L'intelligence artificielle remplacera-t-elle la philosophie ? En toute vérité avec Raphaël Enthoven

  • il y a 7 mois
Avec Raphaël Enthoven, philosophe et auteur de "L'esprit artificiel" (Édition L'observatoire - 2024).

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##EN_TOUTE_VERITE-2024-02-25##

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00:00 En toute vérité, 11h30 sur Sud Radio, Alexandre Devecchio.
00:05 En toute vérité, chaque dimanche entre 11h et midi sur Sud Radio, sécurité, économie numérique, immigration, écologie.
00:11 Pendant une heure chaque semaine, nous débattons sans tabou des grands enjeux pour la France d'aujourd'hui et de demain.
00:16 Et ce dimanche, nous avons le plaisir de recevoir le philosophe Raphaël Enthoven.
00:20 Il nous parlera notamment de sa pièce consacrée à un autre grand philosophe, Albert Camus.
00:27 Il joue au théâtre de la Seine-Libre déjà depuis plusieurs mois et s'est prolongé tout le mois de février, peut-être encore plus longtemps.
00:36 Donc allez-y. Il nous parlera également et surtout de son nouveau livre, « L'esprit artificiel », qui vient de paraître aux éditions de l'Observatoire.
00:44 L'intelligence artificielle va probablement transformer notre monde et nos existences en profondeur,
00:50 au point de s'emparer de presque tous les champs de compétences, de la médecine au journalisme en passant par le droit.
00:56 « Presque tous, mais peut-être pas la philosophie », nous dit Raphaël Enthoven, persuadé que l'intelligence artificielle ne remplacera pas l'esprit humain.
01:05 L'intelligence artificielle va-t-elle remplacer l'homme ? Demain, « Blade Runner » ou « 2001, l'Odyssée de l'espace » seront-ils toujours des films de science-fiction ?
01:12 Chad J. Petty pourra-t-il rivaliser un jour avec Platon ou avec Nietzsche ?
01:16 L'avènement de l'intelligence artificielle va-t-elle au contraire consacrer le règne des philosophes ?
01:21 Tout de suite, les réponses de Raphaël Enthoven, en toute vérité.
01:24 En toute vérité, sur Sud Radio, Alexandre de Vecchio.
01:29 Raphaël Enthoven, bonjour.
01:31 Bonjour Alexandre, merci de ce préambulant.
01:33 Merci à vous.
01:34 Ravi d'être ici.
01:35 Ravi également de vous recevoir pour parler de ce nouveau livre, « L'esprit artificiel »,
01:41 « Une machine ne sera jamais philosophe », c'est aux éditions de l'Observatoire.
01:48 On va approfondir le fond du sujet, qui est effectivement la différence entre l'esprit humain, entre la philosophie et la machine.
01:58 Mais peut-être une question plus générale malgré tout sur l'intelligence artificielle,
02:02 même si ce n'est pas le cœur de votre livre, ça va être un bouleversement extraordinaire.
02:09 Est-ce que ça vous inquiète ?
02:11 Oui, d'une certaine manière.
02:13 Ça vous fascine, ça vous intéresse ?
02:14 Non mais à tous égards.
02:16 Oui, ça me fascine et ça m'inquiète bien sûr.
02:18 C'est-à-dire qu'il y a des métiers qui vont probablement disparaître,
02:23 d'autres qui vont être dopés par l'assistance de cet outil génial.
02:27 Beaucoup de choses vont changer certainement.
02:31 C'est certain.
02:32 Ça ne change rien au fond de ce que je raconte.
02:35 C'est-à-dire qu'à mon avis, la question de la philosophie, l'exercice de la philosophie
02:39 est durablement hermétique à l'intelligence artificielle ou au bénéfice de l'intelligence artificielle.
02:44 Mais pour le reste, il est certain qu'on est en présence d'une deuxième révolution numérique.
02:49 Oui, vous dites que ça ne change rien pour la philosophie.
02:53 En fait, je réfléchissais en vous écoutant,
02:55 mais je me disais que si vraiment on utilisait tous l'intelligence artificielle au quotidien
03:00 au point de ne plus réfléchir à rien,
03:04 il est possible que l'abêtissement général fasse que la philosophie soit touchée aussi.
03:08 Mais vous savez, le phénomène que vous décrivez, il existe déjà.
03:11 Il existe déjà.
03:12 Les bibliothèques de photos nous dispensent de nous souvenir des événements eux-mêmes.
03:18 L'atrophie du muscle mémoriel sous l'effet des bibliothèques de photos,
03:22 il a été prédit par Platon dans le Phèdre quand il explique que
03:26 maintenant qu'on peut écrire les choses, on va pouvoir les oublier.
03:29 Donc bien sûr, c'est un enjeu, mais c'est un enjeu vieux comme l'humanité.
03:32 Ça n'a pas commencé avec l'apparition de l'IA.
03:34 Avec l'apparition de l'IA.
03:36 Vous commencez ce livre par un chapitre amusant sur l'amour à Fallen Toven.
03:43 Mais si un jour, votre compagne vous demande pourquoi vous l'aimez,
03:50 vous vous déconseillez d'utiliser de sa GPT pour répondre à elle ?
03:55 Non, pas du tout.
03:56 C'est pas ça l'histoire.
03:57 C'est plus profond que ça.
03:58 C'est pas ça l'histoire.
03:59 C'est l'idée que l'amour n'a pas de raison logique.
04:03 Je pars du constat que c'est l'histoire.
04:05 On va se dire que peut-être que je la GPT elle ne répond pas.
04:08 Non, justement pas.
04:09 Je pars d'une expérience toute simple que certains d'entre nous, pour leur malheur, ont peut-être faite.
04:14 Si votre conjoint ou votre conjointe vous demande imprudemment pour quelle raison vous l'aimez
04:19 et que vous, malheureux, vous vous aventurez à répondre à cette question,
04:22 immédiatement l'amour est mort.
04:24 Puisque il est la disparition de l'amour.
04:27 L'existence de l'amour est subordonnée au maintien de la cause qu'on lui trouve.
04:30 Si vous dites aux gens "je vous aime parce que vous êtes beau",
04:33 le jour où les gens sont laids, vous ne les aimez plus.
04:35 Si vous dites "je vous aime parce que vous êtes riche" ou que sais-je.
04:38 Donc on ne donne pas de raison à l'amour.
04:40 Quand on aime, on ne compte pas.
04:42 Derrière ça, il y a l'idée qu'on ne trouve pas l'amour.
04:45 On peut trouver l'amour sur un réseau de rencontres.
04:47 Mais on ne trouve pas l'amour sur un réseau de rencontres par la quantité de correspondances, de matchs.
04:52 On trouve l'amour par la case en plus ou la case en moins
04:55 ou quelque chose qui, en tout état de cause, ne rentre pas dans l'algorithme.
04:58 Et c'est ça que je dis.
04:59 Quand on aime, on ne compte pas.
05:01 Il y a quelque chose d'irréductible aux algorithmes dans le sentiment amoureux.
05:04 En lisant ce chapitre, et je sais que vous êtes assez cinéphile,
05:08 cinéphile mais je ne sais pas si vous êtes amateur de séries ou pas,
05:13 mais en lisant ce chapitre, j'ai pensé à Black Mirror.
