• il y a 10 mois
Après la polémique autour de l'école privée Stanislas déclenchée par la nouvelle ministre de l'Éducation nationale Amélie Oudéa-Castéra, Lilia Ben Hamouda, ancienne professeur des écoles, explique pourquoi le financement de l'école privée empêche la mixité sociale.

Nouvel épisode de Vox, notre format de tribune face caméra.

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Transcription
00:00 L'école privée sous contrat est financée à 73% par les fonds publics,
00:04 alors qu'elle n'est pas accessible à tous.
00:06 Donc on injecte de l'argent via les impôts et donc l'argent du contribuable
00:10 dans des établissements qui ne jouent pas la carte de la mixité
00:14 et qui aggravent les inégalités.
00:16 Je vous explique pourquoi le financement de l'enseignement privé sous contrat
00:20 nuit à la mixité scolaire.
00:27 Comment s'occuper quand on ne vit pas ensemble ?
00:30 On a l'exemple de la ministre en visite dans un collège du 94.
00:34 Elle voit des élèves qui portent des baskets
00:36 et elle les interpelle en leur demandant s'ils ont fait du sport.
00:39 Moi je remarque que trois d'entre vous ont des baskets.
00:43 Vous en avez profité un peu pour bouger dans la cour de récré ?
00:47 Aujourd'hui, tous les adolescents mettent des baskets,
00:50 mais pas dans tous les établissements.
00:52 Cette façon de vivre séparés, à côté, dans deux mondes différents
00:56 empêche de se comprendre et empêche de construire un futur commun.
00:59 C'est là l'enjeu de la mixité sociale.
01:02 Il y a différentes évaluations, dont PISA, l'évaluation internationale
01:06 dont tous les médias ont parlé au mois de décembre,
01:08 qui montre que l'école française,
01:10 au lieu de résorber les inégalités de naissance entre les élèves,
01:13 elle les aggrave.
01:14 C'est-à-dire que les résultats montraient
01:16 que les enfants de milieux populaires
01:19 étaient de plus en plus en difficulté au sein de l'école française,
01:22 alors que ceux de milieux favorisés, voire très favorisés,
01:25 faisaient partie des meilleurs élèves européens.
01:27 Si on prend l'exemple de Stanislas,
01:29 on se rend compte que cet établissement,
01:31 qui donc bénéficie de subventions obligatoires des collectivités,
01:35 bénéficie aussi de subventions non obligatoires de la région.
01:39 On apprend qu'ils ont demi-heure d'escalade,
01:41 qu'ils ont deux piscines, qu'ils ont 21 laboratoires.
01:44 Donc une multitude d'infrastructures qui permettent
01:48 de bonnes conditions d'apprentissage.
01:50 Et dans le même département, donc dans la même région,
01:53 on a le lycée Bergston dans le 19e, pour ne pas le citer,
01:57 qui a des fuites récurrentes d'eau
01:59 et qui a des plaques du plafond qui sont tombées dans une classe.
02:03 Donc on s'étonne tout de même d'un tel subventionnement
02:06 d'un établissement privé, au détriment des établissements publics.
02:11 Comme on a des élèves de milieux favorisés
02:13 dont les familles ont peur de la mise en échec dans le public, etc.,
02:18 ces élèves vont de plus en plus facilement
02:20 et de plus en plus souvent vers l'enseignement privé.
02:23 Ce qui fait qu'on se retrouve avec deux écoles.
02:26 L'école des riches, c'est assez caricatural,
02:28 et l'école des pauvres qui serait l'école publique.
02:31 La Cour des comptes relevait qu'en 2022,
02:33 ces 8 milliards d'euros qui ont été distribués
02:36 à l'enseignement privé sous contrat,
02:38 73% du financement de ces établissements,
02:41 jusqu'en juin 2019, l'école était obligatoire à partir de 6 ans.
02:46 Jean-Michel Blanquer, alors ministre de l'Éducation nationale,
02:49 a décidé que l'école deviendrait obligatoire à 3 ans.
02:52 C'est une décision qui a étonné un peu tout le monde
02:54 parce que 97% des élèves français allaient déjà à l'école obligatoire.
02:59 Mais en fait, c'était un énorme cadeau à l'enseignement privé sous contrat
03:02 puisque ça oblige dorénavant les collectivités
03:05 à aussi participer aux frais de scolarité des élèves de moins de 6 ans.
03:09 Toute la partie subvention obligatoire
03:11 qui donc est sur des fonds publics,
03:13 qui donc sort de la poche du contribuable,
03:15 n'est pas contrôlée.
03:16 Et c'est là le problème.
03:17 C'est la Cour des comptes qui l'a révélée l'année dernière, en juin dernier.
03:20 Il n'y a pas de contrôle de l'utilisation de ces fonds.
03:23 Et le vrai problème, il est là.
03:24 On ne peut pas dire que la Cour des comptes soit dirigée par des gauchistes.
03:28 Elle-même rappelait que dans les établissements privés,
03:31 il y avait trois fois moins de boursiers que dans les établissements publics.
03:34 Et Papendia, il semblait aller vers cette piste.
03:37 Il demandait des quotas de boursiers dans ses établissements,
03:40 dans les établissements privés sous contrat.
03:42 Ça peut être une solution.
03:44 Mais on sait très bien que si les établissements privés sous contrat
03:47 ont une obligation, ils vont aller choisir les meilleurs élèves.
03:50 Donc pas sûr que cette solution soit la plus pertinente.
03:53 Tous les établissements privés ne sont pas comme Stanislas.
03:56 Certains, mais ils sont rares, jouent le jeu de la mixité.
03:58 Et ça, il faut le relever.
03:59 En Bretagne, par exemple, où il y a énormément d'établissements privés,
04:03 beaucoup d'établissements jouent la carte de la mixité sociale.
04:06 Pour autant, il ne faut pas jeter l'opprobre sur les parents
04:09 qui font le choix de l'école privée.
04:12 Pour que les parents n'aient plus à faire ce choix,
04:14 il faut tout simplement investir dans l'école publique.
04:16 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]

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