Avec Vincent Jauvert, grand reporter, ancien chef du service étranger de "L'Obs", auteur de "À la solde de Moscou" publié aux éditions du Seuil.
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00:00 Sud Radio Berkhoff dans tous ses états, le face à face.
00:06 Il est 13h03 sur Sud Radio, l'heure pour nous de vous présenter ce face à face.
00:09 Jusqu'à 14h André Berkhoff vous recevez Vincent Jauvert qu'on connaît bien pour ses livres d'investigation.
00:14 Le grand reporter, ancien chef de service étranger à l'Obs et auteur de ce nouveau livre qui sort demain en librairie à la Solde de Moscou.
00:21 C'est aux éditions du Seuil. Bonjour Vincent Jauvert.
00:24 Bonjour. Alors Vincent Jauvert, je rappelle, on l'a reçu et toujours avec plaisir pour la mafia d'Etat notamment,
00:30 puis il a fait plusieurs livres et lui justement il enquête.
00:34 L'enquête vous savez c'est très important, c'est très très bien d'éditorialiser, c'est très bien de commenter, mais c'est très bien d'enquêter.
00:43 C'est quand même la fonction première du journalisme, n'oubliez jamais ce que disait Albert Londres, la plume dans la plaie.
00:49 Et là alors, quelle plaie ? Quelle plaie Vincent Jauvert à la Solde de Moscou ?
00:55 Effectivement, livre qui paraît demain. Et ce qui est étonnant c'est que d'abord, vous êtes d'accord avec moi,
01:01 il n'y a pas une grande puissance qui n'a pas ses espions plus ou moins cachés.
01:05 Je dirais que vous n'avez pas fait le livre sur l'Amérique et la CIA, mais on pourrait faire le même livre ou pas sur l'Amérique et la CIA.
01:11 Juste un mot avant de commencer.
01:13 Oui je l'ai fait, je l'ai fait. C'était même dans mon premier livre il y a 20 ans, qui s'appelait "L'Amérique contre De Gaulle"
01:19 à partir des archives américaines qui venaient juste d'être ouvertes, et notamment les archives de la CIA qui montraient comment elles espionnaient De Gaulle.
01:26 Donc, c'est ici.
01:27 Ah oui, c'est ça. Bah écoutez, voilà.
01:29 Je vais vous raconter une anecdote qui est très marrante, juste une anecdote.
01:32 Ils étaient tellement fascinés par De Gaulle qu'ils interceptaient évidemment toutes ses communications,
01:36 et quand De Gaulle est allé au Mexique, avant d'aller au Mexique pour son fameux discours "mano a mano"
01:40 La mano es la mano, y viva México, oui.
01:42 Il envoie ce discours avant à l'ambassadeur de France au Mexique pour avoir son point de vue.
01:48 La CIA, enfin la NSA intercepte, et le discours est tellement bon que le conseiller à la sécurité nationale de Johnson
01:56 le montre à Johnson et écrit au bord de...
01:59 "Monsieur le Président, vous devriez lire ce discours et vous devriez vous en inspirer."
02:03 Avant qu'il n'y ait prononcé.
02:05 De Gaulle, ouais, c'est très joli.
02:07 Si, si, bien sûr, les américains...
02:08 Mais juste un mot, on ne va pas s'éterniser là-dessus, Vincent Jauvert.
02:11 Mais dans votre livre, donc, paru il y a 20 ans,
02:13 on parlait aussi de journalistes, d'intellectuels, etc.
02:18 Parce qu'il y en a eu, vous savez, un certain nombre de revues qui ont été financées par la CIA.
02:22 Vous en parliez ?
02:23 Non, mais je révélais l'existence encore plus importante d'une taupe qui était au quai d'Orsay pour la CIA
02:30 au moment de la sortie du commandement intégré de l'OTAN,
02:33 qui était le directeur des pactes, c'est-à-dire l'équivalent à peu près aujourd'hui du directeur politique.
02:38 D'accord.
02:39 Si, si, il y avait des taupes, bien sûr, de la CIA, évidemment.
02:41 D'accord. Alors justement, parlons maintenant de ce livre, de la sotte de Moscou,
02:46 qui effectivement, c'est un thriller.
02:48 C'est l'espion qui venait non pas du froid, mais qui venait de l'Hexagone.
02:53 Et c'est vraiment intéressant parce que justement, ça embrasse des politiques, des journalistes, des hauts fonctionnaires.
02:59 Et vous racontez très bien, en fait,
03:03 et c'est parti, on peut dire que c'est parti dès...
03:07 ça a commencé presque au début du XXe siècle, c'est pas 45.
03:13 Mais vous, vous avez choisi depuis 45.
03:15 Oui, parce que ma source, ce sont les archives d'un service secret, du seul service secret qui a ouvert toutes ces archives,
03:23 c'est la STB, c'est-à-dire les services tchécoslovaques.
03:26 C'est votre source.
03:27 C'est ma source première, et en gros c'était la filiale tchécoslovaque du KGB, le soviétique,
03:34 et donc ça date de 45, pas avant, puisque avant, le bloc de l'Est n'existait pas.
03:40 Et vous êtes alors, non juste pour rappeler, comment vous êtes tombé dessus ?
03:44 Par un article dans une revue anglo-saxonne de renseignements,
03:49 de spécialistes, un historien qui racontait l'histoire de Medhi Ben Barka, ça c'est dire quelque chose aux français,
03:55 et qui racontait que Medhi Ben Barka était un agent tchécoslovaque, en fait, et rémunéré comme tel.
04:01 Et à l'intérieur de l'article, il était dit qu'il y a eu une campagne de désinformation organisée à propos de l'enlèvement de Ben Barka dans la presse française,
04:09 via deux médias...
04:10 1965.
04:11 Ouais, ou 66, même chose.
04:13 66, ouais.
04:14 Bon, on s'en fout.
04:15 Il y a deux médias dont certains journalistes étaient achetés par la STB, le Canard Enchaîné et le Nouvel Observateur.
04:25 Et donc je discutais avec cet historien, qui m'a raconté des choses, et ensuite je suis allé sur place,
04:31 et demander les archives, et aidé par une formidable interprète politologue, Sarah,
04:38 on a travaillé pendant plusieurs mois sur ces milliers et milliers de documents.
04:42 Il y avait, oui, il devait y avoir une abondance.
04:44 Oui, parce qu'il note tout, il note tout.
04:46 Il note quand ça marche, il note quand ça marche pas, tous les détails.
04:50 Et ça c'est unique au monde, on n'a jamais eu d'archives du fonctionnement des services de renseignement au quotidien.
04:59 Ah oui, c'est vraiment... Il notait tout ?
05:01 Tout, il notait tout. Et aucun service de renseignement n'a jamais ouvert ça.
05:05 Il faut savoir que les français sont très fiers de dire, par exemple, qu'ils ont ouvert leurs archives de 1940.
05:12 Ah ouais ?
05:13 Donc là ça remonte jusqu'en 1989.
05:16 Donc c'est exceptionnel comme matériau, exceptionnel.
05:19 Oui, tout à fait. Et vous avez pu, donc, eux ils vous ont laissé tout consulter, tout voir.
05:23 Ah, n'importe qui peut faire ça.
05:25 Et alors la France, à la part, parce que je suppose qu'ils ne parlaient pas que de la France, et vous le dites,
05:31 mais à une part en tout cas pas négligeable du tout.
05:34 Ben non, parce que c'était un pays important, d'abord jusqu'en 1966 c'était le siège de l'OTAN, on l'a souvent oublié.
05:39 Bien sûr.
05:40 Et puis après c'était le leader, à l'époque le seul leader politique de l'Europe, l'Allemagne était quand même un nain politique,
05:46 c'était un pays qui avait l'arme nucléaire, d'ailleurs ils se sont beaucoup renseignés là-dessus, on pourra en parler tout à l'heure.
05:52 Donc un pays qui était militairement quand même important, politiquement décisif, le Parti Communiste était puissant encore,
05:59 et ils cherchaient à enfoncer des coins à l'intérieur de la société, donc oui la France était une cible majeure du Bloc de l'Est.
