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00:00 * Extrait de la vidéo *
00:06 Depuis la pandémie en 2020, la santé mentale des français s'est profondément dégradée,
00:11 l'accumulation de nombreuses crises ces derniers mois ne présage en rien son amélioration,
00:15 inflation, réchauffement climatique, guerre en Ukraine, attentats, conflits entre Israël
00:21 et le Hamas, le monde va mal mais en ce Blue Monday, vous savez le jour qui est censé
00:26 être le plus déprimant de l'année, on va tenter de comprendre les racines de ce mal-être
00:31 pour tenter peut-être de le guérir ou de le prévenir.
00:36 Pour ce faire, je suis en compagnie de Cynthia Fleury.
00:40 Bonjour Cynthia Fleury, vous êtes philosophe, psychanalyste, directrice de la chaire de
00:44 philosophie à l'hôpital Saint-Anne et on vous doit notamment la Clinique de la dignité
00:49 ouvrage que vous avez publié au Seuil.
00:51 Vous par exemple, comment vivez-vous avec l'actualité ?
00:54 Je pense que je vis comme nos contemporains, c'est-à-dire à la fois submergé par cette
01:03 actualité qui est absolument, pardon pour la voix, elle est de saison.
01:08 On a tous la même voix en ce moment.
01:09 Elle est de saison mais l'actualité, si vous voulez, c'est notre bain quotidien.
01:14 Et effectivement, vous l'avez nommé, je pense qu'il n'y a pas tellement à expliquer,
01:19 au moins d'être totalement inhumain, anesthésié, ce que nous sommes par ailleurs aussi comme
01:25 stratégie de défense.
01:26 Mais ce qui n'est pas mieux pour s'alimenter, justement lutter contre l'effet déprimant,
01:33 parce que c'est aussi en gardant sa sensibilité qu'on se protège des effets délétères.
01:40 Donc l'anesthésie, c'est une solution entre guillemets à moyen terme.
01:44 Mais non, non, on est à la fois saturé, bien évidemment la question de l'impuissance,
01:52 c'est-à-dire la question de la puissance et de l'impuissance, c'est-à-dire jusqu'où,
01:56 comment devenir un acteur pour essayer soit de changer les choses, soit au minimum ne
02:01 pas participer de l'entropie avec un E.
02:04 Donc non, non, la situation c'est Blue Mendes avec un S.
02:10 Mais alors vous, parce que vous êtes doublement actif par rapport à cela, Cynthia Fleury,
02:14 puisque vous êtes à la fois philosophe, vous publiez des ouvrages pour tenter d'agir
02:19 sur le cours des choses.
02:20 Vous êtes aussi psychanalyste, donc vous avez un certain nombre de personnes avec qui
02:28 vous tentez de mieux comprendre leur trajet de vie.
02:31 Est-ce que le fait d'être doublement actif comme ça vous aide à mieux supporter, justement
02:39 les duretés du temps ?
02:41 C'était un argument qui avait été donné d'ailleurs au moment du confinement.
02:46 Je parle vraiment dans la première partie confinement dur et puis au moment où les
02:52 informations concernant la Covid étaient encore assez imprécises.
02:56 Donc il y avait une peur forte sur notamment la mortalité, etc.
03:03 Et les soignants, les médecins, les infirmiers avaient expliqué que malgré la dureté des
03:09 conditions, malgré même parfois la peur, ce qui les avait préservés c'était fondamentalement
03:17 l'utilité, le sentiment d'utilité, le sentiment d'être là où il faut être.
03:23 Et donc d'une certaine manière, quand on est au contact, c'est à la fois déstabilisant,
03:30 bien sûr, parce qu'on a ce qu'on appelle du traumatisme vicarian, je ne parle pas du
03:33 tout pour moi, mais pour ceux par exemple, les soignants qui peuvent suivre ceux qui sont
03:37 dans des traumas très lourds, donc ne nous mentons pas, c'est tout sauf simple.
03:42 Moi j'avais fait de la supervision de soignants au moment justement d'attentat.
03:47 Mais malgré tout, ça a aussi un effet d'implication et donc de sentiment d'engagement de pouvoir
03:57 être là où il faut, d'un sentiment quand même d'agence, d'agency entre guillemets
04:01 en bon français, préservé.
04:04 Et ça oui, c'est quelque chose qui vous protège.
04:07 Et le fait d'essayer de comprendre ce monde qui nous entoure, puisque a priori quand on
04:12 est philosophe, on a cette volonté-là.
04:16 Cynthia Fleury, est-ce que ça par exemple, c'est aussi une meilleure protection ?
04:19 Pas nécessairement.
04:21 C'est compliqué parce que si vous voulez, la quête de sens dans un monde qui par ailleurs
04:29 déploie son caractère multiforme en irrationnalité, c'est pas… il y a un effet dans un premier…
04:41 vous avez un petit peu le sentiment de ramer à contre-courant.
