• il y a 10 mois
La ministre de l'Education nationale est embourbée dans une polémique autour de la scolarisation de ses enfants, qu'elle a passé du public au privé à cause, selon elle, d'heures "qui n'étaient pas sérieusement remplacées". Des propos qui ont fait bondir les syndicats enseignants. David Grisinelli, secrétaire académique du syndicat enseignants UNSA Bas-Rhin, est l'invité de France Bleu Alsace ce mardi 16 janvier.

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Transcription
00:00 A 7h47, à peine nommée, Théo, la nouvelle ministre de l'éducation nationale, est embourbée
00:05 dans cette polémique autour de la scolarisation de ses enfants.
00:09 Amélie Oudéa Castera a expliqué qu'elle avait mis ses enfants dans le privé parce
00:13 qu'il y avait trop d'heures non remplacées dans le public.
00:16 Elle est vivement critiquée depuis.
00:18 Alors comment les syndicats reçoivent-ils les premiers pas de leur nouvelle ministre ?
00:22 C'est ce que nous allons voir avec le secrétaire académique du syndicat des enseignants, Une
00:26 Sainte, dans le bar.
00:27 Bonjour David Grisinelli.
00:28 Bonjour.
00:29 Amélie Oudéa Castera va se rendre aujourd'hui finalement dans l'ancienne école publique
00:34 de son fils, là où il n'est resté que quelques mois.
00:36 Est-ce que c'est ce qu'il fallait faire après toute cette polémique ?
00:38 Ce qu'il fallait surtout faire, ce n'est pas commencer la polémique.
00:41 C'est-à-dire, ce n'est pas dire ce qu'elle a dit.
00:44 Elle aurait pu se contenter de dire « moi j'ai décidé de mettre mes enfants dans
00:47 le privé ». Et puis voilà, c'était une démarche personnelle et puis c'était
00:51 fini.
00:52 Mais il se trouve qu'elle a donné des arguments.
00:53 Et ces arguments-là sont des arguments mensongers, sont faux.
00:57 Et c'est là que la polémique enfle.
01:00 Là vous l'avez pris comme une attaque personnelle ?
01:03 C'est très dérangeant quand il s'agit de la ministre de l'Éducation nationale
01:08 qui attaque ses propres personnels qu'elle est censée défendre.
01:10 Évidemment que nous l'avons pris comme une agression, qui était sa première prise
01:16 de parole en tant que ministre de l'Éducation nationale.
01:18 Ça commence très très mal.
01:19 Il y avait des rencontres avec les syndicats qui ont commencé hier, qui se poursuivent
01:23 aujourd'hui.
01:24 Est-ce que vous avez confiance en elle désormais pour travailler ?
01:27 Ça va être difficile.
01:29 Évidemment non, on démarre trop mal.
01:32 Mais il va falloir surtout qu'elle prouve maintenant, au-delà de la polémique qui
01:37 à un moment donné va s'estomper, il va falloir surtout qu'elle prouve que sa volonté
01:41 c'est réellement de mettre en avant, de valoriser et de faire en sorte que les personnels
01:47 de l'Éducation nationale et que les enfants de l'Éducation nationale du service public
01:51 puissent travailler dans les meilleures conditions.
01:53 Et ça il y a plein de choses derrière.
01:54 Alors si je peux développer sur un exemple, c'est celui qu'elle a argumenté, c'est
01:59 celui de l'absentéisme.
02:00 Il faut savoir, il faut donner les chiffres.
02:03 Les enseignants français sont les personnels de la fonction publique qui sont le moins
02:09 absent.
02:10 Et les enseignants français sont moins absents que l'ensemble des personnels du privé.
02:16 C'est ce que vous racontez en écrivant un rapport de la Cour des comptes il y a deux
02:20 ans, juste sur Amélie Oudéa Castera.
02:22 Est-ce que vous disiez la confidence va être à bâtir, mais est-ce qu'on ne part pas
02:27 trop loin ? Est-ce que vous pensez qu'elle peut rester en place pour mener les chantiers
02:30 dont l'école a besoin ?