06:09 Et alors comment, justement, parce que vous en parlez dans votre livre encore une fois, lisez-le,
06:14 parce que ça se lit vraiment comme un roman policier, je vous dis, c'est Vincent Lecarré ou John Jauvert, je ne sais pas, mais ça se lit vraiment bien.
06:24 Comment ils procédaient ? Alors comment ça se passait ? La mécanique, bah évidemment ça dépendait des gens,
06:30 mais grosso modo, comment on est Service Tchèque, évidemment très proche de Moscou, du Kremlin, de l'URSS,
06:38 comment on fait, comment on attire, comment on séduit, comment on hameçonne le poisson ?
06:46 C'est une très bonne question parce qu'on voit bien qu'ils employaient toujours la même technique,
06:53 et c'est celle qui marchait, et je suppose qu'ils emploient toujours la même technique.
06:57 C'est une approche circulaire, d'un serpent, il tourne autour, il se renseigne d'abord à l'extérieur, puis à l'intérieur,
07:06 ils vous font parler, ils vous invitent à déjeuner plusieurs fois, ils posent des questions assez larges,
07:11 comme nous les journalistes, on appelait ça, vous vous souvenez, dégorger, faire dégorger, on fait parler,
07:15 et puis petit à petit, ils demandent des questions précises sur votre famille, sur vos antécédents, sur vos pères, vos parents, vos enfants,
07:22 votre situation financière, vos amis, ils vous, mine de rien, ils notent tout.
07:28 - Mais de façon très légère, comme ça ? - Légère, légère, et puis ils vous posent des questions sur la politique,
07:33 ça dépend de ce que vous faites, mais sur la politique, etc.
07:36 Et ils voient si vous êtes engageant, si vous répondez, et si vous avez des faiblesses, si vous avez des fragilités,
07:43 ça s'appelle une fragilité d'ego, on en parlera à propos de quelques-uns,
07:47 et fragilité idéologique, enfin fragilité ou penchant idéologique, qui n'était pas forcément visible,
07:54 le cas de Paul-Marie Lagorche, qu'on pensait être un gaulliste qui était en fait très orienté vers les soviétiques,
07:59 si vous avez des relations sexuelles que vous ne voulez pas revendiquer, il cherchait beaucoup ça,
08:05 et puis à un moment, il décide, alors il s'écrive entre eux, il demande d'abord à Moscou,
08:13 il demande à Moscou "est-ce qu'on peut le faire, est-ce qu'on peut y aller, où est-ce que vous êtes sur le gars,
08:17 qu'est-ce que vous savez sur lui ?" Dans certains cas, que je raconte encore une fois de Paul-Marie Lagorche,
08:21 il dit "ah non, non, là il est chez nous déjà, arrêtez", ou alors "oui, allez-y, il n'y a pas de problème,
08:27 on sait ça et ça de lui, ou d'elle, enfin on ne laisse pas s'y, il n'y a que des hommes,
08:31 et alors on organise le déjeuner, où on va avancer doucement vers la tentative de recrutement,
08:40 on ne va pas trop loin parce qu'on veut pouvoir jouer l'ambiguïté, et dire "ah non, non, on s'est mal compris,
08:46 on voulait voir si vous étiez d'accord pour discuter régulièrement avec nous".
08:52 On fixe à ce moment-là, quand on sent que ça mord, on dit "bon ben, si vous êtes d'accord,
08:58 on va se voir toutes les six semaines, toujours, pour tenir la personne, il faut la voir régulièrement,
09:06 toutes les six semaines, et puis vous allez accepter des rendez-vous clandestins,
09:11 c'est-à-dire que vous n'allez le dire à personne, et puis on va organiser des systèmes de remplacement,
09:17 c'est-à-dire que si on voit qu'il y a un problème dans cet endroit, si au bout d'un quart d'heure l'un des deux n'est pas là,
09:24 on se retrouve, par exemple, le lendemain à la même heure au même endroit.
09:27 Et ça c'est la preuve que si la personne se présente le lendemain au même endroit à la même heure,
09:32 - Il a mordu. - Il a mordu. Et c'est le cas de Gérard Carré-Roux, par exemple.
09:35 - Oui, oui, non, non, c'est absolument pas ce genre.
09:39 - Et je suppose qu'il faut, et la réunion, le déjeuner, est sécurisé,
09:45 c'est-à-dire que si la personne ne le sait pas, qu'elle va être recrutée,
09:48 il y a deux ou trois agents des services spéciaux qui sont allés à côté,
09:52 et qui ont repéré le lieu pendant deux, trois heures auparavant.
09:56 - Passionnant. On se retrouve tout de suite avec Vincent Jauvert après cette petite pause.
10:00 - Et puis on prendra toutes vos questions aussi sur ce sujet passionnant, 0826 300 300,
10:05 pour réagir et pour poser toutes vos questions à Vincent Jauvert.
10:08 On est ensemble jusqu'à 14h. A tout de suite.
10:10 - Sud Radio, votre attention est notre plus belle récompense.
10:14 - Je voudrais vous remercier d'exister. - Ah bah c'est gentil.
10:16 - Parce que vous êtes vraiment la seule radio que j'écoute,
10:18 et vous êtes quasiment les seuls à faire véritablement votre métier de journaliste.
10:22 - Sud Radio, parlons vrai.
10:24 - Ici Sud Radio.
10:28 Les Français parlent au français.
10:33 Je n'aime pas la blanquette de veau.
10:36 Je n'aime pas la blanquette de veau.
10:39 - Sud Radio Bercov dans tous ses états.
10:42 - Et là, c'est plutôt comment les Russes, les Soviétiques et les Russes
10:45 séduisent certains Français à la solde de Moscou de Vincent Jauvert,
10:50 un livre passionnant qui paraît demain aux éditions du Seuil.
10:54 Alors justement, entrons non pas dans le vide du sujet,
10:57 mais voyons des gens. Voyez, Paul-Marie de Lagorse.
10:59 Moi quand j'ai vu Paul-Marie de Lagorse, pour moi c'était un gaulliste.
11:03 Paul-Marie de Lagorse, très connu.
11:05 Rappelez d'ailleurs qui c'était Vincent Jauvert.
11:07 - C'était un grand journaliste qui a commencé sa carrière dans les années 50
11:13 et qui l'a terminé, je ne me trompe pas, dans les années 90.
11:18 Il a été directeur du service étranger de Radio France, je crois, de TF1.
11:23 Grand éditorialiste.
11:25 Les Français de nos âges se souvenaient de son visage à la télévision comme commentateur.
11:31 Et on le croyait, plus à la fin, mais en tout cas dans les années 60,
11:36 on pensait qu'il était comme sa famille, famille d'aristocrates désargentés,
11:41 de droite, gaulliste, comme son frère qui était à l'OTAN.
11:45 Et ça lui permettait d'avancer masqué en quelque sorte.
11:48 Parce qu'en réalité, il était proche des idées, on l'a vu à la fin de sa vie tout de même,
11:53 des idées soviétiques, disons, en tout cas de bloc de l'Est.
11:58 Et donc, Paul-Marie de Lagorse, au début de sa carrière,
12:01 il a accepté de travailler pour la STB Tchécoslovaque.
12:05 Il était devenu un agent très important, notamment sur l'OTAN,
12:11 il connaissait beaucoup de choses.
12:13 Et puis à un moment, comme je le disais tout à l'heure,
12:15 la STB a demandé au KGB, à Moscou, leur a dit "on voudrait aller plus loin avec lui,
12:20 qu'est-ce que vous en pensez ?"
12:21 "Non, non, vous arrêtez tout de suite parce qu'il est déjà chez nous."
12:24 Et il était d'ailleurs, non pas au KGB, mais à ce qu'on appelle le GRU,
12:29 c'est-à-dire le service de renseignement militaire.
12:31 - Depuis longtemps ?
12:32 - Depuis le début de 1960, je crois, je ne me souviens plus exactement,
12:36 jusqu'à quand est-il resté ?
12:38 J'en sais rien, puisque évidemment les archives du KGB ou du GRU,
12:41 elles sont fermées à double tour par Poutine.
12:43 - Bien sûr.
12:44 - Mais probablement, il a resté un certain temps,
12:47 parce qu'il avait besoin d'argent.
12:49 Lui, c'est le cas type de la personne qui avait besoin d'argent.
