• il y a 9 mois
Les invités de Laurence Ferrari débattent de l'actualité dans #Punchline du lundi au jeudi.

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00:00 Effectivement réfléchir à ça.
00:02 Et on va, Julien, juste accueillir les téléspectateurs de CNews qui nous rejoignent.
00:05 On est dans Punchline. Bonsoir à tous, nos auditeurs sont déjà là d'Europe 1.
00:09 On évoque la question de l'insécurité à Nice, dans le quartier des Moulins,
00:13 puisque des fusillades se sont succédées cette semaine.
00:15 La question que je posais à Julien Dray, que je viens d'interrompre,
00:18 c'est est-ce qu'il faut envoyer l'armée ou pas, Julien ?
00:20 J'essayais de vous répondre en disant l'armée, je sais pas bien, parce que je vois pas...
00:23 C'est très compliqué, mais par contre la gendarmerie travaille déjà depuis un certain temps.
00:27 On l'avait demandé déjà il y a une dizaine d'années, y compris au moment où il y avait des tensions très fortes dans les quartiers.
00:32 Et les gendarmes sont capables aujourd'hui d'investir un certain nombre de quartiers, d'être présents,
00:37 parce qu'il y a une bataille rangée.
00:39 Et après, deuxième question qui est posée, il faut pas se tromper,
00:42 ça c'est les petites mains qui sont en train de s'affronter.
00:44 Derrière, il y a des gros dealers.
00:46 Et donc c'est tout l'aspect lutte contre la finance et les moyens financiers,
00:51 parce que la plupart des chefs de ces bandes-là, ils sont même pas là.
00:54 Ils sont à l'étranger, c'est eux qui gèrent.
00:56 En attendant, les habitants sont vraiment excédés.
00:59 Ils sont même résignés à partir.
01:01 Je vous laisse la parole dans un instant.
01:02 On est avec Eugénie Bastier, Louis de Ragnel, Jean-Sébastien Ferjou et Céline Pinard.
01:05 On va écouter une mère de famille qui est très en colère dans ce quartier des Moulins à Nice,
01:08 et qui dit voilà, il faut que les habitants se fassent justice eux-mêmes,
01:12 qu'ils puissent reconquérir leur quartier eux-mêmes.
01:14 Écoutez-la.
01:15 Moi je vois un quartier qui vivait et qui se détruit.
01:19 On voit des élus qui n'apportent rien.
01:22 On voit des politiciens de tous bords qui n'apportent rien.
01:25 Uniquement quand il y a des élections.
01:27 Et là on veut voir vraiment du concret sur le terrain.
01:30 On veut reconquérir, comme j'ai dit, notre territoire.
01:33 Et notre territoire c'est le quartier des Moulins.
01:35 Qu'est-ce que ça vous inspire les opérations Place Nette ?
01:38 C'est pas suffisant pour nous, c'est pas suffisant parce que c'est déplacer le problème.
01:42 Il y a des années, j'ai déménagé du quartier.
01:44 J'avais expliqué que c'était pas le béton qu'il fallait travailler, mais les gens.
01:48 Et en fait on en est arrivé à déplacer, à travailler du béton, pas travailler les gens.
01:52 Et on en arrive à ce qu'on a aujourd'hui.
01:54 Vous entendez cette mère de famille, Eugénie Bastier, qu'est-ce que vous lui dites ?
01:58 Moi j'entends totalement sa détresse.
02:00 Et je suis frappée du contraste entre, effectivement, on a un président de la République qui dit
02:04 on va envoyer peut-être des troupes en Ukraine,
02:06 qui dit que la menace existentielle sur notre pays c'est la menace russe.
02:09 Je ne nie pas du tout la puissance de la menace russe et le danger que constitue Vladimir Poutine.
02:13 Mais le fait est que sur notre territoire, et sur le territoire de la nation même,
02:17 l'ordre ne règne pas et qu'il y a des territoires qui échappent à la loi et qui échappent à l'exercice de l'État.
02:22 Mais la solution c'est l'armée, Eugénie ?
02:24 Je pense qu'il ne doit pas y avoir de tabou.
02:26 Et qu'on peut se poser la question, dans les années qui viennent évidemment,
02:31 il faudra que ce soit préparé.
02:32 On ne peut pas décréter ça du jour au lendemain, sans préparer, sans étudier à fond le problème.
02:38 Mais légalement ce serait possible.
02:40 Légalement ? Mais ils sont militaires.
02:42 Je rappelle que l'intervention de l'armée sur le territoire national est prévue.
02:45 Non, l'intervention de l'État sur le territoire national est prévue par la loi,
02:50 selon plusieurs conditions, si les moyens qui sont disposés à disposition sont insuffisants,
02:54 inexistants, inadaptés ou indisponibles.
02:56 On pourrait peut-être rentrer dans ce cas, notamment dans un cas de crise majeure,
02:59 une crise des banlieues, je n'en sais rien, mais en tout cas, je ne vois pas au nom de quoi il y aurait un non a priori.
03:04 Un tabou autour du déploiement de barbier de Trocadéro.
03:06 C'est un vieux serpent de mer.
03:08 Ah ben oui, Samia Ghali, le demandait pour Marseille il y a déjà 15 ans.
03:11 Rappelez-vous la tribune des généraux dans Valeurs Actuelles qui avait fait débat,
03:14 Éric Zemmour en avait parlé dans un de ses livres, ça a été un grand débat.
03:17 C'est une question que l'on peut légitimement poser.
03:20 Louis Dragnel, et je vous passe la parole ensuite, Jean-Sébastien.
03:22 Moi, je pense que c'est une fausse bonne idée, mais il faut absolument y répondre.
03:24 Pourquoi ? Parce que la question, ce n'est pas celle des moyens.
03:28 Les moyens, en réalité, on les a.
03:30 Je sais que ça peut paraître absurde de le dire comme ça, mais les moyens, nous les avons.
03:33 Le problème, c'est les consignes qui sont données aux policiers et aux gendarmes.
03:36 Si la consigne est de dire aux policiers et aux gendarmes,
03:39 on arrête de prendre en chasse des refus d'obtempérer.
03:43 Surtout si les habitants sortent des armes, vous n'avez pas le droit de vous défendre.
03:46 On est sûr de jamais gagner la guerre, que ce soit des policiers, des gendarmes,
03:49 ou alors même sentinelles ou des militaires.
03:52 La question, c'est la question de l'emploi de la force.
03:54 Donc, si les consignes sont claires, il n'y a aucun problème.
03:57 Et par exemple, Julien Dray parlait des gendarmes mobiles.
04:00 Les gendarmes mobiles savent faire ça, ils ont des blindés.
04:02 En Outre-mer, c'est ce qu'ils font quasiment tout le temps, c'est leur mission.
04:05 Donc, ce n'est pas de désavouer les policiers pour vous ?
04:07 Le deuxième sujet.
04:08 Ce n'est pas de désavouer les policiers, Louis ?
