Faut-il moins de démocratie pour plus d’efficacité, comme le suggère un sondage OpinionWay?

  • il y a 7 mois
Les Vraies Voix avec Philippe Bilger, Françoise Degois, Elisabeth Lévy et Bruno Cautrès, politologue, chercheur au CNRS et au CEVIPOF

Retrouvez Les Vraies Voix avec Cécile de Ménibus et Philippe David du lundi au vendredi de 17h à 20h sur #SudRadio.
---
Abonnez-vous pour plus de contenus : http://ow.ly/7FZy50G1rry

———————————————————————

▶️ Suivez le direct : https://dai.ly/x8jqxru
Retrouvez nos podcasts et articles : https://www.sudradio.fr/

———————————————————————

Nous suivre sur les réseaux sociaux

▪️ Facebook : https://www.facebook.com/SudRadioOfficiel
▪️ Instagram : https://www.instagram.com/sudradioofficiel/
▪️ Twitter : https://twitter.com/SudRadio
▪️ TikTok : https://www.tiktok.com/@sudradio?lang=fr
———————————————————————

☀️ Et pour plus de vidéos des Vraies Voix : https://youtube.com/playlist?list=PLaXVMKmPLMDRB7z8JrbG9LyNtTmhxaU-a

##LE_COUP_DE_PROJECTEUR_DES_VRAIES_VOIX-2024-02-13##
Transcript
00:00 Voici le coup de projecteur des vraies voix.
00:03 Cette démocratie est plus que défaillante.
00:06 Une question très très périlleuse à laquelle on va être confronté,
00:08 qui est celle de l'avenir de la démocratie.
00:10 Le général de Gaulle disait "En France, la cour suprême, c'est le peuple".
00:13 Je suis désolé, la démocratie c'est la constitution, c'est l'application de la constitution.
00:17 Ce sera un déni de démocratie.
00:18 Puisque quand le peuple exprime une volonté, cette volonté n'est pas respectée.
00:21 Tout l'enjeu demain, ce sera d'inventer une démocratie écologique.
00:25 Le sentiment qu'une démocratie en France, elle ne fonctionne pas bien, que ça tourne à vide.
00:29 La démocratie, ce n'est pas le pouvoir de la rue.
00:32 Est-ce que vous voulez de l'autorité ?
00:34 Les Français croient moins en la démocratie que leurs voisins européens.
00:37 Selon un sondage OpinionWay pour le Cevipof, le centre de recherche de Sciences Po,
00:42 68% des sondés estiment que la démocratie ne fonctionne pas bien.
00:45 Ils seraient même quasi 1 sur 4 à souhaiter que l'armée dirige le pays.
00:49 Ça veut dire quoi ?
00:50 Ça veut dire peut-être des questions qu'on se pose.
00:52 L'état de droit est-il en train de mourir de son impuissance ?
00:56 De mourir de son impuissance ?
00:57 Parlons vrai, les Français ont-ils besoin d'un bon coup de pied aux fesses à l'ancienne ?
01:01 Parlons vrai, seuls 24 pays, 24 pays, comme disait ma grand-mère,
01:06 24 pays sont considérés comme des démocraties pleines dans le monde, ça ne fait pas beaucoup.
01:10 L'humain est-il fait pour la démocratie ?
01:13 - Eh ben vous dites... - Oh oh oh, le question !
01:15 Je savais que ça vous plairait !
01:16 Bon, la vraie question qu'on pose aux auditeurs, c'est celle-ci.
01:19 Faut-il donc moins de démocratie pour plus d'efficacité, comme le suggère ce sondage OpinionWay ?
01:25 Pour l'instant, vous les auditeurs de Sud Radio sur le compte X, vous dites non à 84%.
01:29 Et donc nous avons Bruno Cotteres, politologue, chercheur au CNRS et au Cvivpos.
01:33 Merci d'être avec nous, Bruno Cotteres. Philippe Bilger ?
01:37 L'interrogation est sans flatterie, formulée par Sud Radio, est passionnante
01:42 et elle appellerait un débat d'une heure au moins.
01:45 Mais deux idées que j'ai la faiblesse de considérer comme relativement importantes.
01:52 La première, c'est que, bien sûr, même quand on songe au concept d'une démocratie totalement vigoureuse et vertébrée,
02:03 on ne peut s'empêcher, et je rejoins la majorité de nos auditeurs,
02:08 de considérer qu'elle n'arrivera jamais à mettre en œuvre une efficacité aussi absolue
02:16 que celle qu'un régime délié de tout attache démocratique se permettrait de faire.
02:23 Mais il ne faut pas le faire, il faut résister à la tentation.
02:28 Deuxième élément, et c'est le fait que, pour quelle raison, vous l'avez dit Frédéric,
02:34 les citoyens vont vers cette pente morose et d'une certaine manière, pour certains, très militaire,