05:15 Justement, il y a certains épisodes qui montrent que certains ont recours à un algorithme pour trouver l'âme sœur.
05:23 C'est quelque chose auquel vous ne croyez pas du tout ?
05:26 Non, c'est possible.
05:28 On peut encore une fois rencontrer l'amour sur un réseau de rencontres,
05:31 mais ce sera par hasard quand même.
05:34 Il y a un épisode de Black Mirror où une dame perd son fiancé dans un accident de voiture.
05:39 Et il se trouve qu'à l'époque où elle se trouve, on peut commander un clone du fiancé en question.
05:44 Et donc elle envoie à l'entreprise quantité d'informations, de semences, de souvenirs, d'informations en ligne, etc.
05:51 Et elle récupère quelques jours plus tard un clone tout neuf de son fiancé mort,
05:55 qui est exactement le même, en un peu plus beau parce que ce sont les photos qu'il a mises en ligne,
05:59 donc il est plus à son avantage, sexuellement infatigable, nantie du même humour et de la même mémoire.
06:05 Seulement, au bout d'une heure de présence, passé la stupeur de retrouver son amoureux,
06:11 une heure de présence suffit à lui faire mesurer l'abîme qui sépare cet individu programmatique
06:18 de celui dont il n'est que la collection des traces.
06:22 Et c'est ça qui est très intéressant. Nous vivons. Nous vivons.
06:26 Nous envoyons des mails, nous rencontrons des gens, nous discutons, nous faisons des émissions,
06:30 nous écrivons des livres, nous lisons des livres. Nous vivons, nous laissons des traces.
06:35 La sommation des traces que nous laissons n'est rien à côté de l'élan qui les a causées.
06:42 Ça n'est qu'un tas de cendres à côté du feu qui le produit.
06:45 Donc ce qu'on arrive à imiter, c'est le tas de cendres.
06:48 Ce qu'on arrive à imiter, c'est le monticule rétroactif de toutes les traces qu'on laisse de notre vivant.
06:53 Mais en aucun cas l'élan qui leur donne le jour.
06:55 Et c'est ça que manque l'IA par définition.
06:58 Et c'est la raison pour laquelle on est en présence ici d'une énigme pour l'intelligence artificielle.
07:02 Le vrai problème n'est pas que l'intelligence artificielle soit une énigme pour nous.
07:06 Le vrai problème, c'est que nous sommes une énigme pour l'intelligence artificielle.
07:09 Elle n'est pas dotée des moyens de nous comprendre.
07:12 Votre livre est aussi un livre sur la philosophie.
07:16 Votre passion pour la philosophie est une révélation.
07:20 Vous avez raté votre bac philo la première fois.
07:22 Non, je l'ai raté.
07:24 Vous avez eu 11/20.
07:28 J'ai eu une note archi-médiocre.
07:30 Même pas la mention assez bien. Pour un futur philosophe, on peut dire que c'est raté.
07:33 J'ai eu une note archi-médiocre.
07:35 J'ai choisi un commentaire de texte de Kant sur l'amour.
07:38 Vous me demandez à Kant de parler d'amour. Ça n'a aucun sens.
07:42 J'avais fait un commentaire lamentable.
07:45 Je m'en suis sorti avec 11.
07:47 Mais j'insiste sur le fait que 11, c'est vraiment une note très médiocre.
07:51 Parce que quand vous avez 9, vous avez l'espoir que sans faute d'orthographe
07:55 ou bien sans ce fameux hors-sujet, vous auriez pu avoir 12.
07:59 Quand vous avez 10, vous avez l'espoir que sans telle ou telle erreur, vous auriez pu faire mieux.
08:04 11, c'est vraiment la note qui reste.
08:08 C'est l'accident dont on réchappe.
08:10 C'est le tas de morts vivants qui finit par vous faire croire à un monticule.
08:13 C'est l'empilement de feuilles mortes qu'on prend pour une souche.
08:17 11, c'est la note lamentable. C'est une note qui ne sert à rien.
08:20 C'est la note que j'ai eue au bac.
08:22 Cela dit, ça ne vous a pas empêché d'avoir une passion pour le bac de philosophie ?
08:27 Vous regrettez d'ailleurs que cette épreuve n'ait plus vraiment de sens.
08:31 C'est pas la meilleure réforme de Jean-Michel Blanquer.
08:35 J'ai passé le bac philo pendant 30 ans.
08:38 Mais c'est vrai que la dernière réforme en date du bac philo a eu dommage collatéral.
08:42 C'est l'un des dommages collatéraux de cette réforme.
08:44 Mais c'est le pire à mon avis.
08:46 Elle a eu pour effet de faire en sorte qu'un bon élève,
08:48 c'est-à-dire un élève qui tout au long de l'année a des bonnes notes lors du contrôle continu,
08:52 se retrouve avec suffisamment de points pour avoir le bac,
08:55 avant même d'avoir à passer l'épreuve de philo.
08:57 Autrement dit, plus vous êtes bon en classe,
08:59 plus vous avez à vous soucier de la philosophie.
09:01 C'est-à-dire que c'est un acte de décès de cette épreuve reine,
09:04 dont l'immense mérite, quand elle était au centre du bac généraliste,
09:08 était qu'elle nous obligeait à fréquenter les penseurs,
09:13 à penser contre nous-mêmes, à développer l'esprit critique.
09:16 Rien n'est plus utile qu'une telle épreuve,
09:18 et on lui a porté un coup peut-être fatal avec cette réforme.
09:20 On peut toujours revenir en arrière.
09:22 Si je vous ai parlé de cette réforme du bac et de l'épreuve de philo,
09:27 est-ce qu'on va le voir après ?
09:29 Une courte pause, Raphaël Enthoven, vous allez faire un match avec Chad Jipiti,
09:33 en passant le bac de philo.
09:35 On en parle tout de suite après la pause, en toute vérité,
09:38 avec Raphaël Enthoven.
09:40 A tout de suite sur Sud Radio.
09:42 En toute vérité, 11h30 sur Sud Radio, Alexandre Desvecquiaux.
09:46 Nous sommes de retour sur Sud Radio avec Raphaël Enthoven
09:50 pour parler de son nouveau livre, "L'esprit artificiel",
09:53 aux éditions de l'Observatoire.
09:55 "La machine ne sera jamais philosophe".
09:58 Un livre autour de cette révolution,
10:01 deuxième révolution numérique que sera l'intelligence artificielle.
10:06 Beaucoup ont abordé la question,
10:08 sous l'angle de la disparition d'un certain nombre de métiers,
10:11 des bouleversements économiques, sociaux,
10:13 que tout cela allait engendrer.
10:15 Vous avez une vision plutôt optimiste de tout cela, Raphaël Enthoven,
10:19 parce que vous nous dites finalement,
10:21 la machine ne remplacera jamais l'esprit humain.
10:24 Absolument, c'est une certitude.
10:27 Cela ne veut pas dire que l'esprit humain ne peut pas lui-même se robotiser.
10:33 Cela ne veut pas dire qu'on ne peut pas nous-mêmes devenir des machines.
10:37 Le fait que nous soyons rivés à nos écrans toute la journée
10:40 est très mauvais signe et de très mauvaise augure.
