ÉDITO - "L'aide à mourir" proposée par Emmanuel Macron est "une évolution majeure"

  • il y a 7 mois
Dans une interview aux journaux Libération et La Croix, le chef de l'État a détaillé sa position sur la fin de vie. Il annonce un projet de loi sur l'"aide à mourir" qu'il présentera en avril prochain.

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Transcription
00:00 - Mathieu Croissando, Emmanuel Macron l'annonce ce matin dans un entretien accordé à la Croix et à Libération.
00:06 Il veut donc instaurer un modèle français de fin de vie en proposant à ceux qui le souhaitent ce qu'il appelle une aide à mourir.
00:14 Ça veut dire quoi ? Est-ce que c'est une forme d'euthanasie ?
00:16 - Alors ça n'emporte pas le nom. Emmanuel Macron a pris son temps. Il a pris aussi d'exceptionnelles précautions sur le choix des mots.
00:22 On le voit bien, le président de la République ne parle ni d'euthanasie, ni de suicide assisté, ni même d'aide active à mourir,
00:28 qui était un peu l'expression consacrée, mais d'aide à mourir tout court, qui répond selon lui à une démarche de fraternité.
00:35 Mais qu'on ne s'y trompe pas, c'est bien une évolution majeure, même si ça n'est pas un droit, même si ça n'est pas une liberté,
00:41 dit encore le président. Demain, on peut l'appeler comme on veut, mais une personne majeure capable de discernement
00:47 pourra demander qu'on l'aide à mourir dans certaines conditions. D'abord qu'elle souffre d'une maladie incurable
00:53 entraînant des souffrances insupportables et qu'on ne peut pas traiter, que son pronoctype vital soit engagé à court ou moyen terme.
01:00 Ça fait beaucoup de conditions, c'est vrai, mais c'était nécessaire pour encadrer. Et tout ça, après une décision collégiale
01:05 d'une équipe médicale et un délai de réflexion et de rétractation, cette personne pourra se voir remettre un produit pour l'aider à mourir.
01:13 Et si elle n'est pas capable de se l'administrer elle-même, elle pourra le faire à un proche, voire à un médecin.
01:18 Donc vous voyez, on joue sur les mains, on est bien sur l'aide active à mourir, voire un geste d'euthanasie qui serait à ce moment-là pratiqué.
01:25 Est-ce que vous voyez matière à division dans cette façon de formuler les choses ?
01:29 Oui, parce que, évidemment, de toute façon, la fin de vie c'est un sujet qui touche chacun en fonction de ses convictions,
01:35 que ce soit religieuse, philosophique ou éthique dans la pratique médicale, par exemple. Donc c'est un sujet qui divise beaucoup les médecins.
01:40 Je rappelle que le Conseil national consultatif d'éthique avait ouvert la voie à l'aide active à mourir en septembre 2022,
01:46 que l'Académie de médecine, elle aussi avait ouvert la voie à l'été dernier à une forme de suicidé décidée.
01:51 Mais ce matin, par exemple, il y a un collectif de médecins, plusieurs collectifs de médecins d'ailleurs, qui se disent consternés et en colère.
01:57 C'est un communiqué qui est diffusé par la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs.
02:02 C'est intéressant parce que très souvent on oppose les deux.
02:04 C'est par exemple ce qu'a fait hier sur Twitter Bruno Retailleau, le patron des sénateurs LR,
02:10 qui dit qu'il est contre la proposition d'Emmanuel Macron, mais pour de nouveaux moyens pour garantir l'accès de tous aux soins palliatifs.
02:17 C'est aussi le fruit d'un échange, regardez, c'était hier sur notre plateau,
02:20 entre Sébastien Chenu du Rassemblement national et puis Agnès Firmin-Lebaudot, l'ancienne ministre de la Santé.
02:26 On ne peut ouvrir ce débat sur l'aide active à mourir qu'à partir du moment où tous nos départements et un maximum de services hospitaliers ont des soins palliatifs qui fonctionnent.
02:35 Quand on ne veut pas, c'est toujours trop tôt, ce n'est jamais le bon moment.
02:38 Dans la loi, il y a des choses qui concernent le développement des soins palliatifs.
02:41 L'un n'est pas incompatible avec l'autre, je le redis, il ne faut surtout pas opposer les soins palliatifs à l'aide à mourir.
02:49 Et elle a raison, Agnès Firmin-Lebaudot, parce que oui, la France est en retard sur les soins palliatifs,
02:53 oui, il y a dans des territoires où on n'y a pas accès, ce qui est un scandale.
02:56 Chaque loi le répète, depuis la loi 2005 Léonetti, puis ensuite la loi Claisse-Léonetti sous François Hollande,
03:00 à chaque fois le pouvoir dit "on va développer les soins palliatifs" et il ne le fait pas.
03:03 Mais on peut faire l'un et l'autre parce que ça ne répond évidemment pas à tous les soins palliatifs,
03:08 et notamment pas à cette demande d'assistance pour mourir.
03:10 Alors ça va beaucoup débattre forcément au Parlement, et c'est bien d'ailleurs.
03:13 Oui, c'est très bien, même si c'est intéressant parce que ce matin, les politiques sont d'une extrême prudence eux aussi.
03:18 Vous regardez, j'ai regardé les comptes Twitter des principaux leaders de l'opposition,
03:21 ce matin en tout cas, il n'y avait pas de réaction de Marine Le Pen, pas de réaction de Jordan Bardella,
03:25 pas de réaction de Jean-Luc Mélenchon, tout le monde a l'air de prendre ce sujet,
03:30 parce que ça transcende les clivages politiques.
03:33 Vous avez des gens de droite qui sont pour et contre, vous avez des gens de gauche qui sont pour et contre,
03:37 c'est vraiment en fonction des convictions de chacun.
03:39 Donc projet de loi en avril, discussion au Parlement à partir du mois de mai,
03:42 avec deux textes, un sur l'aide à mourir, l'autre sur les soins palliatifs.
03:46 Je voulais finir quand même en vous montrant ce tweet posté par notre confrère Charles Biettry,
03:51 très touchant, très percutant je trouve.
03:54 "J'ai réussi à bien vivre, écrit-il, je n'ai pas envie de mal mourir.
03:57 La maladie de Charcot m'a déjà privé de l'usage des jambes et de la parole.
04:00 Bientôt ce sera la respiration accompagnée de souffrance pour moi et les miens.
04:04 Cette loi, un premier pas, peut nous offrir liberté et dignité.
04:08 Merci", conclut Charles Biettry.
04:11 Il n'y a rien à rajouter.
04:12 Merci Mathieu. Culturez-vous, c'est Lorraine tout de suite.

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