• il y a 6 mois
En pleine discussions pour réformer la fonction publique, le ministre Stanislas Guérini crée le malaise en mettant sur la table la question du licenciement. Langage de vérité salvateur ou mot de trop ? On en parle avec Stanislas Gaudon, président de la fédération services publics à la CFE-CGC et Antoine Foucher, président de Quintet Conseil.

Category

🗞
News
Transcription
00:00 [Musique]
00:12 Le cercle est rache pour parler de la fonction publique et des fonctionnaires.
00:15 On va revenir évidemment sur les mots du ministre Stanislas Guérini
00:19 qui évoque l'idée de pouvoir licencier un fonctionnaire lorsqu'il ne répond pas au travail,
00:24 lorsqu'il ne fait pas le travail demandé, ça c'est un vrai sujet,
00:27 et qui va susciter, j'en suis sûr, un débat sur le plateau.
00:30 Puis on va s'intéresser aussi aux salaires, aux rémunérations,
00:34 à la manière dont on progresse dans la carrière,
00:37 et on en parle avec Stanislas Godon.
00:39 Bonjour Stanislas.
00:40 - Bonjour.
00:40 - Ravi de vous accueillir.
00:41 Président de la Fédération Services Publics CFE-CGC,
00:44 toute la fonction publique, on est d'accord, d'État, territorial, hospitalière.
00:49 - Et également tous les EPIC, EPA,
00:53 parce qu'il y en a aussi dans la catégorie des services publics.
00:56 - Et vous avez quelques éléments à nous transmettre,
00:58 et évidemment vous réagirez à ce qu'a dit le ministre Stanislas Godon.
01:02 Antoine Fouché, ravi de vous accueillir,
01:04 président de Quintet Conseil,
01:06 alors vous êtes aussi un fin connaisseur du dialogue social et de ces sujets,
01:09 parce que vous avez accompagné la ministre du Travail pendant un certain temps.
01:14 D'abord un petit mot Stanislas Godon,
01:16 est-ce que vous faites partie, je dirais comme dans un élan commun,
01:19 est-ce que vous êtes devant debout sur les propos prononcés par Stanislas Guérini,
01:24 puisque c'est dans le cadre d'un pré-projet de loi
01:26 où il évoque l'idée qu'il n'y aurait pas de tabou
01:28 et qu'on pourrait tout à fait licencier les fonctionnaires
01:30 lorsqu'ils ne font pas leur travail,
01:32 parce que le licenciement est possible déjà dans les textes.
01:35 Ça existe déjà ?
01:36 - Exactement.
01:37 Alors effectivement on est devant debout,
01:39 pour ne pas dire très très en colère,
01:41 parce que nous on se préparait à travailler sur un projet de loi fonction publique
01:45 pour améliorer les conditions de vie et de travail,
01:48 rémunération des agents publics,
01:51 et en fait les annonces qui se sont faites dans la presse,
01:53 sans qu'aucune virgule, aucun mot ne soit communiqué aux organisations syndicales,
01:58 c'était la fin du tabou, de l'emploi à vie,
02:02 et de dire que le licenciement pour insuffisance professionnelle
02:06 serait l'alpha et l'oméga de demain.
02:08 Bon, comprenez ça,
02:10 c'est s'inscrire dans la trajectoire des finances publiques
02:14 et faire des économies sur les solutions publiques.
02:15 - Vous dites derrière que c'est les 10 milliards, c'est les économies.
02:18 - C'est juste ça, puisque 10, on vient de nous annoncer 10 de plus,
02:20 et on vient de nous annoncer 20 pour 2025,
02:22 donc ça fait 40 déjà.
02:23 Donc autant vous dire que nous, on ne comprend pas trop ce qui se passe,
02:27 si ce n'est qu'il y a des très mauvais signaux,
02:29 et ce matin j'ai fait une déclaration au Conseil commun de la fonction publique,
02:32 j'ai dit que M. Guérini avait la médaille d'or
02:34 à moins de 100 jours des Jeux olympiques
02:36 sur les mauvais signaux pour les agents publics.
02:38 Parce qu'aujourd'hui, le licenciement pour insuffisance professionnelle
02:41 existe déjà dans le Code général de la fonction publique.
02:43 - On n'a pas de chiffres, pour être honnête, j'ai essayé de regarder.
02:45 - Non mais si, 13.
02:46 - 13 ?