10:43 Ce que je veux dire c'est que, un humain peut devenir un automate,
10:47 mais un automate ne deviendra jamais un humain.
10:50 Le fait que les machines s'emparent de nos vies par exemple,
10:53 ou nous débordent, ou bien nous étouffent,
10:56 le fait que les machines s'emparent de nos vies
10:59 ne signifie pas que nous sommes sur le point de nous donner des machines vivantes.
11:03 Or, paradoxalement, c'est comme cela qu'on pense.
11:06 On croit que si l'iPhone nous obsède toute la journée,
11:10 si nous avons les yeux rivés sur nos écrans,
11:12 c'est parce que nos écrans d'une certaine manière le désirent
11:15 et font tout pour nous appâter.
11:17 On fuit notre propre responsabilité dans cet exercice d'hypnose.
11:20 Donc, je suis optimiste.
11:23 L'esprit humain est d'une étoffe qu'aucune machine ne synthétise,
11:27 qu'aucune IA ne parvient à saisir.
11:30 Une conversation aura toujours un coup d'avance sur la réponse qu'on veut déduire.
11:34 Donc, il y a là quelque chose d'irréductible.
11:37 Néanmoins, il n'est pas impossible à l'humain lui-même
11:41 de faire le deuil de son esprit et de devenir tout entier un automate.
11:45 C'est là que je reste pessimiste.
11:48 Nous allons en parler de cette déshumanisation de l'être humain.
11:53 C'est peut-être effectivement le vrai risque qui nous menace.
11:56 Mais j'avais teasé avant la pause votre match.
12:00 Il y a eu Kasparov et la machine sur les échecs.
12:06 Et il y a Raphaël Antoven et Chad Jipiti sur le bac philo.
12:13 Quel a été le résultat ?
12:16 Le résultat est que la machine a eu 11 comme moi le jour du bac.
12:20 C'est une belle revanche !
12:22 Et que moi j'ai eu 20.
12:24 Ce qui est fatalement excessif d'ailleurs.
12:27 C'est sympa ce que vous dites, l'histoire, la comparaison avec Kasparov.
12:30 Mais malheureusement, c'est hors sujet.
12:33 Kasparov est un génial, prodigieux joueur d'échecs
12:36 qui voit jusqu'où l'humain peut résister, non pas à la machine,
12:40 mais à une usine qui calcule indifféremment la totalité des coups disponibles.
12:45 Donc Kasparov se lance un défi qui est véritablement difficile.
12:49 En ce qui me concerne, il n'y avait pas de match.
12:51 Puisqu'on demandait, moi je suis simplement le prof de philo,
12:54 à qui on demande d'accomplir l'exercice élémentaire
12:58 qu'aucune machine n'est en mesure d'accomplir, c'est-à-dire penser.
13:01 Donc il me suffisait de réfléchir pour que le match soit plié en vérité.
13:07 Il me suffisait de trouver ce qu'on appelle une problématique.
13:10 Dans une dissertation en philosophie, l'une des premières choses qu'on vous apprend à faire,
13:13 c'est à trouver une problématique, c'est-à-dire le problème qu'il y a
13:17 sous la question qu'on vous pose.
13:19 Et c'est cette clé, cette problématique qui vous permet ensuite de construire la dissertation.
13:23 Mais ça, cet atome de pensée qu'on appelle une problématique,
13:27 qui vient naturellement à un élève qui bosse un peu en terminale,
13:31 ne viendra jamais à une intelligence artificielle, mais même dans 1000 ans.
13:35 En même temps, vous dites "c'est une note très médiocre,
13:38 mais pour une machine, c'est pas si mal".
13:41 Ça veut dire que malgré tout, elle a réussi à faire la dissertation.
13:46 Moi, je ne lui aurais pas mis la moyenne. Je ne me serais pas mis 20,
13:48 et je n'aurais pas mis la moyenne à la machine.
13:50 Vous avez été professeur, vous ne croyez pas aussi sévère.
13:52 Non, non, je ne me serais pas mis...
13:54 Enfin, moi, je n'ai pas été prof en terminale, j'ai été prof à la fac,
13:56 mais je ne me serais pas mis 20, ça c'est sûr,
14:00 et je n'aurais pas mis 11 à la machine, je n'aurais pas mis la moyenne à la machine.
14:02 Pour une raison simple, c'est qu'il n'y a pas de problématique,
14:04 il n'y a pas de colonne vertébrale.
14:06 C'est-à-dire que la machine a rangé indifféremment dans des parties "oui", "non", "peut-être",
14:11 la totalité des systèmes disponibles, selon une classification qui était parfaitement arbitraire,
14:16 qui était certie dans des traits d'humour ridicules, et grossiers, et poussifs, et c'est tout.
14:23 C'est-à-dire qu'il n'y avait aucune nécessité à l'empilement des arguments par la machine.
14:28 La machine ne se posait pas la question...
14:30 Quand vous faites une dissertation, une bonne disserte,
14:32 c'est une disserte où vous ne dites pas "oui" puis "non",
14:35 "oui", et puis vous pointez ce qui coince dans la thèse à laquelle vous donnez sa chance,
14:39 et ce faisant, vous approfondissez votre propos en changeant de point de vue.
14:43 Mais vous ne vous opposez pas à vous-même.
14:45 Thèse, antithèse, foutaise.
14:47 On ne s'oppose pas à soi-même, on creuse son propos.
14:50 Or, c'est ce que la machine est incapable de faire.
14:52 Sa première partie aurait pu venir après la seconde, et indifféremment, et inversement.
14:56 Donc, il n'y avait pas de dissertation.
14:58 On met 11, parce qu'il y a tous les systèmes disponibles qui sont résumés en 30 paragraphes.
15:05 Voilà. Alors on salue cet effort-là.
15:08 Mais, sachant que c'est la machine qui l'a fait en 1 minute 30,
15:10 et qu'en plus, même un élève qui ferait ça ne rendrait pas une dissertation décente,
15:14 moi j'aurais mis 9.
15:16 D'accord, très bien Raphaël.
15:17 Et toi, le sujet d'ailleurs de cette épreuve était "Le bonheur est-il affaire de raison ?"
15:22 Oui.
15:23 Qu'est-ce que vous avez répondu ?
15:24 En fait, le plus important, c'est de dire que...
15:27 Vous prenez cette question "Le bonheur est-il affaire de raison ?"
15:29 Il y a un problème dans cette question.
15:31 Il y a un problème, il y a un truc qui coince.
15:33 Et c'est ça qu'un élève doit faire surgir pour fabriquer la problématique,
15:36 et faire sa dissertation dont il a la colonne vertébrale à ce moment-là.
15:39 Or, qu'est-ce que c'est que le bonheur ? C'est un sentiment.
15:42 Comment un sentiment peut-il être une affaire de raison ?
15:45 Comment peut-on rationaliser un sentiment ?
15:47 Et là, on tient la problématique.
15:49 Quand on a creusé, quand on a fait cet effort minimal de creuser la question,
15:52 on a vu que la machine, devant un tel sujet,
15:54 a pris toutes les théories du bonheur, les œudémonismes, comme on dit,
15:57 les a listées par ordre chronologique pour faire bien,
16:00 parce que c'était un ordre comme un autre,
16:02 et puis voilà, il n'y avait rien de plus à en dire.