12:53 Il le disait d'ailleurs tout à fait ouvertement à ses officiers traitants,
12:57 et qui ont payé régulièrement,
12:59 là à l'époque c'était quelque chose comme 2000 francs, je crois, par mois,
13:02 ce qui devait être le double du SMIC.
13:04 - Ouais.
13:05 - Plus des primes, toujours des primes.
13:07 Et c'était le renseignement militaire.
13:09 - C'est ça.
13:10 - Parce que notamment il avait un frère,
13:12 et puis il avait cette image du gaulliste aristocrate,
13:16 qui évidemment ne pouvait pas trahir la France.
13:18 - Il y aurait pensé, oui.
13:19 - Et qui trahissait la France.
13:21 - Alors, quelqu'un d'autre que j'ai connu, moi,
13:23 comme rédacteur en chef de l'Express, je me rappelle, dans les années,
13:27 allez, ça ne nous rajeunit pas, mais dans les années 72 à 75,
13:32 je crois en tout cas, moi j'ai quitté l'Express en 75,
13:35 Philippe Grimbach.
13:36 - Ouais.
13:37 - Alors ça c'est intéressant, très proche de Giroud,
13:39 très proche de tout le monde,
13:41 très proche des milieux à la mode, enfin Grimbach très dandy un peu.
13:44 - Alors Grimbach, le cas Grimbach n'a pas été révélé par moi,
13:48 mais par l'Express quelques jours avant que je sorte le livre.
13:51 C'est une très belle enquête de l'Express sur leur ancien patron,
13:55 et lui a travaillé émargé au KGB,
13:58 ils l'ont reçu par une autre source, c'est un peu compliqué à raconter.
14:02 - Mais vous l'avez eu aussi, il n'était pas non, pas rapport du tout.
14:06 - Non, il n'était pas au service des tchèques, il était au service uniquement du KGB,
14:09 et c'est un transfuge qui avait déjà écrit un livre très important dans les années 90,
14:14 avec des noms de code, mais les noms de code de Grimbach
14:17 n'étaient pas associés à son nom, il ne donnait pas les noms,
14:20 et dans ces notes initiales, il y avait les noms,
14:23 une note initiale qui était en Grande-Bretagne,
14:26 et l'Express a eu la bonne idée d'aller voir ces notes-là,
14:30 où il y avait marqué le nom de code, un tel, c'est Philippe Grimbach.
14:34 - Et c'était intérêt ou conviction, lui ?
14:37 - Si j'ai bien compris, c'est les deux.
14:40 C'est surtout l'intérêt.
14:42 - Et alors justement, vous, vous parlez de quelqu'un,
14:44 enfin on va en parler, de deux personnes.
14:46 - Mais pardonnez-moi vos interrompes, même si c'est pas moi qui l'ai découvert,
14:49 c'est un formidable agent, c'est un des rares qui a été décoré à Moscou,
14:54 clandestinement, pour le travail qu'il a accompli.
14:56 - Il a été décoré ? - Décoré à Moscou.
14:58 - Officiellement ? - Mais officiellement, enfin je veux dire.
15:01 - Oui, oui, par le patron numéro 2 du KGB de l'époque.
15:04 Il y en avait plusieurs, c'est quand même, voilà,
15:08 un personnage flamboyant, extraordinaire,
15:11 pas forcément sympathique, mais un entre-genre incroyable,
15:15 c'est d'ailleurs pour ça qu'il a été choisi, forcément.
15:17 - Oui, forcément, parce qu'il connaissait.
15:19 - Et insoupçonnable, comme toujours.
15:21 Les meilleurs sont ceux qui sont absolument insoupçonnables.
15:23 - Personne n'y pense, par exemple, alors vous parlez d'un joueur des Duel Ops,
15:27 lui qui apparemment avait besoin d'argent, Albert-Paul Lantin.
15:30 - Oui, alors lui, il était soupçonnable, en ce sens,
15:33 c'était un De Gaulle, qui était très engagé dans le combat anticolonial,
15:37 c'est lui qui avait fait l'intermédiaire entre,
15:40 et c'est comme ça qu'il a pu avoir les informations,
15:42 entre l'Élysée de De Gaulle et le FLN.
15:44 Donc, personnage qui est très engagé, ancien résistant,
15:47 et donc les gaullistes de gauche, ceux qui étaient les plus engagés
15:51 en faveur de la décolonialisation de l'Algérie,
15:55 lui parlaient en n'imaginant pas une seconde que c'était un agent.
16:00 Et donc, il a eu accès à des informations, notamment nucléaires,
16:03 sur l'avancement, ou plutôt le non-avancement de la bombe H,
16:07 des travaux de la bombe thermonucléaire française,
16:09 qu'il a livré aux Tchèques, donc aux Soviétiques,
16:13 et en ce sens-là, il a livré des informations militaires très importantes.
16:17 - Et justement, lui c'était quoi ?
16:19 Parce que, comme vous dites, c'est pas parce qu'on est à gauche
16:21 qu'on va devenir espion tchèque ou du KGB.
16:24 - Bien sûr.
16:25 - Alors, qu'est-ce qui le motivait ?
16:26 - L'argent.
16:27 - L'argent.
16:28 - L'argent. Ah oui, oui.
16:29 Lui, il était rémunéré au départ.
16:30 - Il disait qu'il n'était pas bien payé au Nouvel Obs.
16:32 - Il disait qu'il n'était pas bien payé au Nouvel Obs,
16:34 et à un moment, il était payé 800 francs,
16:37 il demande 1000 francs par mois,
16:39 et son officier traitant écrit,
16:41 "Franchement, ça serait normal d'aligner son salaire
16:44 avec notre agent de je ne sais plus quel journal,
16:47 ça se fait en France, et puis il faudrait, je vous jure que c'est vrai,
16:50 il faudrait l'équivalent du 13ème mois."
16:52 - Ah ah ah, c'est magnifique, oui.
16:55 Et les RTT ?
16:56 - Pas encore les RTT, mais le 13ème mois, oui.
16:59 - Ah, c'est pas mal, Albert Po...
17:01 Et alors, l'autre flamboyant, quand même,
17:03 le canin enchaîné, le journaliste du canin enchaîné,
17:06 qui ne connaît pas, pour ceux qui...
17:09 Je vous parle d'un temps que les moins de 30 ans ne peuvent pas connaître,
17:11 mais enfin, Jean Clémentin.
17:13 - Oui, Jean Clémentin, maintenant,
17:15 il a été, à l'époque, rédacteur en chef politique,
17:19 puis il est devenu rédacteur en chef tout court,
17:22 et celui qui a vraiment lancé le canin enchaîné
17:24 sur l'enquête, sur la révélation,
17:27 donc le personnage central du canin enchaîné,
17:29 qui était un agent de la STB,
17:31 et lui aussi, pour de l'argent,
17:33 au départ, idéologiquement, il était à droite,
17:36 d'une famille très à droite, même,
17:39 et puis, il est allé en Indochine,
17:41 et là, il a vu les désastres de la colonisation,
17:44 en quelque sorte, les drames,
17:46 il s'est rapproché du Parti communiste,
17:49 de libération de l'époque, c'est-à-dire,
17:51 qui n'a rien à voir avec la libération d'aujourd'hui,
17:53 qui était quand même dans le groupe,
17:55 et on ne s'en est pas aperçu, mais il est resté,
17:57 et à ce moment-là, la STB l'a recruté,
17:59 et il a fait passer,
18:02 non seulement il a formé de la même façon
18:04 l'entourage de Gaulle, etc.,
18:06 par exemple, il avait accès aux médecins
18:09 qui avaient opéré de Gaulle, de la prostate,
18:12 donc, important de savoir ce que c'est cancéreux,
18:14 où ça en est, etc.,
18:16 et donc, il a formé là-dessus,
18:18 et puis, il a fait passer plusieurs fois
18:21 de fausses articles,
18:23 articles dictés par la STB,
18:25 - Ou dans le canard ! - Dans le canard !
18:27 - C'est ce qu'on va compter.
18:29 - Et on voit d'ailleurs,
18:31 on voit l'article final,
18:33 imprimé dans le canard, et puis on voit dans les archives,
18:35 le brouillon en tchèque.
18:37 - Incroyable !
