Chaque jour, découvrez la pépite du jour dans la France Bouge avec Elisabeth Assayag.
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00:00 Europe 1, La France Bouge, la pépite. La pépite avec vous Ludovic Lecointre, vous avez cofondé Iconus, c'est ça ?
00:08 Oui tout à fait. La start-up existe depuis six ans.
00:10 Oui. Vous vous avez, on va revenir un peu sur votre parcours, c'est bien de connaître qui sont les entrepreneurs autour de la table de La France Bouge.
00:17 Vous avez une formation de pharmacien, vous avez travaillé dans l'industrie pharmaceutique pendant près de 20 ans.
00:21 Et puis vous avez, vous êtes parti, vous avez acheté une pharmacie.
00:27 Ça a duré dix ans, bon c'était pas le meilleur souvenir.
00:30 Oui c'était pas mon truc.
00:31 Non c'était pas votre truc. Et vous avez fait le choix d'aller travailler à l'Agence Nationale de Sécurité du Médicament.
00:36 Oui j'étais, plus précisément j'étais expert externe.
00:40 Expert externe. Comment vous vient l'idée de, un, fonder une entreprise et pourquoi, dans le domaine de l'autisme ?
00:49 Enfin c'est sur les maladies, sur la détection des maladies liées à l'autisme.
00:56 Ou alors c'est le résultat d'un parcours qui n'est pas programmé forcément comme ça au départ, et de rencontres.
01:02 C'est souvent des rencontres entrepreneuriales.
01:04 Et en fait, il se trouvait qu'en tant qu'expert externe à l'ANSM, donc j'évaluais les dossiers, pour faire cours, les dossiers d'AMM que déposent les entreprises pharmaceutiques pour avoir leurs autorisations de mise sur le marché.
01:17 Donc pour avoir l'Agence du Médicament.
01:20 Et en fait, j'ai rencontré un chercheur qui s'appelle Michael Tenter, qui est à l'origine de technologies innovantes dans le domaine de l'imagerie par les ultrasons depuis de nombreuses années.
01:33 Et il m'avait demandé à l'époque d'évaluer un projet lié à l'administration de médicaments avec des ultrasons.
01:39 Et j'ai commencé à découvrir le monde de l'innovation par ce biais là, en travaillant avec eux.
01:44 Et puis bon, ce projet n'a pas fonctionné pour différentes raisons, mais j'ai découvert cette innovation académique.
01:52 - Mais c'est quoi cette innovation ? C'est l'objet même d'Iconus ?
01:57 - Alors, en fait Iconus, c'est une start-up qui exploite, si vous voulez, les résultats de recherche, de la recherche académique française.
02:03 En l'occurrence, principalement Inserm et CNRS.
02:05 - Alors vous allez nous expliquer ce que c'est, en lien avec l'autisme, pour qu'on comprenne bien tout ce que ça veut dire, comment vous faites avancer ce diagnostic de plus en plus précoce.
02:16 On vous écoute et ensuite on va vous poser des petites questions. Vous êtes prêts ?
02:19 - Oui.
02:19 - Allez, on vous écoute Ludovic Lecointre, c'est à vous.
02:21 - Alors Iconus, c'est une start-up active depuis début 2017, qui exploite donc des technologies de l'Inserm et du CNRS, comme je viens de le dire, pour faire de l'imagerie neuro-fonctionnelle.
02:32 Donc ce qui est important là-dedans, c'est le mot fonctionnel, c'est-à-dire que nous n'imageons pas les structures tissuéaires du cerveau, il y a d'autres techniques qui font ça très très bien.
02:39 Nous, on image les phénomènes dynamiques qui se passent dans le cerveau quand il travaille.
02:43 Et nous sommes une start-up un petit peu particulière, j'ai l'habitude de dire une start-up PME, parce qu'en fait nous ne vivons pas sur des levées de fonds en cascade qui s'enchaînent pour faire progresser la société.
02:54 Nous vivons dès le début de la société sur notre chiffre d'affaires que nous réalisons sur un marché, un premier marché, qu'on appelle le marché de la recherche fondamentale sur le cerveau.
03:04 Donc nos clients sont des chercheurs en neurosciences, et à ces chercheurs, on leur vend un produit qui exploite ces technologies innovantes de l'Inserm et du CNRS pour faire de la recherche sur le cerveau.
03:13 Et ça nourrit l'entreprise, ça la fait grandir, et ça nous permet de financer des projets de recherche pour des applications futures cliniques dont effectivement potentiellement l'autisme, mais pas que.
03:24 Aujourd'hui c'est 35 personnes, nous sommes basés à Paris, nous fabriquons nos produits à Paris.
03:28 Merci pour votre pitch, merci de vous être prêté à l'exercice Ludovic Lecointe, co-fondateur d'Iconius.
03:33 Vous, si je comprends bien, vous avez inventé une machine qui ressemble à une espèce d'ordinateur à roulette, et vous vous attaquez à plusieurs maladies du cerveau.
03:43 Oui, alors il y a plusieurs indications possibles à notre technologie effectivement.
