Elisabeth Lévy - "Metoo : il faut des règles strictes contre le pilori médiatique !"

  • il y a 7 mois
Retrouvez "Lévy sans interdit" avec Élisabeth Lévy tous les matins du lundi au jeudi

Retrouvez nos podcasts et articles : https://www.sudradio.fr/

Nous suivre sur les réseaux sociaux

▪️ Facebook : https://www.facebook.com/SudRadioOffi...
▪️ Instagram : https://www.instagram.com/sudradiooff...
▪️ Twitter : https://twitter.com/SudRadio
▪️ TikTok : https://www.tiktok.com/@sudradio?lang=fr

##LEVY_SANS_INTERDIT-2024-03-07##

Category

🗞
News
Transcription
00:00 - Le Grand Matin Sud Radio, 7h-8h30, Patrick Roger.
00:04 - Il est 8h14, Les Vies Sans Interdit, bonjour Elisabeth Lévy.
00:08 - Bonjour Patrick, bonjour à tous.
00:10 - Alors cette semaine, Roman Polanski a été jugé pour diffamation
00:16 contre l'ex-actrice Charlotte Lewis.
00:20 Vous voulez revenir sur ce procès et plus largement.
00:23 - Oui, plus largement sur ce que ça soulève.
00:25 C'était une ex-actrice britannique, alors je rappelle,
00:29 il faut le faire quand on parle de Roman Polanski,
00:31 qu'en 1975 il a été condamné pour relation illicite avec une mineure,
00:36 il a purgé sa peine, mais à la suite d'une entourloupe
00:39 et d'un acharnement d'un procureur américain,
00:41 le dossier n'a pas été fermé.
00:43 Bon, alors Charlotte Lewis c'est une autre affaire,
00:45 elle joue dans Pirates en 1984, en 2010,
00:49 elle convoque une conférence de presse
00:51 pour dire que Polanski l'a violée en 83,
00:54 avant le tournage de Pirates.
00:55 Bon, pas de preuve, pas de procès,
00:57 Polanski ne sera ni condamné, ni blanchi.
01:01 Et en 2019, au moment de la sortie de J'Accuse,
01:04 pardon de... oui, de J'Accuse, oui,
01:06 il déclare à Paris Match un bon menteur à ce sujet,
01:09 on l'interroge sur Charlotte Lewis,
01:11 et il dit "un bon menteur doit avoir une bonne mémoire",
01:13 il évoque les contradictions de son accusatrice.
01:16 Et voilà, c'est pour ça qu'elle l'attaque,
01:18 et elle a osé mardi déclarer à la barre du tribunal
01:22 que cette interview avait détruit sa vie.
01:25 Donc, comme le dit la défense du cinéaste,
01:27 c'est tout de même assez étrange,
01:29 elle, elle a le droit d'accuser Polanski de viol,
01:31 mais s'il se défend, c'est un salaud.
01:33 Alors attention, il est peu probable
01:35 qu'il y ait une condamnation,
01:37 aucune peine n'a été requise,
01:39 mais devant le tribunal de l'opinion,
01:41 le chantage à la souffrance avale tout,
01:43 détruit, je veux dire, fait plus que tout,
01:45 Polanski est un violeur.
01:47 - Bon, c'est la justice qui tranchera, Elisabeth Lévy.
01:50 - Eh bien, elle tranchera jamais sur le viol,
01:52 en réalité, sur le viol de Charlotte Lewis,
01:54 et au-delà de Polanski,
01:56 il y a des dizaines, sans doute d'ailleurs des centaines,
01:58 parce qu'il y a aussi des anonymes
02:00 d'hommes qui sont salis ou bannis
02:02 sans avoir été condamnés.
02:04 C'est la loi des suspects,
02:06 accusés = coupables, et puis avec
02:08 #MeToo cinéma, #MeToo garçons, #MeToo boulangerie,
02:10 #MeToo coiffure, je suppose,
02:12 il y a un emballement de la machine accusatoire,
02:14 c'est tous les jours, vous l'avez vu,
02:16 une célébrité mise en cause,
02:18 ensuite, Mediapart lance un appel à dénonciation,
02:20 d'autres femmes découvrent en masse
02:22 qu'elles ont été abusées,
02:24 les souvenirs reviennent, et les monstres sont
02:26 ensuite exhibés en place publique.
02:28 Alors, certains auront la chance,
02:30 parce que c'est une chance d'avoir un procès, comme Gérard Depardieu,
02:32 en attendant, leur vie est à l'arrêt,
02:34 leur œuvre est effacée,
02:36 des concerts de Depardieu ont encore été annulés en Allemagne,
02:38 d'autres, comme Jacques Doyon, par exemple,
02:40 parmi d'autres, je cite les noms qui sont
02:42 dans l'actualité, ne seront jamais
02:44 blanchis, car l'accusation intervient
02:46 après la prescription ou après leur mort,
02:48 comme François Truffaut,
02:50 et ça, c'était hier, juste hier.