04:10 Ben non.
04:11 Ils ne savent pas faire le travail, donc on va envoyer les militaires à leur place ?
04:13 Les gendarmes sont des militaires.
04:14 Le deuxième sujet.
04:15 Vous mettez des militaires.
04:16 Les militaires, eux, quand ils tirent, c'est pour tuer.
04:18 Ben, c'est ce que je disais.
04:19 Ils ne savent pas faire d'interpellation.
04:20 Leur métier, ce n'est pas de faire des interpellations, ce n'est pas d'utiliser des balles en caoutchouc.
04:26 Ils n'ont pas d'armes de force intermédiaires.
04:28 Et donc, en fait, on se retrouverait dans une situation, à mon avis, qui serait très préjudiciable aux militaires.
04:32 Puisqu'ils n'arriveraient pas à exercer leur mission.
04:35 Nous, ce que veulent les habitants, c'est arrêter le chaos dans ces quartiers, interpeller les dealers, judiciariser, donc les mettre en prison, et rendre la tranquillité à toutes ces personnes.
04:45 Et j'ajoute un deuxième sujet qui, pour le coup, ce n'est pas la question de la police, de la gendarmerie, ou même de Sentinel ou de l'armée.
04:51 C'est la question de la maîtrise de l'immigration.
04:53 Et ce n'est pas un petit sujet.
04:55 Quand vous voyez que le 2 février dernier, le Conseil d'État a mis fin au principe de non-admission, c'est-à-dire que, concrètement, dans les Alpes-Maritimes,
05:02 il y a 30 à 40 000 migrants qui, chaque année, ont été refoulés.
05:06 - Alors, vous expliquez que Nice, effectivement, est sur le passage, après la frontière italienne.
05:09 - Exactement. 30 à 40 000 migrants qui étaient refoulés grâce au principe de ce qu'on appelle, je ne vais pas rentrer dans le détail, mais de la non-admission.
05:14 Et le Conseil d'État, depuis le 2 février, empêche les autorités de pratiquer la non-admission.
05:19 Conséquence, ces migrants, donc, on ne peut pas les refouler, donc ils vont venir là, et mécaniquement, ils vont aller là où il y a tous les trafics, dont les trafics de drogue.
05:27 Donc ça, ce n'est pas une question de police ou de gendarmerie.
05:29 C'est une question de responsabilité politique.
05:32 - Qui n'est pas d'accord avec le fait qu'on puisse envoyer l'armée dans les quartiers ?
05:34 - Moi. - Alors, Fabien.
05:36 - Moi, je pense, comme le disait le parrainage, c'est une très mauvaise idée pour plusieurs raisons.
05:39 - Sur cinq. - Je ne parle pas d'une crise aiguë, comme d'ailleurs ce qui est prévu par la loi, mais d'une situation...
05:45 Les militaires ne sont pas formés pour assurer du maintien de l'ordre. Ils sont formés, effectivement, pour...
05:49 - Le Sentinelle, c'est un dispositif qui existe depuis les attentats et qui est permanent, quasiment. On le remet de temps en temps.
05:54 - Donc ils servent déjà à faire du maintien de l'ordre, de facto, dans notre pays.
05:57 - Non, mais ils sont formés pour pouvoir tirer dans le cas où il y ait des terroristes.
06:00 - Ils ne tirent pas, mais leur présence assure et empêche les attentats.
06:03 - Oui, mais là, on est dans une autre situation. Les militaires ne sont pas formés pour assurer du maintien de l'ordre.
06:08 Les policiers ou les gendarmes le sont. Et au-delà de ça, ce sera un renoncement, d'une part,
06:12 parce que la plupart des militaires eux-mêmes disent qu'ils ont déjà suffisamment de missions auxquelles faire face
06:17 et des budgets qui ne leur permettent pas, d'ailleurs, d'y faire face.
06:20 On ne va pas en plus leur demander d'assurer l'ordre intérieur quand ils sont censés, justement,
06:24 encore plus dans un contexte géopolitique incertain pour la France,
06:27 censés concentrer leurs moyens sur le fait de pouvoir éventuellement se projeter sur des théâtres d'opérations extérieures.
06:33 Et c'est un vrai renoncement. Ce dont on a besoin, c'est simplement de policiers et de gendarmerie
06:39 pour occuper le terrain dans ces quartiers-là, mais pas dans le sens de police de proximité,
06:43 comme on l'a parfois entendu dire, au sens forcément d'assurer des relations avec les habitants,
06:48 mais au sens d'acter la présence de l'État dans ces quartiers-là,
06:54 parce qu'aussi longtemps que l'ordre ne sera pas rétabli, ça ne sert à rien de lutter contre les trafics de drogue.
06:58 On inverse la logique. Il faut d'abord rétablir l'ordre et derrière, s'attaquer à la crimine.
07:02 - Céline Bidart, après, je sens que Julien n'est pas d'accord avec ce qui a été dit.
07:04 - En fait, qu'est-ce qu'on attend de l'armée ? Parce qu'effectivement, si c'est pour aller arrêter des petits voyous,
07:11 les gens qu'on a vus sur ces images-là, la police peut très bien le faire.
07:14 En revanche, si c'est pour tirer à balles réelles, là, effectivement, il vaut mieux que ce soit l'armée.
07:18 On en est là ? Je n'ai pas l'impression. Imaginez que vous envoyez l'armée dans un endroit comme ça.
07:23 Qu'est-ce qui va se passer ? Elle va peut-être réussir à arrêter un certain nombre de petits dealers, de petites mains, comme on dit.
07:31 Et ensuite, qu'est-ce qui va se passer ? Ils vont être relâchés tout de suite, puisque la justice ne fait pas son travail.
07:36 Qu'est-ce qui va se passer ? Il ne leur arrivera rien, puisque aucun maire n'ose retirer des logements sociaux
07:42 à des gens qui, pourtant, abusent des aides qu'on leur donne.
07:47 Qu'est-ce qui va se passer ? Puisque de toute façon, les mêmes qui couinent en permanence sur la situation qui est faite dans leur quartier
07:55 se retrouvent souvent dans les marches blanches pour pleurer sur un gamin mort lors d'un refus d'obtempérer.
08:00 Ce qui peut se comprendre, puisque ces gens vivent ensemble, et que même devant quelqu'un dont on trouve qu'il a un comportement de voyou,
08:07 on peut, parce qu'on a des liens avec lui, être touché et être bouleversé par sa mort.
08:12 Mais on est dans un Muellstrom de gens qui sont un petit peu perdus, de politiques qui ne prennent pas leurs responsabilités,
08:19 d'une justice qui n'a pas les codes et qui ne sait pas comment répondre à ces nouvelles atteintes.
08:25 Et ce n'est pas l'armée qui changera quoi que ce soit, parce que de toute façon, c'est la chaîne entière qui est déferlée.
08:30 Je suis assez d'accord. Julien Dray, qu'est-ce qui vous a choqué dans ce cas-là ?