02:47 - Ce qui a été relayé dans les médias, c'est de dire
02:50 "C'est quand même pas normal qu'il n'y en ait que 13."
02:52 Non mais pardon, on fait quoi ?
02:54 On fait la course à l'échalote pour virer les agents publics ?
02:56 C'est quoi l'histoire ?
02:58 On est là pour affaiblir le service public ?
03:00 En plus, je rappelle qu'il n'y a pas que l'insuffisance professionnelle,
03:03 il y a aussi toute la partie disciplinaire.
03:05 Et quand on nous parle de gradation de l'insuffisance professionnelle,
03:08 ça veut dire quoi ?
03:09 On est un peu insuffisant, un moyen insuffisant, très insuffisant ?
03:13 - Débat de l'évaluation.
03:14 - Voilà.
03:15 - J'ai quand même un mot sur ce mot "fonctionnaire",
03:17 parce qu'il est très abrasif,
03:19 mais quand on met "tout", c'est comme le mot "journaliste".
03:21 Il y a autant de types de journalistes qu'il y a de fonctionnaires.
03:23 Fonctionnaires territoriaux, fonctionnaires hospitaliers, fonctionnaires d'État.
03:27 On nous dit d'un côté qu'il faut plus de personnel hospitalier,
03:30 puis en même temps les Français voudraient bien qu'on réduise le mammouth.
03:34 Est-ce qu'il n'y a pas comme ça une sorte de schizophrénie,
03:36 un peu de complexité dans le cerveau des Français ?
03:38 Est-ce qu'on veut plus de service public avec moins de fonctionnaires ?
03:41 Est-ce que je résume bien le sujet ?
03:42 - Oui, en partie, mais après je pense que si,
03:45 c'est parce qu'on ne se donne pas les moyens souvent
03:47 de poser à plat le débat et de parler précisément des choses,
03:50 parce que le nombre de fonctionnaires a augmenté,
03:53 mais c'est vrai, mais, enfin aussi je prends sur longue période,
03:56 c'est-à-dire sur 40 ans, mais ce n'est pas du tout les dépenses de l'État
03:59 et pas du tout les dépenses de personnel qui sont responsables
04:02 de l'augmentation de la dette.
04:04 Ce sont des dépenses sociales qui ont augmenté de 5 points de PIB
04:06 sur cette période-là, donc ça n'a rien à voir avec le traitement des fonctionnaires.
04:09 Donc de toute façon, même si on licenciait beaucoup de fonctionnaires,
04:13 on ne ferait pas d'économie substantielle,
04:15 donc ce n'est pas un sujet d'économie.
04:16 Et puis après, c'est la question du statut de la fonction publique,
04:20 c'est plus celle, et c'est aussi ça quand même que le ministre a évoqué,
04:24 c'est celui de la rigidité de ce statut qui fait que de moins en moins,
04:29 et ça les chiffres le montrent aussi, on arrive à attirer les talents
04:32 et on arrive à gérer les carrières,
04:34 et ça crée de la frustration chez les fonctionnaires,
04:37 parce que, en fait, dans une boîte, les talents, vous pouvez les promouvoir,
04:41 vous pouvez donner du temps aux personnes pour respirer,
04:43 vous pouvez permettre d'aller explorer des nouveaux sujets,
04:46 des nouveaux métiers, vous tromper, revenir.
04:48 C'est beaucoup plus compliqué dans la fonction publique,
04:52 et tout le monde en souffre.
04:53 L'efficacité des services publics, l'épanouissement des agents,
04:56 et me semble-t-il, moi je connais moins bien le sujet que vous,
04:59 mais je pense que c'est vraiment ça le cœur du projet de loi,
05:02 et c'est ça qui va être discuté, et c'est ça qui est le vrai sujet.
05:06 - Saïd Sass-Gaudon, l'augmentation des salaires,
05:09 on va y venir, il y a eu 3,5 et 1,5, vous dites que ce n'est pas suffisant,
05:12 mais sur la question de l'attractivité, 2600 euros en moyenne,
05:16 si j'ai bien lu, ça c'est pour la fonction publique d'État,
05:19 on descend beaucoup plus bas sur la territoriale,
05:22 en catégorie C, 2000 euros,
05:26 le retour du sens de la fonction publique, ça passe par quoi ?
05:31 Par le salaire, par une meilleure gestion des carrières et du RH,
05:34 puisque c'est une émission RH, on nous dit qu'il n'y a pas de RH,
05:37 il n'y a pas de gestion de carrière, vous êtes d'accord ?