02:52 Alors, dans une affaire un peu
02:54 différente, bien sûr, Clémentine Autain
02:56 dénonce le Parisien qui a divulgué
02:58 la plainte pour viol d'Hercilia
03:00 Soudé, contre son compagnon, qui,
03:02 comme Hercilia Soudé, est un élu
03:04 de la France Insoumise, alors Clémentine Autain
03:06 a raison, pas de les traiter d'extrême-droite,
03:08 évidemment, mais Clémentine Autain
03:10 a raison, il est dommage que
03:12 la gauche n'ait pas cette retenue,
03:14 si vous voulez, quand l'accusée est de droite, comme Damien Abad,
03:16 rappelez-vous le déchaînement,
03:18 et pourtant,
03:20 je dirais que si on ne veut pas que l'arbitraire
03:22 devienne la norme, que la vie privée
03:24 soit un souvenir dans notre société,
03:26 eh bien, il faut aujourd'hui
03:28 instaurer des règles extrêmement strictes
03:30 contre le piloter médiatique.
03:32 Alors, je vous en cite deux,
03:34 interdiction pour les médias
03:36 de relayer les accusations tant qu'il n'y a pas
03:38 de plainte, on ne peut pas accuser,
03:40 comme ça, après, aller voir les uns les autres,
03:42 et que ça se soit partout. Si la justice
03:44 ne peut pas juger, les médias le peuvent
03:46 encore moins, donc la prescription
03:48 judiciaire doit valoir
03:50 prescription médiatique.
03:52 Si ça s'arrête pour la justice, ça s'arrête pour les médias,
03:54 ça n'existe pas.
03:56 Et aussi, interdiction de relayer des plaintes
03:58 avant un renvoi au tribunal,
04:00 ou au minimum, une mise en examen.
04:02 Alors, bien sûr, je vous dis ça,
04:04 mais ça n'arrivera pas, les journalistes
04:06 hurleront à la liberté d'informer,
04:08 liberté de vendre, aussi, parce que ces sujets
04:10 marchent. Les féministes,
04:12 elles, hurleront au combat contre la prétendue
04:14 culture du viol. Comme le dit
04:16 Delphine Meillet, avocate de Romane Polanski,
04:18 la libération de la parole
04:20 des femmes ne justifie pourtant pas
04:22 de réduire les hommes au silence.
04:24 (musique)
04:26 - Lévis, sans interdit,
04:28 Elisabeth Lévis,
04:30 Alexis Poulin, votre réaction ?
04:32 - Il y a plusieurs choses,
04:34 il y a, effectivement,
04:36 l'emballement médiatique, systématiquement,
04:38 autour de ces affaires, parce que, oui, ça fait vendre,
04:40 et parce que ça intéresse,
04:42 mais il y a autre chose,
04:44 je pense que s'il y a autant
04:46 de libération de la parole,
04:48 après les mouvements #MeToo, etc., ça dit quelque chose
04:50 aussi d'une évolution sociale.
04:52 Je pense qu'il ne faut pas minimiser
04:54 la parole des victimes, parce que
04:56 ça met du temps, c'est difficile de prendre la parole.
04:58 On voit que dans le milieu du cinéma,
05:00 il y avait quand même des profils
05:02 de pigmalions,
05:04 de directeurs, de réalisateurs
05:06 qui utilisaient leur pouvoir
05:08 pour asseoir ce pouvoir-là
05:10 sur des actrices, on va pas reparler
05:12 de l'affaire Weinstein, où là c'était un producteur qui faisait ça.
05:14 Donc il y a une réalité aussi
05:16 de prédation dans un milieu.
05:18 Pas que le cinéma, mais
05:20 il ne faut pas minimiser la parole des victimes.
05:22 Le problème, c'est que
05:24 derrière, vous avez effectivement le tribunal médiatique
05:26 qui peut s'emballer, qui va très loin,
05:28 vous avez aussi la cancel culture, moi je suis contre
05:30 le fait de dire que parce que Depardieu est accusé,
05:32 on va supprimer tous ses films, des plateformes,
05:34 on va arrêter, parce qu'un film,
05:36 c'est pas un acteur, c'est une oeuvre,
05:38 c'est beaucoup plus large.
05:40 Mais par contre, sur la parole des victimes,
05:42 il faut essayer de la protéger,
05:44 essayer de faire en sorte
05:46 qu'elle soit prise au sérieux, et que la justice
05:48 puisse faire son travail, je suis d'accord avec Elisabeth.
05:50 Tout le problème, c'est le temps de la justice,
05:52 c'est pas du tout le temps médiatique, évidemment.
05:54 Et là,
05:56 il y a tous ces normes...
05:58 - Oui, c'est vrai, alors quand il y a
06:00 la prescription, évidemment, après c'est