08:33 Le problème, c'est que ce n'est pas vrai qu'on ait les moyens. Parce qu'on ne fait que des incursions dans ces quartiers.
08:40 On n'a pas de forces présentes en permanence au quotidien dans ces quartiers-là. Je les connais bien, je les ai souvent.
08:46 Donc vous avez effectivement des bacs qui rentrent, à un moment donné, vous avez de la police qui patrouille, etc.
08:51 Là, le problème, c'est qu'il faut arriver à casser la structure telle qu'elle s'installe dans le quartier.
08:56 C'est-à-dire la tutelle d'un certain nombre de dealers qui ont les réseaux, ont les getters, savent passer par les caves, savent cacher ce qu'il faut, etc.
09:05 Donc il faut un quadrillage du quartier. L'armée ne sait pas faire ça, il faut être honnête. La gendarmerie sait le faire.
09:10 Parce qu'elle sait faire, d'un point de vue statique, une présence sur le terrain.
09:14 Donc ces quartiers-là, ils ne doivent pas être envahis par la gendarmerie.
09:16 Mais il doit y avoir des régiments de gendarmerie qui viennent et qui, par ailleurs, parce que c'est ça la question qui est posée, rassurent la population.
09:23 Parce qu'il y a toute une partie de la population qui a beaucoup de détails.
09:26 Mais quand il n'y a pas les policiers qui sont là pour la protéger au quotidien, toutes les heures, elle ne donne pas les détails.
09:31 Parce que quand la police s'en va, elle a peur de se faire attaquer.
09:34 – On dit la même chose ? – Non, parce que vous pensiez que tout était en état bien.
09:40 – Ah non, non, je n'ai jamais dit que la situation était très bonne.
09:45 – Non, mais je pense que la police valait encore un mot puis en avance.
09:48 – Non, mais la seule question qui compte, c'est quelle est la volonté politique ?
09:52 Est-ce qu'ils sont prêts à prendre des risques ?
09:54 Parce que l'absence de risque fait qu'on va dire aux policiers, vous allez terroriser un petit peu, vous passez dans le quartier,
10:01 vous faites trois interpellations, et en fait ça ne terrorise personne.
10:04 Et ça fait surtout grandement paniquer les habitants qui se disent,
10:07 ah ben il y a les policiers qui viennent un jour, le lendemain ils ne sont plus là, on ne sait plus…
10:10 – Je suis d'accord, c'est vraiment la détermination politique, parce qu'il y a quand même un énorme tabou.
10:14 C'est-à-dire que la police ou les gendarmes, quand ils interviennent dans ces quartiers-là,
10:18 sont tétanisés à l'idée qu'il y ait un incident.
10:21 Évidemment que personne ne souhaite qu'il y ait des morts, que la police en vienne, que les gendarmes en viennent.
10:26 – Mais si par principe les policiers et les gendarmes se disent qu'ils ne vendront pas leur arme, c'est quand même perdu.
10:29 – En revanche, je constate que quand il s'agissait des gilets jaunes,
10:31 parce que ceux-là n'avaient pas la même sociologie, il y avait un peu moins de réticence
10:36 ou un peu moins d'hésitation de la puissance publique à tirer dans le tas, pour le dire.
10:40 Et on se souvient de certaines stratégies de maintien de l'ordre
10:44 qui délibérément, en quelque sorte, créent des erreurs.
10:47 Donc oui, il y a un énorme tabou, on a peur, effectivement, que ça dégénère,
10:51 parce qu'on a peur d'être accusé de racisme.
10:53 – Allez, on va avancer. Alors Julien n'est pas d'accord, mais…
10:56 – Non, je pense que… – À moi parce qu'on avance, Julien.
10:58 – Le problème, c'est la force numérique que vous mettez sur le terrain.
11:01 Ce n'est pas un problème d'aller tirer au flash-ball, etc.
11:04 Quand vous avez, parce que je l'ai vécu en tant qu'élu,
11:06 quand vous avez une présence permanente, c'est ce qui se passe d'ailleurs
11:09 quand il y a eu les émeutes, on faisait venir à ce moment-là les compagnies de CRS
11:12 qui étaient là, à ce moment-là, tout se calmait.
11:14 Mais quand elles partaient, toi on commençait comme…
11:16 – Mais les deux ne se causent pas.
11:18 – Je rêverais qu'on évoque maintenant le risque attentat,
11:20 parce que je parlais des menaces, des nombreuses menaces
11:22 qui pèsent sur notre pays, celle du terrorisme évidemment est majeure.
11:27 323 menaces d'attentat ont visé des lycées partout en France
11:30 depuis une semaine, avec des interpellations ici ou là.
11:33 Mais quelles sont les suites réellement ?
11:35 On parlait de l'efficacité de la justice.
11:37 Quels sont les meilleurs mécanismes pénales qui sont possibles ?
11:39 On voit juste ça avec Noémie Chousse et je vous passe la parole.
11:41 – Ce mineur de 17 ans a été interpellé à Malakoff dans les Hauts-de-Seine
11:45 par les policiers de l'Office de lutte anti-cybercriminalité.
11:48 Il a été placé en garde à vue.
11:50 Une première arrestation alors que depuis une dizaine de jours
11:53 des établissements partout en France sont la cible de menaces
11:56 via les ENT, les espaces numériques de travail.
11:59 323 menaces dans 44 départements ont ainsi été comptabilisées
12:03 par le ministère de l'Éducation nationale.
12:05 À Paris, trois enquêtes ont été ouvertes.
12:08 D'abord pour atteinte à un système de traitement automatisé de données
12:12 mis en œuvre par l'État, délit faisant encourir
12:14 7 ans de prison et 300 000 euros d'amende.
12:17 Mais aussi pour menace de mort ou d'atteinte aux biens dangereuses
12:21 pour les personnes à l'encontre d'un chargé de mission de service public
12:24 jusqu'à 5 ans de prison, 75 000 euros d'amende.
12:27 Apologie du terrorisme au moyen d'un service de communication
12:30 au public en ligne et provocation à un acte de terrorisme,
12:34 7 ans de prison, 100 000 euros d'amende, usurpation d'identité,
12:38 divulgation d'informations fausses afin de faire croire
12:41 à une destruction dangereuse.
12:43 Là encore, un délit faisant encourir 2 ans de prison
12:46 et 30 000 euros d'amende.
12:48 Alors Céline Pinard, pour reprendre vos arguments,
12:50 on verra ce que ça donnera, les condamnations ou pas,
12:53 de ces individus qui menacent d'attentat les lycéens en France.
12:57 Mais force est de constater qu'on parle toujours du maximum
13:01 de ce que l'on peut donner, mais force est de constater
13:04 que les magistrats appliquent les lois avec tact et mesure.
13:08 C'est exactement l'inverse des dépassements d'honneuraire.
13:12 Et là, je pense qu'il faut quand même vraiment changer
13:15 de manière de faire.