04:44 Donc la réalité aujourd'hui, c'est la conscientisation à la fois de la barbarie,
04:49 de l'absurde, c'est des choses très camusiennes.
04:51 Et je dirais que dans un premier temps, s'arquebouter sur la nécessité d'un sens, c'est pas
04:58 nécessairement protecteur.
04:59 Donc qu'est-ce qui est protecteur souvent ? C'est le soin, c'est-à-dire c'est
05:07 malgré tout le sentiment d'amour, le sentiment affectif.
05:12 Pas forcément d'ailleurs que la préservation des siens, mais le sentiment d'humanité
05:19 qui est un tout petit peu plus vaste que le sens.
05:22 Vous voyez, c'est quelque chose d'un peu plus protéiforme.
05:24 Et cette appartenance générique à l'humanité, si on arrive à préserver ça, oui, on traverse
05:31 généralement mieux.
05:32 - Freud dit que le déprimé voit le monde tel qu'il est, Cynthia Fleury.
05:38 Autrement dit, cette lucidité qui normalement est, hélas, le corollaire d'une information
05:48 sinon exhaustive, du moins aussi complète que possible, cela veut dire que finalement
05:52 il n'y a pas d'autre échappatoire que la dépression dans ce monde-là ?
05:56 - Non, ça ne veut pas dire ça, mais ça veut dire effectivement que oui, il y a un effet
06:00 réel de désillusion qui est, je dirais, vrai.
06:06 C'est-à-dire que l'effet de la vérité est un effet violent.
06:10 Pour autant, si vous voulez, on ne peut pas nier que le monde ce n'est pas que ça non
06:16 plus.
06:17 On a naturellement une forme de tropisme cognitif où on a tendance, là encore, à se focaliser
06:26 sur le pire pour des raisons, je dirais, à la fois évolutionnistes et puis même aujourd'hui,
06:33 disons-le clairement, culturelles.
06:35 - C'est-à-dire culturelles ?
06:37 - Culturelles dans la mesure où c'est à la fois notre économie de l'information qui
06:43 est structurée autour de la mauvaise nouvelle ou en tout cas de la nouvelle la plus impactante.
06:49 La nouvelle la plus impactante, ce n'est pas, si vous voulez, la découverte du merveilleux.
06:52 Je dirais que personne n'a besoin des news 24h/24 pour découvrir le merveilleux.
06:58 Donc, pour le coup, vous avez par ailleurs aussi toute une économie de l'information,
07:03 donc une saturation, une exposition aux informations qui, de toute façon, privilégie la voie
07:09 du négatif.
07:10 Bon, il n'empêche que, ça n'empêche pas que c'est vrai.
07:13 Donc, pour vous dire que non, à un moment donné, il faut pouvoir trouver une manière
07:21 de focaliser sur d'autres types d'informations pour essayer de contrebalancer ou du moins
07:26 de se nourrir aussi de quelque chose qui n'est pas que mortifère.
07:29 - Mais ça vous arrive de vous dire, vous avez le droit de critiquer les journalistes, de
07:33 critiquer Cynthia Fleury, bien sûr, ça veut dire que ça vous arrive de vous dire que les
07:39 médias exagèrent, que leur sélection négative des actualités est quelque chose de trop
07:48 déprimant pour être honnête ?
07:49 - Je dis, ce n'est pas une accusation ni de malhonnêteté.
07:53 - Je parlais de malhonnêteté intellectuelle.
07:55 - Oui, oui, non, mais en l'occurrence, ce n'est ni une accusation de malhonnêteté
07:58 ni d'exagération.
07:59 C'est un biais, si vous voulez.
08:01 Donc, au minimum, on peut le souligner et dire aux uns et aux autres, oui, bon, ben
08:06 voilà, il y a une focale qui est délibérément aussi qui porte là-dessus, alors qu'elle
08:11 pourrait aussi porter sur autre chose.
08:14 Ça n'empêche pas, si vous voulez, la vérité des informations, mais on ne peut pas nier
08:20 cette focale.
08:21 - Mais justement, chez les philosophes, a priori, les gens heureux sont plutôt rares.
08:26 Qu'en pensez-vous ?
08:27 - D'abord, voilà, le bonheur, la question du bonheur, si vous voulez, elle est une
08:35 question très, très vaste en philosophie.
08:37 Je dirais que le travail, en tout cas, collectivement parlant, c'est moins de s'attacher au
08:45 bonheur des uns et des autres parce que ça a quelque chose d'assez directif et généralement
08:49 assez contre-productif.
08:51 En revanche, on essaye justement de produire des conditions de possibilité de ce bonheur.
08:58 Et justement, dans la clinique de la dignité, c'est aussi un peu ça, c'est-à-dire comment
09:02 on préserve des conditions d'émergence, non seulement d'émergence, mais aussi de
09:07 pérennisation, de protection contre le malheur, en tout cas, si ce n'est le bonheur.
