Votre santé : schizophrénie, ce n'est pas ce que l'on croit !

  • il y a 8 mois
Retrouvez William Leymergie entouré d’experts, du lundi au vendredi en direct dès 12h30, pour une émission dédiée aux problématiques de notre quotidien.

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00:00 [Musique]
00:05 C'est une maladie relativement fréquente qui touche environ une personne sur cent.
00:10 Alors d'abord, pouvez-vous nous rappeler les symptômes, les causes,
00:15 et puis ensuite s'il y en a, et s'ils sont efficaces les traitements.
00:19 Déjà, on va revenir sur le nom.
00:21 Schizo, ça veut dire morcellement, et phrénie, ça veut dire esprit.
00:26 C'est en fait une fragmentation de l'esprit.
00:28 Il ne faut pas penser ce que l'on voit dans tous les journaux, dans tous les films et tout.
00:33 C'est un dédoublement de la personnalité.
00:35 Non, pas du tout, ça n'a rien à voir avec un dédoublement de la personnalité.
00:39 Tout le monde sait encore ça.
00:42 Oui, schizo, c'est un double personnalité.
00:45 Morcellement, c'est plusieurs.
00:50 C'est fragmenté, mais il n'est pas fragmenté en deux personnalités.
00:54 Vous allez voir avec les applications.
00:57 C'est pire.
00:58 Non, non, non, il faut oublier tout ça.
01:00 Tout ce qu'on a dit, ce n'est pas un dédoublement de la personnalité.
01:03 Vous dites quand même que c'est fragmenté.
01:05 Ça veut dire qu'on est plusieurs là-dedans.
01:08 Oui, on est plusieurs à l'extérieur surtout.
01:11 Je vais vous expliquer.
01:13 C'est une maladie dans laquelle la personne qui souffre de schizophrénie
01:19 est totalement déconnectée de la réalité.
01:22 Elle est déconnectée de la réalité et comme elle est déconnectée de la réalité,
01:25 elle ne sait pas qu'elle est malade.
01:27 Elle pense qu'elle va bien, elle pense que tout va bien.
01:29 Et comme elle pense que tout va bien, elle ne va pas être en demande de soins.
01:33 Elle ne va pas aller consulter puisqu'elle pense que tout va bien.
01:36 Il faut comprendre que c'est une maladie complexe,
01:39 c'est une maladie chronique,
01:41 c'est une maladie qui survient généralement entre 15 et 25 ans,
01:46 mais surtout, c'est une des maladies les plus invalidantes qu'il soit.
01:51 C'est terrible d'être schizophrène,
01:53 c'est terrible pour le patient, je vais vous expliquer pourquoi après,
01:56 mais c'est terrible pour l'entourage.
01:59 Vivre avec un schizophrène, avoir une personne schizophrène parce qu'elle souffre,
02:04 c'est terrible parce qu'on la voit souffrir.
02:06 Mais je croyais qu'elle ne souffrait pas,
02:08 parce qu'elle ne souffre pas si elle ne se rend pas compte qu'elle est complètement...
02:10 Si, si, elle souffre, parce que quand je vais parler de certains symptômes,
02:12 comme les hallucinations, elle souffre.
02:14 Alors on y est là.
02:16 On y est aux symptômes.
02:17 Oui, quels sont les signes ou les symptômes ?
02:19 Ce qu'il faut comprendre, et ça aussi c'est compliqué,
02:21 c'est qu'on peut dire qu'il y a autant de schizophrénie,
02:24 de schizophrènes que de schizophrénie ou de schizophrénie que de schizophrènes,
02:28 parce qu'en fait on a des formes très très variées.
02:30 On retrouve essentiellement trois types de symptômes, comme on voit là,
02:34 des symptômes avec délire, des symptômes négatifs et des symptômes associatifs.
02:39 Dans les symptômes avec délire, vous allez retrouver des persécutions,
02:43 syndrome délire de persécution,
02:45 ils ont l'impression que tout le monde leur en veut,
02:47 c'est une horreur.
02:49 Délires érotiques, délires mystiques, délires complotistes,
02:53 certains sont mégalos complètement, d'autres sont totalement paranos.
02:57 Ils ont l'impression que tout le monde leur en veut,
02:59 ils sont dans un bus par exemple, ils ont l'impression que tout le monde leur veut du mal,
03:04 ils marchent dans la rue, ils regardent les gens comme ça.
03:06 Quand on discute avec des schizophrènes, c'est terrible.
03:09 On peut pas se tromper, on sait quand on a une personne...
03:13 - Les traitants et les proches le savent, mais lui, quand il raconte, lui ou elle,
03:19 parce que contrairement à une idée reçue, avant on pensait qu'il y avait plus d'hommes que de femmes,
03:23 en fait on sait maintenant que les hommes sont plus précocement touchés,
03:26 mais il y a pratiquement autant d'hommes que de femmes.