13:17 Parce que si un gamin qui fait, qui commet un acte comme ça,
13:22 se retrouve avec 50 000 euros d'amende ou 30 000 euros d'amende
13:26 à payer par les enfants, par les parents ou par lui,
13:29 il faut regarder quelle est la structure.
13:31 Mais en fait, il faut que l'amende pèse sur la vie de la famille
13:34 et pèse pour un certain nombre d'années.
13:36 Et que ça soit su, que la publicité soit faite,
13:39 parce que le but du jeu, c'est que les gens arrêtent
13:41 ce genre de mobilité.
13:43 Et jusqu'à présent, comme on pouvait faire n'importe quoi
13:45 et qu'on ne payait jamais sa dette, là, je pense qu'il faut arrêter
13:48 parce qu'en fait, ça coûte, ce dont on ne se rend pas compte,
13:51 c'est ce genre de jeu coûte un argent incroyable à l'État
13:55 pour faire passer les démineurs, pour regarder...
13:58 - Il y a des lycéens qui ont été évacués.
14:00 Ce n'est pas un jeu, en fait.
14:02 - Non, ça terrorise les gens.
14:04 Ça a des impacts extrêmement lourds.
14:07 Et en plus, étant donné le contenu des menaces,
14:10 ça veut dire quand même qu'il faudrait aussi s'intéresser
14:12 à l'attente mentale de ce jeune homme.
14:14 Parce que même s'il ne fait que jouer avec la menace terroriste,
14:17 ce n'est pas normal à 17 ans de trouver le terrorisme amusant.
14:20 - Absolument. Eugénie Massié, vous êtes d'accord ?
14:22 - Oui, évidemment, bien sûr.
14:23 Et on pense aux Jeux olympiques qui arrivent bientôt
14:25 et des événements qui vont se tenir
14:27 sont susceptibles d'être annulés suite à des menaces.
14:29 On se demande bien comment l'État va avoir les moyens d'empêcher ça.
14:32 Et c'est le problème de la guerre contre le terrorisme
14:34 qui est le terrorisme à pour objectif
14:36 de créer un état de sidération et de vigilance permanent
14:39 dans la société et de la part des gouvernements.
14:41 Et à cette menace terroriste qui existe maintenant
14:43 depuis à peu près une vingtaine d'années en Occident,
14:45 s'ajoute la dimension cyber
14:47 qui aujourd'hui abolit même le virtuel et le réel
14:50 et qui crée une couche supplémentaire
14:52 de possibilités de terroriser.
14:54 J'imagine évidemment que les élèves qui ont cliqué
14:56 dans leur mail, dans leur NT, qui sont tombés sur des images,
14:58 ça veut dire que plus personne n'est à l'abri,
15:00 même en restant chez soi, dans sa chambre, devant son ordinateur,
15:03 on est susceptible de se retrouver face à des images terroristes.
15:07 Et c'est absolument un défi colossal pour nos démocraties.
15:11 - Julien Dray, il faut interpeller, sanctionner lourdement ?
15:14 - Il y a deux choses différentes.
15:15 De moi, je pense que les sanctions financières, ça se discute
15:17 parce que si c'est pour pénaliser une famille
15:19 qui n'a pas de moyens que les autres...
15:21 Par contre, je pense que c'est les jeunes
15:22 qui doivent être dans des sorties de leur milieu,
15:24 c'est-à-dire qui doivent être dans des centres d'éducation.
15:26 - Il y en a très peu, Julien, il n'y a pas de place.
15:28 - C'est ça le problème, c'est que c'est ça qu'il faut.
15:30 Il faut ouvrir les centres, il faut les reprendre en main,
15:32 et de manière pas simplement conjoncturelle par une sanction,
15:35 parce qu'il y a tout un travail à faire de rééducation.
15:37 Et si vous les laissez dans leur milieu,
15:39 d'abord vous risquez de pénaliser les frères et les sœurs
15:42 qui eux travaillent bien, mais voilà,
15:44 donc ceux-là, il faut les prendre en main.
15:46 La pénurie aujourd'hui de place dans ces centres d'éducation renforcés,
15:49 elle crée cette situation ubuesque où vous avez des sanctions
15:52 qui ne sont même pas appliquées le plus souvent, etc.
15:54 Après, il y a un autre débat qui n'est pas de la même nature.
15:57 On est en train de découvrir qu'il y a toute une réorganisation
16:00 des réseaux terroristes qui s'est mise en place ces deux dernières années.
16:03 Et peut-être, je ne pense pas que nos services sont sous-estimés,
16:07 mais malheureusement, la pieuvre, elle est multiple,
16:10 et il y a une très grosse réorganisation qui s'est mise en place,
16:13 qui est évidemment un péril maintenant pour l'ensemble des démocrations.
16:16 - Et on en a vu un exemple à Moscou, effectivement.
16:18 Jean-Sébastien Ferjou, avant Louis Dragnet.
16:20 - Je comprends ce que tu dis, Julie André, sur les cas les plus graves,
16:23 mais si on raisonne d'un point de vue réaliste, ça peut être tout le monde.
16:27 Les gens qui écrivent des menaces, on l'a vu dans les procès,
16:30 ça peut être vraiment monsieur et madame tout le monde,
16:32 y compris des gens très socialement intégrés.
16:34 Donc, ça ne va pas avoir que des jeunes, parce que parfois,
16:37 ce sont des majeurs, qu'on irait mettre dans des centres d'éducation.
16:40 Et comme vous l'avez souligné, on n'en a pas les moyens.
16:42 Mais comme le disait Jacques Lacan, le réel, c'est quand on se cogne.
16:44 Et effectivement, et Eugénie l'a souligné, il y a un problème,
16:47 finalement, de gens qui perdent le contact avec le réel,
16:50 parce qu'il y a une forme de nihilisme qui s'est mise en place,
16:53 une forme de virtualisation du monde.
16:55 Et il faut effectivement revenir à la certitude de la sanction,
16:58 qui puisse passer, pourquoi pas, par le placement,
17:01 mais en tout cas, par la certitude de la sanction et qui intervienne vite,
17:04 parce que sinon, effectivement, on a une génération
17:06 qui est en train de perdre le réel, tout milieu confondu.
17:09 - Louis Dragnet, la menace du terrorisme, elle terrifie nos gouvernants,
17:12 et a raison. Il y a eu une réunion qui s'est tenue aujourd'hui
17:15 avec Gérald Darmanin, et la DGSI, quel était le but de cette réunion ?
17:19 - OK, madame, c'est Céline Berton, la nouvelle patronne de la DGSI.
17:23 L'objectif de cette réunion, c'était de faire un briefing
17:26 au ministre de l'Intérieur sur l'état de la menace
17:29 à l'issue de l'attentat qui s'est produit à Moscou.