16:04 Alors qu'en réalité, il y avait à dire.
16:07 Si le bonheur est un sentiment, comment peut-il être affaire de raison ?
16:10 Et ça permettait, par exemple, à partir du moment où on se pose cette question,
16:14 où on a cette clé,
16:16 ça permet, par exemple, d'examiner dans la première partie
16:19 la petite Madeleine, la fameuse petite Madeleine de la recherche du temps perdu,
16:24 dont le bonheur qu'elle inspire au narrateur
16:28 s'estompe à mesure qu'il se demande pourquoi il est heureux.
16:32 Donc plus il essaie de raisonner son bonheur, moins il est heureux.
16:36 En première partie, pour dire que le bonheur l'emporte sur la raison,
16:39 on a un exemple là tout à fait trouvé.
16:42 Mais le même exemple de la Madeleine peut revenir en troisième partie
16:46 pour dire cette fois-ci que quand le narrateur comprend d'où lui vient son bonheur,
16:52 alors il est démultiplié.
16:54 Quand il a la raison de son bonheur, le bonheur est augmenté.
16:57 Et donc, vous voyez, le même exemple tiré de...
17:00 Bon, c'est un passage un peu riche, mais quand même,
17:03 le même exemple littéraire dans une bonne discerte
17:06 peut se trouver en première partie comme en troisième partie
17:09 parce qu'il est analysé sous des angles différents.
17:11 Jamais la machine ne peut faire un truc pareil.
17:14 Ce n'est pas possible.
17:16 Parce que l'idée même de revenir sur le même exemple lui paraîtrait une stagnation.
17:20 D'ailleurs, vous expliquez que la philosophie,
17:23 contrairement au progrès scientifique,
17:26 alors ce n'est pas du tout quelque chose qui stagne,
17:28 mais l'évolution n'est pas linéaire.
17:31 Non, elle ne fait pas de progrès.
17:33 On n'a pas fait de progrès en philo depuis Platon.
17:35 On n'a pas fait mieux.
17:37 Ou depuis Aristote, peu importe.
17:40 Ou depuis Kant. On ne fait pas de progrès.
17:42 La philosophie se développe,
17:45 réinvestit les mêmes questions,
17:48 leur propose des réponses différentes, examine des systèmes différents,
17:51 et puis les penseurs sont certis dans leur époque, bien sûr.
17:55 Ils n'ont pas les mêmes outils sous la main.
17:57 Mais la philosophie ne fait pas de progrès.
17:59 Les arguments de Platon sont aujourd'hui aussi recevables qu'il y a 2000 ans.
18:02 Et de la même façon qu'en philosophie les questions sont plus essentielles que les réponses,
18:07 l'enjeu en philosophie n'est pas de progresser.
18:09 En astronomie, on a fait des progrès depuis Copernic et depuis Ptolémée.
18:13 Dans toutes les sciences, on a fait des progrès considérables.
18:17 Un mathématicien médiocre aujourd'hui est meilleur que Newton, pourtant un génie.
18:21 Alors qu'en philosophie, un professeur de terminale est moins bon que Socrate.
18:25 C'est comme ça.
18:27 Parce que la philosophie, son but, enfin sa raison d'être,
18:30 n'est pas de faire des progrès, mais de revisiter un même désarroi,
18:34 le désarroi d'exister, qu'on décline en question.
18:37 Et ces questions sont inépuisables.
18:40 Proust a dit que chaque écrivain était une sorte de cataclysme nouveau et qu'il avait tout à faire.
18:46 Et bien chaque philosophe est une sorte de séisme nouveau à sa manière et qu'il a tout à reprendre.
18:51 Il n'est pas plus avancé qu'Aristote.
18:53 C'est la particularité de la philosophie.
18:55 C'est aussi pour ça que l'IA ne peut pas être philosophe, ça va trop vite pour elle, un truc qui stagne.
18:59 - Raphaël Eintraven, vous aimez les dissertations de...
19:02 - C'est pas stagner le mot, le mot est pas bon parce que quand on stagne on pue.
19:06 - Non, non, non, non, c'est un chatoiement si vous voulez.
19:10 - Un aller-retour permanent ?
19:12 - C'est un mouvement bronien, c'est un entrelace, c'est un choc permanent de particules
19:18 où les morts et les vivants s'entrelacent et discutent en permanence,
19:21 mais on peut pas parler de stagnation.
19:23 - Raphaël Eintraven, vous aimez les dissertations de philo, j'en ai peut-être une pour vous.
19:28 À quoi va servir la philosophie à l'âge de l'intelligence artificielle ?
19:34 - Non, la question de savoir à quoi sert la philosophie est une vieille question,
19:37 c'est pas une question qui vient avec l'arrivée de l'IA.
19:39 - J'ai pas dit ça, mais peut-être que ça pose encore plus...
19:42 - Je crois pas, sincèrement je crois pas.
19:44 Non, c'est-à-dire que ce qui est intéressant, d'abord on peut répondre de mille manières
19:47 à la question de savoir à quoi sert la philosophie.
19:48 - À quoi sert la philosophie ?
19:49 - Oui, je peux vous dire que la philosophie ça sert à comprendre que la loi n'est pas le contraire de la liberté,
19:53 ça sert à former des gens qui préfèrent le débat au combat,
19:58 ça sert à s'étonner du monde qu'on a l'habitude de voir,
20:02 ça sert à regarder comme une énigme le monde ordonné que nous lèguent les savants.
20:06 Il y a 50 000 belles définitions de la philosophie qui résument son usage admirablement
20:11 et qui permettent de répondre à cette question.
20:13 Mais quand on a répondu à cette question, on n'a pas dit grand-chose.
20:15 Ce qui est intéressant dans cette question, c'est de la questionner elle-même,
20:18 c'est-à-dire d'où venez-vous... comment dire ?
20:20 Qu'est-ce qui vous fait penser, pardonnez-moi de retourner la question,
20:22 mais qu'est-ce qui vous fait penser que la philosophie doit avoir une utilité ?
20:25 Et si le propre de la philosophie était de n'avoir aucune utilité et d'être indispensable à ce titre ?
20:30 Et si le propre... etc.
20:32 C'est-à-dire que ce qui est intéressant, ce n'est pas de répondre à la question,
20:34 c'est de questionner la question.
20:36 D'où vient que la philosophie doit être utile ?
20:38 Et cette démarche-là, cette façon de faire,
20:40 qui n'est pas une façon d'esquiver la réponse,
20:42 mais qui est une façon de considérer que la réponse, c'est ce qu'il y a de plus facile.
20:46 Cette façon de faire est en réalité, me semble-t-il, extrêmement féconde.
20:50 Et donc, vous me dites "à quoi sert la philosophie ?"
20:53 Moi, je ne m'en inquiète pas, parce que l'enjeu pour la philosophie
20:57 n'est pas tant de servir à quelque chose,
20:59 que de tourner le regard vers le monde,
21:02 séparément de l'intérêt qu'il peut avoir pour soi.