18:39 - Par exemple, c'était un peu compliqué, mais c'est intéressant,
18:41 parce que je suis sûr qu'ils continuent à faire la même chose,
18:43 évidemment, il fallait enfoncer le clou
18:45 entre la France et l'Allemagne,
18:47 donc ils avaient inventé un faux testament politique
18:49 du chancelier Adenauer,
18:51 disant qu'il fallait embêter la France,
18:53 quelque chose comme ça, qui était totalement faux,
18:55 et ça permettait de créer un coin
18:57 entre la France et l'Allemagne.
18:59 Ça n'a pas vraiment marché, en fait, à l'époque.
19:01 - Il a aussi l'argent, et lui aussi, pendant très longtemps, quand même,
19:03 Jean Clémentin.
19:05 - Oui, oui, oui,
19:07 jusque dans les années... début des années 70,
19:09 et il a commencé en milieu des années 50.
19:11 Oui, longtemps, longtemps,
19:13 il a pu payer sa maison, comme ça,
19:15 il a...
19:17 Oui, oui, oui, et il n'a pas voulu me parler,
19:19 quand j'ai sorti l'affaire,
19:21 j'ai sorti l'affaire d'abord
19:23 dans le Nouvel Obs,
19:25 et il est mort entre temps.
19:27 - D'accord, il n'a pas voulu vous recevoir à ce moment-là.
19:29 - Non, ni lui, ni son fils.
19:31 - Alors, parlons de quelqu'un
19:33 qui est encore en activité,
19:35 disons, Gérard Carreyrou.
19:37 Gérard Carreyrou,
19:39 Europe 1, TF1,
19:41 un peu partout,
19:43 et qui a d'ailleurs très vivement
19:45 protesté
19:47 contre votre livre, et vous-même.
19:49 Alors,
19:51 Gérard Carreyrou,
19:53 qu'est-ce qui s'est passé ?
19:55 - Eh bien, Gérard Carreyrou
19:57 n'était pas un personnage important
19:59 à la STB, comme je le dis,
20:01 il n'était pas agent.
20:03 Il y a une gradation,
20:05 il y a l'informateur,
20:07 un formateur simple,
20:09 la personne n'est pas au courant du tout
20:11 qu'elle discute avec quelqu'un des services d'enseignement,
20:13 le collaborateur de confiance
20:15 qui commence à entrer dans la clandestinité,
20:17 mais il n'est pas sous les ordres,
20:19 il n'est pas forcément
20:21 censé savoir qu'il a en face de lui
20:23 quelqu'un des services d'enseignement, et puis il y a l'agent qui est totalement
20:25 sous ordre et qui est payé. Lui, il était au milieu,
20:27 il savait
20:29 qu'il avait affaire,
20:31 en tout cas, il savait, d'après les rapports
20:33 du service de renseignement tchèque,
20:35 qu'il savait, puisque
20:37 je vous ai raconté l'histoire
20:39 de la réunion de remplacement, il est allé à une réunion
20:41 de remplacement, donc il savait
20:43 qu'il était dans une relation
20:45 clandestine,
20:47 et il n'était pas rémunéré, malgré ce qu'il
20:49 dit, je n'ai jamais dit qu'il était rémunéré,
20:51 mais il recevait des cadeaux,
20:53 du cristal de Bohème, des vases,
20:55 des services divers et variés,
20:57 on a les factures,
20:59 mais il savait à qui il avait affaire, il savait parfaitement à qui
21:01 il avait affaire, en tout cas, d'après ce qu'ils disent
21:03 eux, et eux,
21:05 quand ils disent que ça ne marche pas avec quelqu'un,
21:07 ils le disent, quand ils disent
21:09 que quelqu'un ne sait pas à qui il a affaire,
21:11 ils le disent,
21:13 on pourra venir tout à l'heure sur des gens
21:15 qui ont refusé, sur des gens...
21:17 Et donc, lui,
21:19 tout porte à croire,
21:21 qu'il a accepté pendant deux ou trois
21:23 ans de travailler pour eux,
21:25 je pense essentiellement, un peu par
21:27 idéologie, c'était un homme de gauche à l'époque,
21:29 et puis je pense surtout
21:31 par égo, il était flatté,
21:33 il leur disait
21:35 que ses rapports
21:37 allaient directement
21:39 à Prague, au comité central,
21:41 que c'était un élément
21:43 de paix très important, ce qu'il faisait
21:45 était fondamental pour la paix dans le monde,
21:47 je pense que c'est un des éléments.
21:49 - L'égo peut jouer, c'est clair.
21:51 - L'égo joue, certainement.
21:53 - On continue à en parler, c'est passionnant,
21:55 avec Vincent Jauvert à la solde de Moscou,
21:57 non pas Vincent Jauvert à la solde de Moscou,
21:59 on pourrait le dire, non ?
22:01 Je plaisante, je galège.
22:03 Après, cette toute petite pause.
22:05 - Et vous aurez la parole 0826 300 300,
22:07 pour poser toutes vos questions,
22:09 à tout de suite.
22:11 - Sud Radio Bercov,
22:13 dans tous ses états,
22:15 appelez maintenant pour réagir,
22:17 0826 300 300.
22:19 - Ici Sud Radio,
22:21 les Français
22:25 parlent au français,
22:27 les carottes sont cuites,
22:29 les carottes sont cuites.
22:31 - Sud Radio Bercov,
22:33 dans tous ses états.
22:35 - Quel portrait, quel portrait,
22:37 quel dîner de tête à la solde de Moscou,
22:39 le livre de Vincent Jauvert.
22:41 Alors justement, on parlait un peu,
22:43 les faiblesses, il y a l'égo, il y a l'argent,
22:45 et puis il y a aussi, quand même, il faut le dire,
22:47 le sexe, ça joue quand même
22:49 un rôle non négligeable, on sait, il n'y a pas une
22:51 histoire d'espionnage qui est
22:53 sévrée dans la réalité. Justement,
22:55 avant de parler de Patrick Collier et de Gérard Lecomte,
22:57 Albert Paul Lantin, vous disiez,
22:59 était assez friard de donner
23:01 quelques secrets d'alcove, peut-être,
23:03 à ses interlocuteurs.
23:05 - Absolument, la compromission par le sexe
23:07 était vieux comme le monde,
23:09 et ils cherchaient, donc, les
23:11 journalistes, qui étaient à leur solde,
23:13 donner des informations sur
23:15 les situations financières de leurs
23:17 cibles, si évidemment, il manquait
23:19 d'argent, et puis, savoir quelle était
23:21 leur orientation sexuelle, et leur activité
23:23 sexuelle, leur désir,
23:25 et, par exemple, Lantin
23:27 a révélé
23:29 qu'un tel, ancien patron d'une
23:31 grande chaîne
23:33 de radio,
23:35 adorait les parties fines.
23:37 Bon, alors, est-ce qu'ils l'ont
23:39 utilisé ensuite ? Est-ce qu'ils le
23:41 reconnaissaient ? Est-ce qu'ils étaient d'accord ?
23:43 Ou un tel rêvait de tromper sa femme,
23:45 mais avait pas trouvé,
23:47 et donc, mais, simplement,
23:49 il voudrait pas que sa femme le sache. Donc, évidemment,
23:51 Lantin dit, ben, ça serait bien que vous
23:53 envoyiez une belle érondelle,
23:55 comme on dit, et puis après,
23:57 vous vous coincez. Cela dit,
23:59 je n'ai pas vu dans les archives, de
24:01 recrutement, mais sans doute, fait
24:03 par le biais de la compromission sexuelle.
24:05 Je n'ai pas vu, mais ils le cherchaient.
24:07 - Alors, quelqu'un qui a eu une autre
24:09 attitude, Patricollier, je rappelle,
24:11 Patricollier, ancien président de l'Assemblée nationale,
24:13 bien sûr, entre compagnons, on le sait,
24:15 de Madame...
24:17 - Aliot-Marie. - Aliot-Marie. - C'est ça.
24:19 Alors, Patricollier a été aussi recruté,
24:21 en tout cas, on a tenté de le recruter.
24:23 - Oui, il a fait semblant de marcher,
24:25 mais dès qu'il a compris qu'il avait
24:27 affaire à des gens du service de renseignement, il est allé voir
24:29 la DST, j'ai vérifié auprès des anciens,
24:31 c'était bien le cas, tout de suite,
24:33 et donc, il a fait la chèvre.
