Anne Bourse reçoit Julien Bayou, député Europe Écologie Les Verts de Paris, sur le plateau des 4 Vérités.
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00:00 Bonjour Julien Bayou. Est-ce que les annonces faites par Gabriel Attal hier soir sont à la hauteur de la crise ?
00:09 Non, je pense qu'on est vraiment très très loin du compte. On parle de mesurettes, on parle de 15 euros pour chaque agriculteur,
00:16 quand l'endettement moyen c'est 200 000 euros.
00:18 Pourquoi vous dites 15 euros ?
00:19 15 euros c'est les recettes fiscales que le gouvernement dit qu'il va abandonner, ça représente 15 euros par mois pour chaque agriculteur.
00:26 Sur le gazoil non routier ?
00:27 Sur le gazoil par exemple, ils ont du mal à se payer, ils ont un endettement énorme.
00:31 Nous les écologistes nous proposons de changer radicalement de politique agricole, ce que ne fait pas ce gouvernement depuis 2017.
00:38 Quelque part il ignore l'agriculture, quand il multiplie les traités de libre-échange, celui avec la Nouvelle-Zélande vient de rentrer en vigueur,
00:46 en fait c'est une trahison de notre agriculture. Quand il le fait avec le Chili, c'est la même pour notre viticulture.
00:53 Est-ce que ces annonces se font au détriment de l'environnement ? Je pense notamment aux normes, aux recours etc. qui ont été annoncés hier.
01:00 Nous verrons, mais je ne pense pas du tout que les normes soient l'ennemi de l'agriculture.
01:04 En fait il n'y a pas d'agriculture sans écologie et nous les écologistes on sait qu'il n'y a pas d'écologie sans les agriculteurs.
01:10 Quand les maires écologistes sont aux manettes, c'est les meilleurs alliés de l'agriculture.
01:15 Je pense à Besançon où Anne Vignaud développe massivement le bio, les circuits courts dans les cantines.
01:22 Et bien évidemment pour l'agriculteur, les agriculteurs autour de Besançon, c'est un débouché pérenne.
01:27 Vous voyez, vous pouvez contractualiser pendant plusieurs années et ainsi pouvoir entreprendre et faire votre métier correctement.
01:34 Nous voulons une juste rémunération pour les agriculteurs. Quand nous sommes aux manettes, nous le faisons.
01:38 Les agriculteurs traditionnels ne sont pas ennemis avec l'environnement ? Pour vous, ce n'est pas deux camps irréconciliables ?
01:49 Non, certainement pas. Et d'ailleurs depuis une semaine, c'est frappant de voir les discussions fécondes entre agriculteurs, entre écologistes.
01:58 Et on se rend compte bien souvent d'ailleurs qu'il manque quelqu'un à la table. C'est la grande distribution.
02:03 Je pense par exemple au lait. On sait que les producteurs de lait sont pressurisés par l'actalis, qui leur impose un prix de 40 centimes le litre.
02:11 Nous consommateurs, les personnes qui nous regardent devant la télé, le payent 1,40€. Au milieu, il y a 1€ qui a été pris et aux agriculteurs.
02:19 Et aux consommateurs, par l'actalis. Ça en fait une immense fortune et le gouvernement n'a jamais, jamais, jamais cherché à encadrer.
02:26 Justement, il y a la loi EGalim. Hier, Gabriel Attal disait "faire respecter la loi partout, sans exception".
02:32 Est-ce que ce plus de contrôle, de sanctions, est-ce que ce coup de pression va dans le bon sens ?
02:37 On n'est pas sur un coup de pression. Faire respecter la loi, c'est le rôle du gouvernement. Ils sont au pouvoir depuis dix ans.
02:42 Emmanuel Macron était ministre de l'économie en 2014, il y a dix ans déjà.
02:46 Bruno Le Maire dit "je vais écrire pour qu'il respecte la loi". Mais enfin, de qui se moque-t-on ?
02:52 Ça veut dire que sur son bureau, il a un rapport avec le nom des enseignes qui ne respectent pas la loi, qui devraient mériter des amendes colossales,
02:59 et il va leur envoyer un petit mail ? Ça veut dire concrètement que depuis des années, le gouvernement tourne le dos aux agriculteurs.
03:07 Mais tourne le dos également aux consommateurs. On nous avait promis des contrôles de la DGCCRF, la Direction Générale de Répression des Fraudes.
03:15 Mais il y a moins d'agents qu'en 2007. Un quart de moins. Ils ont supprimé des agents. Comment voulez-vous qu'ils contrôlent alors qu'il y a moins d'agents ?
03:23 Vous dites qu'il faut appliquer les sanctions, la loi, aujourd'hui, contre tous ces industriels et la grande distribution.
03:28 Je dis que ce gouvernement ne le fait pas et ne le fera pas. Je dis que nous avons besoin…
03:32 Pourquoi vous dites qu'il ne le fera pas, là ?
03:33 Parce que c'est contraire à leur politique économique. Ils ont voulu faire croire qu'en améliorant les marges des distributeurs,
03:42 ça allait ruisseler sur les agriculteurs et le consommateur. Qui peut le croire ?
03:46 La vérité, c'est que quand Yara fait des profits, il le fait sur le dos des agriculteurs.
03:52 Quand Lactalis fait des profits, il le fait sur le dos des agriculteurs.
03:55 Quand Leclerc fait des profits, il le fait sur le dos des agriculteurs.
03:59 Ces manifestations ont aussi donné lieu à quelques débordements. Hier soir, un incendie au bureau des douanes à Nîmes,
04:05 incendie aussi à Narbonne, à la mutualité sociale agricole ou encore à Carcassonne.