05:39 - Bien sûr, et d'ailleurs, on a fait la proposition auprès du ministre,
05:42 on a dit, mettez enfin au point une vraie RH fonction publique,
05:48 avec notamment ce qu'on appelle une GPEC,
05:50 c'est-à-dire un prévisionnel des effectifs et des compétences,
05:52 pour savoir où est-ce que l'on va, les départs à la retraite,
05:55 la démographie, l'âge moyen des agents publics,
05:58 et pour répondre à ce qui a été dit précédemment,
06:00 l'attractivité, mais pardon, mais nous on a été mis au pain sec et à l'eau
06:04 pendant des années, la valeur du point d'indice, juste un comparatif,
06:08 le SMIC il a augmenté de plus de 60% en 20 ans,
06:11 le point d'indice a évolué de 13%,
06:14 donc à chaque fois on fait la course au SMIC seuil minimum de traitement,
06:17 on tasse les grilles, et ce qui fait que même les catégories A aujourd'hui
06:20 se retrouvent parfois en confusion avec les catégories B,
06:23 c'est vous dire si quand même, la partie rémunération,
06:26 qui fait, qui évidemment est un des volets très importants de l'attractivité,
06:30 la rémunération, nous on a subi de plein fouet l'inflation,
06:34 et quand l'inflation était quasiment à 7, on nous a dit 3,5,
06:37 pardon, mais le décalage quoi, là aussi encore mauvais signaux
06:40 vis-à-vis des agents publics.
06:42 - Mais concrètement, cette question du salaire, là vous revendiquez combien
06:46 en augmentation, parce que là il y a un débat quand même de nouveau qui est posé,
06:49 il y a eu une manifestation en mars, revalorisation des salaires,
06:52 est-ce que c'est audible chez les Français ça, quand on voit les fonctionnaires
06:56 redescendre dans la rue et dire, parce que l'enjeu c'était sécurité de l'emploi
06:59 versus salaire plus faible mais sécurité de l'emploi, c'était ça,
07:02 on vendait le package comme ça, aujourd'hui c'est plus compliqué ?
07:05 - Alors, nous on ne s'inscrit pas du tout dans l'histoire de la rémunération au mérite,
07:09 encore un truc qui est sorti du chapeau, qui veut absolument rien dire.
07:12 - Vous ne le croyez pas ?
07:13 - Non, nous on dit, on va prôner l'ascenseur social, c'est l'ADN notamment de la CFECGC,
07:17 si on a des agents méritants, on fait des passerelles de promotion,
07:21 soit de grade, soit de catégorie, on peut aller jusque là,
07:24 et également de la mobilité promotionnelle, c'est-à-dire que vous avez par exemple
07:29 des situations et des secteurs géographiques qui sont en tension,
07:32 et bien là, vous proposez à ces agents, moyennant une bonification indiciaire,
07:36 une évolution de carrière, d'aller dans ces endroits pour apporter leurs compétences.
07:40 Parce qu'il faut arrêter de faire les procès d'intention,
07:42 - Mais il faut les motiver !
07:43 - Mais oui, bien sûr, il faut arrêter de faire les procès d'intention vis-à-vis des agents publics.
07:47 J'apprécie que vous ayez dit qu'on n'est pas responsable quand même des 3200 milliards de dettes,
07:53 et je rappelle aussi que dans le cadre de la réforme de Berthionnet,
07:56 si on avait été augmenté en temps et en heure,
07:59 les cotisations seraient aussi rentrées dans les caisses de l'État.
08:02 - C'est vrai, mais excusez-moi de revenir sur mon sujet,
08:04 puisque le discours très médiatique du ministre, évidemment, a fait mouche,
08:08 parce que ça a créé un débat, une polémique, et on en parle encore sur ce plateau,
08:11 mais est-ce qu'il n'est pas en train de nous dire,
08:13 "Bon, écoutez, essayons d'utiliser ces collaborateurs de la fonction publique
08:17 un peu comme des salariés du privé, c'est-à-dire les motiver,
08:19 et donner le droit, pour ceux qui ne sont pas à leur place, de s'en séparer."
08:23 13 sur la globalité de l'effectif,
08:25 reconnaissons que ça reste quand même très faible si on les compare au départ dans le privé.
08:29 Qu'est-ce que vous en pensez ?