02:31 Moi je ne suis pas là pour faire de la politique.
02:34 Je suis là pour faire en sorte que dans l'Éducation nationale, les choses s'améliorent.
02:40 Et donc il va falloir qu'elle prenne en main des dossiers très costauds.
02:44 À savoir, ceux qui sont les plus urgents et les plus importants, c'est l'attractivité
02:50 du métier.
02:51 Comment se fait-il qu'aujourd'hui, il y ait de moins en moins de personnes qui veulent
02:55 aller dans ce métier ?
02:56 C'est d'abord parce que les conditions de travail sont de plus en plus dures.
02:59 Et c'est parce que les salaires ne suivent pas.
03:01 Quand on compare les salaires des enseignants français à ceux des pays autour, les Allemands,
03:07 les Luxembourg, Pays-Bas, Danemark, tout ça, on est très très loin.
03:12 On a parfois des différences du simple au double.
03:14 On va revenir sur les propos de la ministre avec vous, 0388 25 15 15.
03:19 Vous êtes choquée, heurtée, parce que la ministre de l'Éducation nationale a dit
03:22 bonjour Laurence.
03:23 Bonjour Hubert.
03:24 Depuis Baldenheim.
03:25 Bonjour Laurence.
03:26 Soyez la bienvenue Laurence.
03:27 Est-ce que vous êtes choquée ou non par ce qu'a dit la ministre ?
03:31 Non.
03:32 Je pense que cette personne a donné un avis personnel en tant que maire.
03:38 Et elle a dit tout haut ce que tout le monde pense tout bas.
03:42 Ou peut-être beaucoup de personnes pensent tout bas.
03:45 Je pense que c'est une bonne chose.
03:47 C'est à utiliser pour faire avancer le système justement.
03:51 Puisque effectivement les professeurs et enseignants peuvent être mécontents de leurs conditions
03:57 de travail et de leur rémunération.
03:58 Je pense que justement c'est un chantier à prendre en considération pour le faire
04:04 avancer pour que nos jeunes puissent bénéficier d'enseignements réguliers et corrects.
04:11 Et ça fera avancer toute la France.
04:14 D'autre part, je tiens à préciser un point.
04:17 Mes enfants ont eu l'occasion d'être scolarisés dans les deux domaines.
04:20 Et ma fille notamment dans le secteur privé durant deux années en BTS.
04:25 Et je peux vous dire que ça a marqué notre étonnement.
04:29 Puisque dans un établissement privé à Strasbourg, que je ne citerai pas, en fait ce que nous
04:39 avons constaté c'est qu'il y avait plus d'absentéisme encore que dans le public.
04:44 Ces professeurs sont des personnes qui sont engagées pour une année ou pour deux années.
04:49 Je ne peux pas vous donner le nombre d'années où qu'elles sont engagées.
04:52 Quoi qu'il en soit, il y avait beaucoup d'absentéisme qui était remplacé plutôt les samedis.
04:59 Donc il faut savoir qu'à ce niveau-là ce sont des personnes qui peuvent être bien
05:05 sûr aussi adultes et qui devaient se redéplacer une seconde fois où ça embêtait justement
05:12 parce que ce sont des gens qui venaient d'autres régions.
05:14 Donc ce que vous nous dites Laurence, dans un premier temps...
05:16 Parce que d'autres personnes devaient travailler pour payer leurs études.
05:19 Donc c'était vraiment inconvenant.
05:20 Dans le public, c'est autant problématique.
05:23 Laurence, c'est ça en fait.
05:24 Ce que vous nous dites c'est que l'herbe n'est pas forcément plus verte dans le privé
05:26 que dans le public.
05:27 Ce qu'on a parfois tendance à croire et à penser.
05:30 Et puis pour en revenir aux propos de la ministre, vous dites "bon, elle met les pieds dans le
05:32 plat, est-ce que ce n'est pas finalement salutaire ?"
05:34 Laurence, on vous remercie en tout cas de votre témoignage.
05:36 On aura l'occasion d'échanger avec Nathalie dans un très court instant.