24:35 Il les a fait parler,
24:37 sur leur méthode, sur qui faisait quoi
24:39 au sein du service,
24:41 il a rapporté tout, il a même été
24:43 à un moment sonorisé, comme on dit.
24:45 - C'est-à-dire,
24:47 il a pris un petit micro.
24:49 - Il avait un micro, et les gens
24:51 de la DST écoutaient par derrière
24:53 et enregistraient.
24:55 Ça a duré pendant plusieurs mois,
24:57 et ensuite, son officier
24:59 traitant, celui qui croyait le traiter,
25:01 a été expulsé, déclaré
25:03 personnel en gratta,
25:05 et lui a reçu une lettre,
25:07 20 ans après, du patron de la DST,
25:09 avec une médaille en reconnaissance
25:11 de son apport
25:13 contre l'espionnage français.
25:15 - Donc, lui, il ne s'est pas laissé embrigadé.
25:17 - Non, pas du tout.
25:19 - Alors, là, lui, c'est intéressant,
25:21 parce que lui, il faisait partie de la police
25:23 et était très près
25:25 des grands du pouvoir, du pouvoir
25:27 gaulliste de l'époque, Gérard Lecomte.
25:29 - Oui, alors, Gérard Lecomte, c'est l'espion parfait,
25:31 comme dit
25:33 John le Carré,
25:35 c'est-à-dire la personne qui a accès
25:37 à énormément d'informations et qui est
25:39 invisible, en gros.
25:41 Il était au cabinet du préfet de police de Paris,
25:43 donc quelqu'un qui est extrêmement bien informé.
25:45 - Bien oui, bien sûr.
25:47 - Et il recevait tous les rapports de la DST
25:49 et du SDEC, c'est-à-dire le service de renseignement.
25:51 - Ah oui, il avait tout.
25:53 - Il avait tout, et s'il n'avait pas assez,
25:55 il allait sur le bureau de ses copains,
25:57 et il donnait tout,
25:59 l'ensemble, au service tchèque,
26:01 il les photographiait chez lui,
26:03 il donnait les films
26:05 à sa femme,
26:07 qui avait rendez-vous très régulièrement
26:09 dans une station de métro qui changeait
26:11 tout le temps, et il se rencontre...
26:13 - Ah, c'est sa femme qui amenait les films.
26:15 - Oui, et dans une rencontre très subreptice,
26:17 à la sortie de la rame,
26:19 un tchèque,
26:21 prenait les films
26:23 et glissait dans la poche
26:25 de madame les billets.
26:27 Ça allait jusqu'à 6 000 francs
26:29 à chaque fois.
26:31 6 000 francs de l'époque, c'est beaucoup d'argent.
26:33 - 6 000 francs de l'époque, c'est énorme.
26:35 - Et ça a duré 12-13 ans.
26:37 Il a été soupçonné,
26:39 il a été arrêté,
26:41 et faute de preuve, ils l'ont relâché.
26:43 L'ancien patron de la DST
26:45 qui couvrait l'affaire à l'époque,
26:47 en parle dans son livre sans donner le nom
26:49 du personnage, et dit que probablement,
26:51 il a compris qu'il y avait une pression politique,
26:53 on ne voulait pas, le pouvoir ne voulait pas
26:55 dire que la police française était infiltrée.
26:57 - Surtout qu'il était le collaborateur
26:59 numéro un du privé de police.
27:01 - Oui, un ou trois.
27:03 Il était dans l'équipe
27:05 d'abord de Papon,
27:07 puis de Grimaud.
27:09 Et il a terminé sa vie, c'était extraordinaire,
27:11 comme patron des Bleus,
27:13 c'est-à-dire, vous savez, l'organisme
27:15 à Nanterre qui accueille les sans-abri,
27:17 pour se laver,
27:19 pour se soigner.
27:21 Et un article du Monde,
27:23 bien plus tard, en 1984,
27:25 qui le qualifie de "saint laïque".
27:27 - C'est magnifique.
27:29 - Alors que cet homme avait trahi la France pendant des années,
27:31 et des années, mais il s'est
27:33 en partie réhabilité.
27:35 - Voilà, il s'est racheté une conscience laïque.
27:37 Alors je crois que nous avons des éditeurs, Estéban.
27:39 - Oui, puisque c'est Philippe qui nous appelle depuis
27:41 quand ? Bonjour Philippe.
27:43 On va retrouver Philippe dans quelques instants,
27:45 mais on a une question sur les réseaux sociaux pour vous,
27:47 Vincent Jauvert. - Oui.
27:49 - À quoi ressemble concrètement un officier traitant ?
27:51 Est-ce que c'est Monsieur Tout-le-Monde ?
27:53 Est-ce que c'est l'espion style
27:55 James Bond ? - Non, c'est Monsieur Tout-le-Monde.
27:57 C'est Monsieur Tout-le-Monde. Il faut que ce soit des gens
27:59 qui passent totalement inaperçus.
28:01 - Ils parlent parfaitement français,
28:03 il n'y a aucun doute ? - Ils parlent parfaitement français.
28:05 La différence avec d'autres, c'est qu'ils sont
28:07 extrêmement sympathiques.
28:09 Tous sont séduits d'abord
28:11 par la personne. - Bien sûr.
28:13 - C'est le job premier. Il faut que l'autre ait l'impression
28:15 qu'il a affaire à un ami qui le comprend.
28:17 - Qui veut devenir un ami. - Un ami.
28:19 Regardez Poutine qui change de face,
28:21 qui s'adapte à vous.
28:23 C'est comme ça qu'il a eu tant de
28:25 succès au début avec tous les
28:27 grands personnages
28:29 occidentaux, les leaders,
28:31 parce qu'ils savaient parfaitement s'adapter
28:33 aux clients en face de lui.
28:35 Et eux, ils étaient pareils. - On a retrouvé
28:37 Philippe André. Philippe, tu nous appelles de quand ?
28:39 Bonjour Philippe. - Bonjour Philippe.
28:41 - Bonjour André, bonjour Monsieur.
28:43 - Bonjour. - Alors,
28:45 du télé... du téléquai public,
28:47 j'ai lu le livre, donc, "Anapsia d'Etat",
28:49 je vous recommande à tous les Français
28:51 auditeurs de le lire.
28:53 C'est un jour,
28:55 c'est un...
28:57 c'est une oeuvre, un chef-d'oeuvre.
28:59 - Merci Monsieur. - J'aimerais
29:01 revenir sur quelque chose, sur l'affaire
29:03 en France contre Charles Hernu,
29:05 ministre de la Défense
29:07 à l'époque, qui...
29:09 - Charles Hernu, vous parlez, oui.
29:11 - Oui, oui, Charles Hernu.
29:13 Je pense que Vincent Jauvert
29:15 est informé sur son cas,
29:17 alors je ne sais plus s'il était impliqué
29:19 dans les renseignements,
29:21 les groupes de renseignements de l'Est ou pas,
29:23 à ce sujet-là.
29:25 Et j'ai une autre question,
29:27 concernant
29:29 la gouvernance Mitterrand,
29:31 mais là c'est inversement proportionnel, on va dire.
29:33 Des gens comme
29:35 Papon et comme
29:37 Bousquet,
29:39 qui ont collaboré, est-ce que
29:41 Mitterrand,
29:43 dans ce cadre-là,
29:45 s'en est servi, ou les services de renseignement
29:47 s'en sont servis ?
29:49 - Vincent Jauvert ? - Pour la deuxième
29:51 question, je ne sais pas, du tout.
29:53 Je ne sais pas, ils n'étaient pas au pouvoir.
29:55 Papon était au pouvoir sous...
29:57 Il était membre du gouvernement sous Giscard.
29:59 Je ne sais pas.
30:01 Quant à la première question... - Sur Charles Hernu.
30:03 - Sur Charles Hernu, alors...
30:05 Il y a quelques années,
30:07 L'Express avait sorti
30:09 toute une affaire sur ce que
30:11 Charles Hernu disait au...
30:13 Je crois que c'était au service de l'Est roumain.