17:32 Et donc, la décision qui a été prise, c'est de réorienter
17:35 un certain nombre de capteurs de la DGSI vers tous les ressortissants,
17:39 les gens qui ont des liens avec des gens d'origine, par exemple,
17:43 des pays d'Asie centrale, le Kyrgyzstan, le Kazakhstan,
17:47 le Turkménistan, puisque la crainte du renseignement intérieur,
17:51 c'est non pas qu'il y ait des commandos projetés qui viennent de l'étranger,
17:55 mais l'activation à distance de personnes qui habitent déjà
17:58 sur le territoire national. Et la crainte est extrêmement élevée,
18:02 à tel point que plusieurs sources à la DGSI, qui ont préparé cette réunion,
18:06 nous expliquent qu'il y a des mots... - Des informations d'Europe 1, effectivement.
18:10 - Des mots comme "il faut se préparer à la possibilité de tuerie de masse",
18:14 "le retour des attaques terroristes de haute intensité",
18:18 et avec en ligne de mire... - La cérémonie d'ouverture des JO.
18:22 - La cérémonie d'ouverture des JO, où il y a eu beaucoup de menaces
18:27 qui ont été interceptées, et venant précisément de cette communauté.
18:31 Donc il y a eu, si vous voulez, une augmentation des menaces interceptées
18:35 depuis l'attentat qui a été commis à Moscou.
18:38 - Il y a une possibilité qu'elle soit annulée, cette cérémonie d'ouverture ?
18:42 - Ça dépend de la volonté du président de la République.
18:45 C'est le président de la République qui peut décider de ça.
18:47 - Si le risque est trop grand ? - C'est une décision politique.
18:50 - On va continuer en débat. - C'est-à-dire que ce n'est pas
18:52 ni la patronne de la DGSI, ni le ministre de l'Intérieur qui peut décider de ça.
18:55 C'est le président de la République. On sait que depuis le début,
18:58 il a maintenu envers et contre tout cette cérémonie d'ouverture sur la scène,
19:01 parce qu'il le souhaite. Est-ce qu'il écoutera les lignées du renseignement ?
19:06 - On se demande où c'est écrit. - On a appris que la Pologne
19:09 et des soldats étrangers viendront à Paris sécurisés pendant les JO.
19:13 - Génie Bastiat, un commentaire ? - On a l'impression que ce qui va se passer,
19:16 c'est un peu comme les JO du Japon il y a quatre ans pendant le Covid,
19:20 où il y avait une bulle sanitaire qui s'était construite autour de ces JO
19:23 qu'on a quand même maintenues, mais dans une bulle sanitaire extrêmement poussée.
19:26 Là, ce sera un peu la même chose, mais dans une bulle sécuritaire.
19:28 Ils ne seront évidemment pas annulés, rien ne sera annulé,
19:30 mais avec des conditions de sécurité telles que ça va être extrêmement déplaisant.
19:35 - Julien Drey ? - La question qui est posée sur les cérémonies d'ouverture,
19:39 c'est de savoir s'il ne faut pas la reformater.
19:41 La reformater parce qu'elle va être trop longue.
19:44 C'est très dur, c'est quelque chose qui dure 3-4 heures.
19:47 Ça veut dire une tension terrible pour les services.
19:50 Je ne suis pas convaincu qu'on ait besoin d'avoir toutes les délégations avec les drapeaux.
19:55 On peut avoir une très belle cérémonie d'ouverture qui dure 1h30-2h,
19:58 c'est largement suffisant et ça évitera la tension que va générer à ce moment-là les choses.
20:03 Après, ce sont souvent des sites fermés, donc tout ça va être très contrôlé, etc.
20:07 C'est bien qu'il y ait une coopération européenne et que les services européens viennent,
20:10 vu le danger dans lequel on est aujourd'hui.
20:13 - Absolument. Allez, on va faire le rappel des titres de l'actualité, il est 18h35.
20:16 Simon Guélin est là pour ses "News et Europe".
20:18 - Le Haut-Vernay revit la disparition du petit Émile pour tenter de percer le mystère.
20:26 Sa famille, des voisins et des témoins sont réunis sur place pour une mise en situation.
20:30 Au total, 17 personnes ont été convoquées par la justice pour reconstituer le moment
20:35 où l'enfant de 2 ans et demi a disparu, c'était le 8 juillet dernier.
20:39 Aux Etats-Unis, les corps de 2 des 6 personnes disparues ont été retrouvés aujourd'hui à Baltimore.
20:44 Ils étaient prisonniers de leur véhicule à plus de 7 mètres de profondeur.
20:48 Il faudra désormais retirer les importants débris du pont effondré
20:51 pour que les plongeurs puissent poursuivre les recherches sur place.
20:55 Et puis, près d'une semaine après l'attentat de Moscou qui a fait 143 morts,
20:59 les enquêteurs russes affirment que les auteurs de l'attaque
21:02 avaient des liens avec les nationalistes ukrainiens.
21:04 De son côté, Kiev dément toute implication dans ce massacre, Laurence.
21:08 - Merci beaucoup Simon Guilain. On va faire une petite pause.
21:10 On va continuer à débattre de la menace terroriste qui plane sur la France
21:13 à la lumière de ce qui s'est passé à Moscou.
21:15 Notre invité sera Anne Niva, grand reporter qui rentre de Russie.
21:18 A tout de suite dans Punchline.
21:20 18h40, on se retrouve en direct dans Punchline sur CNews et sur Europe 1.
21:28 Anne Niva nous a rejoint. Bonsoir Anne.
21:30 Vous êtes grand reporter. Vous publiez ce livre "La haine et le déni"
21:34 avec les ukrainiens et les russes dans la guerre aux éditions Flammarion.
21:37 Un livre de reportage où vous alternez les passagers russes et en Ukraine.
21:40 C'est vraiment votre métier de grand reporter.
21:42 On a évoqué il y a quelques instants, avant que vous n'arriviez,
21:44 la menace terroriste à la lumière bien sûr de l'attentat de Moscou
21:47 et la grande crainte des autorités françaises
21:50 qu'un commando puisse perpétrer un massacre, une tuerie de masse,
21:55 comme le disait il y a un instant Louis de Ragnel sur le sol français,
21:58 à l'approche des Jeux Olympiques.
22:00 Le fait que cet attentat ait pu se produire à Moscou prouve que rien n'est à écarter.
22:04 En réalité, que cette menace terroriste est omniprésente partout, y compris en Russie.
22:08 Bien évidemment que la menace terroriste est présente absolument partout.
22:12 C'est que les médias se réveillent aujourd'hui pour en parler.
22:15 Moi, ça fait 30 ans que je pratique le reportage.
22:17 Avant d'être dans la guerre entre l'Ukraine et la Russie,
22:20 j'ai couvert la guerre en Irak, j'ai couvert la guerre en Afghanistan.
22:23 Je peux vous dire que quand je rentrais, et j'avais eu du mal à vendre mes reportages
22:27 parce que ça intéressait beaucoup moins finalement que la guerre en Ukraine.