21:05 Je vous posais aussi la question par rapport à l'intelligence artificielle,
21:10 parce qu'on peut se demander si justement dans un monde
21:13 où l'intelligence artificielle aura les réponses à toutes les questions techniques,
21:17 est-ce qu'on aura peut-être un peu plus encore besoin de sens et de philosophie ?
21:21 Mais vous m'en répondrez après une courte pause, Raphaël, en tauvonne.
21:25 On se retrouve sur Sud Radio, en toute vérité,
21:27 pour parler de votre dernier livre, "L'esprit artificiel, une machine ne sera jamais philosophe".
21:33 C'est aux éditions de l'Observatoire, à tout de suite sur Sud Radio.
21:36 En toute vérité, 11h30 sur Sud Radio, Alexandre Devecchio.
21:40 Nous sommes de retour en toute vérité sur Sud Radio avec Raphaël en tauvonne.
21:45 Nous parlons de son dernier livre, "L'esprit artificiel",
21:48 qui vient de paraitre aux éditions de l'Observatoire.
21:51 "Une machine ne sera jamais philosophe", nous dit...
21:54 C'est le sous-titre.
21:55 Raphaël en tauvonne.
21:58 Effectivement, "Une machine ne sera jamais philosophe",
22:02 et on va vers une époque où les machines vont sans doute prendre de plus en plus de place dans notre vie.
22:08 Du coup, est-ce que le règne de l'intelligence artificielle, paradoxalement,
22:12 ce ne sera pas aussi le règne des philosophes ?
22:14 Est-ce que nous allons avoir besoin de plus de sens que jamais ?
22:19 Je ne sais pas si on peut le dire comme ça, mais l'histoire est peut-être riche d'enseignements.
22:23 Si vous pensez par exemple au "Temps moderne", le film de Chaplin,
22:27 qui décrit la naissance du capitalisme, l'émergence du fordisme,
22:32 la robotisation de l'individu, la machinisation de l'individu
22:35 qui vient s'inscrire dans son corps au point que l'ouvrier continue d'avoir les mouvements spasmodiques,
22:41 comme des spasmes, qui sont ceux du travail à la chaîne,
22:46 cette époque-là a été aussi l'occasion d'une réflexion approfondie
22:53 sur ce que c'était que l'exploitation de l'homme par l'homme,
22:56 sur ce que c'était aussi qu'un corps brisé, ce que c'était que le travail à la chaîne.
23:01 Simone Weill s'est inscrite dans ce sillage, on a pu parler de tout cela.
23:04 C'est-à-dire que les époques où la machine donne le sentiment soit de prendre le pouvoir,
23:12 soit de contaminer l'humain, sont aussi des époques de grandes fêtes réflexives
23:19 et de grandes occasions pour nous de repenser la question de l'humanité.
23:23 Donc je ne suis pas pessimiste sur l'utilisation de la philosophie.
23:27 Pas tant parce que la philosophie serait pourvoyeuse de sens.
23:31 La philosophie n'est pas pourvoyeuse de sens.
23:33 La philosophie me paraît davantage pourvoyeuse de la question de savoir
23:37 d'où nous vient le besoin que la vie ait un sens pour être vécue.
23:40 C'est plutôt ça qui compte, c'est plutôt ça qu'elle fait, c'est plutôt ce travail-là.
23:45 C'est-à-dire qu'au lieu de répondre à la question du sens de la vie, ce qui est facile là encore,
23:50 la véritable question c'est de savoir d'où vient le besoin qu'on ait que la vie a un sens.
23:56 Et en cela, l'exercice de pensée me paraît absolument indispensable.
24:01 Et d'ailleurs, il est vécu comme indispensable par quiconque s'y adonne un peu.
24:05 Il suffit de s'y livrer un peu pour en tomber amoureux
24:08 et de comprendre les bénéfices qu'il y a à raisonner comme ça.
24:11 Vous avez parlé de cinéma, des films que vous citez à la fin de votre livre, je pense à Blade Runner,
24:19 ont montré que finalement demain les machines ont montré.
24:23 C'est la question philosophique que ça pose finalement.
24:26 C'est un livre de Philippe Kadic d'ailleurs.
24:29 Au départ, est-ce que les machines peuvent avoir une âme en quelque sorte ?
24:34 Vous répondez sans doute par la négative. En revanche, est-ce qu'elles peuvent finir par tuer l'âme humaine ?
24:41 C'est ça qui est intéressant dans Blade Runner, c'est que dans Blade Runner,
24:44 les réplicants, qui sont donc des êtres d'artifice, des humains créés par couture et addition des parcelles.
24:53 Ce ne sont pas des cyborgs, ils ne sont pas moitié humains, moitié machines.
24:57 Ce sont des êtres humains d'artifice.
25:00 Mais ils n'ont que quatre ans de vie devant eux.
25:03 Les humains se disent, en les condamnant à mourir au bout de quatre ans de façon irrémédiable,
25:10 on les tient, on fait en sorte qu'ils ne puissent pas se révolter.
25:13 Seulement en découvrant qu'ils n'ont que quatre ans de vie,
25:16 les réplicants eux-mêmes choisissent de s'emparer de leur liberté.
25:19 C'est-à-dire que c'est ça qui est génial, c'est la conscience de leur mortalité qui en fait des humains.
25:25 Ils deviennent humains et donc ils ont le désir légitime d'être libres et de ne plus servir
25:29 à partir du moment où ils apprennent que la vie est brève.
25:32 C'est là que le film est formidable puisqu'il montre qu'il suffit pour devenir humain d'avoir peur de mourir.
25:40 C'est ce que raconte le premier Blade Runner en tout cas, qui est vraiment admirable pour ça.
25:44 Mais l'autre chose que ça raconte, c'est que moi j'y vois une fable sur l'obsolescence programmée.
25:49 On croit avoir la maîtrise sur nos outils en programmant leur obsolescence au bout de deux ou trois années d'usage.
25:57 Mais le résultat de l'obsolescence programmée, c'est qu'on croule sous les outils défunts
26:03 que les fleuves amanient et on peut marcher dessus désormais tant il y a de vieux iPads qui traînent dedans.
26:10 C'est-à-dire qu'on croule sous les outils.
26:12 Et donc le fait que nous étouffions sous nos outils, c'est la version réelle, si j'ose dire, du scénario de Blade Runner.
26:20 Où des individus, parce qu'ils sont provisoires, deviennent dangereux pour nous.
26:26 Est-ce que la question aussi, vous avez parlé tout à l'heure de maîtrise,
26:32 est-ce que le vrai danger avec l'intelligence artificielle, c'est pas tout simplement d'en perdre la maîtrise ?
26:37 Ce qui renvoie à un autre film qui serait plutôt 2001, l'Odyssée de l'espace.
26:42 Est-ce que vous croyez à ce scénario-là ?
26:47 Non.
26:49 Non.
26:50 Je ne vois pas qu'on perde la maîtrise de cela.
26:55 Ou plus exactement, je m'intéresse à la question de savoir pour quelle raison, depuis Pygmalion jusqu'à l'intelligence artificielle,
27:03 en passant par le Golem, Terminator, Frankenstein, etc.
27:09 Nous n'avons jamais cessé de faire le cauchemar que nos créatures, que nos créations deviennent des créatures et nous tournent le dos.
27:18 On a toujours fait ce cauchemar-là.