30:15 Et moi derrière, j'avais sorti ce que Charles Hernu
30:17 disait aux Américains, puisque les
30:19 jerseys avaient été ouverts aussi, et il leur disait
30:21 exactement la même chose.
30:23 - Double service.
30:25 - Je ne suis pas... Je pense que ça fait partie
30:27 des gens qui étaient flattés, je ne crois pas
30:29 qu'il ait jamais trahi, mais je peux me tromper.
30:31 - D'accord.
30:33 Une question, parce que nous n'avons pas
30:35 là, tout de suite, une question
30:37 Vincent Jauvert, par rapport à
30:39 tous ces gens, etc.
30:41 Est-ce qu'aujourd'hui,
30:43 que ce soit du côté américain
30:45 ou du côté russe, ou du côté français,
30:47 puisque... Alors on est d'accord,
30:49 le juste, d'abord une question, tout le monde
30:51 utilise un peu partout dans les pays étrangers
30:53 les mêmes tactiques
30:55 d'espionnage et de renseignement. - Bien sûr.
30:57 - Il n'y a pas un pays spécifique,
30:59 vous l'avez dit vous-même... - J'imagine qu'il doit y avoir
31:01 des spécificités des uns et des autres,
31:03 mais enfin... - Tout le monde pratique
31:05 le renseignement. - Oui, et puis tout le monde pratique
31:07 de la même façon, être amis, jouer
31:09 avec les copains, je ne vois pas
31:11 comment on pourrait faire autrement.
31:13 - Est-ce qu'aujourd'hui,
31:15 cette solde de Moscou, à votre avis,
31:17 aujourd'hui, donc,
31:19 sous Poutine,
31:21 puisque votre livre
31:23 appartient vraiment à une période très précise
31:25 et où il y avait effectivement
31:27 des services, aujourd'hui ils sont peut-être
31:29 plus bouclés, mais à votre avis,
31:31 rien n'a changé, sur le fond ?
31:33 - Oh non, rien n'a changé, mais
31:35 tout a continué, comme dit la chanson.
31:37 D'autant plus que,
31:39 du temps de l'Union soviétique,
31:41 le KGB était aux ordres
31:43 du pouvoir politique, on oublie ça,
31:45 le KGB n'était pas au pouvoir en Union soviétique,
31:47 c'était le parti communiste.
31:49 Aujourd'hui, c'est le service de renseignement
31:51 qui est au pouvoir, et ce sont des
31:53 hommes de renseignement, tous,
31:55 au pouvoir. - Y compris Poutine, bien sûr.
31:57 - Mais tous son entourage, c'est unique
31:59 dans l'histoire du monde, unique,
32:01 que des hommes qui sont uniquement
32:03 des gens qui ont été formés pour faire
32:05 de l'espionnage extérieur, dirigent le pays.
32:07 Et donc,
32:09 ils ne savent faire que ça, ils le font bien,
32:11 semble-t-il, donc évidemment, ça continue,
32:13 et de plus belle,
32:15 on a des histoires qui sortent tous les jours,
32:17 tous les jours, partout, dans le monde,
32:19 de gens qui se font arrêter
32:21 pour espionnage, recrutés
32:23 toujours de la même façon, il y a toujours de l'argent,
32:25 il y a toujours une séduction,
32:27 et,
32:29 bon, et vu la tension
32:31 internationale d'aujourd'hui,
32:33 connaître le niveau d'armement
32:35 et de préparation, et d'intention,
32:37 surtout, c'est crucial pour Poutine,
32:39 comme, évidemment, comme de l'autre côté,
32:41 simplement c'est plus facile pour les Russes,
32:43 parce que, quand même, nos territoires
32:45 sont largement plus
32:47 perméables que la Russie.
32:49 - Mais alors justement, est-ce que, d'un autre côté,
32:51 on ne peut pas dire aussi que la CIA, quelque part,
32:53 même en Amérique, démocratie, évidemment,
32:55 ce que n'est pas
32:57 tout à fait la Russie, c'est le moins que l'on puisse dire,
32:59 mais la CIA, on l'a vue
33:01 avec ce qui s'est passé avec Biden
33:03 et les GAFAM et compagnie,
33:05 est-ce que la CIA n'est pas, elle aussi,
33:07 au pouvoir ? - Non, je crois pas.
33:09 Non, non, non.
33:11 Elle a beaucoup de pouvoir, oui, c'est vrai.
33:13 C'est vrai que leur manière
33:15 de... Alors, c'était pas la CIA, c'est la NSA,
33:17 c'est-à-dire... - Oui, National Security Agency.
33:19 - Oui, l'organisation de
33:21 les écoutes
33:23 sont allées beaucoup trop loin,
33:25 et ont mis en cause la vie
33:27 privée d'Américains.
33:29 - Ben oui, très fort.
33:31 - Mais ça s'issue. - Oui.
33:33 Il y a des contre-pouvoirs. - Il y a des contre-pouvoirs.
33:35 En Russie, ils font forcément la même chose,
33:37 donc oui, ils n'ont pas le pouvoir,
33:39 ils ont beaucoup de pouvoir, parfois trop,
33:41 ils s'en accordent trop, c'est sûr,
33:43 mais c'est sans commune mesure,
33:45 avec ce qui se passe en Russie.
33:47 - En Russie.
33:49 Est-ce que nous avons un...
33:51 Est-ce que nous avons un auditeur ?
33:53 - On a Philippe de Sauné-Loire. Bonjour, Philippe.
33:55 - Bonjour, Philippe. - Bonjour, André,
33:57 merci pour vos remarquables
33:59 émissions.
34:01 Moi, je pense que vous êtes d'utile et des publics.
34:03 - Je vais te demander
34:05 à être remboursé par la sécurité sociale,
34:07 vous avez raison, Philippe.
34:09 Alors, dites-moi,
34:11 allez-y, Philippe, allez-y.
34:13 - Alors, tout à l'heure, vous venez de dire que, par exemple,
34:15 en parlant de la Russie,
34:17 que le renseignement
34:19 est au pouvoir, et que c'est le seul cas.
34:21 Ah non, non, non, Georges Bouchet-Pere
34:23 était l'ancien directeur de la CIA,
34:25 donc vous avez eu l'ancien directeur
34:27 des services secrets, qui a été président
34:29 des Etats-Unis. Voilà.
34:31 - Oui, c'est un peu vrai que ça. - Oui, c'est tout à fait
34:33 vrai, mais d'abord, c'était pas... - Donc, le renseignement
34:35 aux Etats-Unis est bien entendu
34:37 très très proche du pouvoir.
34:39 - Non, c'est vrai. - Il est... - Non, simplement
34:41 ce que disait Vincent Jauvert,
34:43 et je crois, il y a des contre-pouvoirs aux Etats-Unis,
34:45 on le sait plus facilement,
34:47 disons, voilà.
34:49 - Oui, oui. - Et puis, il y a aussi
34:51 le fait que Georges Bouchet-Pere, effectivement,
34:53 avait été directeur de la CIA,
34:55 mais ce n'était pas un officier de carrière, d'une part,
34:57 de renseignement, et d'autre part, autour de lui,
34:59 il n'y avait pas que des gens issus
35:01 du service de renseignement.
35:03 Autour de Poutine, il n'y a que des gens issus du service
35:05 de renseignement. - Voilà, j'imagine qu'il a quand même
35:07 les Lavrov et compagnie,
35:09 ils ne sont pas tous que du renseignement, non ?
35:11 - Lavrov, peut-être pas,
35:13 non, mais tous les autres, oui, enfin,
35:15 c'est suffisant de... - Non, non, mais c'est clair
35:17 que, effectivement, c'est un autre, en tout cas,
35:19 c'est un autre système, ça c'est clair.
35:21 Il y a une question, quand même,
35:23 Vincent Chauvert, que vous posez dans votre livre
35:25 quand on le lit... - Pardonnez-moi de vous interrompre,
35:27 du temps de George Bush,
35:29 quand il était à la CIA,
35:31 il y avait une grande enquête
35:33 publique sur
35:35 l'activité de la CIA
35:37 pendant les dernières années,
35:39 notamment leur intervention scandaleuse au Chili
35:41 ou ailleurs. Vous ne verrez pas ça à Moscou.
35:43 - Oui, ce ne sera plus...