09:15 - Parce que justement, la dignité, une forme de décence, bref, est ce que vous plaidez
09:20 dans ce dernier livre, La Clinique de la dignité, que vous avez publié aux éditions du Seuil.
09:24 Est-ce que ça permet justement, Cynthia Fleury, de mieux préserver notre santé mentale ou
09:32 en tout cas la manière dont on perçoit le monde ?
09:34 - Très clairement.
09:35 Très clairement.
09:36 Et d'ailleurs, souvent, vous avez un impact du sentiment de manque de dignité, en tout
09:45 cas récurrent, je ne parle pas de manière comme ça sporadique, mais quelque chose qui
09:49 est rémanent.
09:50 Ce sentiment-là, à un moment donné, a un impact sur la santé mentale.
09:54 Oui, il provoque d'abord une mésestime de soi, etc.
10:00 Mais les expériences répétées de mépris, d'humiliation produisent nécessairement,
10:05 à un moment donné, un impact qui va soit de la dépression, soit au contraire, d'une
10:12 bouc-émiscérisation d'autrui, en tout cas de troubles de sentiments d'hostilité récurrent,
10:19 de rumination, de ressentiment, que sais-je.
10:21 Donc, vous avez quantité de symptômes qui sont liés à l'intériorisation, à un moment
10:26 donné, du sentiment de manque de dignité.
10:29 Mais ça aussi, ça participe bien sûr de ce climat et de cette sensation que nous traversons
10:37 une époque particulièrement dure ?
10:38 Alors, encore une fois, c'est toujours compliqué.
10:41 Tout dépend sur quel type d'échelle on se met.
10:44 Si on se met sur des échelles de 10, 20, 30 ans, depuis les années 90, oui, la période
10:50 est difficile, ce n'est pas nouveau, le diagnostic n'est pas nouveau.
10:54 Mais disons que le diagnostic qui a été annoncé maintenant depuis les années 70,
11:00 par le GIEC, par le rapport Médose, etc.
11:04 Je ne parle pas simplement, si vous voulez, bien évidemment, de la question climatique,
11:08 mais je parle plus globalement de ce qu'on peut appeler, dans la foulée de Ulrich Beck,
11:13 la société du risque, les risques systémiques, parce qu'on est définitivement rentré dans
11:17 des risques systémiques qui sont justement, qui donnent un sentiment d'effondrement
11:25 assez continuel.
11:26 Cette vérité-là, oui, elle donne un sentiment que de nouveau, la modernité est une fabrique
11:36 de situations indignes, alors que les années 70, 80 nous avaient éloigné de ce sentiment-là.
11:42 En revanche, si vous rebasculez sur un siècle, oui, tout d'un coup, non, on redécouvre
11:48 la vérité des cycles de vie terriblement difficiles, à la fois les vies individuelles
11:54 et les vies collectives.
11:55 - Cynthia Fleury, la Clinique de la dignité, c'est le livre que vous publiez aux éditions
11:59 du Seuil.
12:00 On se retrouve dans une vingtaine de minutes pour voir justement comment la santé mentale
12:04 des Français, sous toutes ses formes, s'est détériorée, depuis notamment la crise du
12:09 Covid.
12:10 On se retrouve avec le professeur Nicolas Franck, qui a publié « Protéger sa santé
12:13 mentale » aux éditions Odile Jacob.
12:16 - 6h39, les matins de France Culture, Guillaume Erner.
12:22 - Ce que l'actualité fait à nos psychiés, nous sommes pour en parler en duplex avec
12:28 le professeur Nicolas Franck.
12:30 Bonjour.
12:31 - Bonjour.
12:32 - Vous êtes psychiatre et également chef de pôle au Centre hospitalier Levinatier,
12:38 coordinateur du diplôme d'études spécialisée de psychiatrie de Lyon à l'université Claude-Bernard.
12:43 Vous publiez « Protéger sa santé mentale » après la crise aux éditions Odile Jacob.
12:48 Et puis ici, dans ce studio, nous sommes en compagnie de la philosophe et psychanalyste
12:52 Cynthia Fleury, qui a notamment publié « La Clinique de la dignité » aux éditions du
12:56 Seuil.
12:57 Cynthia Fleury, une réaction au biais politique, non pas tant à la formation du gouvernement,
13:02 encore que si vous souhaitez y réagir, vous pouvez bien entendu le faire, mais pour nous
13:07 dire pourquoi la politique aussi a parfois tendance, souvent tendance également, à
13:12 ne pas nous aider à aller mieux, disons, pour utiliser un euphémisme.
