellites que vous utilisez aujourd'hui, c'est les gouvernements, les institutions, c'est ça qui vous donne l'autorisation de les utiliser, c'est ça ?
03:13 Tout à fait, c'est dans le secteur public, tout à fait.
03:15 Vous n'êtes pas les seuls, Antoine Rostand, sur ce créneau-là.
03:19 Qu'est-ce qui permet aujourd'hui, vous, de mesurer, on l'a un peu compris, mais d'attribuer ces émissions avec autant de précision ?
03:27 Aujourd'hui, il y a quelques équipes qui font ce travail-là.
03:32 Et on fait partie des 2-3 équipes qui ont vraiment un leadership mondial sur le sujet, avec une équipe à Harvard et une équipe à Valencia, en Espagne.
03:40 C'est quoi ? C'est la combinaison de ces technologies qui fait qu'on arrive à cette précision-là sur la mesure ?
03:47 C'est vraiment beaucoup de maths, c'est beaucoup d'algorithmiques.
03:50 Donc on a en France beaucoup de matheux. On travaille avec l'université de Paris-Saclay, qui est bien placée à Shanghai.
03:56 Et on a eu accès à toute la capacité mathématique de la recherche française pour être capable de faire ça.
04:02 Donc on exploite vraiment toute la qualité de la recherche française, le laboratoire des sciences du climat et de l'environnement, l'université de Paris-Saclay, etc.
04:09 Ça vient vraiment de la recherche.
04:11 Kéros, c'est une équipe de combien de personnes ?
04:12 150.
04:13 Vous en parliez justement, vous êtes notamment attaqué au suivi à la quantification des fuites de méthane dans le monde.
04:20 Vous en avez parlé, ces données n'existaient pas avant Antoine Rostand ?
04:23 Non, on ne savait rien. Le méthane, c'est un tiers du réchauffement climatique et on ne savait rien.
04:28 Comment vous l'expliquez ça ?
04:30 Parce qu'en fait, c'était très difficile à mesurer, parce que le méthane, c'est le gaz naturel.
04:34 En Europe, il y a une odeur, mais naturellement, il n'y a pas d'odeur.
04:37 Donc on ne le voit pas, on ne le sent pas.
04:39 Et donc il y avait énormément de fuites qu'on ne savait pas attribuer, on ne savait pas d'où ça venait.
04:42 On savait qu'il y en avait, puisqu'on peut le mesurer dans l'atmosphère, mais on ne savait pas d'où ça venait.
04:46 Maintenant, on sait d'où ça vient, on sait exactement qui pollue.
04:49 Et c'est un changement fondamental dans la lutte contre le réchauffement climatique,
04:54 puisque maintenant, on est capable de mettre en place des réglementations, des amendes.
04:57 Et grâce à notre technologie, l'Europe a mis en place une réglementation
05:00 qui, pour la première fois, va donner des amendes et va interdire ces pollutions au méthane.
05:04 Oui, parce que c'est ce que j'allais vous dire.
05:06 L'idée aussi, c'est de prendre des mesures, de prendre des décisions, de trouver des solutions.
05:10 Une fois qu'on a ces informations, qu'on a ces données-là,
05:13 qu'est-ce qu'ils en font, ces données-là ? Les gouvernements, les pouvoirs publics ?
05:17 La grosse décision...
05:20 Parce que vous, vous êtes dans ce suivi-là, justement, derrière,
05:22 une fois que vous leur avez fourni toutes ces informations.
05:24 Nous, on a beaucoup poussé pour qu'il y ait une réglementation européenne
05:27 qui s'applique non pas à la production de méthane en Europe,
05:31 mais surtout sur le méthane dit "importé",
05:34 donc à l'énergie que l'on importe de l'extérieur des frontières.
05:37 Et ça, c'est pour la première fois, il y a eu ça pour la forêt,
05:40 et maintenant, pour le méthane, il y a une réglementation européenne
05:43 qui va obliger les pays qui exportent de l'énergie,
05:46 donc du pétrole, du gaz ou du charbon, vers l'Europe,
05:49 à réduire leurs émissions de méthane, et nous, on va contrôler ça.
05:52 - Ces décisions politiques, vous les suivez, donc, évidemment ?
05:55 - On les suit, et on a beaucoup travaillé avec les politiques
05:58 pour qu'ils comprennent la valeur de la technologie
06:00 et pourquoi ils pouvaient faire une réglementation
06:02 et qu'on serait capable de suivre leur mise en œuvre.
06:04 C'est ça, le problème, quand on met une réglementation,
06:06 il faut avoir les moyens de suivre, et c'est ce qu'on apporte sur la table.
06:09 - Vous parliez des Nations Unies, vous parliez d'Europe aussi.
