La Sexy News de Flore Cherry : l'exhibitionnisme

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Transcript

00:00 Brigitte Laé, Sud Radio, c'est l'instant sexy news.

00:05 Eh bien nous accueillons Fleur Chéry, Sabine Prokhoris, pour notre sexy news du jour.

00:12 Et on va parler exhibitionnisme.

00:14 Exactement, je vais essayer de faire un parallèle entre le sujet du jour et les exhibitionnistes.

00:19 Vous me direz après ce que vous en pensez.

00:21 Donc vous vous demandez aujourd'hui s'il est possible de séparer l'oeuvre de l'artiste

00:25 et il y a une oeuvre que l'on ne peut pas séparer de l'artiste,

00:28 c'est celle de l'exhibitionniste qui fait de son corps le temps d'un instant.

00:31 Très bref, une oeuvre choquante, provoquante, destinée à susciter des émotions fortes chez son spectateur.

00:37 Ça peut être de la surprise, du dégoût, de l'admiration, de la peur ou de l'excitation.

00:41 On ne sait jamais vraiment.

00:42 Mais ce qui est sûr, c'est que ce n'est pas de l'indifférence.

00:45 Certains utilisent même l'exhibitionnisme pour des raisons militantes ou politiques.

00:49 On pense aux fémènes bien sûr, qui crivent sur leur poitrine des slogans pour défendre les droits des femmes.

00:55 Certains utilisent leur corps nu à des raisons artistiques.

00:58 On pense notamment aux oeuvres de la performeuse serbe Marina Abramovic,

01:03 connue pour s'inscrire dans le mouvement de l'art corporel,

01:06 celui qui dévoile son corps au symbolique, toujours très provocante.

01:10 Mais la personne nue n'est pas toujours la personne forte, la personne qui choque l'autre.

01:16 Je vais vous donner un exemple.

01:17 Si vous allez sur les sites pornographiques, il y a ces mots-clés.

01:20 C F N M, Closed Female Naked Male ou l'inverse.

01:24 C M N F, Closed Male Naked Female.

01:26 Grosso modo, des femmes nues parmi des hommes habillés ou l'inverse.

01:30 Et dans ce type de pornographie, les personnes nues sont les personnes qui sont soumises,

01:35 humiliées, à la merci des autres, habillées, qui détiennent le pouvoir.

01:39 Et qui font d'elles un petit peu ce qu'ils veulent.

01:41 Et c'est en ça que se mettre nue a quelque chose de très ambivalent.

01:45 C'est à la fois le privilège des rois,

01:47 qui peuvent déambuler dans leurs appartements tous nus auprès de leurs cours,

01:50 qui elles, est habillée.

01:51 Et le châtiment des marginaux, humiliés, que l'on dénudait naguère sur la place publique.

01:57 Ce qu'il y a donc de paradoxal chez l'exhibitionniste,

01:59 c'est qu'en dévoilant une partie de sa vulnérabilité, son sexe, ses seins ou ses fesses,

02:05 il fait de sa faiblesse une forme de pouvoir bref et momentané.

02:09 Quand c'est lui, bien sûr, qui choisit de l'imposer à l'autre.

02:12 Alors, tous les exhibitionnistes ne sont pas tout le temps dans une relation dominant-dominée.

02:17 Il y a la pratique, par exemple, festive du "boob flashing",

02:20 montrer ses seins en soulevant rapidement son t-shirt quand on est en festival ou en carnaval, pour s'amuser.

02:26 C'est une pratique que l'on retrouve beaucoup au carnaval de la Nouvelle Orléans, par exemple.

02:29 Et puis, il y a aussi la pratique du "dick rating", c'est-à-dire l'évaluation du pénis,

02:34 des hommes qui envoient des photos de leur sexe à des femmes consentantes, sous rémunération.

02:39 Et ces femmes, des "cam girls" ou des travailleuses du sexe, vont leur transmettre leurs commentaires

02:44 sur la taille, la longueur du prépuce, la couleur, les poils, etc., comme s'il s'agissait d'une œuvre d'art.

02:50 Bien sûr, mais cette fois-ci, c'est l'avis du spectateur, de la spectatrice en l'occurrence, qui est important,

02:55 et non pas l'œuvre en question.

02:57 Et c'est peut-être ça que nous apprend l'exhibitionniste,

03:00 c'est que le jeu de l'œuvre et de l'artiste n'est jamais vraiment clair.

03:03 On ne sait jamais si une œuvre d'art a une forme de pouvoir sur les gens,

03:06 ou au contraire, met l'artiste à nu, en vulnérabilité.

03:10 - Sabine Prokhoris, vous êtes très brillante, je vous laisse réagir à ce que dit Flore.