03:47 En fait notre technologie, je dis qui vient de l'Inserm et du CNRS, on a des brevets pour l'utilisation de cette technologie, permet de donner trois lectures différentes du cerveau.
03:57 La première lecture c'est l'activation des neurones, l'activité neuronale.
04:02 Donc quand dans une zone du cerveau des neurones s'activent, ils ont besoin d'être nourris par le sang, parce que les neurones contrairement aux muscles n'ont pas de réserve énergétique.
04:12 Donc tout de suite le flux sanguin va augmenter dans cette petite zone précisément.
04:16 Et notre technologie a cette capacité de mesurer très finement les petites variations de flux sanguin, on va être capable sur l'image du cerveau du sujet étudié de visualiser cette zone.
04:24 Avec une très très grande précision.
04:26 Donc si une zone du cerveau s'active, vous êtes capable de faire clignoter cette zone en rouge et quel est le lien donc avec l'autisme ?
04:34 Alors c'est un autre aspect, donc ça c'est le premier aspect de notre technologie, on a déjà dit qu'on en avait trois.
04:40 Le deuxième aspect c'est l'imagerie vasculaire très précise avec des agents de contraste, on peut avoir une résolution des flux sanguins de 5 micromètres, pour une information de 5 micromètres c'est la taille d'un globule rouge.
04:51 Donc on va jusqu'au capillaire, entre 5 et 20 microns chez l'humain, et donc on peut mesurer comme ça les flux sanguins très précisément pour les futures maladies, par exemple la maladie neurogénérative est en origine probablement vasculaire.
05:04 Donc ça c'est le deuxième cas, le troisième, on y vient.
05:07 L'autisme, on arrive à l'autisme, c'est en fait on mesure ce qu'on appelle le connectome, dans le cerveau il y a en permanence des zones qui se connectent entre elles même quand on fait rien, ou qui se déconnectent, et quand on fait des tâches évidemment ces phénomènes sont amplifiés.
05:21 Et ces connexions entre les différentes zones du cerveau forment un pattern de connectivité qu'on appelle le connectome, et il y a des gens, c'est pas nous qui le disons, qui pensent qu'il y a dans le cerveau un état standard on va dire de connectome, qui sert de référence.
05:36 Et à partir du moment où on pose ce principe là, on peut poser le principe que quand il y a une pathologie ou un trouble de syndrome autistique, il y aura un écart par rapport au pattern normal, et notre technologie permet de mesurer ce connectome, et donc peut-être, si la science marche en notre faveur, de diagnostiquer différentes pathologies dès la naissance ou très très proche de la naissance, dont l'autisme.
05:56 Donc c'est une technologie, si on vous entend bien, Lidovic Lecointre, qui va être révolutionnaire si vous allez jusqu'au bout, et si c'est vérifié, et là je rebondis sur ce que vous nous disiez Mahamed Sagidi tout à l'heure, président fondateur de "Vaincre l'autisme" sur Europe 1, c'est-à-dire qu'aujourd'hui, à travers cette technologie, on peut aborder le diagnostic de l'autisme à travers un prisme beaucoup plus médical qu'un prisme clinique et compagnie, et les parents, et les générations.
06:23 - Exactement, parce que... - Donc on est complètement éloigné de la psychanalyse là. - On est éloigné de la psychanalyse, et puis des idéologies, surtout des idéologies, parce qu'il y en a beaucoup aujourd'hui sur le web, où les parents sont victimes.
06:33 Le problème de l'autisme, c'est un dysfonctionnement neuronal, c'est clair, c'est découvert depuis longtemps, dans les connexions des synapses, il y a des dysfonctionnements...
06:44 - Les synapses et les circuits électriques, pour vous montrer un exemple. - Les circuits électriques, il y en a qui se connectent, il y en a qui ne se connectent pas, et là vous avez un dysfonctionnement, le traitement de l'information est complètement dysfonctionné pour un enfantisme.
06:55 Vous parlez d'une bouteille qu'on prend en verre, je donne un exemple qui vous paraît bête, mais c'est comme ça, il regarde un verre, le verre il y a de l'eau, vous vous parlez de l'eau, lui il peut associer le mot "eau" au verre, mais pas à le liquide qu'il y a dedans.
07:08 - Donc il y a une déconnexion entre les... - Exactement, s'il y a des outils comme ça qui viennent détecter plus tôt, ça permet déjà d'avoir une suspicion, par la suspicion on va commencer un travail.
07:18 - Alors ça c'est la suspicion, et là vous utilisez le langage dans le dépistage, sauf que la technologie de Ludovic Lecointre, qui est l'association Europe 1 avec Iconus, c'est que vous vous adressez au bébé de moins de 6 mois.
07:32 - Oui, tout à fait. - Et c'est ça qui est extraordinaire.
07:34 - Alors c'est extraordinaire, on ne sait pas encore si c'est extraordinaire, on espère. - Mais c'est en cours, parce que là ça démarre normalement cette année, en 2024, vous avez trois dispositifs qui vont être testés sur les nouveaux-nés à l'hôpital Robert Debré à Paris.