03:29 - Et ce qui est terrible, où il y a une souffrance terrible, c'est une souffrance visuelle.
03:33 Vous avez l'impression que tout le monde veut vous tuer,
03:36 tout le monde veut vous faire du mal, tout le monde en a après vous.
03:40 Des hallucinations auditives.
03:43 Vous entendez des voix, et des voix qui peuvent vous menacer, vous insulter, vous traiter de tous les noms,
03:49 mais des voix qui peuvent vous donner des ordres incongrus.
03:51 - Oui, donc, je reviens sur la question que posait Caroly tout à l'heure.
03:54 - C'est dingue !
03:55 - Donc, il va pas bien le schizophrène.
03:57 - Mais il va pas bien, il est pas conscient qu'il va pas bien.
03:59 - Oui, pour lui c'est normal.
04:01 - Il est dans le bus, il dit "tous ces gens-là ils veulent me tuer,
04:03 ils doivent pas être très à l'aise quand même".
04:06 - C'est ce que je disais, il souffre.
04:07 - Oui, mais donc il va pas...
04:08 - Ah non, il va pas bien, il souffre terrible, c'est ce que j'ai dit.
04:11 Il y a la souffrance du schizophrène et la souffrance de l'entourage.
04:15 - Mais il se rend pas compte que...
04:17 - Il souffre, c'est ce que je lui disais.
04:18 - Il se rend pas compte que finalement c'est des hallucinations ?
04:20 - Non, parce qu'il pense que les gens l'en veulent vraiment.
04:22 - Ah ouais ?
04:23 - Et par exemple quand il a des hallucinations tactiles,
04:25 certains vous racontent "j'ai des araignées qui me marchent dessus, je les entends me marcher dessus".
04:30 Il a des hallucinations gustatives, avec des goûts de poubelle, de matière dans la bouche.
04:35 Faut comprendre que c'est une véritable souffrance.
04:38 - Ah d'accord.
04:39 - C'est en permanence ou c'est par moment ?
04:40 - Non, c'est par moment justement.
04:42 Il y a certains moments où on a ces hallucinations, ces délires, ces moments de parano,
04:48 puis d'autres moments où on est complètement apathique, replié sur soi, isolé, amorphe.
04:56 Il parle pas, il parle à personne, etc.
04:58 Donc souvent dans ces cas-là, les traitants ou les proches peuvent prendre ça pour de la dépression.
05:03 Et après il y a les syndromes associatifs.
05:06 Alors là c'est un peu plus compliqué, ils ont des difficultés à mémoriser,
05:10 ils ont des difficultés à planifier les tâches,
05:12 ils n'arrivent plus à faire les courses, ils n'arrivent plus à faire cuire des pâtes.
05:15 Et donc ça veut dire quoi ?
05:16 Ça veut dire une perte d'autonomie totale.
05:18 Et puis vraiment, certains ne peuvent pas du tout vivre seuls.
05:22 A côté de ça, certains...
05:23 Bien, moi je connais des médecins schizophrènes.
05:25 Donc c'est pour ça que je vous dis qu'il y a des degrés...
05:29 - Et vous, ça va, toi ça va, t'es pas schizo.
05:31 - On en parlera.
05:33 - Mais pas à ce moment-là, c'est avant d'être en pied.
05:38 - Non, non, mais vous voyez cette souffrance...
05:39 - Vous dites plutôt les hommes que les femmes là.
05:41 - Alors, les hommes sont plus précocement touchés, 3 à 4 ans de plus.
05:45 Je vous le disais tout à l'heure, ça arrive souvent entre 15 et 25 ans.
05:52 - Mais c'est génétiquement...
05:54 - Alors, il y a une forme génétique.
05:55 On sait par exemple que dans les jumeaux, quand il y a un jumeau qui est atteint,
05:58 ou une jumelle, l'autre aura 40% de risque d'être lui aussi schizophrène.
06:05 Donc il y a une forme génétique, etc.
06:07 Après, on sait que ça survient entre 15 et 25 ans.
06:09 Pourquoi ?
06:10 Parce que 15 et 25 ans, c'est l'âge charnière pour le cerveau.
06:14 C'est l'âge où le cerveau est prêt pour optimiser toutes les fonctions,
06:19 pour l'âge adulte après, et il fait un peu le ménage.
06:22 Dans notre cerveau, entre 13 et 25 ans, il y a un ménage qui se fait
06:25 entre tout ce qu'on a appris.
06:26 On a appris à marcher, on a appris à parler, on a appris plein de choses.
06:29 Et puis, ça, il faut que ça devienne automatique,
06:31 mais qu'on ne soit plus là à réfléchir, comme on a appris à marcher et tout.
06:35 Donc, il fait le ménage dans le cerveau entre les synapses,
06:37 entre les connexions, entre les neurones, et il travaille énormément à ce moment-là.