13:17 - Bon, il y a quantité bien sûr de raisons, mais notamment une et qui fait écho quand
13:23 même à notre première discussion, c'est-à-dire que la politique s'aligne de plus en plus,
13:27 si ce n'est exclusivement sur l'actualité, c'est-à-dire que le régime de temporalité
13:33 de la politique aujourd'hui, c'est celui de l'actualité, l'événementiel de l'actualité
13:39 et l'agenda du politique, ce qui fait que ça bascule, ça fait basculer, ça fait perdre
13:45 à la politique son efficience, puisque son efficience se situe aussi dans l'anticipation,
13:51 la vision, la programmation, l'intelligence, entre guillemets, un temps plus long, et donc
13:56 résultat, ça fait que la politique bascule du côté de la réaction, et la réaction,
14:01 ça renforce le sentiment d'impuissance.
14:02 Et le fait que les utopies soient mal en point, Cynthia Fleury ?
14:07 Alors ça c'est compliqué, parce que les utopies, elles sont à la fois mal en point
14:11 et en même temps, je dirais que les grands récits, si vous voulez, ce grand mythe aujourd'hui
14:17 des grands récits, il n'est pas tout à fait au même endroit, c'est-à-dire qu'on ne
14:20 conduit pas aujourd'hui les individus comme on conduisait hier les foules, les masses.
14:26 Les grands récits, ça a aussi un pendant, je dirais, dangereux, il peut y avoir...
14:32 Donc il faut faire attention, ce grand récit, aujourd'hui, il doit être au contraire beaucoup
14:37 plus multiple, et d'ailleurs, vous vous rendez compte que tous ceux qui ont réinvesti, je
14:44 dirais, non pas les petits récits, mais les récits territoriaux, les récits d'enracinement
14:50 pour reprendre un terme de veille, ou les récits d'atterrissage pour reprendre un terme de
14:55 veille de la tour, sont au contraire généralement plus heureux, au sens où tout d'un coup,
14:59 ils sont dans le faire, dans l'expérience.
15:01 - Professeur Nicolas Franck, il y a quelque chose de spécifique dans l'actualité à
15:07 laquelle nous nous livrons, il est 8h25 et nous sommes en train d'informer nos camarades
15:14 auditrices et auditeurs sur ce qui se passe dans le monde, alors que bien souvent, ceux-ci
15:19 sont encore chez eux, par exemple, certains sont dans leur salle de bain, au lit, que
15:25 sais-je, le fait de voir ou d'entendre l'irruption du monde et du fracas du monde au sein d'un
15:33 espace intime, qu'est-ce que ça peut provoquer pour le psychiatre que vous êtes, comment
15:37 observez-vous cela ?
15:38 - Vous l'avez déjà évoqué, ça peut provoquer de l'anxiété, vous l'évoquez à travers
15:45 les mots que vous employez, et évidemment, l'hyperconnexion, l'hyperinformation, c'est
15:51 quelque chose de stressant pour nous tous, parce qu'il distingue la période actuelle,
15:56 il me semble-t-il, d'il y a quelques décennies, celle que j'ai connue quand j'étais enfant
15:59 et adolescente, c'est le fait qu'on connaît toutes les catastrophes en direct, parce
16:03 qu'on a non seulement la radio, mais la radio, on est sur une radio d'analyse avec de la
16:07 distance, je pense que la nature anxiogène est bien moindre, surtout quand on va plutôt
16:12 essayer de remonter le moral de nos auditeurs, que les informations qui sont données de
16:16 manière brute en direct et qui sont uniquement catastrophistes, ça c'est quelque chose
16:20 qui est difficile à supporter et qui est nouveau.
16:22 Et les nouvelles générations ont grandi dans cet environnement anxiogène.
16:26 Donc effectivement, il y a besoin de contrecarrer cela en apprenant à ces générations à
16:31 faire face à cet afflux d'informations.
16:33 - Le Covid marque une date importante ?
16:35 - Oui, c'était une rupture pour nous tous.
16:39 J'y pensais, je discutais avec des équipes de garde à l'hôpital ce week-end, je parlais
16:43 de l'époque d'avant, ça me semble extrêmement loin, c'est mon vécu personnel, mais ça
16:48 m'est rapporté par la plupart de mes interlocuteurs.
16:50 Il y a eu une espèce de fracture avec un stress majeur, nous avons tous été sidérés,
16:55 nous avons reconstruit un quotidien qui n'a duré que quelques semaines.
16:58 Mais après, on est reparti sur autre chose et puis on a eu du mal à redémarrer parce
17:02 que la crise était sans fin.
17:03 Et puis on a enchaîné sur d'autres crises derrière, vous en avez quelques éléments
17:07 il y a quelques instants, donc on n'est pas sorti d'une sorte de marasme qui ne nous
17:11 permet pas de nous projeter correctement dans l'avenir.
17:14 Alors c'est vrai que Cynthia Fleury parlait des grands récits, mais il y a aussi la prise
17:19 de contrôle immédiate sur son environnement, sur sa destinée, qui est mise à mal avec
17:24 tout ça.