35:45 - C'est plus compliqué. - Pas tout de suite, en tout cas.
35:47 - Il faut attendre le rapport Khrouchev ou Solzhenitsyn pour que ça bouge.
35:49 - Exactement.
35:51 - Juste un mot,
35:53 Vincent Chauvert, plus qu'un mot d'ailleurs,
35:55 est-ce que cette...
35:57 comment, au fond,
35:59 il y a votre livre,
36:01 mais il y a eu déjà des choses qui sont sorties,
36:03 sur un certain nombre de gens,
36:05 que ce soit pendant vos enquêtes ou dans d'autres,
36:07 est-ce qu'il y a eu
36:09 sanctions ?
36:11 Est-ce qu'il y a eu réaction, etc.,
36:13 quand on regarde maintenant, avec un peu de recul,
36:15 votre livre, il sort demain,
36:17 c'est encore trop tôt,
36:19 mais quand même, sur un certain nombre de ces personnages,
36:21 dont on a entendu parler, vous-même, vous avez fait des enquêtes
36:23 là-dessus, est-ce qu'il y a eu des réactions,
36:25 des sanctions ou pas ? - Sanctions, non,
36:27 il y a prescription.
36:29 - Prescription de 20 ans, je pense.
36:31 - Oui. - Donc, c'est plus ancien
36:33 que ça, même pour M. Carrérault.
36:35 Largement, il y a 40 ans.
36:39 Voilà, tout est dit,
36:41 il y a prescription.
36:43 D'ailleurs, je pense qu'une des raisons pour lesquelles ils ont ouvert
36:45 le chèque, qu'ils ont commencé à ouvrir, c'est en 2008,
36:47 c'est 20 ans après,
36:49 c'était 20 ans après
36:51 la fin, donc
36:53 les risques d'implication judiciaire
36:55 étaient...
36:57 - Oui, étaient inexistants.
36:59 - En revanche, on pourrait imaginer que certains...
37:01 - Mais du point de vue de société, laissons la justice de côté,
37:03 comment les gens ont réagi
37:05 par rapport à...
37:07 - Oh, ben,
37:09 pas bien, je veux dire que
37:11 je pense que le Canada Enchaîné, par exemple, a un peu souffert
37:13 de la publicité négative faite par
37:15 l'affaire Clémentin,
37:17 c'est-à-dire aussi qu'ils n'ont pas très bien réagi.
37:19 Pour M. Carrérault, je ne sais pas
37:21 ce que ça va donner.
37:23 Je pense que les Français,
37:25 dans leur ensemble, n'aiment pas trop qu'on
37:27 trahisse son pays. - Ben oui, c'est pas...
37:29 - On évite qu'on trahisse son pays
37:31 pour de l'argent.
37:33 Il y a des choses aussi bêtement que ça.
37:35 - Mais juste un mot là-dessus,
37:37 en fait, il y avait aussi,
37:39 sans doute, et là, je ne sais pas,
37:41 on peut penser ce qu'on veut,
37:43 c'est vrai que, quand on est
37:45 pour une cause, par exemple, je pense à la cause du
37:47 communisme, beaucoup de gens se disaient "il faut
37:49 aider l'URSS à l'époque à gagner"
37:51 puisque c'est l'avenir de l'humanité,
37:53 le prolétariat mondial,
37:55 donc ils le faisaient en toute bonne foi et peut-être
37:57 en toute sincérité idéologique.
37:59 - Ceux qu'on a cités, je suis
38:01 pas sûr, franchement. - Non, pas ceux-là.
38:03 - Mais d'autres, oui, c'est vrai.
38:05 Mais bon,
38:07 ça peut expliquer,
38:09 ça peut donner
38:11 des circonstances atténuantes,
38:13 mais reste que travailler
38:15 son pays, c'est travailler son pays.
38:17 - Certes. - Je vois pas comment on peut le dire autrement.
38:19 En théorie, les services
38:21 de renseignement, d'ailleurs de l'Est, faisaient attention
38:23 de ne pas recruter des gens du Parti Communiste.
38:25 - Ah oui. - Parce qu'ils étaient tellement
38:27 encadrés, surveillés,
38:29 qu'ils le faisaient pas.
38:31 En réalité, ils le faisaient, parce qu'il
38:33 manquait quand même d'informateurs,
38:35 on peut croire à un idéal, mais
38:37 sans forcément travailler son pays.
38:39 - Alors, une question quand même, pas de femmes ?
38:41 - Ben non. - Pas de femmes ?
38:43 Où sont les mataharis ?
38:45 - Ben, c'est logique. Non, attendez, là, les mataharis,
38:47 c'est de l'autre côté, ça c'est pour aller... - Non, non.
38:49 Je dis où sont... Il aurait pu y avoir des mataharis côté
38:51 français ou européen.
38:53 - Ben, il y en avait, il y a les hirondelles
38:55 qu'on met dans les lits des diplomates.
38:57 - Oui. - Et autres. Mais non, c'est simple.
38:59 C'est simplement que les femmes n'avaient pas de position de pouvoir
39:01 à l'époque, ni dans la presse, ni dans la politique,
39:03 ni dans l'administration, ni nulle part.
39:05 - Je crois que c'est simple que ça. - C'est ça.
39:07 - On va marquer une courte pause sur Sud Radio
39:09 et après on prendra tous vos appels
39:11 au 0826 300 300.
39:13 A tout de suite.
39:15 - Sud Radio Bercoff dans tous ses états,
39:17 midi 14h.
39:19 André Bercoff.
39:21 - Ici Sud Radio.
39:23 Les français parlent au français.
39:27 Je n'aime pas la blanquette de veau.
39:31 Je n'aime pas la blanquette de veau.
39:33 Je n'aime pas la blanquette de veau.
39:35 - Sud Radio Bercoff dans tous ses états.
39:37 - Toujours avec Vincent Jaubert
39:39 et André Bercoff.
39:41 Et nous avons Guy, qui nous appelle depuis Paris.
39:43 Bonjour Guy. - Bonjour Guy.
39:45 - Bonjour monsieur André Bercoff, bonjour monsieur Jaubert.
39:47 - Bonjour. - On vous écoute Guy.
39:49 - J'ai été chimiste pendant plusieurs années
39:51 au CEA, dans un laboratoire de recherche appliquée.
39:53 Et j'ai été surpris de l'indifférence
39:55 ou même de la naïveté
39:57 concernant la sécurité.
39:59 J'ai eu plusieurs cas où il a fallu que j'intervienne.
40:01 Notamment ce monsieur qui est un
40:03 grand mathématicien,
40:05 qui a sa fille qui fait partie du Paraclub.
40:07 Nous sommes en réunion de Paraclub
40:09 un soir, et il vient me voir, il me dit
40:11 "Guy, je ne sais plus où j'ai mis ma voiture."
40:13 Parce qu'il avait été trépané, il avait eu une opération.
40:15 Donc on se met à la recherche de sa voiture,
40:17 et je le vois transpirer à grosses gouttes.
40:19 Je lui dis "Mais qu'est-ce qu'il se passe ?"
40:21 Il me dit "Il y a ma sacoche dans la voiture."
40:23 Je lui dis "Et dans la sacoche, qu'est-ce qu'il y a ?"
40:25 "Il y a des dossiers confidentiels."
40:27 Moi j'étais accrédité au secret confidentiel,
40:29 comme lui.
40:31 Donc on a réussi à retrouver la voiture, la sacoche,
40:33 et je l'ai donc raccompagnée
40:35 au CEA, pour qu'ils remettent
40:37 des dossiers ultra confidentiels au coffre.
40:39 Voilà. Ça c'est un exemple.
40:41 On a eu un stagiaire indien
40:43 qui n'a pas arrêté de photocopier
40:45 toutes les parutions internes,
40:47 et qui a rempli
40:49 des mâles complets pour les envoyer en Inde,
40:51 et quand il est revenu au centre
40:53 de Bombay, il a fait paraître
40:55 toutes les parutions internes
40:57 en les accaparant.
40:59 Et ce sont devenus des mâles pour
41:01 le centre de recherche
41:03 de Bombay.
41:05 - Oui Guy, ça arrive assez souvent.
41:07 Ça arrive assez souvent.