06:02 difficile.
06:04 - Attendez, il y a deux choses, vous dites victime,
06:06 c'est extraordinaire, parce que, merci de le faire,
06:08 c'est-à-dire que quand une femme parle,
06:10 qu'elle dit "je suis victime", elle est victime.
06:12 Femmes, on vous croit. En revanche, si l'homme,
06:14 lui, dit "pardon,
06:16 merci de me laisser aller au bout
06:18 d'un raisonnement,
06:20 merci de me laisser aller au bout de mon raisonnement,
06:22 ce serait gentil de vous écouter,
06:24 laissez ma parole se libérer,
06:26 c'est Alexi, voilà.
06:28 Pardon.
06:30 Donc, excusez-moi,
06:32 je suis...
06:34 Il faudrait croire les femmes,
06:36 jamais les hommes, les hommes, ils mentent,
06:38 ça c'est la première chose. Donc je suis désolée,
06:40 quand une femme se dit victime, elle est éventuellement
06:42 plaignante, d'accord ?
06:44 Je veux dire, vous ne pouvez pas, vous,
06:46 décider qu'elle est victime. Alors je reconnais qu'il y a
06:48 des cas, pardon, Alexi, je vous ai écouté,
06:50 mais c'est pas fini. - Je vais répondre, parce que c'est important.
06:52 - Et...
06:54 Oh, putain.
06:56 Donc, quand, je vous disais,
06:58 on écoute la parole des femmes, pas celle des hommes,
07:00 et, je veux dire,
07:02 on peut aller sur la place publique, salir le nom
07:04 de quelqu'un, et ça, si vous voulez,
07:06 s'est admis. Un homme, s'il se défend,
07:08 on va le traiter de tous les noms.
07:10 La deuxième chose, qui me paraît très importante,
07:12 vous dites la prédation dans les milieux du cinéma.
07:14 Ce qui est extraordinaire, c'est qu'on parle toutes d'affaires
07:16 vieilles de 30 ans, en réalité,
07:18 pratiquement. - Pas toutes, non, pas toutes.
07:20 - Pas toutes, mais beaucoup. - Non, non, non, il y en a
07:22 de ces dernières années aussi. - Mais, si vous voulez, il y a quand même
07:24 un petit problème. Moi, j'ai réécouté
07:26 l'interview de Judith Gaudrech, il y a 10 ans,
07:28 elle avait 40 ans.
07:30 Mais le délai de prescription n'était pas
07:32 encore fermé.
07:34 Et elle envoie sur les roses
07:36 son intervieweuse, Catherine Sélac,
07:38 en gros, c'est elle, la bourgeoise
07:40 coincée, si vous voulez,
07:42 et elle lui dit, mais c'était une emprise
07:44 très inspirante, si vous voulez,
07:46 Pygmalion, c'est pas seulement quelque chose
07:48 d'horrible. Et, si vous voulez,
07:50 on juge, des femmes
07:52 jugent leur passé
07:54 avec les yeux du présent, présent
07:56 qui change, pourquoi on dirait que Judith Gaudrech
07:58 dit la vérité aujourd'hui, ou que c'est la vérité
08:00 et pas la vérité il y a 10 ans.
08:02 Et on juge avec
08:04 toute une société,
08:06 si vous voulez, avec les yeux du passé.
08:08 - Alors, tu peux répondre rapidement ?
08:10 - Bien sûr, bien sûr. - C'est que,
08:12 il y a des hommes victimes, c'est une parole pas forcément
08:14 de femmes, vous avez le #MeTooGarçon
08:16 dans le cinéma qui vient d'être lancé également.
08:18 Donc, il y a des hommes et des femmes victimes.
08:20 Et puis, pourquoi je parle
08:22 de parole de victime ? Parce que c'était le principe
08:24 de la civise, cette commission interne au stéréo
08:26 contre l'inceste et les violences faites aux enfants, c'est victime,
08:28 on vous écoute, on vous croit. Parce que, sans ça,
08:30 c'est impossible de parler.
08:32 Et donc, ce principe-là, qui avait été défendu par le juge
08:34 Durand, on vous écoute, on vous croit, c'est la base.
08:36 Peu importe après, le temps de la justice,
08:38 c'est le juge, c'est un juge, monsieur Durand,
08:40 il faut d'abord dire aux victimes qu'on les écoute
08:42 et qu'on les croit, avant de dire "vous affabulez,
08:44 vous êtes là pour attaquer, etc."
08:46 Et ça, c'est important de dire que
08:48 cette parole-là, elle est respectée.
08:50 - Moi, une femme qui dit "j'ai été violée par Polonski",
08:52 je ne la crois pas par définition.
08:54 - On va continuer le débat dans un instant.
08:56 Et Fabien Roussel qui sera l'invité de Jean-Jacques Bourdin
08:58 tout à l'heure à 8h30.

Recommandations