17:25 - Cynthia Fleury ?
17:26 - Oui, pour aller dans le même sens.
17:28 L'OMS d'ailleurs, au moment du confinement, avait indiqué à tous ceux qui ressentaient
17:35 un sentiment comme ça, à la fois de saturation et puis d'anxiété très fort, que la surexposition
17:40 et même l'exposition tout court, parce qu'aujourd'hui quasiment l'exposition est une surexposition
17:45 aux informations, était un facteur qui venait justement, comment dire, avoir un impact
17:51 sur la santé mentale.
17:52 - Et il y a d'ailleurs une pratique, professeur Nicolas Franck, qui est de plus en plus commune
17:59 avant même parfois d'ailleurs d'allumer la radio dans nos lits.
18:03 Nous ouvrons nos smartphones et on est exposé à l'actualité de la nuit.
18:07 - "Doom scrolling", pour prendre ce mot, cet anglicisme.
18:13 - Comment vous dites ? Parce que la liaison était...
18:15 - C'est "Doom scrolling".
18:17 C'est un anglicisme qui décrit le fait qu'on scrolle, qu'on parcourt les nouvelles anxiogènes
18:24 le matin.
18:25 Alors effectivement, ça évoque la nécessité d'avoir un petit peu de planification, de
18:30 contrôle sur tout ça.
18:31 On peut prendre regard, en tout cas, à cette irruption.
18:34 Vous avez fait allusion tout à l'heure de nouvelles qui sont souvent inquiétantes parce
18:38 qu'on est sur des faits divers, on est sur la guerre, les guerres, toutes les catastrophes
18:42 qui viennent d'arriver dans le monde.
18:44 Tout ça, c'est extrêmement inquiétant et c'est trop immédiat.
18:47 En fait, il faut prendre de la distance avec l'immédiateté pour faire face à notre quotidien
18:52 actuel.
18:53 Et pour ça, il faut se mettre des règles.
18:55 Moi, j'ai vu un de mes collaborateurs qui, par exemple, s'interdit de regarder Internet
19:00 dans sa chambre.
19:01 Il met des horaires, un nombre d'heures maximum avant d'aller sur Internet.
19:05 C'est ce type de règles qui peut nous protéger et qui peut nous éviter d'être exposés
19:09 de manière excessive aux écrans parce qu'on y passe un nombre d'heures considérable
19:12 qui grandit d'année en année.
19:14 Et finalement, pour peu de choses très constructives, il faut réfléchir à son mode de vie globalement
19:20 si on veut sortir de ce que vous évoquez là.
19:23 Je vous vois opiner du chef, Sintia Flory.
19:26 Oui, parce qu'en l'occurrence, il y a un double péril, si j'ose dire.
19:30 Il y a ce péril là d'une surexposition qui vient provoquer un découragement dans
19:36 le meilleur des cas, voire un sentiment d'anxiété fort et une dépression.
19:42 Mais il y a aussi un autre péril qui est tout aussi problématique, qui est l'anesthésie,
19:46 c'est à dire la désensibilisation, si vous voulez, comme stratégie aussi de défense
19:50 psychique, qui fait que physiologiquement, à un moment donné, on ne capte plus rien
19:55 parce qu'on n'y arrive plus.
19:57 Et le problème, c'est que moralement par derrière, cette anesthésie générale, elle
20:03 crée une apathie sociale, morale, qui est dangereuse également aussi pour la conduite
20:07 des démocraties.
20:08 Mais professeur Frank, il y a aussi une manière de voir les choses à l'inverse.
20:14 Il y a d'ailleurs un terme allemand qui traduit bien ça, la schadenfreude, autrement dit
20:20 cette joie mauvaise qui peut nous envahir.
20:22 Parce que c'est terriblement cynique, mais le fait de voir les malheurs du monde peut
20:27 aussi nous rassurer lorsqu'on n'est pas touché directement par ces malheurs-là,
20:31 peut nous rassurer sur notre bien-être ou par comparaison nous faire dire que finalement
20:37 nous allons mieux que nous ne le pensons.
20:39 Je crains que cette stratégie ait ses limites.
20:42 Je pense que quand l'afflux d'informations est excessif, ça ne suffit plus, ce mécanisme-là
20:50 est dépassé.
20:51 Je crois plutôt à la reprise de contrôle et au fait de redevenir acteur.
20:56 Le problème de tout ça, c'est qu'on est très passif, on est immergé dans plein d'informations
21:01 qu'on reçoit, sans bouger de fait soi, et que finalement peu de choses dépendent de
21:08 nous.
21:09 La seule manière de reprendre le contrôle, c'est de mieux trier ces informations, d'être
21:13 actif par rapport à notre lien avec Internet, mais aussi par rapport à notre lien avec notre
21:18 quotidien.