22:30 Donc bien sûr que le risque terroriste, on vient de le voir avec ce qui s'est passé à Moscou, est présent.
22:35 On est monté à 143 morts aujourd'hui.
22:39 Et il y a encore beaucoup de questions qui restent sans réponse.
22:43 En tout cas, on voit bien qu'en Russie, même si le Kremlin souligne la version ukrainienne,
22:52 il y a quand même beaucoup de Russes qui pensent qu'il s'agit d'un attentat terroriste
22:57 parce que moi-même j'ai vécu en Russie 10 ans.
23:00 Et le risque terroriste, il y a eu énormément d'attentats terroristes dans les 20 dernières années en Russie.
23:05 Et celui, l'un des plus récents, il y a à peine 10 ans, c'était quand même plus de 35 morts à Saint-Pétersbourg dans le métro.
23:14 Donc tout ça pour les Russes, ça n'est pas original.
23:18 C'est quelque chose qui leur fait peur.
23:20 Mais la guerre en Ukraine aussi est dans le quotidien des Russes depuis 2 ans.
23:25 Donc il y a un amalgame forcément aujourd'hui dans la tête des Russes.
23:29 Personne ne sait si c'est véritablement des Ukrainiens ou si c'est l'État islamique, branche du Khorasan.
23:35 Julien Drey, ça veut dire aussi que cet attentat qui s'est produit à Moscou prouve les failles du système Poutine à vos yeux ou pas ?
23:43 On ne va pas leur jeter la pierre.
23:45 On a été confronté nous aussi à la menace terroriste.
23:47 Elle a été terrible et pourtant on avait des services qui étaient plutôt compétents.
23:50 Donc ce serait trop facile de dire, vous voyez, c'est la faille du système, la faillite du système, etc.
23:55 Par contre, ce que je pense, c'est que M. Poutine a cru qu'il allait s'acheter une conduite avec les forces islamistes.
24:03 Il l'a cru depuis le 7 octobre.
24:05 Et il a rattrapé par ça parce qu'en Russie, il y a des forces islamistes depuis très longtemps dans le Caucase.
24:10 Et le combat pour l'installation d'un califat, il est partout, y compris en Russie.
24:14 Et c'est un réveil difficile pour lui.
24:16 Il avait pactisé pour vous avec ces organisations terroristes ?
24:20 Il avait pactisé, mais il a reçu, il y a moins de 15 jours, le Hamas en grande pompe.
24:23 Donc il pensait que sur ce flanc-là, les choses étaient en train de s'apaiser.
24:27 Notamment après l'intervention de la Russie en Syrie contre Daesh, qui a joué un rôle considérable.
24:32 L'État islamique en question a attaqué l'Iran.
24:34 Donc il y a quand même des différences.
24:36 L'État islamique au Khorasan a fait un attentat en Iran.
24:39 L'Iran soutient le Hamas. On voit bien qu'il y a aussi au sein même du monde musulman des guerres terroristes.
24:48 Non mais si vous voulez, ça pose quand même un problème à Vladimir Poutine, cet attentat.
24:52 Parce que qui sont les hommes qui vont combattre sur le front ukrainien aujourd'hui, en venant de la Fédération de Russie ?
25:00 Ce sont essentiellement des non-russes, c'est-à-dire détenteurs du passeport de la Fédération de Russie,
25:05 mais qui viennent de républiques non-ethniquement russes, comme la Bourgiatie, le Déguestan, le Tatarstan, etc.
25:11 Donc il lui est difficile aujourd'hui à Vladimir Poutine, parce que là pour le moment, sa priorité c'est de calmer l'opinion publique.
25:17 Parce qu'évidemment, tout le monde a très peur.
25:23 Il y a une grande colère des Russes ou pas ?
25:25 Oui absolument. Et depuis vendredi, il y a évidemment un racisme anti-Tadjik,
25:29 puisque les quatre personnes arrêtées qui ont été montrées sont ressortissantes du Tadjikistan.
25:35 Ce racisme et cette xénophobie existaient déjà.
25:38 Mais là, ce que je veux dire, c'est que ça prend une nouvelle ampleur.
25:41 Tous les chauffeurs de taxi à Moscou sont originaires du Tadjikistan, du Zbekistan, etc.
25:47 Donc aujourd'hui, les Russes ne veulent plus les prendre.
25:50 C'est quand même compliqué pour Vladimir Poutine, parce qu'il ne souhaite pas déclarer une seconde vague de mobilisation.
25:59 Et il sait très bien que la plupart de ceux qui vont combattre en Ukraine sont issus de ces républiques.
26:05 Et il y a quand même 20% de la population en Russie qui est musulmane.
26:09 Donc il doit tenir compte de tout cela, et c'est un équilibre fragile.
26:12 J'aimerais juste qu'on écoute la Russie, la porte-parole du comité d'enquête en Russe,
26:17 qui continue à cibler l'Ukraine, alors que l'Etat islamique a revendiqué par deux fois l'attentat de Moscou.
26:25 On l'écoute, elle s'appelle Svetlana Petrenko.
26:28 Après avoir travaillé avec les terroristes détenus, examiné les dispositifs techniques saisis
26:35 et analysé les informations sur les transactions financières,
26:38 des preuves de leur lien avec les nationalistes ukrainiens ont été obtenues.
26:43 L'enquête a permis de confirmer des données selon lesquelles les auteurs de l'attaque terroriste
26:48 ont reçu depuis l'Ukraine d'importantes sommes d'argent et des crypto-monnaies
26:52 qui ont été utilisées pour préparer le crime.
26:55 Voilà pour ce que disent les officielles russes.
26:58 C'est de la cécité ? C'est de la stratégie ? C'est quoi, Anne Kéva ?
27:01 C'est la doxa, c'est-à-dire qu'elle ne peut rien dire d'autre,
27:05 puisque Vladimir Poutine, c'est lui qui donne le "là"
27:07 et c'est lui qui a quand même attendu 19 heures avant de parler.
27:12 Après l'attentat.
27:14 Après l'attentat.
27:15 Et il continue à souligner le récit qui est celui en cours aujourd'hui au Kremlin,
27:24 qui est de dire que la Russie est face à une menace existentielle
27:28 et même face à une double menace, c'est ce que dit le Kremlin.
27:32 Donc la double menace, c'est bien sûr celle des nazis "d'Ukraine"
27:37 et c'est celle de cet islamisme, de ce terrorisme islamique.
27:42 Donc là, Vladimir Poutine, il marche sur des oeufs,
27:46 puisque justement, pour les raisons que j'ai évoquées,
27:48 il a besoin de personnes pour continuer à faire cette guerre.
27:51 Et en même temps, il faut qu'il ménage cette population
27:54 qui existe à l'intérieur de la Russie, qui travaille sur les chantiers,
27:58 qui est très importante économiquement pour la Russie.
28:02 Et il le répète tout le temps, Vladimir Poutine,
28:04 la Russie est un État multinational.