06:12 Aujourd'hui, dans le monde, puisque c'est aussi ce que vous défendez,
06:17 tout le monde n'est pas au même niveau, tout le monde n'a pas les mêmes ambitions
06:21 concernant la transition environnementale, la transition énergétique.
06:24 Vous les voyez, ces différences-là, en fonction des institutions,
06:27 des pays avec lesquels vous travaillez ?
06:29 - Oui, on voit vraiment... Par exemple, on a fait une comparaison
06:32 de deux États différents aux États-Unis, le Texas et le Nouveau-Mexique.
06:36 Ils ont des réglementations très différentes, justement,
06:38 sur les émissions de méthane, et le Nouveau-Mexique a deux fois moins
06:41 d'émissions de méthane par unité de pétrole produit que le Texas.
06:45 On voit bien que même au sein des États-Unis, il y a des différences réglementaires,
06:49 et que quand la réglementation est en place, il y a un impact immédiat.
06:52 Il faut voir que la réglementation méthane européenne,
06:54 ça va être l'impact climatique le plus important jamais fait.
06:58 On parle de 2 gigatonnes de CO2, c'est deux fois la France et l'Allemagne réunies.
07:03 Toutes les émissions de la France et de l'Allemagne réunies.
07:05 - C'est à combien d'années ? - En 3-4 ans.
07:07 - En 3-4 ans, oui, c'est énorme.
07:09 - Une petite question, ce n'est pas pour vous mettre en difficulté,
07:11 mais on parle aussi beaucoup de l'empreinte carbone,
07:13 de l'intelligence artificielle, notamment l'entraînement de cette technologie,
07:18 avec ses multiples données, ça a un impact important.
07:22 Comment vous travaillez sur ce paradoxe-là ?
07:26 Polluer un petit peu tout en voulant dépolluer.
07:30 - D'abord, l'intelligence artificielle qu'on utilise n'est pas les LLM,
07:34 ce qu'on appelle la Generative AI, donc c'est assez peu consommateur,
07:37 en capacité de calcul.
07:41 Mais après, je pense qu'il faut voir l'écologie de manière objective.
07:46 Si on doit dépenser 1 pour gagner des 10, il faut le faire.
07:49 Il ne faut pas avoir une vision religieuse ou idéologique du problème.
07:55 Ce qu'on fait, c'est qu'on est objectif.
07:58 On donne des chiffres, il y a des choses qui marchent, des choses qui ne marchent pas.
08:01 Et on va donner aux décideurs, que ce soit les États, les entreprises, les investisseurs,
08:06 des moyens de décider que ça c'est mieux, c'est pas parfait, mais c'est mieux que ça.
08:09 Et c'est vraiment très important.
08:11 - C'est intéressant. Je crois d'ailleurs qu'en plus, vous défendez,
08:13 c'est ce que je disais en préambule de cette émission,
08:15 le terme d'intelligence environnementale.
08:17 Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce concept ? Qu'est-ce que vous entendez derrière ça ?
08:20 - On y est venu au bout de quelques années.
08:22 En fait, c'est un concept qui n'existait pas.
08:24 Il y a de l'intelligence économique, mais on ne fait pas que de l'économie.
08:27 Il y a l'intelligence militaire, mais on ne fait pas de militaire.
08:30 Il y a un vrai sujet d'environnement.
08:32 Pour nous, le problème crucial de la gouvernance climatique,
08:35 c'était le manque de données, le manque de compréhension.
08:38 Et c'est vraiment pour ça qu'on a décidé de se focaliser là-dessus,
08:41 l'intelligence environnementale, donc comprendre l'impact de l'activité humaine,
08:44 comprendre l'impact d'une politique publique,
08:46 comprendre l'impact d'un investissement et mesurer tout ça en temps réel.
08:49 - Kéros, c'est pas rien. Vous avez été nommé par le Times
08:51 parmi les 100 entreprises les plus influentes au monde.
08:55 Quelle influence vous souhaitez avoir, justement, aujourd'hui sur ce monde ?
08:58 Antoine Rostand en terminera là-dessus.
09:00 - C'est vraiment transformer la gouvernance climatique mondiale.
09:03 Les COP sont là, elles ont leurs limitations.
09:06 Et ce qui manquait, c'est la donnée.
09:08 Donc on veut que les COP deviennent effectives,
09:10 que les gouvernements aient un impact.
09:12 Et c'est vraiment notre mission.
09:14 - On terminera là-dessus. Merci beaucoup, Antoine Rostand,
09:16 d'avoir répondu à nos questions. Je rappelle, vous êtes le président
09:18 et cofondateur de Kéros. Merci beaucoup de nous avoir accompagnés.
09:21 Dans Smart Impact, on passe à notre débat.

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