21:19 - Cynthia Fleury, sur la comparaison, les comparaisons qu'on peut faire entre les malheurs
21:22 du monde et ses malheurs personnels ?
21:24 - C'est compliqué parce qu'effectivement, dans un premier temps on peut l'imaginer,
21:28 mais aujourd'hui, il y a un effet de rétrécissement du monde.
21:32 Les malheurs du monde se rapprochent.
21:35 Il y a une porosité encore plus forte.
21:39 C'est-à-dire que ce jeu de comparaison ne tient pas longtemps.
21:42 Il y a un sentiment d'identification fort, et tant mieux, mais un sentiment que le malheur
21:48 tombe toujours un tout petit peu plus près.
21:51 Donc, il y a un sentiment de précarité très fort.
21:54 Le fait, par exemple, de se dire « Mon Dieu, demain, moi, ça peut m'arriver, je peux basculer
21:59 dans cette vie violente, indigne, etc. », c'est une peur qui aujourd'hui est bien plus forte.
22:06 Encore une fois, je parle sur des échelles de temps qui sont celles des trente dernières
22:11 années.
22:12 - Professeur Nicolas Franck, la période du Covid, c'est une période où on a accusé,
22:17 certains ont accusé les médias d'avoir noirci le tableau, d'avoir suscité des craintes
22:23 qui n'étaient pas des craintes proportionnées au danger que couraient les Françaises et
22:30 les Français, que couraient les êtres humains.
22:32 Qu'est-ce que vous en pensez ? Est-ce que vous trouvez que les médias ont trop chargé
22:35 la barque ?
22:36 - Les médias se sont alignés sur les décisions politiques.
22:39 Je pense qu'on ne peut pas trop accuser les médias de ça, dans la mesure où on nous
22:44 a annoncé la guerre, que tout le monde allait mourir, qu'il fallait absolument se protéger,
22:49 ne plus voir personne, ne pas parcourir plus d'un kilomètre autour de chez soi, porter
22:52 un masque en permanence rapidement, etc. et qu'il fallait être enfermé pendant deux
22:55 semaines, quitte à arrêter le fonctionnement de la société.
22:58 Non, c'est une question de prise en compte de la santé mentale dans les décisions politiques.
23:01 Fait-on plus de bien à une population en enfermant tout le monde, quitte à créer
23:05 50% de dépression, 50% de troubles anxieux, etc. en sauvant quelques vies qui auraient
23:10 été...
23:11 - 50% de troubles anxieux ?
23:12 - De dépression, de troubles anxieux, oui.
23:14 C'est les taux qu'on avait avec des échelles de troubles anxieux et de dépression, pas
23:17 forcément des diagnostics cliniques avec un psychiatre.
23:20 Mais quand on a fait passer des échelles à ce moment-là, regardez les études, les
23:22 enquêtes de Santé publique France, c'était ça.
23:24 Et la première enquête de ce type a eu lieu en Chine, c'était début 2020, c'était
23:28 50% de troubles mentaux.
23:29 Donc on a su très tôt qu'on créait des dégâts psychiatriques et psychologiques.
23:34 Mais néanmoins, ce qui me choquait à l'époque, c'est surtout qu'on disait "il y a des questions
23:38 sanitaires de faire ça, et puis effectivement il y a des conséquences psychiatriques et
23:41 psychologiques".
23:42 Comme si la psychiatrie n'était pas dans la santé.
23:44 Alors que la santé mentale, c'est une des dimensions de notre santé qu'il faudrait
23:48 prendre en compte lorsqu'on prend de telles décisions.
23:50 - Autrement dit, ce que vous déplorez, ce n'est pas tant la manière dont les médias
23:53 ont informé sur cette crise sanitaire, mais la manière dont celle-ci a été gérée ?
23:58 - Oui, mais après, je ne jette la pierre à personne.
24:01 C'était une nouveauté effrayante pour tout le monde.
24:03 On a vu ce flux arriver vers l'Europe, déferler de l'Asie.
24:08 Celui qui avait découvert le virus est mort lui-même du virus.
24:10 C'était extrêmement effrayant.
24:12 On ne connaissait pas le taux de mortalité.
24:13 Donc effectivement, il fallait bien prendre des décisions.
24:15 Mais ce qui aurait été intéressant, ça aurait été d'aménager quelque chose par
24:18 rapport à la santé mentale des personnes qui se sont retrouvées enfermées, parfois
24:22 complètement isolées, sans aucun contact, et qui se sont enfermées dans une dépression
24:26 extrêmement sombre.
24:27 Moi, je pense aux étudiants qui sont à l'autre bout du pays ou dans un autre pays, qui ont
24:30 perdu tout contact avec les leurs parce qu'il n'y avait plus de faculté, il n'y avait plus
24:34 de petit boulot, il n'y avait plus rien du tout.
24:36 Et ça a été extrêmement difficile pour eux.