05:39 Oui, finalement une ministre qui, oui, met les...
05:42 Alors, sitôt nommée "met les deux pieds dans le plat", est-ce que ce n'est pas une
05:47 bonne chose ? À l'image de ce que dit Laurence finalement, est-ce que ça ne peut pas faire
05:49 aussi avancer et bouger les choses ?
05:51 C'est une ministre.
05:53 C'est donc une personne qui a la responsabilité de ce dossier.
05:57 Donc si elle avait en même temps fait des propositions, ça aurait été intéressant.
06:01 Les propositions ont été faites.
06:03 C'est le ministre précédent qui a lancé toute une campagne qu'il appelle la campagne
06:08 du pacte, qui devrait soi-disant résoudre le problème de l'absentéisme.
06:14 Alors le pacte enseignant, c'est la possibilité pour certains enseignants d'accepter de remplacer
06:20 des collègues qui seraient absents dans certaines matières.
06:23 C'est proposé au collège et au lycée.
06:25 Effectuer des missions supplémentaires dans l'idée d'être rémunérés davantage.
06:29 Ça a été très critiqué l'année dernière.
06:31 Mais est-ce que là, ça fait quelques mois que c'est en vigueur ?
06:33 On n'en entend plus trop parler.
06:34 Est-ce que ça fonctionne ?
06:35 Il y a à peu près un tiers des enseignants qui s'y étaient mis.
06:37 Qu'est-ce que vous en pensez David Grisinelli du syndicat ?
06:39 Je n'en pense pas que du bien.
06:40 Pourquoi ? Parce que si on pose le problème de l'absence et donc de la continuité du
06:47 service public d'éducation, quelles sont les deux grosses problématiques liées à cela ?
06:52 C'est tout d'abord et avant tout l'absence des professeurs des écoles dans le primaire,
06:58 qui eux sont de vrais problèmes pour les parents, puisqu'ils se retrouvent avec des
07:02 enfants sur les bras, ou les autres instituteurs et professeurs des écoles avec les élèves
07:07 dans leur classe.
07:08 Et donc du coup, ça détériore la qualité du service rendu.
07:12 Des absences pour arrêt maladie ou pour formation ?
07:15 Pour tout.
07:16 Il faut savoir qu'à l'heure d'aujourd'hui, plus de 60% des absences ne sont pas liées
07:21 aux arrêts maladie.
07:22 Il y a un tiers qui est lié aux arrêts maladie.
07:25 Voilà, c'est ça.
07:26 Le reste, c'est l'institution qui entraîne l'absence.
07:31 Pour ces cas-là d'absence dans le primaire, le fameux pacte ne résout en rien puisqu'il
07:40 ne s'adresse pas aux professeurs des écoles.
07:42 Pour ces cas-là, il faut créer des postes de remplaçants.
07:45 J'aimerais que l'on rejoigne à présent Nathalie qui est à Strasbourg.
07:49 Nathalie, bonjour.
07:50 Oui, bonjour à tous et bonne année à toute l'équipe.
07:54 Bonjour Nathalie, bonne année à vous également Nathalie.
07:56 Merci de nous appeler, donc d'échanger avec nous en direct sur France Bleu Alsace.
07:58 Qu'est-ce que vous pensez de tout ce qui se passe autour de la ministre actuellement
08:01 et de ses propos surtout ? Est-ce que ça vous a choqué ou pas ?
08:04 Alors, il y a deux choses.
08:08 Est-ce que c'est choquant qu'elle scolarise ses gamins dans le privé ? Non.
08:12 Je suis relativement d'accord avec votre invitée.
08:14 Elle aurait simplement dit c'est ma décision, j'ai choisi de faire comme ça et puis on
08:19 passe à autre chose.
08:20 Ça n'aurait pas induit de discussion plus que ça.
08:22 Sa façon de parler, moi je pense que c'est une personne en responsabilité et qu'elle
08:27 n'a pas à s'exprimer de cette façon.
08:28 Elle dit les choses et qu'elle met le pied dans le plat.
08:30 Ok, on est d'accord.