28:07 Et en cela, il a absolument raison, c'est-à-dire qu'en Russie,
28:10 vous avez énormément de différentes nationalités.
28:12 Il n'y a pas que la nationalité russe.
28:14 Céline Pina, qu'est-ce que ça signifie ?
28:15 Rappelez-vous, après le 7 octobre, ce qui se passe au Dagestan,
28:18 notamment sur l'aéroport, où vous avez des dizaines et des dizaines de personnes
28:23 qui veulent se faire "tuer les passagers" d'un avion qui est censé arriver de Tel Aviv.
28:28 Donc là, on voit quand même que la situation est extrêmement tendue,
28:32 il suffit d'une étince à l'aïeux pour provoquer...
28:34 Oui, oui, ça fait très peur, ça.
28:35 Voilà, et ça a terrorisé tout le monde.
28:37 Le deuxième point qu'on oublie, c'est la façon dont, pas seulement Poutine,
28:41 mais les anciennes républiques soviétiques ont utilisé le nazisme.
28:45 En fait, on a de la propagande sur le nazisme qui va durer quasiment jusqu'aux années 2000.
28:50 Donc ce qui nous paraît, à nous, daté des années 50,
28:53 à eux, c'est encore extrêmement frais.
28:55 Troisièmement, on est chez un dictateur, donc il n'en a rien à faire de la vérité,
28:59 il n'a même pas à avoir un rapport avec, en revanche, il est dans le narratif.
29:02 Et dans le narratif, pour que quelqu'un vous entende,
29:05 il faut que tout cela se place dans un fond d'écran qui est déjà en place.
29:09 Et le fond d'écran en place, c'est la guerre avec l'Ukraine.
29:11 Et comme il ne peut pas vraiment s'attaquer directement à l'islamisme,
29:16 eh bien, en politique, on détourne le tir, on triangule,
29:19 pour retrouver l'adversaire qu'on sait combattre,
29:22 parce que l'autre, en fait, on ne sait pas ce qu'on va en faire.
29:24 Il viendrait la nazification.
29:26 - Poutine l'a commencé, on l'a vu aussi en marche sur le 7 octobre.
29:30 - Il faut quand même comprendre ce que c'est que la Russie,
29:32 ce qu'a été l'Union soviétique.
29:33 La grande guerre, ce n'est pas rien pour les Russes.
29:35 C'est des millions et des millions de morts, c'est des sacrifices terribles.
29:39 Et il n'y a pas une famille russe qui n'a pas perdu une ou deux enfants.
29:43 C'est une histoire qui s'est racontée, qu'on ne peut pas gommer comme ça,
29:46 et ce n'est pas que de la propagande.
29:48 Et d'ailleurs, c'est le peuple russe qui gagne la bataille, ce n'est pas Staline.
29:51 Parce que Staline, au départ, il n'a rien compris.
29:53 C'était un malier Hitler, donc c'est une mobilisation sans précédent.
29:56 Donc il y a une fierté russe dans cette guerre qui reste,
29:59 qui est permanente et qui ne s'efface pas du jour au lendemain.
30:01 Donc après, il en joue effectivement, parce qu'il sait bien
30:04 que ce sentiment est présent dans la population russe telle qu'elle est.
30:08 Moi, mon sentiment, c'est que connaissant un peu les Staliniens
30:12 et les nouveaux Staliniens, je pense qu'ils sont en train de tout revisiter.
30:17 Alors c'est toujours la même chose, ça tourne très vite dans ces cas-là.
30:20 Donc dans un premier temps, on a l'impression que rien ne bouge,
30:22 et puis d'un coup, il va y avoir des pieuges, des machins, et ils vont tourner.
30:25 J'aimerais évoquer avec Anne Niva aussi la position française
30:27 par rapport au soutien à l'Ukraine.
30:29 On va écouter Sébastien Lecornu, ministre des Armées,
30:31 qui a été très clair à l'occasion d'un point sur le soutien à l'Ukraine.
30:33 Il estime que la Russie est une menace pour nous, Français. Écoutez-le.
30:36 La réalité, c'est que la Russie représente une menace pour nous.
30:40 Pour l'Ukraine, c'est une évidence.
30:43 Mais une menace pour nous, ça devient de plus en plus une évidence.
30:46 On voit bien que le comportement de la Fédération de Russie
30:48 n'est pas le même qu'il y a deux ans, au début de la guerre.
30:52 J'ai rendu public un certain nombre d'interactions particulièrement agressives
30:56 des forces armées russes à l'égard des forces armées françaises.
31:01 Des attaques cyber, certes, mais attaques quand même de plus en plus dures,
31:06 de plus en plus violentes, tant sur des infrastructures cyber militaires que civiles.
31:12 Militaires, elles sont largement repoussées,
31:14 mais les infrastructures civiles peuvent être plus fragiles.
31:17 Voilà pour Sébastien Lecornu.
31:18 Ani Niva, il a aussi dit qu'il allait donner des ordres de réquisition
31:22 pour certaines usines d'armement.
31:23 Oui, ça, ce n'est pas encore fait.
31:25 Sébastien Lecornu dit que la Russie a changé d'attitude depuis deux ans.
31:28 Certes, mais la France aussi a changé d'attitude depuis deux ans.
31:31 Je me souviens qu'Emmanuel Macron ne tenait pas le discours qu'il tient aujourd'hui,
31:36 en 2024, pendant toute l'année 2022, puisqu'il a parlé encore après l'été 2022.
31:41 Il soulignait le fait qu'il fallait continuer à dialoguer avec la Russie
31:44 et qu'il ne fallait pas humilier la Russie.
31:47 Aujourd'hui, il tient un autre discours.
31:49 Mais tout ça, c'est de la politique.
31:50 Moi, justement, dans mon livre, je ne traite pas de politique, je traite de l'humain.
31:54 Et ce que je voudrais dire, qui me semble intéressant,
31:56 c'est que la population russe, à qui j'ai parlé, puisque je parle russe,
32:00 et que même si les Russes ont du mal à s'exprimer publiquement,
32:04 parce qu'ils peuvent, s'ils s'expriment anti-guerre, se retrouver en prison,
32:07 à quelqu'un qui parle leur langue et qui leur assure la discrétion, ils parlent.
32:11 Et qu'est-ce qu'ils disent ?
32:13 Eh bien, il y a des Russes pro-guerre et pro-Poutine, on sait ce qu'ils disent,
32:17 mais il y a aussi des Russes anti-guerre et anti-Poutine.
32:19 Et moi, ce qui m'intéressait, c'est le niveau de patriotisme des uns et des autres.
32:22 Et en fait, il est le même.
32:24 Il y a un immense niveau de patriotisme, même chez les Russes anti-Poutine et anti-guerre,
32:30 parce que quand je leur demande comment ils voient la fin de cette guerre,
32:33 est-ce qu'ils envisagent une victoire de l'Ukraine,
32:37 eh bien, même eux n'arrivent pas à me le dire, c'est-à-dire à l'envisager.