24:38 Et certains pays ont instauré des mesures pour lutter contre ça.
24:41 Je pense par exemple à la bulle sociale, c'est-à-dire la possibilité de conserver
24:44 des contacts illimités avec une personne.
24:46 Nous, on n'a pas eu ça en France.
24:47 - Cynthia Fleury, justement, vous qui avez écrit la Clinique de la dignité aux éditions
24:52 du Seuil, dans quelle mesure cette politique sanitaire s'inscrit-elle dans une manière
24:56 de redonner leur dignité aux individus ou au contraire de leur ôter cette dimension-là
25:02 de leur humanité ?
25:03 - La Clinique de la dignité, c'est l'inverse, si vous voulez, de ce qui a été fait dans
25:09 un système d'état d'urgence sanitaire, mais qui souvent, hélas, même pas que souvent,
25:16 toujours, fait un biais biologisant.
25:20 C'est-à-dire qu'en gros, ce qui est préservé, c'est la vie biologique.
25:26 Et on sait très très bien que la vie humaniste et même tout simplement humaine, ce n'est
25:31 pas simplement la vie biologique, c'est l'indivisibilité de la vie, c'est-à-dire la vie sociale,
25:37 culturelle.
25:38 Et on sait très bien également que quand vous mettez l'ensemble d'une population sous
25:43 une même loi, notamment une loi de confinement, vous venez renforcer les vulnérabilités
25:50 des plus vulnérables, c'est-à-dire, bien évidemment, tous ceux qui sont au bout de
25:54 la chaîne.
25:55 On pense bien évidemment à ceux qui sont âgés.
25:57 Il est évident que quand vous avez 90 ans, basculer en confinement, ça n'a pas du tout
26:03 le même impact que quand vous avez 40 ans ou que quand vous avez 2-3 ans et que vous
26:07 rentrez dans des systèmes d'apprentissage.
26:09 Là aussi, c'est la santé mentale des jeunes gens et par ailleurs, la dérégulation de
26:16 leur système d'apprentissage, c'est quelque chose qui est très important aujourd'hui.
26:19 Ça veut dire que ces séquelles, professeur Frank, vous les voyez encore, ces séquelles
26:25 liées à la crise du Covid ou bien elles ont fini par disparaître.
26:29 Comment ça se déroule dans votre spécialité, autrement dit la psychiatrie ?
26:33 Écoutez, on a été vraiment très malmené, non seulement parce qu'on a eu un afflux
26:39 de personnes, de consultants, d'hospitalisés qui étaient majeurs, en décalé.
26:43 En 2020, ça ne s'est pas si mal passé.
26:45 Tout le monde était figé en quelque sorte, mais plutôt en 2021 et 2022.
26:49 Et cet afflux massif de personnes qui étaient en souffrance a rencontré finalement un déficit
26:54 de personnel parce que de nombreux infirmiers avaient quitté la profession, de nombreux
26:58 médecins avaient changé aussi de lieu d'activité et on n'a pas été capable de répondre
27:03 à la hauteur de l'enjeu.
27:04 Mais alors, il y a quand même un masochisme, Cynthia Fleury, chez les êtres humains.
27:10 Regardez par exemple cette vogue des faits divers.
27:12 Il y a énormément d'attention pour ces faits divers.
27:16 Or, ceux-ci, statistiquement, sont bien heureusement des faits relativement rares et beaucoup
27:23 d'entre nous sont fascinés par des détails qui sont bien souvent des détails, bien
27:28 entendu, atroces.
27:29 Alors là, on ne peut pas accuser directement les médias.
27:33 C'est le public qui est porté vers ce type d'informations.
27:37 Oui, mais généralement, le fait divers, alors ça dépend quel est le fait divers.
27:41 Je pense à des meurtres sordides ou ce genre de choses.
27:45 Oui, mais là aussi, ça dépend.
27:48 C'est-à-dire que le fait divers, s'il est dans sa mythologie du fait divers, donc
27:54 d'infra, c'est plus compliqué que ça parce que c'est un objet culturel en soi.
27:58 Donc, c'est un objet qui permet à chacun de se positionner, de donner son avis.
28:04 Je ne vais pas dire de retrouver de la puissance, mais là aussi, cette passion pour le fait
28:11 divers, c'est une passion à la fois pour le divertissement et l'intrigue qu'il
28:14 suppose, mais ça ne met pas tout à fait au même endroit de sentiments d'impuissance.
28:19 Donc, ça dépend quel fait divers.
28:21 Maintenant, pour essayer de sortir de cette idée du masochisme, etc., on peut quand même
28:30 dire que malgré tout, et c'est souvent comme ça que ça se passe, c'est-à-dire
28:35 la Covid a provoqué à la fois une non considération de la question de la santé mentale et en
28:42 même temps par cette non considération très forte de la santé mentale, elle a remis quand
28:47 même en lumière la nécessité de la santé mentale.