02:42 c'est que simplement, moi je le crois, l'élite de notre pays, il faut le dire clairement,
02:49 notre régime actuel, notre président de la République, et peut-être n'est-il pas le seul,
02:55 nous ont fait perdre le goût et l'exemple de ce qu'est une véritable démocratie.
03:01 - François Sdegoye ?
03:02 - Je crois qu'il ne faut pas voir, mais peut-être que Bruno verra autre chose,
03:06 mais dans le sondage, il ne faut pas voir un désir secret des Français à l'autoritarisme
03:11 et après à toutes les théories un peu vaseuses et fumeuses sur le retour du roi, etc.
03:15 Je pense qu'il ne faut voir qu'une immense déception en réalité.
03:18 Nous sommes un vieux peuple démocratique et nous avons besoin qu'elle respire.
03:24 Moi je pense qu'il faut la démocratie en mieux, nous avons besoin que la démocratie respire.
03:30 Nous avons besoin de changer, pour moi, de République, pas forcément sur l'exemple de l'extrême-gauche,
03:38 mais nous devons changer, nous devons faire respirer, nous devons absolument faire en sorte
03:43 que les citoyens participent beaucoup plus.
03:45 Quand vous voyez le désamour pour l'Europe, et Bruno sera probablement d'accord là-dessus,
03:49 sur toutes les études qu'on regarde, ce qui crée le problème et le schisme,
03:53 c'est la façon dont ça fonctionne de manière perçue comme antidémocratique.
03:57 Je ne crois pas du tout que les Français aient une passion pour les régimes dictatoriaux,
04:01 je pense que les Français expriment une grande déception romantique et concrète.
04:05 Elisabeth Lévy, 23% des Français sont pour un régime militaire, si on peut rajouter.
04:09 C'est parce qu'ils croient que ce sera Cécile de Ménigus, colonel de gendarmerie, leur dictateur.
04:14 C'est pour ça. Non, trois choses. La première, c'est la crise de la démocratie représentative,
04:19 qui fait que, et ça n'a pas commencé avec Emmanuel Macron, par exemple,
04:23 que ce soit l'Europe, que ce soit l'immigration ou d'autres sujets,
04:28 ce qui est mené, comme le dit Marcel Gaucher, ce sont des politiques antidémocratiques.
04:32 Alors, les gens votent, hein ! Donc, s'il vous plaît, il y a aussi cela.
04:35 Deuxièmement, il y a aussi, ce n'est pas que les élites et le peuple qui est...
04:39 les élites et les gouvernants qui sont critiquables, je pense que nous, nous sommes beaucoup...
04:45 Les gens se demandent toute la journée, surtout en France, drogués à l'argent public,
04:49 ce que leur pays va faire pour eux, mais quand il s'agit de se demander
04:52 ce qu'ils vont faire pour leur pays, excusez-moi, il y a beaucoup moins d'enthousiasme.
04:55 Et troisièmement, et je pense que c'est probablement au quotidien
04:59 un des facteurs les plus importants, c'est l'impuissance.
05:02 Mais l'impuissance, elle n'est pas liée à la démocratie,
05:04 elle n'est pas liée au caractère démocratique du régime.
05:07 L'impuissance, elle est liée à la lâcheté des dirigeants, au fait qu'ils ont délégué,
05:11 au fait qu'ils n'osent pas aller contre les médias, etc.
05:14 Donc, la question peut-être sur laquelle j'ai vraiment...
05:18 C'est la crise de la démocratie représentative, c'est-à-dire,
05:22 on n'arrête pas à avoir des gouvernants qui, dans le fond,
05:26 aient l'adhésion d'une population qui les a élus, ce qui est quand même un petit problème.
05:30 - Bon, Bruno Cotteret, c'est à vous. Vous avez entendu tout cela.
05:33 Est-ce que les chiffres vont dans le sens de la réaction autour de la table ?
05:38 - Globalement, oui. Je partage l'idée de François Deloye qui est...
05:42 Effectivement, ça ne veut pas dire que les Français,
05:44 ils voudraient avoir quelqu'un en uniforme qui dirigerait l'État.
05:49 Ils l'ont déjà eu au début de la Ve République.
05:52 Et d'ailleurs, c'était un tout autre contexte.
05:55 Par contre, c'est vrai qu'en creux, c'est bien cette histoire que racontent nos données.
05:59 C'est l'histoire d'une immense déception sur la promesse démocratique.
06:03 Philippe Billiard a raison. Au fond, l'horizon démocratique,