27:20 Il a toujours été démenti.
27:22 Aucun sculpteur n'a créé de statues vivantes jusqu'à nouvel ordre.
27:26 Donc Pygmalion c'était il y a 3000 ans et c'est toujours faux.
27:30 Nous avons toujours fait le rêve que nos créations deviennent des créatures et nous tournent le dos.
27:35 Alors c'est un rêve qui souvent prend la forme d'un cauchemar.
27:38 Blade Runner, Terminator, etc.
27:42 Les machines s'emparent du pouvoir et donc deviennent une menace pour nous, etc.
27:46 Nous faisons ce cauchemar-là de façon récurrente.
27:49 Mais c'est un cauchemar dans lequel, je trouve, entre beaucoup plus d'orgueil que de crainte.
27:57 Pour une raison toute simple, c'est que quelle est la seule instance, le seul être, à avoir produit des créatures qui lui disent "merde, c'est Dieu".
28:08 Le cauchemar que nous faisons de produire un jour des créatures qui nous tournent le dos,
28:13 on en est aussi loin aujourd'hui qu'à l'époque de Pygmalion.
28:16 Mais le cauchemar permanent que nous faisons de cela est un renseignement sur le désir que nous avons de nous prendre pour Dieu.
28:22 Il y a beaucoup plus d'orgueil que de crainte qui entre là-dedans.
28:25 Mais est-ce que c'est pas tout simplement vrai que parfois on se prend pour Dieu ?
28:30 Vous avez expliqué qu'effectivement, le mythe de Frankenstein est aussi une métaphore.
28:38 Si je prends un autre film, je pense à James Cameron qui a beaucoup peint justement la technologie...
28:44 Lequel, le Terminator ?
28:46 Oui, mais Titanic, j'allais vous dire.
28:48 Pourquoi Titanic ?
28:50 Parce que Titanic, c'est l'homme qui croit en sa technologie et la technologie qui se retourne.
28:57 Vous dites que ça ne s'est jamais retourné, mais Titanic par exemple est le contre-exemple.
29:03 Il n'est pas bon votre exemple.
29:05 Vous avez commencé par là, mais notre addiction aux écrans, finalement, d'une certaine manière, ça se retourne contre nous.
29:16 Alors certes, les écrans ne prennent pas pour autant le pouvoir, mais ils ont un pouvoir sur nous.
29:21 L'exemple de Titanic est beau, mais je ne crois pas qu'il soit bon ici pour une raison simple.
29:26 C'est que la catastrophe du Titanic est une fable.
29:31 C'est devenu une fable, un mythe.
29:33 C'est devenu une fable, et une fable sur l'hubris de l'humanité.
29:37 C'est-à-dire, nous croyons avoir produit un navire insubmersible.
29:41 Le révérend Carter, à bord du navire, donne des messes pour ceux qui n'ont pas la chance de traverser l'Atlantique à bord du Titanic.
29:49 Tout ça, la veille du jour, il rencontre un iceberg.
29:52 C'est une fable sur la misère de notre démesure, et sur l'incapacité où nous sommes de dominer les éléments naturels.
30:03 C'est ça que ça raconte.
30:05 Ce n'est pas une fable sur la technologie qui se retourne contre nous.
30:08 Oui, mais il y a l'orgueil. L'orgueil, pour le coup, n'est pas...
30:11 L'orgueil est battu en brèche, mais l'orgueil n'est pas battu en brèche par la technique elle-même, il est battu en brèche par un iceberg, encore un juif, comme dirait Gainsbourg.
30:20 Plus pertinente serait, me semble-t-il, l'objection de la bombe atomique.
30:27 J'allais y venir. J'aurais pu citer Oppenheimer, effectivement.
30:31 L'objection de la bombe atomique, c'est effectivement...
30:35 On peut considérer qu'on a donné le jour, avec la bombe atomique, à un monstre qui nous échappe, dont la mythologie s'est aussitôt emparée sous la forme de Godzilla, clairement,
30:45 qui est un enfant de l'humanité, qui est une création de l'humanité, et qui nous échappe.
30:51 Et là, on peut considérer qu'effectivement, nous avons changé de monde et que nous sommes dans un autre registre. Mais ça n'est pas l'IA. Pas la même chose.
30:57 Merci, Raphaël Antoine, du coup, pour cette analyse cinématographique.
31:04 On a un peu fait le tour de la question de l'IA. J'aimerais qu'on parle, dans la dernière partie de l'émission,
31:11 de votre autre actualité, qui est une actualité autour d'Albert Camus.
31:16 Vous consacrez une pièce à ce philosophe. Pourquoi ce philosophe et pourquoi ce philosophe aujourd'hui ?
31:24 Aujourd'hui, comme hier, parce que c'est...
31:28 On le rappelle au théâtre de la scène libre, pour ceux qui veulent aller voir Raphaël Antoine et entendre parler de Camus.
31:35 Et on est prolongé pour la troisième fois. Le truc marche. La salle est... Le public est là.
31:41 Donc on peut le dire d'expérience. Le public est là. C'est un succès. Ça marche.
31:47 Pourquoi Camus ? Parce que Camus est le meilleur ami des gens qui croient en rien et qui se bagarrent quand même,
31:52 qui font ce qu'ils peuvent dans un monde dépourvu de sens.
31:56 C'est-à-dire que quand le ciel ne vous fait pas le cadeau d'avoir une signification, quand le monde ne vous fait pas la fleur d'avoir un sens,
32:03 quand il vous laisse face à votre désarroi, il y a des philosophes comme Albert Camus qui s'emparent de ce désarroi et qui le sculptent,
32:10 et qui le font travailler, et qui montrent que l'inquiétude d'être au monde est en réalité un outil de compréhension et une façon de mieux vivre.
32:18 Donc il a... Voilà, voilà. Et puis Camus est un humaniste qui assume le fait que le monde n'est pas là pour faire plaisir à l'homme.
32:25 Donc c'est génial. Il marche sur deux jambes qui apparemment vont dans des directions contraires.
32:29 On peut penser à hauteur d'homme, on ne peut pas se donner de principe plus grand que son caractère,
32:33 et dans le même temps il a un discours sur l'être et sur l'existence qui est radicalement dépourvu de signification, de divinité.
32:43 C'est quelqu'un qui ne vous ment pas, qui ne vous rassure pas, mais dont les réponses qu'il vous propose du coup sont vraiment consistantes.
32:50 Et c'est ça qui se passe quand on en parle en général. C'est-à-dire que Camus touche au cœur les gens qui l'écoutent ou qui le découvrent,
32:57 parce qu'il prend en charge des questions qu'inévitablement nous n'avons pas pu ne pas nous poser.
33:04 Merci Raphaël Anthoven. On continue à parler Albert Camus après une courte pause.
33:10 Dans la dernière partie de Dans Toute Vérité, on verra que c'est tout de même un philosophe particulièrement actuel d'une certaine manière.
33:18 On se demandera aussi ce qu'il aurait pensé de l'intelligence artificielle.
33:22 Je ne sais pas si vous vous êtes posé la question Raphaël Anthoven. On en parle tout de suite sur Sud Radio après une courte pause.