07:45 - Oui, alors on a trois dispositifs qui sont partis dans les études, dont un effectivement à Robert Debré, dans une étude qui va analyser des bébés, des prématurés, des grands prématurés, des bébés qui ont des différents problèmes de naissance, et dont un bras autistique effectivement, entre la naissance et 6 mois.
08:01 - Donc vous aurez un groupe témoin et un groupe déjà, pour pouvoir comparer. - Absolument. C'est une étude qui est financée par l'ANR, qui est dirigée par le docteur Valéry Biron à Robert Debré, Pierre Grécin, c'est un chercheur de l'INSERM qui est très actif sur cette étude, qui s'appelle Charlie Domenet, qui porte le projet.
08:17 - Donc là, elle est en phase d'acceptation administrative, nous sommes en France, donc il y a beaucoup de paliers à franchir, et ensuite le protocole serait validé pour ensuite passer à l'échelle supérieure, et je trouve ça extraordinaire, vous en pensez quoi autour de la table ?
08:33 - C'est une chose à rappeler, que l'autisme c'est post-natal ou pré-natal, donc des outils comme ça qui viennent précocement diagnostiquer. Je me rappelle que le professeur Benary avait découvert que par manque de cytocine à l'accouchement, le chlore ne s'évacue pas du cerveau du bébé, c'est une première mondiale, il était obligé de la financer par les américains, parce que la France en l'a pas entendu, et il restait à découvrir quand est-ce qu'il y a un dysfonctionnement chez le fœtus,
09:02 et il faut comprendre que c'est ces recherches là qui vont amener à faire évoluer les choses, il y a prévenir de la maladie, aujourd'hui, comme on ne la considère pas comme une maladie qui est porte-atteinte à la santé publique, on n'agit pas pour la recherche.
09:15 - Donc on est dans un trouble neurologique ?
09:17 - Exactement, c'est neurologique, mais pas que, parce que par manque de recherche il y a des choses qui vont être physiologiques, organiques, etc. La génétique n'est même plus discutable aujourd'hui. Moi j'ai fait des recherches génétiques, Thomas Bergeron il est connu dans le monde, il est français, que mon fils était de nouveau, c'est un accident d'une mutation génétique dans le chromosome 11, sauf que les autres peuvent être héréditaires chez des familles où il y a 2-3 enfants.
09:44 Par contre, là, moi j'ai des cousins aujourd'hui qui ont des enfants autistes, et j'ai ma sœur qui a une fille autiste, d'ailleurs qui est préfétérée à l'école Rabat, qui a vraiment évolué, donc il y a quand même quelque chose de génétique qu'il faut creuser plus.
09:56 - Il y a une part de génétique qu'il faut peut-être creuser. Ludovic Lecointre, si ça avance, là je rappelle, on est en phase de test en ce moment, ça démarre à l'hôpital Robert Debré à Paris sur des nouveaux-nés, est-ce que vous allez conserver le même mode de financement ? Parce que ça va prendre de l'ampleur.
10:13 - Alors, le financement de la société, vous pouvez me le parler ? Alors effectivement, la société a cette particularité qu'elle est auto-financée par ses ventes, donc nous avons les moyens de faire des preuves de concept, c'est-à-dire qu'en fait on va en clinique, on va faire des recherches cliniques sur différentes pathologies, dont l'autisme, on l'amène jusqu'à la preuve de concept, et à la moment de la preuve de concept, si elle est positive, évidemment, c'est pas à l'avance, à ce moment-là, il faudra des moyens bien supérieurs pour déployer le système sur le marché, et là évidemment, il faudra trouver des partenariats, il faudra changer de modèle de ce point de vue, tout à fait.
10:42 - Alors, à Strasbourg, une maison 100% adaptée aux autistes vient d'être inaugurée, c'est bien, il y a plein de belles initiatives en France, racontez-nous.
10:49 - Cette maison s'appelle La Cordée, elle a été imaginée par l'association Autonome Ensemble, donc le bâtiment se décompose en 7 appartements qui ont été spécialement conçus, occupés par des adultes autistes, donc on fait une petite visite du domicile si vous voulez, environ 40 mètres carrés, une cuisine, un salon, une chambre, sauf que l'espace est adapté pour le quotidien des adultes autistes, donc par exemple, il y a des variateurs de lumière pour les personnes photosensibles, ou encore une meilleure isolation phonique,
11:11 chaque locataire a son propre espace, mais il peut aussi partager des activités pour favoriser la vie sociale, donc ça passe par des sorties karaoké, du bowling, du cinéma, voilà, il y a toute une vie de communauté qui se crée.
11:22 - Voilà, il se passe des choses, on avance en France autour de l'autisme, on en parle ce soir sur Europe 1, à l'occasion de la journée mondiale de l'autisme, vous restez tous autour de la table de la France Bourge, on va faire une petite pause en musique avec les Ritamitsouko et Andy sur Europe 1.
11:36 Europe 1.