• il y a 9 mois
L’éclairage engagé de Catherine Ladousse, coprésidente de la commission parité du Haut Conseil à l'Égalité entre les femmes et les hommes et cofondatrice du Cercle InterL, réseau qui depuis plus de vingt ans se mobilise pour la mixité dans les secteurs scientifiques et technologiques. Cette ancienne directrice de la communication chez IBM revient notamment sur la place des femmes dans l’informatique.

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Transcription
00:00 Générique
00:02 ...
00:04 -Bonjour, Catherine Hadous. -Bonjour, Marie-Claire.
00:07 -Merci d'avoir accepté d'être notre grand témoin du jour.
00:10 Vous êtes particulièrement bien placée pour tenir ce rôle
00:14 parce que votre regard sur la situation des femmes
00:17 dans l'économie a été nourri, finalement,
00:19 à la fois de beaucoup d'expériences personnelles,
00:22 professionnelles, et puis, également,
00:25 vous vous êtes engagée très tôt pour la parité,
00:28 pour l'égalité entre les hommes et les femmes,
00:30 et aujourd'hui, votre rôle au sein du Haut Conseil
00:33 pour l'égalité entre les femmes et les hommes
00:36 vous permet d'avoir une observation plus affinée.
00:39 Donc, pour résumer en quelques mots,
00:41 vous avez démarré votre carrière dans le monde financier,
00:44 pré-école, American Express,
00:46 et vous êtes arrivée, rapidement, ensuite, chez IBM.
00:49 Vous êtes rentrée dans le monde de la tech.
00:52 Quand vous êtes arrivée, vous m'avez dit
00:54 que vous aviez été marquée par le fait
00:57 que vous étiez une prominence marquée des hommes.
00:59 Comme, en même temps, la direction générale d'IBM France
01:03 avait décidé, consciente du sujet, de lutter contre ces inégalités,
01:06 vous avez été amenée à réfléchir, à travailler,
01:09 à proposer ce qui a abouti à la création du cercle intérieur.
01:13 Expliquez-nous, on reviendra sur le sujet,
01:15 comment ça s'est passé
01:17 et comment vous avez fait bouger, à ce moment-là,
01:20 les lignes avec ce cercle.
01:21 -C'était une prise de conscience,
01:23 de la part de quelques femmes dirigeantes
01:26 dans ces grandes entreprises du secteur énergétique.
01:29 L'avantage, c'est que les écarts étaient tellement importants,
01:32 l'invisibilité des femmes était tellement forte
01:35 que ces entreprises, notamment les américaines,
01:38 il faut rendre hommage aux entreprises internationales,
01:41 plutôt que les entreprises françaises,
01:43 se sont dit qu'il fallait trouver des solutions pratiques.
01:47 Le meilleur moyen, c'est d'interroger les salariés.
01:50 Du coup, nous avons créé ce premier réseau.
01:52 On était pionnière, à l'époque,
01:54 puisqu'on a créé le réseau d'IBM
01:56 avec d'autres collègues en 1999.
02:00 Et le cercle intérieur, en 2001,
02:02 il y avait quatre entreprises à l'origine,
02:04 donc IBM, General Electric, France Télécom,
02:07 à l'époque, ça s'appelait encore France Télécom,
02:10 et Schaumberger. L'idée, c'était de partager nos bonnes pratiques.
02:14 C'était une aventure collective,
02:16 de façon très pragmatique et très concrète.
02:18 Cette interrogation de dire pourquoi on n'arrive pas
02:22 à recruter des femmes
02:23 et comment faire pour les retenir.
02:25 Et ça fait 22 ans que l'aventure continue.