32:42 Donc, pour le moment, cette guerre militairement n'est pas gagnée,
32:46 ni d'un côté ni de l'autre, on est dans une guerre d'attrition.
32:48 Et c'est pour ça qu'elle va durer longtemps, que les Russes que Poutine prépare sa population.
32:52 Et que de l'autre côté, côté ukrainien, où j'ai également énormément à en parler à tout le monde,
32:57 et où il y a aussi des avis qui ne sont pas toujours les mêmes, bien sûr,
33:00 parce qu'il y a une différence entre l'avant et l'arrière, comme dans toutes les guerres,
33:03 eh bien, il y a aussi deux bonnes guerres, si je puis dire,
33:06 que du côté de Volodymyr Zelensky, on essaye de continuer à avoir cette aide.
33:10 Mais beaucoup d'Ukrainiens trouvent qu'on les a lâchés dès le départ.
33:15 J'ai un ancien officier du renseignement ukrainien qui me disait,
33:19 "Dès 22, vous ne nous avez pas assez, vous nous avez laissés tomber."
33:24 Donc ça, il faut l'entendre aussi, même si ça ne fait pas plaisir à entendre.
33:28 - Bien sûr. Eugénie Bassié, vous voulez rajouter quelque chose ?
33:30 - Oui, il y a un écrivain qui a écrit un livre qui s'appelait "Z comme zombie",
33:34 où il parlait de l'opinion russe, la manière dont elle a été formatée par la propagande
33:38 qui est entre les mains de l'État en Russie.
33:40 Est-ce que vous avez eu le sentiment de ressentir ça,
33:43 le poids de cette propagande publique, médiatique, sur les Russes,
33:47 qui disaient qu'ils étaient carrément devenus des zombies ?
33:49 - Oui, mais bien sûr, ça dépend de quelle Russie.
33:52 Ça dépend aussi de la classe d'âge, bien sûr,
33:54 parce que la Fédération Russie reste le premier pays le plus grand du monde,
33:57 11 plusieurs horaires, donc il y a les télévisions d'État
34:00 qui, évidemment, sont beaucoup regardées par des personnes de 50 ans et plus,
34:05 tandis que les plus jeunes sont sur Internet, sont sur les chaînes télégrammes.
34:10 - Ils s'informent. - Ils s'informent, mais il faut le vouloir.
34:12 Il faut mettre un VPN sur son téléphone, parce qu'il y a des sites qui sont censurés.
34:16 YouTube n'est pas encore censuré en Russie,
34:18 donc c'est un effort quand même pour vouloir s'informer.
34:22 Donc, bien sûr que cette propagande existe, mais comme on l'a dit sur ce plateau,
34:26 elle n'existe pas que depuis cette guerre.
34:28 Elle existe depuis très longtemps.
34:30 Le narratif sur le poids de l'histoire en Russie
34:33 et l'importance de cette fameuse Grande Guerre patriotique,
34:36 qui est la façon dont on appelle en Russie la Seconde Guerre mondiale,
34:39 ce n'est évidemment pas du tout la même vision que la nôtre.
34:41 - Ce n'est pas le même que le nôtre. Jean-Sébastien Fergeron, un dernier mot.
34:43 - Une question pour Aniva et ces Russes à qui vous parlez, justement.
34:46 Il y a le patriotisme vis-à-vis de la Russie, mais si on raisonne en bloc,
34:50 est-ce qu'ils se sentent faire partie un peu plus d'un monde occidental
34:54 ou d'un monde blanc, pour le dire autrement,
34:56 ou alors de cette nouvelle coalition de régime autoritaire avec la Chine et l'Iran ?
35:00 Où est-ce qu'ils se sentent appartenir ?
35:02 - Ils se sentent quand même encore faisant partie du monde occidental et notamment européen.
35:07 Mais là, je parle des élites, des élites économiques, des élites intellectuelles
35:13 dont beaucoup ne peuvent plus venir ici.
35:16 Et donc, ça leur coûte mentalement de ne plus pouvoir venir.
35:20 On sent que ça les fait souffrir. Il y a cette histoire des sanctions, bien sûr.
35:23 Donc, ils se sentent encore complètement partis de ce monde européen,
35:27 de ce monde occidental, mais en même temps, on voit bien
35:32 que les alliances politiques internationales de la Russie sont en train de changer.
35:36 Et toutes les sanctions sont contournées.
35:38 Si on peut encore aujourd'hui s'acheter, je ne sais pas, une Porsche ou une Ferrari
35:43 quand on habite Moscou, c'est parce qu'elles arrivent dans un pays tiers,
35:47 comme l'Azerbaïdjan, comme l'Ozépéquistan ou d'autres.
35:49 C'est-à-dire, comme avec l'Iran, bien sûr, n'importe quel État sanctionné s'adapte
35:54 et contourne les sanctions.
35:55 Pas de solution à court terme entre la Russie et l'OTAN ?
35:57 Non, pas de solution à court terme.
35:58 Une guerre d'accession qui va durer des mois ?
35:59 Non, absolument pas. Pour le moment, c'est bloqué.
36:00 Et avec les Européens qui tentent d'envoyer de l'armement en en achetant dans le marché ?
36:03 Les Russes attendent beaucoup les élections américaines.
36:06 Pour savoir si Donald Trump est élu ou pas ?
36:09 Sera capable de trouver une solution à ce problème. Mais beaucoup en doutent quand même.
36:13 Si vous permettez, je voudrais faire une remarque.
36:15 C'est la fin de l'émission, Julien.
36:16 Il y a quelque chose qui m'énerve dans le positionnement de la France.
36:19 Quand un ministre des Armées dit "la Russie est une menace pour la France",
36:23 il faut qu'il m'explique.
36:25 Ce qu'on fait pour s'en prémunir ?
36:27 Non, ce n'est pas ça. Nous sommes une puissance nucléaire.
36:29 Qui pense que les chars russes vont...
36:31 J'ai connu ça dans les années 70, quand la gauche devait arriver au pouvoir,
36:35 on nous expliquait que les chars russes allaient arriver à la Concorde.
36:37 Mais aujourd'hui, ce n'est pas ça qui est posé.
36:39 Il y a bien d'autres moyens d'être menaçants.
36:41 Oui, d'accord. Mais faisons attention à notre pays.
36:43 Les Russes sont aussi très fiers d'être une puissance nucléaire.
36:45 Anne Nival, à NLDNi, avec les Ukrainiens et les Russes dans la guerre.
36:48 Je recommande ce livre extraordinaire de reportage.
36:50 Merci à vous d'être venus, chers auditeurs et téléspectateurs de CELUS et Europe 1.
36:55 Dans un instant, Christine Kelly sur CELUS pour Facein l'Info,
36:58 et Hélène Zellani sur Europe 1.
37:00 Bonne soirée à vous sur nos deux antennes.
37:02 ...