28:50 Je pense qu'il y a eu quand même une déstigmatisation, c'est-à-dire que la psychiatrie qui était
28:55 ressentie comme étant ce qui gère le pathologique et précisément ce qui n'est pas moi,
29:01 tout d'un coup, on a remis la psychiatrie dans la santé mentale, donc dans la santé.
29:06 Et aujourd'hui, malgré tout, je pense qu'il y a une banalisation ou une sorte de normalisation
29:12 plus forte, une autorisation des individus à dire quelque chose de leur santé mentale
29:17 et à revendiquer cette nécessité.
29:19 Alors, professeur Frank, je sais bien que vous n'allez pas me répondre en quelques
29:24 mots parce que les choses ne sont évidemment pas simples, mais si vous deviez tenter justement
29:31 de nous aider à protéger notre santé mentale, que diriez-vous ?
29:34 Je dirais qu'il s'agit de réfléchir à son mode de vie, de prendre garde aux écueils
29:40 qu'on a évoqués tout à l'heure, en termes en particulier de confrontation à tout ce
29:44 qui est anxiogène.
29:46 Ça veut dire reconstruire ses liens sociaux, reconstruire son lien à la nature.
29:50 Quand on l'a perdu, on vit souvent dans de grandes agglomérations, dans un quotidien
29:54 très stressant.
29:55 Ça veut dire prendre soin de soi, ça veut dire prendre soin des autres.
29:58 Moi, je crois aussi, pour aller dans la suite de ce que vient de dire Cynthia Fleury, qu'il
30:02 faut élever le niveau de culture de la santé mentale, de culture de santé mentale en France,
30:07 en particulier concernant tout ce qui nous protège, ce que je dis là, mais aussi par
30:10 rapport aux troubles courants, anxiété, dépression ou aux troubles plus sévères,
30:15 parce que la déstigmatisation, elle doit être globale.
30:18 Donc tout ça, tout ça va ensemble.
30:20 Je pense que l'attention qui a été attirée, et je souscris complètement à ce qui a été
30:23 dit pendant la crise du coronavirus, doit être mise à profit pour s'intéresser à
30:29 ce champ-là.
30:30 Et donc le message principal, c'est prenez le contrôle de votre quotidien pour vous
30:34 sentir mieux et faites attention à ça.
30:36 Cynthia Fleury.
30:37 Oui, sincèrement, on sait à quel point tout ce qui remet du pouvoir faire, déjà de
30:44 l'expérience, du présentiel, puisque maintenant, c'est le terme un peu terrible, mais c'est
30:52 vrai que c'est absolument déterminant.
30:54 Vous avez les travaux d'Antonofsky sur ce qu'il appelle la salutogénèse, c'est-à-dire
30:59 la...
31:00 Salutogénèse.
31:01 La salutogénèse, la fabrique de la santé, justement.
31:04 Et Antonofsky avait travaillé sur les survivants de la Shoah pour essayer de comprendre qu'est-ce
31:10 qui venait préserver leur santé à eux, alors qu'ils avaient traversé par ailleurs
31:15 les pires traumas.
31:16 Mais aujourd'hui, vous avez...
31:17 On parlait à l'instant de la place...
31:19 C'est peut-être...
31:20 Si la réponse était dans la question, je veux dire, si le fait d'avoir traversé le
31:24 pire...
31:25 Non, pas nécessairement.
31:26 Donc non.
31:27 Parce que là aussi, on a des travaux assez forts et...
31:29 Non, on a à la fois traversé le pire.
31:32 Il n'y a pas d'effet de causalité sur le fait de traverser le pire qui provoque une
31:37 résilience immense.
31:38 On peut avoir les deux catégories.
31:39 Donc on cherche...
31:41 L'une des choses les plus compliquées, c'est les mécanismes de la résilience.
31:45 Pourquoi tel ou tel être va fabriquer cette capacité de faire face ?
31:51 Il n'empêche que la nature dans la salutogénèse, c'est important.
31:55 On sait tout à fait que...
31:56 Voilà.
31:57 La luminosité naturelle, la biodiversité...
32:00 Et on n'a même pas besoin que ce soit de la biodiversité remarquable.
32:04 Ça peut être de la biodiversité ordinaire, tout ça.
32:07 Ça, les forêts, l'air, etc.
32:10 Toute cette reconnexion à la nature, on sait que c'est absolument déterminant pour récupérer
32:18 de la santé mentale, de la santé tout court.
32:20 Merci beaucoup, Cynthia Fleury.
32:22 La Clinique de la Dignité, c'est le livre que vous avez publié aux éditions du Seuil.
32:27 Le professeur Nicolas Franck, avec un autre professeur, Frédéric Heisebert.
32:33 « Protéger sa santé mentale après la crise », c'est votre ouvrage publié aux éditions
32:39 Odile Jacob.