04:10 Les forces de l'ordre n'interviennent pas. Est-ce que vous aussi vous dénoncez, comme beaucoup à gauche,
04:16 ce deux poids, deux mesures, en gros, les bons et les mauvais manifestants ?
04:19 Écoutez, je crois que tout le monde le constate. Moi, j'ai vu un ministre de l'Intérieur comme tétanisé par la situation,
04:25 un peu comme un lapin pris dans les phares d'une voiture. Et un gouvernement qui, au-delà, n'a même pas un mot pour les agents.
04:33 Je pense à la direction régionale, l'Adréal à Carcassonne, un bâtiment soufflé par un explosif.
04:38 Pas un mot pour les agents. Il a fallu que je monte à la tribune de l'Assemblée pour leur rendre hommage.
04:44 Là encore, on a vraiment un sentiment de fin de règne. Ce gouvernement qui ne sait pas faire face aux crises,
04:50 ne sait pas projeter une vision d'avenir et qui se retrouve tétanisé, sans savoir gérer.
04:56 Il faut réorienter notre politique pour qu'elle bénéficie aux agriculteurs.
05:01 Ça implique d'abolir certaines dettes, celle de la MESA, comme le propose Marie Toussaint, candidate aux élections européennes.
05:07 Ça implique de garantir un revenu. Ça implique de développer massivement les cantines bio, par exemple,
05:13 comme le font les maires écologistes à Lyon, à Strasbourg, ailleurs.
05:16 Parce qu'ainsi, vous offrez une nourriture de qualité aux enfants, les parents d'élèves sont ravis.
05:22 Et puis évidemment, un débouché pérenne pour les agriculteurs.
05:25 Revenons sur la loi immigration. Elle a été promulguée cette nuit par Emmanuel Macron.
05:29 La loi va s'appliquer pour vous. Vous tournez la page. Vous l'avez largement contestée.
05:34 Nous continuons de la contester. Je pense qu'il y a heureusement les aspects les plus terribles
05:40 qui ont été nettoyés par le Conseil constitutionnel, des aspects proprement anticonstitutionnels et inhumains
05:46 qui avaient été proposés par la droite. Il reste le texte du gouvernement qui est précarisant pour les plus vulnérables.
05:53 Je pense aux jeunes mineurs qui, à 18 ans, sont jetés à la rue.
05:59 Et au regard de toute la situation dont on a parlé, pour les agriculteurs, mais aussi pour les consommateurs,
06:04 beaucoup de Français ont du mal à se nourrir. Qui peut croire que c'est en jetant des gamins à la rue
06:11 que l'ensemble de la population va vivre mieux ?
06:14 Un an et demi pour cette loi qui ne règle rien, rien de la situation des salaires, de la situation du logement, par exemple.
06:24 Et pendant ce temps-là, ils ont laissé couver la crise agricole.
06:29 Il y a une loi d'orientation agricole qui a été reportée, reportée, reportée parce qu'il fallait parler de la loi asile et migration.
06:34 Le Conseil constitutionnel est beaucoup décrié, pointé du doigt par la droite, remis en cause.
06:41 Vous dénoncez, vous, cette remise en cause de la droite du Conseil constitutionnel ?
06:47 Oui, je crois qu'on a une droite qui a perdu toute boussole.
06:51 Ceux qui se réclament du gaullisme mettent en cause les institutions fondées par le général de Gaulle.
06:56 Moi, je pense qu'il faut passer à la sixième République.
06:59 C'est d'ailleurs pour ça que nous proposons un meeting le 5 février avec l'ensemble des forces de gauche, les écologistes.
07:04 Enfin, voir la droite républicaine critiquer le Conseil constitutionnel mis en place par de Gaulle,
07:09 oui, j'y vois, je crois qu'ils seront perdus pour la cause.
07:12 Vous dites que vous faites un meeting avec les forces de gauche, pourtant, aux européennes, la gauche part en ordre, dispersée.
07:20 Qu'est-ce qui ne marche pas pour l'instant du côté de la gauche ?
07:23 On voit pour l'instant dans les sondages, la gauche est largement derrière, alors qu'en 2019, Yannick Jadot avait fait quand même 13,5%.
07:32 Qu'est-ce qui ne marche pas pour l'instant dans cette campagne pour vous ?
07:34 Les élections européennes n'ont pas vraiment démarré.
07:36 Alors, il y aura plusieurs listes.
07:37 Moi, je leur souhaite plein succès à toutes.
07:39 Je veux qu'il y ait le plus de députés écologistes, bien sûr, socialistes, communistes, insoumis au Parlement européen,
07:45 parce que le Parlement européen, c'est un des échelons où on peut traiter les enjeux, notamment de la politique à rigueur commune.
07:51 Donc, il faut envoyer des forces de gauche écologistes en nombre.
07:54 Mais je ne veux pas que ça nous détende de l'objectif crucial de préparer la victoire en 2027.
08:00 Et donc, avec ce meeting à la Bourse du travail de Paris…
08:03 Vous dites en 2027, on part en ordre dispersé aux européennes, mais on continue le travail en commun.
08:09 Et vous pensez déjà à 2027 ?
08:10 Voilà, on peut travailler de manière séparée aux élections européennes et se retrouver pour préparer une coalition qui fasse du bien au pays en 2027.
08:17 C'est ça l'enjeu. On sent bien la fin de règne d'Emmanuel Macron qui n'a plus rien à proposer, qui gère mal les crises et qui, finalement, abîme le pays.
08:26 Les services publics, le logement, rien n'est fait, en particulier pour le climat.
08:30 Voilà ce que nous voulons proposer pour le pays en 2027.
08:32 Merci, Julien Bayou.
08:33 Merci à vous.