33:28 Nous sommes de retour en Toute Vérité avec le philosophe Raphaël Anthoven, actualité riche de Raphaël Anthoven,
33:40 puisqu'il est à la fois sur scène le théâtre de la scène libre où il rend hommage à Albert Camus.
33:49 Il vient de faire paraître ce livre "L'esprit artificiel. Une machine ne sera jamais philosophe" aux éditions de l'Observatoire,
33:57 dont nous avons beaucoup parlé pendant toutes les premières parties de cette émission.
34:03 Peut-être reliez les deux actualités.
34:10 Je suis fait de parcelles différentes.
34:13 Vous ne parlez pas d'Albert Camus il me semble dans ce livre, mais qu'aurait pensé Albert Camus de l'intelligence artificielle ?
34:21 Je n'en ai aucune idée. D'abord on ne fait pas parler les morts.
34:24 C'est un bon sujet de dissertation.
34:26 Non, ce n'est pas un bon sujet de dissertation, parce qu'on ne fait pas parler les morts, et en particulier sur un sujet dont ils n'ont jamais parlé eux-mêmes.
34:35 Camus est plutôt du côté de ceux qui considèrent que la nature finira toujours par l'emporter sur l'histoire.
34:41 C'est quelqu'un de... un philosophe de la chair j'allais dire, il y a quelque chose de charnel, il aime la vie, il est sensoriel, ce qui est rare,
34:51 ce n'est pas un esprit abstrait, donc peut-être que... Je ne suis pas sûr qu'il aurait beaucoup aimé l'intelligence artificielle.
34:58 Je ne sais pas, je n'en sais rien, vraiment je n'en sais rien.
35:00 Je sais qu'il pense en ayant un corps.
35:02 Il pense à partir du corps. Le corps est son fil de pensée, c'est le fil de son ontologie, c'est le fait, c'est la corporealité.
35:07 C'est le fait de jouer au foot, c'est le fait de faire l'amour, c'est le fait de se baigner, de sentir le vent, de voir le sel se dessiner sur la peau quand on sort de l'eau.
35:15 C'est tout cela. C'est tout cela qui le fait penser. C'est tout cela qui le fait lutter, c'est la source de son courage.
35:21 C'est un penseur du corps. Et c'est aussi cela qui l'empêche de devenir fou.
35:26 Parce que quand on assume de penser à partir du corps qu'on a, ça veut dire qu'on assume de ne pas détenir toute la vérité.
35:32 Ça veut dire qu'on assume de ne pas prendre ses impressions pour des normes.
35:36 Donc il a cette humilité fondamentale, l'humilité qui vient aux gens qui acceptent de penser en ayant un corps.
35:42 Raymond Aron, de la même manière, refusait de penser au-delà de son corps.
35:46 Enfin, voulait penser au-delà de son corps, mais refusait d'une autre souche que son existence de petit homme, juif, lecteur, normalien, etc.
35:56 Ce sont des gens qui ont la sagesse de se donner un corps comme limite à la pensée et comme souche à la pensée.
36:04 Et qui pour cette raison ne deviennent pas fous.
36:07 Parce que précisément, ils savent très bien que ce qu'ils prennent ou ce qu'ils ont envie de tenir pour une vérité absolue
36:13 est d'abord le fait d'une illusion du corps.
36:18 Ils refusent tout simplement la pensée en système.
36:21 Le dogmatisme. La pensée en système leur paraît une forme de malhonnêteté.
36:25 Est-ce qu'aujourd'hui, on est confronté à la pensée en système beaucoup dans le débat public ?
36:33 Vous allez me dire que ça a peut-être toujours existé, mais est-ce qu'il y a une forme de retour du dogmatisme ?
36:39 C'est plus grave que ça.
36:41 Parce que la pensée en système, c'était les années 70, les années 80 ou les années 60.
36:45 C'était le communisme.
36:47 C'était une pensée qui se donnait comme systématique.
36:50 C'est-à-dire qu'à l'instant où vous refusiez de souscrire au dépérissement de l'État ou à la lutte des classes,
36:54 vous étiez étiqueté comme bourgeois.
36:57 C'est-à-dire qu'on vous faisait le procès de celui que vous étiez, quand vous étiez en désaccord avec le contenu d'une parole.
37:03 De cette façon, le système pouvait vous intégrer comme l'un des éléments ou comme l'une des preuves supplémentaires de ce qu'il avait raison de penser.
37:10 Donc c'était une pensée en système.
37:12 C'était une pensée systématique.
37:14 Ce sont des pensées voraces.
37:16 Ce sont des pensées qui dévorent les interlocuteurs en en faisant des éléments d'elles-mêmes.
37:19 Là, on est en présence d'autre chose.
37:21 On est en présence d'un refus spectaculaire de pensée.
37:24 D'une sanctification spectaculaire de nos impressions au nom du droit qu'on a bien de les tenir pour des vérités.
37:33 On est en présence de la revendication démocratique funeste qui consiste à prendre ses impressions pour des vérités parce qu'on a bien le droit de penser comme ça.
37:43 L'ennemi aujourd'hui, c'est la confusion de l'égalité des droits et de l'égalité des compétences.
37:50 Le vrai danger.
37:51 C'est le sentiment que nous avons tous des droits égaux mais nous n'avons pas les mêmes compétences, on n'a pas la même formation, on n'a pas la même histoire.
37:58 Et l'idée que nous ayons des compétences égales est une idée complètement folle alors que l'idée que nous avons des droits égaux est une idée essentielle.
38:08 La confusion des deux est à l'origine de catastrophes aujourd'hui dans tous les domaines, que ce soit le domaine médical, le domaine scientifique par exemple.
38:17 C'est ça qui fait qu'aujourd'hui on se retrouve avec des discussions entre des astronomes et des platistes.
38:22 C'est ça qui, pardon je sais que vous l'aimez bien, a permis l'émergence d'un phénomène comme celui de Didier Raoult par exemple.
38:27 C'est-à-dire que le sentiment que l'égalité des droits est une équivalence des compétences fait que les gens qui pensaient n'importe quoi se disaient qu'ils avaient bien le droit de penser ce qu'ils pensaient.
38:39 Non, je n'ai pas d'amitié particulière pour Didier Raoult.
38:43 Ah zut, j'ai ouvert la boîte de Pandore.
38:45 Non mais vous m'avez interpellé donc je vous réponds.
38:47 Mais pour le coup, il me semble que Didier Raoult justement se prévalait de ses compétences.
38:54 C'est vrai que pour le citoyen, face à différentes personnes qui se prévalent...
38:59 Il faut arbitrer entre des experts.
39:01 Il faut arbitrer entre des experts.
39:03 Je pense que c'est un peu plus ça la problématique que le fait de quelqu'un qui est totalement non-expert, qui est très tendre à détenir la vérité.
39:13 Mais ne relançons pas à cette question de covist.
39:16 Mais vous avez parlé du système totalitaire qu'était le communisme.
39:21 Il y a aujourd'hui le wokisme qui d'une certaine manière prend le relais.
39:27 Là on est dans une forme malgré tout de pensée en système ou d'essentialisation.
39:32 Oui mais c'est autre chose.
39:33 Le wokisme c'est la résurrection des pensées contre-révolutionnaires de la fin du 18e siècle, du début du 19e siècle.