06:07 c'est presque un horizon infini. On n'en aura jamais fini, de la démocratie.
06:10 On ne pourra jamais dire un jour, ça y est, c'est fini.
06:13 C'est complètement démocratique parce que, justement,
06:15 le cœur de la démocratie, c'est de repousser les limites de la démocratie sans cesse.
06:20 Mais c'est vrai qu'en France, il y a une déception très claire
06:23 sur le fonctionnement de la démocratie.
06:25 Le sentiment, d'abord, que les institutions ne renvoient pas bien la balle,
06:30 que les gens font confiance au moment du vote.
06:34 Et puis derrière, ils sont déçus que le système fait trop la parbelle
06:40 pour ceux qui sont nés du bon côté.
06:43 C'est très présent dans nos données.
06:45 Il y a une claire, claire aspiration à l'efficacité.
06:49 Ça ne veut pas dire pour autant que l'efficacité, c'est aller vite,
06:52 courir dans tous les sens, etc.
06:54 Non, l'efficacité, c'est beaucoup plus l'idée de dire,
06:57 je veux voir un jour que concrètement, on m'avait promis que ma situation allait changer.
07:02 Elle a bien changé.
07:04 On m'a dit que j'allais pouvoir avoir des promotions,
07:07 une vie en réalisant tous mes projets.
07:11 Et donc, le système est perçu comme un système qui ne tient pas à ses promesses.
07:15 Et je dirais que si je devais résumer par une image,
07:17 l'image qui me vient, c'est comme si beaucoup avaient le sentiment
07:20 qu'ils sont des joueurs assez fair-play,
07:23 mais qui jouent sur un terrain qui, lui, n'est pas fair-play.
07:26 - Philippe Bidje.
07:27 - Bruno, j'ai écouté Elisabeth tout à l'heure sur son deuxième point.
07:33 Elle indiquait que la démocratie telle qu'elle est aujourd'hui permet d'agir.
07:38 Est-ce que, moi, je suis un peu en désaccord avec ce point de vue,
07:43 est-ce qu'au fond, on ne pourrait pas définir la démocratie aujourd'hui,
07:49 même dans sa définition la plus âpre,
07:52 comme précisément le régime où, pour réussir, tout n'est pas permis ?
07:58 Et c'est de là que vient la déception.
08:00 Et je mets un point d'interrogation.
08:03 - Oui, bien sûr, il faut toujours rappeler qu'effectivement,
08:06 le cœur de la démocratie représentative, c'est qu'il y a des institutions,
08:10 donc il y a des règles du jeu.
08:11 Tout n'est pas permis.
08:12 Effectivement, il y a des règles du jeu.
08:14 Et c'est vrai qu'il y a, de ce point de vue-là, un paradoxe.
08:18 On est aujourd'hui, pas seulement en France,
08:20 dans des démocraties qui offrent de multiples occasions de s'exprimer.
08:23 La liberté de ton que vous rencontrez dans l'espace médiatique aujourd'hui
08:27 est sans commune mesure avec celle des décennies précédentes,
08:30 bien évidemment.
08:32 Il est à la portée de n'importe qui aujourd'hui
08:35 de trouver beaucoup d'informations, une information pluraliste,
08:38 de pouvoir s'exprimer.
08:40 Il y a eu une véritable progression de la liberté d'expression
08:42 dans nos démocraties au cours des dernières décennies.
08:46 Mais c'est vrai qu'il y a une demande,
08:49 qui est que cette parole, cette prise de parole,
08:52 elle soit davantage écoutée par le pouvoir politique
08:55 qui lui donne le sentiment d'être un peu enfermé dans ses certitudes
08:59 et enfermé, presque bunkerisé, dans un univers
09:03 qui apparaît de plus en plus, aux yeux de ceux que nous nous enquêtons,
09:06 comme une sorte de bulle qui s'est détachée un jour
09:09 et puis qui est à part.
09:11 Bon, alors, Françoise de Gauvre veut intervenir.
09:13 Rappelons que dans cette étude,
09:15 il est question de méfiance, de lassitude et de morosité.
09:18 C'est l'état d'esprit général des Français
09:20 qui suscite cette réaction, Françoise.
09:22 Oui, mais parce que je pense que d'abord, il y a une grande trahison.
09:24 Alors, je ne sais pas si vous remontez jusqu'à ça.
09:26 Je pense qu'il y a une fracture monstrueuse avec 2005,
09:29 le référendum qui est chassé par les Français très largement
09:32 et qui rentre par la fenêtre, évidemment, sur le tapis vert,
09:36 ai-je envie de dire.
09:37 Je pense qu'on n'a pas mesuré à quel point cet événement-là