08:31 Après on verra si c'est suffisent d'effet.
08:32 Mais il y a façon et façon de dire les choses.
08:35 Et sa façon de s'exprimer a heurté profondément l'ensemble de la communauté de l'éducation
08:39 nationale.
08:40 Pas seulement les enseignants, mais tous les administratifs qui gravitent autour.
08:44 Parce qu'il faut savoir qu'un enseignant ne travaille pas tout seul.
08:46 Un BAU, ça ne fonctionne pas juste avec des profs.
08:48 Donc ça a choqué vraiment l'ensemble de la communauté de l'éducation nationale.
08:52 Après, on va savoir si elle s'attelle au vrai dossier qu'elle a.
08:55 Monsieur parlait tout à l'heure de l'attractivité du métier.
08:58 On va le dire communément comme tous les Français, le recrutement.
09:01 Il y a actuellement un vrai problème de recrutement dans l'éducation nationale.
09:05 Et pas seulement que les profs.
09:06 Les profs, c'est vraiment ce qu'on voit.
09:08 Parce que tout de suite, ça a un gros impact.
09:11 Mais dans l'éducation nationale, il n'y a plus aucun métier qui n'attire.
09:15 Et pourquoi ? Parce que les conditions de travail.
09:17 Pas forcément que les salaires, que les traitements, parce qu'on est des fonctionnaires des traitements,
09:22 mais les conditions de travail, la façon dont on nous demande de travailler, les missions
09:27 qu'on nous demande de remplir, qui sont, avec la tête d'un ministre, très variables.
09:32 On n'est pas des girouettes.
09:33 Les enseignants ne sont pas des girouettes.
09:35 On ne leur demande pas de faire des réformes à chaque fois qu'il y a un nouveau ministre qui arrive.
09:40 "Ah ben vous allez maintenant enseigner plutôt ça, plutôt ça."
09:43 Essayez de leur faire leur job, ce serait bien.
09:45 Mais par contre, trouvez-leur des collègues.
09:46 - S'attaquer au vrai problème, le recrutement en l'occurrence.
09:49 Nathalie, merci de nous avoir fait part de votre point de vue ce matin en direct sur France Bleu Alsace.
09:54 Ce que nous dit Nathalie, c'est ce que vous soulignez, évidemment, la question du manque de moyens,
09:58 la question du besoin de recruter des enseignants, David Grisnelli.
10:02 Mais il y a aussi une question qui se pose, c'est un peu l'aura du public par rapport au privé,
10:06 ce cliché qui aurait l'avis dur que le privé, l'enseignement privé, est meilleur que l'enseignement public.
10:11 C'est aussi ça que dit cette polémique avec Amélie Oudéa-Casterrat.
10:15 - Alors c'est ce que disent certains, les défenseurs du privé.
10:19 Mais quand on regarde, là encore, il faut avoir un regard le plus objectif possible,
10:25 et ce que les recherches disent, à savoir aujourd'hui, le service public
10:31 est celui qui est le mieux capable de faire progresser les élèves.
10:36 Et c'est ça qui compte dans un système éducatif aujourd'hui,
10:39 c'est faire progresser les élèves, quel que soit leur niveau de rentrée dans le système éducatif.
10:45 Et ça, aujourd'hui, le système public y arrive mieux que le système privé.
10:50 Ça c'est indiscutable.
10:53 Et du coup, on ressort évidemment la discussion sur où est-ce qu'on met les moyens ?
11:00 Est-ce qu'on met les moyens plus dans un service qui accueille tous les élèves ?
11:04 Ou est-ce qu'on donne autant de moyens, si ce n'est plus aujourd'hui,
11:07 dans un service privé qui sélectionne ses élèves ?
11:11 Des questions que vous porterez auprès de la ministre,
11:14 dans ce cas, votre syndicat portera auprès de la ministre lors de futures discussions, on l'imagine.
11:18 Merci beaucoup David Grisinelli d'avoir été avec nous ce matin,
11:21 secrétaire académique du syndicat des enseignants, Une Sat dans le Bar.
11:24 Bonne journée.

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