41:09 - Ce monsieur qui vient d'être surpris,
41:11 il a perdu son ordinateur,
41:13 ce monsieur qui fait partie de la sécurité,
41:15 ingénieur de sécurité pour les Jeux Olympiques.
41:17 - Oui, oui, pour les Jeux Olympiques.
41:19 - Il y a une histoire, si je peux intervenir.
41:21 - Ça ne doit pas arriver.
41:23 - Oui, mais ça arrive.
41:25 - Non, mais il y a une belle histoire,
41:27 qui a à voir avec les Russes, vous allez voir.
41:29 Au début des années 90, les Russes ont inventé
41:31 un système, enfin inventé,
41:33 ils ont vu dans une petite annonce
41:37 un jeune mathématicien
41:39 ou physicien
41:41 chercher à donner des petits cours.
41:43 Et cet homme-là, ce jeune homme-là
41:45 travaillait au CEA.
41:47 Au CEA militaire, à la dame.
41:49 - Militaire. - La direction des applications militaires.
41:51 Et donc les Russes leur ont dit, ben oui, écoutez,
41:53 quelqu'un s'est présenté
41:55 pour prendre des cours,
41:57 il payait largement, puis petit à petit
41:59 il a demandé des notes plus précises.
42:01 Et à la fin, ce garçon-là
42:03 a donné tous les rapports officiels,
42:05 enfin les rapports secrets sur les essais nucléaires français.
42:07 - Ah ouais. - Et il a été arrêté,
42:09 il a été allé en prison pendant plusieurs années,
42:11 il est sorti il n'y a pas très longtemps.
42:13 C'était les Russes qui faisaient ça. Donc vous avez raison,
42:15 au CEA pendant un moment, ils ne faisaient pas assez attention.
42:17 - Oui, il y a eu sûrement,
42:19 Guy, effectivement, beaucoup de choses comme ça.
42:21 Et ça, c'est les trous dans la raquette.
42:23 C'est les mailles du filet.
42:25 - Oui, c'est qu'on est un pays libre,
42:27 avec des gens qui ne sont pas
42:29 forcément toujours à la...
42:31 comme ça, se relationner dedans, ils devraient être un peu plus, sans doute.
42:33 - Mais ce qui est intéressant,
42:35 d'ailleurs il y a un livre écrit,
42:37 le troisième livre, celui-là je ne pense pas que vous l'avez écrit,
42:39 c'est la France-Afrique.
42:41 - Non, je ne connais rien du tout à l'Afrique. Oui, oui, oui.
42:43 - Non, parce qu'il y a eu un certain nombre de
42:45 attractions, séductions intéressantes
42:47 là-bas aussi. - Sans doute, sans doute.
42:49 Là, on est plus dans l'action
42:51 clandestine plutôt que dans l'enseignement, je crois.
42:53 - Et dites-moi, juste un mot,
42:55 justement, Vincent Jauvert,
42:57 un autre fil rouge
42:59 intéressant, est-ce que
43:01 les gens qui travaillaient, vous savez,
43:03 comme il y a eu le Pen Club, qui était
43:05 pro-CIA et compagnie américain,
43:07 est-ce que les Russes ont fait,
43:09 ont subventionné,
43:11 je ne parle pas du Parti Communiste,
43:13 etc., bien sûr, français,
43:15 mais des revues, des publications,
43:17 des recherches
43:19 intellectuelles, enfin des recherches
43:21 de conférences pour drainer
43:23 un certain nombre, soit d'intellectuels,
43:25 soit de chercheurs, ou tout ça, ou pas,
43:27 à votre connaissance. - Il y a un cas
43:29 qui a abouti à l'emprisonnement de
43:31 quelqu'un qui s'appelait Charles Patey,
43:33 à la fin des années 70, je crois,
43:35 qui avait une petite lettre
43:37 confidentielle, mais qui était assez lue,
43:39 et qui
43:41 était clairement,
43:43 il a été pris en flagrant délit
43:45 de recevoir de l'argent d'un officier traitant
43:47 russe, soviétique, donc il a été
43:49 mis en prison, et puis il y a le cas d'André
43:51 Hulman dont je parle dans le...
43:53 - La Tribune des Nations.
43:55 - Ça c'était une publication
43:57 assez importante dans les années
43:59 50 et 60, totalement
44:01 financée par le KGB,
44:03 lui-même donc, travaillant pour le KGB,
44:05 et bien il est mort, il n'a
44:09 jamais été inquiété,
44:11 et la publication s'est poursuivie,
44:13 probablement sur le financement
44:15 du KGB, jusqu'au début des années 80.
44:17 - Oui. - Mais c'était quand même
44:19 marginal. Enfin, celle-là,
44:21 elle est élue dans les cercles quand même
44:23 diplomatiques, donc
44:25 ça a joué un rôle... c'était pas
44:27 fondamental. La CIA, effectivement,
44:29 en Europe, a eu beaucoup plus
44:31 de résultats, je pense. - En fait,
44:33 quand on lit votre livre,
44:35 à la fin on se dit,
44:37 non pas du tout le tous pourri,
44:39 évidemment pas, parce que ce serait
44:41 trop facile et simpliste,
44:43 total, mais quand même,
44:45 la tentation
44:47 de l'argent, des gros sous, des euros,
44:49 des dollars, des petrodollars,
44:51 on le voit aujourd'hui avec les émirats
44:53 et tout ça, qu'est-ce qu'elle est forte
44:55 dans les hommes et les femmes
44:57 d'influence ? - Oui, bien sûr.
44:59 Il n'y a pas que les hommes et les femmes d'influence, on est tous
45:01 sensibles, je pense à l'argent. À un moment,
45:03 il faut savoir, qu'on peut comprendre que,
45:05 quand on met le dos dans un engrenage,
45:07 qu'on pourra plus l'enlever. C'est ça le truc,
45:09 je pense pas au début,
45:11 ça fait partie des gens qui considèrent
45:13 sans doute qu'ils sont intouchables dans une certaine mesure,
45:15 qu'on ne les embêterait jamais.
45:17 - Oui, il y a un sentiment d'impunité.
45:19 - Et effectivement, en France, du fait
45:21 que les pouvoirs publics ne voulaient pas
45:23 faire savoir que la France
45:25 était infiltrée comme les autres pays, parce qu'on était
45:27 soi-disant en meilleure relation avec les Russes
45:29 et que ça ne plaisait pas aux Américains,
45:31 il ne fallait pas que ça se sache qu'on était aussi infiltrés que les autres.
45:33 Et donc, effectivement, on était assez
45:35 tranquille lorsqu'on travaillait,
45:37 à moins de travailler sur des affaires militaires
45:39 très précises, donc vraiment,
45:41 du top secret, on était assez tranquille
45:43 de ne pas être embêté, au final,
45:45 par les autorités françaises.
45:47 - Alors, on pourrait se poser la question, mais c'est vrai, je le dis,
45:49 c'est ce que disait un jour Jacques-Laurent Bost,
45:51 un critique de cinéma,
45:53 qui a été secrétaire de Sartre pendant un moment,
45:55 il disait "J'ai travaillé trois semaines pour France Dimanche,
45:57 il faut bien vivre,
45:59 mais au bout de trois semaines, je ne voyais plus la nécessité."
46:01 (rires)
46:03 - Oui, mais...
46:05 On peut se poser quand même la question.
46:07 - C'est lui qui parlait des yens d'un
46:09 kilographe, c'est ça ? - C'est ça, absolument.
46:11 En tout cas, vraiment, lisez
46:13 "À la solde de Moscou" de Vincent Jauvert,
46:15 c'est absolument passionnant,
46:17 c'est... voilà, c'est...
46:19 Ce sera sur Netflix dans deux ans.
46:21 - J'espère, oui.
46:23 - J'espère. - Ça sort... c'est publié aux éditions
46:25 du Seuil, ça sort demain en librairie
46:27 "À la solde de Moscou", merci beaucoup
46:29 Vincent Jauvert d'avoir été avec nous. - Merci à vous.
46:31 - André Bercoff, on se retrouve demain avec Céline Alonso,
46:33 direct du Salon de l'Agriculture, de 12h à 14h.
46:35 Et puis tout de suite, c'est Brigitte Lahaye
46:37 sur Sud Radio, à demain.
46:39 Sud Radio, parlons vrai.