Jean-Michel Schaeffer (président de la filière des Volailles Françaises): "Ça fait des années qu'on vit des injonctions contradictoires qui ne se traduisent jamais en revenus"
Alors que la colère monte dans le monde agricole, BFMTV propose ce jeudi une émission spéciale LE FORUM BFMTV “Agriculteurs & écologie: la fracture” pour permettre le dialogue entre paysans et écologistes, mais aussi avec des acteurs de la grande distribution et des représentants de la majorité
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00:00 Aujourd'hui, les agriculteurs sont dehors parce qu'en fait, ça fait des années qu'on vit tous des injonctions contradictoires
00:06 et qui ne se traduisent jamais en revenus.
00:08 C'est qu'on a fait des efforts et des efforts et on a le sentiment qu'ils ne sont jamais valorisés,
00:15 jamais mis en avant et que quand on arrive au bout d'un cycle d'efforts, qu'on nous en redemande encore
00:20 et qu'à chaque fois, en termes de revenus, ça ne se traduit jamais en rien.
00:24 Et qu'on nous demande de courir un 100 mètres avec 50 kg de boulet au pied gauche et au pied droit.
00:30 Pourquoi je dis ça ? Parce qu'on nous demande souvent de respecter des normes qu'on ne demande pas à nos importations.
00:39 Donc aujourd'hui, la difficulté qu'on a, et les éleveurs aussi sur le terrain,
00:43 moi j'étais hier soir à Strasbourg avec les gars de chez nous, c'est que je prends mon secteur de la volaille.
00:49 Nous, on importe un poulet sur deux. Donc on n'est plus du tout autosuffisant.
00:55 Qu'est-ce qu'on vit ? On a vécu des accords de libre-échange qui font qu'aujourd'hui,
00:59 on importe un million de tonnes de poulet du Brésil, de Thaïlande et d'Ukraine.
01:04 Et moi, ça fait cinq ans que je me bats pour dire qu'il y en a marre de tous ces accords de libre-échange,
01:09 il faut qu'on rééquilibre les choses. Et plus j'en parle, pire ça devient.
01:13 Parce que depuis qu'on importe un million de tonnes, qu'est-ce qui se passe ?
01:16 On a eu un droit de douane zéro qui a été mis en place avec l'Ukraine,
01:20 alors qu'il faut bien sûr soutenir au niveau de sa population.
01:22 C'était une mesure de solidarité.
01:23 Mais là, on soutient un oligarque qui nous envoie et qui nous déverse du poulet à bas prix sur le marché européen.
01:31 Donc encore du volume d'importation. Hier, le commissaire au commerce dit
01:35 « Ah, on va peut-être boucler l'accord avec le Mercosur ». Donc encore 180 000 tonnes de poulet.
01:40 Et là, moi, éleveur, et ceux sur le terrain, ils disent « Mais punaise, nous, on a des normes, salmonelle, pas d'usage d'antibiotiques,
01:48 il faut qu'on gère super bien nos élevages. » C'est quoi le merci que nous envoie l'Union européenne ?
01:52 C'est qu'on continue à importer, à importer, à importer des poulets à bas prix.
01:56 Et aujourd'hui, on importe presque 30% des blancs de poulet qui ne viennent plus d'Europe.
02:01 Et ils ne sont tellement pas chers qu'on n'arrive plus à prendre la place pour nourrir notre population.
02:06 Parce qu'on cherche une fierté, on cherche à gagner notre vie et on veut aussi être fiers d'être paysans.
02:12 Et en même temps, autre injonction contradictoire, on nous a demandé de monter en gamme.
02:16 Nous, la filière française, on fait 20% de poulet plein air. Il n'y a aucun pays en Europe qui fait ça.
02:22 Et aujourd'hui, les bâtiments sont vides, de plus en plus vides, parce que le consommateur,
02:27 nous, on a les attentes du citoyen, mais nous, la réponse, elle ne peut pas venir du citoyen.
02:33 Elle vient du consommateur qui achète le produit. Et aujourd'hui, sur les produits montés en gamme, on n'en vend plus.
02:40 Et en plus, pour construire des poulaillers, on a une directive européenne qui va encore nous rajouter des normes,
02:47 ce qui est complètement scandaleux. Donc là, il faut absolument qu'on revienne en arrière.
02:50 Alors qu'on importe des poulets de sites d'élevage de 2 millions de poulets.
02:53 – Allez-y, vous liez et réagir, prenez la parole.
02:55 – Là, ça ne marche plus.