03:16 - C'est une chronique dense, vraiment !

03:18 Vous savez, dans la mythologie ancienne, il y avait un personnage qui était une femme, qui s'appelait Bobo,

03:23 qui, pour effrayer tout le monde, montrait son sexe.

03:26 Il y avait vraiment une fonction comme ça, d'effroi, lié à la vue des organes génitaux.

03:33 Pourquoi ? Pour plein de raisons, on ne va pas rentrer là-dedans.

03:36 C'est intéressant cette histoire de l'exhibitionniste,

03:38 parce que, évidemment, cette ambivalence est intéressante,

03:41 parce qu'on a exactement, dans le cas de l'exhibitionniste,

03:44 y compris l'exhibitionniste du métro.

03:47 Une fois, quand j'étais jeune, il y avait un type, j'étais à côté d'une copine,

03:50 c'était assez drôle, je n'avais rien vu, parce que je parlais avec elle,

03:52 elle me donne des coups de coude, elle me dit "regarde, regarde".

03:55 En fait, c'était un pauvre type qui ouvrait son imperméable et qui montrait son sexe assez flasque.

03:59 Donc, on a changé de place, on avait envie de rire, on ne s'est pas senti agressé sexuellement.

04:03 Mais ce qui est intéressant, effectivement, là, on sentait la vulnérabilité de cet homme.

04:08 C'est-à-dire, il voulait évidemment faire réagir, mais en fait, c'est une pulsion à but passif,

04:12 comme dirait Freud, c'est-à-dire, en fait, ce qu'il veut, c'est être regardé.

04:16 C'est l'inverse du voyeurisme, si vous voulez.

04:19 Pour se prouver qu'il a un sexe, en fait.

04:22 Oui, oui, être regardé, c'est-à-dire, il est dans une situation de passivité, en fait.

04:25 Il fait un acte, mais la pulsion, c'est son propre acte, donc c'est pulsionnel,

04:29 mais le but est passif, c'est-à-dire être vu.

04:32 Donc, c'est assez intéressant de voir tous ces jeux, où on voit bien qu'on ne peut jamais dire

04:36 "c'est ceci" ou "c'est cela", ça circule en réalité dans la sexualité.

04:40 Et en ce qui concerne l'art, l'artiste, le créateur, si vous voulez,

04:46 d'une certaine manière, ce n'est pas tant qu'il se mette à nu,

04:49 c'est qu'il utilise des choses extraordinairement intimes, parfois à son insu,

04:53 pour créer quelque chose, mais qui le dépasse, comme je disais tout à l'heure.

04:56 C'est-à-dire, c'est Proust qui disait "en fait, mon oeuvre, je ne pourrais pas dire mes lecteurs,

05:00 mais les propres lecteurs d'eux-mêmes, avec son livre,

05:03 parce que son livre, c'est comme ces vers grossissants que l'opticien tendait

05:07 aux clients qui venaient acheter des lunettes".

05:09 Alors, peut-être qu'il y a des vers qui ne conviennent pas.

05:11 C'est-à-dire, en fait, les oeuvres qui vous touchent,

05:13 c'est qu'elles éveillent en vous des choses que vous ignoriez, parfois même, de vous-même,

05:17 et donc ça élargit votre expérience, et vous entrez en relation

05:20 avec quelque chose de l'humain à travers cette création de l'artiste.

05:24 Donc, l'activité et la passivité, en fait, c'est toujours les deux à la fois.

05:27 En latin, quand j'étais jeune, j'ai mis mes vieilles traces de latin,

05:32 il y a des verbes qu'on appelle les verbes déponants.

05:34 C'est-à-dire, ce sont des verbes conjugués au passif,

05:37 qui sont des verbes actifs, mais de forme passive, du point de vue grammatical.

05:42 C'est vraiment intéressant, les verbes actifs de forme passive,

05:46 parce que ça résume à peu près tout ce que vous dites.

05:48 C'est-à-dire, actif-passif, pouvoir, réceptivité, tout ça, ça circule, en fait.

05:54 - Et oui, c'est la sexualité. - Mais c'est la sexualité !

05:58 - Exactement. Et de toute façon, c'est pas par hasard qu'on a envie de montrer son sein ou son pénis.

06:04 - Bien sûr ! - Ça parle toujours de nous, de toute façon.

06:07 - Bien sûr ! - Et la manière dont l'autre réagit ne parle que de lui, évidemment.

06:10 - Bien sûr, exactement. - Merci, Flor, merci beaucoup.

06:14 Je rappelle qu'on peut aller au Suite Paradise, ce club à Fantasme, 12 rue Marie Stuart, dans le 2ème.

06:22 Et vous êtes également sur union.fr.

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