06:41 Et quand on travaille beaucoup, on risque de faire des erreurs.
06:44 Donc, on pense qu'il y a un bug à ce moment-là.
06:46 - Mais on les laisse comme ça, ces gens-là, ou on les traite ?
06:49 Mais ils restent dans la vie des autres ?
06:52 - Je finis juste sur une des causes.
06:55 - C'est neurologique, en fait. C'est vraiment dans le cerveau.
06:57 - Une des causes, c'est aussi le cannabis.
06:59 Alors, on sait que la consommation de cannabis multiplie par deux
07:03 le risque de faire de la schizophrénie.
07:06 Mais, attention, le problème, c'est qu'on peut quand même se poser la question
07:10 qui est la poule de l'œuf ?
07:11 Est-ce qu'ils ont pris du cannabis ?
07:13 Parce qu'ils commençaient à avoir des souffrances.
07:16 - Oui, ou alors est-ce qu'ils...
07:17 - Vous voyez ? Est-ce qu'ils ont commencé pour ça ?
07:19 Ou est-ce que c'est le cannabis qui a provoqué les troubles-là ?
07:24 Puisqu'on sait qu'il y a aussi un effet du cannabis sur les neurones.
07:27 Donc, voilà. Et votre question, c'était sur ce qu'on peut faire ?
07:30 - Non, mais est-ce qu'on les laisse dans la vie courante ?
07:32 Ou alors ils sont traités régulièrement ?
07:34 Ils peuvent être chez eux, mais il faut qu'ils aillent, je ne sais pas,
07:36 dans un cabinet médical.
07:37 - Est-ce que ça se soigne ?
07:38 - Est-ce qu'ils prennent des médicaments ? Est-ce que ça se soigne ?
07:40 - Alors, la difficulté, c'est de poser le bon diagnostic.
07:43 Après, comme je vous ai dit, il y a autant de schizophrénie
07:47 que de schizophrènes.
07:48 Donc, les médecins dont je vous parle, il y en a, enfin, médecins et autres.
07:53 Il y a d'autres métiers.
07:55 Tout va bien. Il y a des formes légères.
07:57 Et puis, il y a des formes où, comme vous le disiez,
07:59 ils sont en appartement thérapeutique, il faut qu'on s'occupe d'eux.
08:02 Alors, il y a eu de nets progrès dans les traitements,
08:06 ce qu'on appelle des antipsychotiques.
08:08 Ça fait partie des psychoses, la schizophrénie.
08:10 Il y a des traitements, avant, ils étaient totalement...
08:13 Quand on les traitait, ils étaient totalement apathiques,
08:15 ils prenaient du poids, etc.
08:17 Là, maintenant, on a des médicaments de plus en plus performants.
08:19 - Mais une forme, on va dire, légère, légère de schizophrénie,
08:22 ça se soigne avec des médicaments ?
08:24 - Voilà. Il faut les traiter, il faut les prendre en charge.
08:26 Tout dépend du degré, évidemment.
08:28 Mais ce qui est important, c'est quand tu commences à traiter,
08:30 ils sont efficaces, ces traitements.
08:33 Ils ne vont pas te donner une vie tout à fait normale,
08:35 mais ils sont efficaces.
08:37 Mais il faut les prendre régulièrement.
08:39 Et j'ai oublié de vous dire...
08:41 - À vie ? - Oui.
08:43 Il faut les prendre régulièrement.
08:45 Il faut aussi avoir une vie régulière, se lever à heure régulière,
08:47 avoir un bon sommeil, pas consommer de produits, évidemment.
08:49 Il y a tout de même 40 % de suicides, pour revenir à la souffrance.
08:52 Ils sont tellement en souffrance,
08:54 il y en a 40 % qui font des tentatives de suicide,
08:56 et il y en a 10 % qui réussissent.
08:59 Et notamment, dans les hallucinations, dans les délires,
09:02 certains pensent avoir des pouvoirs surnaturels,
09:04 genre "je vole",
09:06 et ils se jettent du 10e étage.
09:08 Donc il y a vraiment des formes très variées.
09:12 Mais tout ça, pour répondre à la question de début,
09:14 ce n'est pas un dédoublement de la personnalité,
09:17 mais vraiment autre chose,
09:19 une déconnexion totale et avec des souffrances.
09:21 C'est une des maladies dans laquelle les patients souffrent le plus,
09:24 et leur entourage.
09:26 - Oui, ce n'est pas que ça.
09:28 C'est vrai que dans la vision populaire,
09:30 on se dit "oui, il y a un jour comme ça, il a l'air normal,
09:32 et puis un autre jour, il est le deuxième, l'autre".
09:34 - Ça, c'est plus bipolais.
09:36 - C'est plus compliqué que ça, en fait.
09:38 Mais ça se souhaite.
09:40 - Il faut bien le prendre en charge.
09:42 - Merci beaucoup.
09:44 [Musique]

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