02:28 -Justement, comme ça fait plus de 20 ans
02:30 et qu'il y a vraiment eu un développement très marqué,
02:34 avec d'ailleurs des évolutions au sein du cercle intérieur,
02:37 de la composition et de ce que c'est devenu par la suite,
02:40 aujourd'hui, 20 ans après, votre regard,
02:43 puisque là, vous avez pu voir ce qui avait bougé
02:45 ou pas bougé, ou pas suffisamment bougé,
02:48 et puis finalement, dans le sujet spécifique de la tech,
02:51 vous avez toujours travaillé dans ce thème-là,
02:54 ça va faire aussi le lien avec votre activité actuelle,
02:57 parce qu'au sein du Haut Conseil,
02:59 vous avez également participé récemment, justement,
03:02 à un rapport qui est sur les femmes et le numérique,
03:05 et vous avez parlé de visibilité,
03:07 je crois que vous allez nous dire que c'est pas tout à fait ça.
03:11 Commençons par le début, votre propre regard
03:13 sur l'évolution des femmes dans ce monde-là.
03:16 -Si on regarde les chiffres, on peut être un peu désespéré,
03:20 il n'y a que 29 % de femmes dans le numérique,
03:22 et encore dans les 29 %, on compte les fonctions,
03:25 comme celles que j'ai occupées, les RH,
03:27 donc il n'y a que 16 % de femmes dans les métiers techniques,
03:30 donc il n'y a que 26 % de femmes qui sont diplômées d'ingénieur.
03:34 Tous ces chiffres pourraient, en effet, nous déprimer.
03:37 En même temps, je dirais que 20 ans après,
03:39 ce qui est positif, c'est qu'il y a de plus en plus
03:42 d'entreprises qui s'engagent, que le sujet,
03:45 on n'est plus obligé de démontrer, grâce à toutes les études,
03:48 que la mixité est absolument indispensable.
03:51 Donc ça, c'est déjà une étape.
03:54 Après, la deuxième étape, et puis le deuxième défi,
03:58 c'est comment faire en sorte de pouvoir attirer
04:01 les jeunes filles.
04:03 Pourquoi est-ce que, dans les années 60,
04:05 il y avait énormément de femmes qui étaient dans l'informatique ?
04:08 Pourquoi, aujourd'hui, en 2024, on se retrouve avec si peu de femmes,
04:12 alors qu'il y a des possibilités de croissance
04:15 avec des centaines de milliers de postes ?
04:18 C'est vrai qu'il y a cette interrogation,
04:20 et c'est vrai qu'aujourd'hui, il y a des solutions,
04:23 des propositions, une prise de conscience de l'industrie.
04:26 Dans deux jours, il y aura les assises
04:28 des métiers du numérique, la Fondation numérique.
04:31 C'est un bon signe. Après, le combat continue.
04:34 -Le combat continue. D'ailleurs, quand on lit,
04:37 encore une fois, le Conseil, pour y venir,
04:40 a fait des travaux sur les sujets de sexisme, etc.
04:43 C'est pas le thème de notre émission,
04:46 puisque nous, on est vraiment dans la partie des femmes
04:49 dans le monde économique. Mais vous avez également fait
04:52 ce rapport sur les femmes et le numérique,
04:54 et là, on le voit sous deux angles,
04:56 mais l'angle qui est leur présence, comme vous venez de le dire,
05:00 dans ces métiers, dans les formations, au départ, etc.,
05:03 est très net. Mais, finalement,
05:05 à chaque fois, c'est toujours très surprenant,
05:08 parce qu'on fait ce constat, on le partage,
05:10 le constat qu'en fait, la prise de conscience est totale,
05:13 qu'on a des grandes initiatives, qu'on arrête pas de mesurer,
05:17 qu'on a rendu concrets les éléments en question.
05:19 Pourquoi y arrive-t-on, malgré tout, pas suffisamment vite ?
05:23 -C'est-à-dire qu'en fait, il faut se dire
05:26 qu'il n'y a pas de fatalité pour que les femmes
05:28 ne s'intéressent pas à la tech. J'aime beaucoup
05:31 cette citation d'Isabelle Collet, spécialiste du numérique,
05:34 qui dit qu'il faut démasculiniser le secteur.