39:39 C'est-à-dire c'est la résurrection de l'idée qui était le propre de Bonald, de Joseph de Maistre, de Burke et de tous les penseurs contre-révolutionnaires de la fin du 18e, début du 19e.
39:49 De l'idée selon laquelle l'arrachement à notre origine était une déshumanisation.
39:56 L'idée selon laquelle se défaire de ses appartenances c'est se déshumaniser, c'est s'oublier, c'est se perdre soi-même.
40:04 Oublier sa souche, c'est oublier qui l'on est.
40:07 Cette idée-là, chère à Bonald, chère à de Maistre, chère à la pensée contre-révolutionnaire,
40:12 elle est réactivée ingénuement par des gens qui ne les ont pas lues, à mon avis,
40:16 mais qui pensent exactement de la même manière que l'identité aujourd'hui d'un individu est une valeur en soi
40:24 et que la perte de l'identité est à l'origine d'une déshumanisation.
40:28 C'est une modalité d'adversité, comment dire, ce sont les habits neufs de la pensée contre-révolutionnaire
40:35 qui s'opposent, comme à l'époque, à l'idée tout simplement d'universel ou à l'idée qu'on accède à son humanité
40:42 en s'arrachant à ses déterminations natives pour former un projet, pour devenir un sujet.
40:49 Cette querelle qui remonte à la Révolution française est une querelle qu'on revoit surgir aujourd'hui grâce au wokisme.
40:58 Je dis grâce au wokisme parce que c'est une façon aussi de mesurer la puissance des arguments
41:02 en faveur d'une thèse universelle que d'y voir une opposition si antique.
41:06 Ce qui est intéressant avec le wokisme, c'est que c'est une adversité plus vieille que le marxisme.
41:12 L'identitarisme est une adversité plus vieille que le marxisme.
41:17 C'est une modalité de la clôture, de la pensée close, qui précède de loin les pensées en système du 19e siècle.
41:25 Je ne suis pas sûr que ce soit un phénomène si neuf, je ne suis pas sûr que le danger soit comparable.
41:31 J'ai plutôt le sentiment que les tenants du wokisme réactivent sans le savoir la pensée conservatrice des contre-révolutionnaires.
41:42 Avec une forme de puritanisme aussi.
41:45 Prenez la Belle au bois dormant.
41:48 La Belle au bois dormant, il y a 40 ans, fait scandale parce que les ligues de vertu s'indignent d'un baiser hors mariage.
41:54 Aujourd'hui, la Belle au bois dormant fait scandale parce que les néo-féministes s'indignent d'un baiser sans consentement.
42:01 C'est la même histoire. La matière a changé, la matière est rigoureusement identique.
42:07 On revisite, c'est le même vertuisme délétère, c'est le même danger en réalité.
42:13 Donc il faut combattre le wokisme comme il fallait combattre la réaction à l'époque.
42:19 Ce qui est intéressant avec le wokisme, c'est que c'est un réactionnariat progressiste.
42:26 Il se vit comme progressiste. Il vous présente vous-même comme conservateur.
42:30 Je suis le conservateur d'une époque où l'on était plus libre qu'aujourd'hui.
42:35 Tout à fait, Raphaël Eintmann.
42:38 Dernière question, parce qu'on touche malheureusement à la fin de l'émission.
42:43 En tout cas dans les dernières questions, Camus a été aussi beaucoup controversé au moment de la guerre d'Algérie
42:52 où il refusait de choisir son camp.
42:56 La fameuse phrase sur la justice et sa mère, où en réalité il réagissait face au terrorisme
43:04 et il expliquait que si la justice du terrorisme c'était de mettre des bombes et que sa mère...
43:12 Cette phrase est un scandale, il faut quand même le redire, le dire et le redire.
43:16 Elle fait écho à l'actualité.
43:19 Camus n'a jamais dit "entre la justice et ma mère, je choisis ma mère".
43:25 Camus a dit à un militant du FLN "en ce moment il y a des gens qui posent des bombes dans des bus
43:34 que ma mère pourrait prendre au nom de la justice. Si c'est cela la justice, je préfère ma mère".
43:40 Autrement dit, Camus n'a pas dit "je préfère ma mère à la justice", il a dit "une justice qui peut tuer ma mère
43:48 n'est pas une justice juste". C'est ça qu'il a voulu dire.
43:52 Camus est vilipendé parce qu'on l'a réduit à des paroles qu'il n'avait pas tenues ou à des choses qu'il n'avait pas pensées.
43:58 Au moment de la guerre d'Algérie, le problème de Camus...
44:02 C'est un peu comme Tocqueville au moment de la révolution de 48.
44:07 On sent bien que ces gens-là n'aiment pas ce qui est en train de se passer
44:12 et qu'ils sont obligés d'y adhérer parce qu'ils y voient une nécessité.
44:16 Tocqueville c'était un aristocrate perdu en démocratie et qui consentait à la démocratie qu'au fond il n'aimait pas trop.
44:22 Camus, c'est un français d'Algérie ou un algérien de France, pour lui c'était synonyme.
44:28 Camus est un français d'Algérie qui était profondément déchiré par ce conflit.
44:32 Mais la vertu de cette déchirure, c'est qu'il était incapable d'être con.
44:38 Il était incapable d'adhérer, j'appelle être con, l'adhésion corps et âme à une cause au dépend de l'autre.
44:45 Il était incapable d'être idiot. Il était suffisamment... Il entendait tous les discours.
44:51 Il était perméable à tous les discours.
44:53 Alors Camus n'a pas vu l'épilogue. Je ne sais pas ce que Camus aurait dit désaccordéviant.
44:57 Je pense qu'il aurait vécu ça comme... Enfin il aurait eu le cœur brisé à mon avis.
45:01 Le cœur brisé et en même temps il aurait trouvé ça nécessaire. J'en sais rien en vérité.
45:04 Il y avait aussi l'idée peut-être qu'aucune cause mérite un déchaînement de violence contre des innocents.
45:12 Oui bien sûr. Mais ça dépend des... Oui évidemment.
45:17 Il aurait été le premier à dénoncer le fait que l'armée ait obtenu des pouvoirs de police et les tortures.
45:24 Camus aurait promu le livre de Henri Halleg. La question, il aurait probablement lutté sur ce terrain-là.
45:30 Mais vous m'emmenez sur le terrain qui me... Comment dire ?
45:33 Vous flattez la tentation de faire parler les morts et je suis embarrassé de le faire à chaque fois.
45:38 Je préfère m'abstenir là-dessus parce qu'on le saura jamais.
45:42 Eh bien on le saura jamais. Ce sera là.
45:44 Ce sera les mots de la fin.
45:46 La dernière réponse de Raphaël Antovone qui n'aura pas voulu nous parler du 7 octobre.
45:51 Je ne demandais que ça camarade. On n'avait pas le temps.
45:54 Et de Camus mais on n'a pas le temps. Ça pourrait être le sujet d'une émission supplémentaire.
45:59 En tout cas merci d'avoir été avec nous. C'était passionnant.
46:02 Je vous laisse avec les informations et on se retrouve la semaine prochaine pour un nouveau numéro.
46:06 Dans toute vérité, merci.
46:08 [SILENCE]

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