09:40 a été facteur d'une fracture, d'une méfiance
09:44 et d'un désamour de la démocratie.
09:46 On en parle encore.
09:47 Encore !
09:48 On est 19 ans plus tard.
09:50 Ce référendum, ça a été le moment politique en France
09:53 et cette réalité-là.
09:56 Je crois aussi que peut-être, mais ça, je fais de la politique,
10:00 tout ce qui s'est passé avec les gilets jaunes,
10:02 tout ce qui s'est passé également avec le fait que
10:05 les électeurs ont été tordus moralement dans leur manière de voter.
10:09 2017 et 2022, les démocrates, comme moi,
10:14 ils ne supportent pas ce gouvernement,
10:16 ils ne supportent pas cette politique,
10:18 mais ils supportent encore moins Marine Le Pen.
10:20 Et donc, quand vous êtes tordus, contre vos convictions,
10:23 quand vous avez un choix corneillé à faire
10:25 et qu'entre deux mots, vous choisissez le moindre,
10:27 est-ce qu'on ne retrouve pas les conditions exceptionnelles
10:30 de l'élection et de la réélection d'Emmanuel Macron
10:32 dans cette méfiance, Bruno ?
10:33 Ils supportent moins Marine Le Pen, c'est quand même vite dit.
10:35 C'est parce qu'elles nous disent les sondages.
10:37 Non, c'est parce que je dis, en tout cas, 2017 et 2022,
10:39 c'est ce qui s'est passé.
10:40 Jésus-Lecoq au 13 vous répond, Bruno Cotteres.
10:43 Alors, il faut rappeler quand même que cette méfiance,
10:45 elle est assez structurelle sous une longue période.
10:47 D'accord.
10:48 Quand on étudie en longue durée,
10:51 on voit qu'il y a quelque chose qui s'est passé dans le pays,
10:54 mettons, entre le milieu, la fin des années 80
10:57 et le début des années 90.
10:59 Voilà, un ensemble d'événements.
11:01 Il y a beaucoup de choses qui se sont passées à ce moment-là.
11:04 Les Françaises, les Français découvrent d'abord
11:06 les réalités de l'intégration économique globale de la France.
11:09 Ce qu'on commence à appeler la mondialisation,
11:11 un mot que personne n'utilisait dans les années 80, 70, 80,
11:15 la mondialisation.
11:17 À part Alain Minc qui disait qu'elle sourit heureuse.
11:20 C'est un peu plus tard.
11:21 Ils vont voter en faveur du traité de Maastricht,
11:24 n'oublions jamais, par une très courte majorité, 51%.
11:28 En faveur du traité.
11:30 Donc déjà, on voit qu'il y a des doutes.
11:32 Et puis là, le sentiment qui se met à se développer,
11:36 qui est d'une politique qui ne parle pas au pays,
11:40 qui est partie dans une autre dimension, au fond.
11:44 Et c'est vrai que ça ne date pas d'Emmanuel Macron.
11:47 Non, je n'ai pas dit ça, mais il y a des facteurs accélérants.
11:50 2005, c'est accélérant.
11:52 C'est tout aussi vrai qu'alors que c'était le cœur de métier
11:54 d'Emmanuel Macron au début,
11:57 il n'y est pas arrivé.
11:58 La restauration de la confiance dans la politique.
12:01 Et sur l'autre aspect de notre enquête,
12:04 qui est la tonalité qu'on a donnée à notre papier
12:06 dans le journal Le Monde,
12:07 et aussi la promesse au fond d'émancipation,
12:10 qui n'est pas perçue comme ayant été
12:12 fondamentalement tenue par Emmanuel Macron.
12:15 - Oui, et l'avenir n'est visiblement pas prometteur.
12:19 Merci beaucoup, en tout cas, Bruno Cotteres,
12:21 d'avoir été avec nous.
12:23 Chercheurs au CNRS et au Cvipof,
12:26 merci beaucoup, en tout cas, merci Philippe Bilger.
12:28 Merci François Zergoy, merci Élisée de Téville.
12:31 - Donc on va faire une dictature militaire.
12:33 - Non, pas plus.
12:34 - C'est déjà fini.
12:35 - Moi je me réjouirais bien, vous ne la voyez pas,
12:38 au balcon de l'Élysée, Cécile de Ménibus.
12:40 - Évita Ménibus !
12:41 - Cécile de Ménibus, avec ses voluptes,
12:43 avec le collier, là, comme ça.
12:45 - Mais nos grands-parents nous ont dit
12:47 il nous faudrait une bonne guerre.
12:48 Moi je me souviens, on était petits déjà, il y avait des amis.
12:50 - Il ne faut pas confondre l'autorité et la dictature, quand même.
12:53 - Heureusement !
12:54 - Merci Madame.
12:55 - Il n'y en a pas.
12:56 - Comment ?
12:57 - Les amis, les amis, à votre avis, à votre avis...

Recommandée