05:37 Qu'est-ce qui s'est passé ?
05:39 C'est pas que les femmes ont reculé,
05:41 mais les hommes, et peut-être IBM y est pour quelque chose,
05:44 se sont engouffrés dans ces métiers,
05:46 qui sont devenus de pouvoirs.
05:48 -Très rémunérateurs. -Très rémunérateurs.
05:50 A partir de là, les femmes, évidemment,
05:53 se sont senties presque exclues, et ça, c'est important.
05:56 Donc on voit qu'il y a énormément de sexisme
05:59 dans ces métiers-là. Ce qui fait que, évidemment,
06:02 les solutions, c'est de créer, évidemment,
06:04 à la fois un environnement qui soit plus propice
06:07 et plus bienveillant pour les femmes,
06:09 et surtout, il faut partir de l'éducation.
06:12 Si vous allez dans d'autres pays,
06:14 il n'y a pas de fatalité.
06:15 En France, certes, dans les pays occidentaux,
06:18 on a ce problème-là, et on a du mal à aller plus vite,
06:21 malgré une politique forte,
06:23 malgré l'engagement des entreprises,
06:25 des associations qui, au quotidien, se battent
06:28 pour pouvoir, comme le cercle interne,
06:30 pour pouvoir expliquer l'intérêt de ces métiers.
06:33 Mais, en fait, dans d'autres pays,
06:35 avec une politique volontariste, et parfois, d'ailleurs,
06:39 ce n'est pas toujours pour des bonnes raisons.
06:41 Au Moyen-Orient, on retrouve beaucoup de femmes
06:44 dans ces métiers, parce qu'elles peuvent le faire de la maison.
06:47 Dans d'autres pays, la Chine, j'ai eu l'occasion
06:50 de travailler au pays d'origine chinoise,
06:52 et j'ai vu qu'il y avait beaucoup de femmes,
06:55 et pas simplement dans les usines, dans les laboratoires,
06:58 et à la tête de l'entreprise. -C'est important,
07:01 parce que, quand je disais en introduction
07:04 que le futur est écrit, on l'écrit en permanence,
07:07 et que l'intelligence artificielle va avoir un rôle important.
07:10 Il y a un autre sujet que vous allez bientôt traiter,
07:13 si ce n'est pas de trahir un secret,
07:15 au niveau du Haut Conseil, c'est le rapport des femmes de l'argent.
07:19 Ca sera l'un de vos prochains sujets.
07:21 -En effet, vous savez, Haut Conseil,
07:23 peut-être juste pour repositionner le rôle du Haut Conseil
07:27 à l'égalité, c'est un peu un rôle de la foi des Guyons et de Vigie.
07:31 C'est la possibilité d'approfondir un sujet,
07:33 de revenir avec des solutions concrètes
07:36 proposées au gouvernement pour atteindre l'égalité.
07:39 On a plusieurs commissions, on travaille sur différents sujets,
07:42 depuis la violence, la santé, l'international.
07:45 En ce qui concerne la commission parité,
07:47 on va d'abord s'attaquer au sport,
07:49 c'est l'actualité des Jeux olympiques.
07:52 On va travailler sur la parité dans le sport.
07:54 Il y a énormément de choses à faire.
07:56 Après, ce sera les femmes et la finance.
07:59 On démarrera le travail dans quelques mois.
08:01 Avec une vision à 360 degrés, c'est ça qui est intéressant,
08:05 c'est la relation à la fois des femmes avec la finance.
08:08 -Bien écoutée, Catherine.
08:10 Avec ça, je vais pouvoir vous réinviter la prochaine fois
08:13 pour parler de ce rapport-là,
08:15 qui sera certainement très éclairant.
08:18 Merci encore. -Merci beaucoup.
08:20 -Et bonne continuation de vos missions.
08:22 -Merci, Marie-Claire.

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