08:30 - Justement, je pense que si on veut faire avancer le statut de la fonction publique,
08:32 et on en a besoin et pour les agents, et pour la France,
08:34 et pour l'efficacité du service public,
08:36 il ne faut pas passer trop de temps sur la polémique.
08:40 Et le sujet, c'est celui que vous avez posé juste avant,
08:45 c'est comment est-ce qu'il y a une aspiration de tous les travailleurs,
08:49 quel que soit leur statut aujourd'hui, à la mobilité, la liberté, le test,
08:54 la possibilité de faire différentes carrières,
08:58 de changer d'endroit de travail, de changer de service, même de métier.
09:04 C'est totalement incompatible avec le statut de la fonction publique, ça.
09:07 Ou en tout cas, le statut est rigidifié.
09:10 - La fonction d'état ne peut pas passer dans l'hospitalier, par exemple.
09:13 - C'est hyper compliqué, mais même si vous voulez passer d'une catégorie à une autre,
09:16 alors que vous êtes totalement méritant,
09:18 et qu'on veut faire jouer l'ascenseur social, et vous avez totalement raison,
09:21 vous ne pouvez pas le faire.
09:22 Et donc là-dessus, il y a un consensus, mais là où il y a sans doute le débat,
09:26 et je pense que c'est vraiment ça le cœur du sujet,
09:28 c'est comment est-ce qu'on donne cette liberté pour rendre le service public plus efficace,
09:32 les agents plus épanouis, et la fonction publique plus attractive,
09:36 en touchant au statut sans avoir le sentiment de précariser.
09:40 Et je pense que c'est ça le cœur du débat, parce que, me semble-t-il,
09:44 mais on aura sans doute ce débat là entre nous,
09:46 à partir du moment où vous donnez de la liberté de changer,
09:50 à partir du moment où vous donnez de la liberté de choix aux agents,
09:53 à partir du moment où vous donnez de la liberté de choix aux managers de choisir leurs agents,
09:57 et tout ça dans une logique de résultat au service des usagers,
10:01 et bien vous réintroduisez forcément ce que vous allez appeler de l'arbitraire,
10:06 ce que le ministre appelle du mérite,
10:09 et me semble-t-il, c'est là qu'il faut discuter sur les réglages à faire.
10:14 - Comme les proviseurs et principaux, qui à une époque, ça avait été évoqué,
10:17 et avaient souhaité pouvoir choisir leur prof pour créer une team,
10:20 une équipe engagée autour d'un patron, comme dans une entreprise,
10:23 ce qui ne se fait pas aujourd'hui.
10:25 - En France, mais ailleurs, l'autonomie des établissements scolaires est beaucoup plus forte,
10:29 et il n'est pas interdit de penser qu'il y a un lien entre le caractère très rigide
10:35 de l'éducation nationale en France et le décrochage sur PISA.
10:39 - Qu'est-ce que vous en pensez ? Parce que, vous savez, on a parlé d'hospitalier,
10:42 on a parlé de la fonction publique en général, puis là on arrive doucement vers les profs.
10:45 Je pense qu'on peut donner des perspectives de carrière en organisant la promotion sociale,
10:49 l'ascenseur social, sans mettre à mal le statut, un statut protecteur.
10:54 Nous, en tout cas, on est vent debout aussi, on est un peu la muraille
10:58 qui va protéger, évidemment, le statut de fonction publique.
11:01 Mais nous ne sommes pas fermés à des évolutions, comme par exemple, ça a été évoqué,
11:05 la NAO, qui aujourd'hui n'existe que dans le secteur privé.
11:08 - La négociation salariale.
11:09 - Eh oui, nous on est favorables à ça, il n'y a pas de soucis.
11:11 - Mais soit de gris à gris avec le DRH...
11:13 - À condition qu'on donne l'enveloppe budgétaire qui va avec.
11:16 Et aujourd'hui, les signaux qui sont donnés par Bercy, croyez-moi, ce n'est pas tout à fait ça.
11:21 C'est-à-dire que quand demain on va arriver et on va dire "bon, l'inflation est à 5",
11:25 ok, on fait comme dans le privé, négociation, on essaye de combler un peu cet impact.
11:29 Oui ? Ou est-ce qu'il y aura l'enveloppe budgétaire ?
11:32 - Mais ça y est, Sasse-Godon, vous vous rappelez de ce ministre de l'Éducation nationale,
11:35 puisqu'on est resté sur les profs qui évoquaient l'idée de dégraisser le mammouth,
11:38 c'était sur l'Éducation nationale.
11:40 Est-ce qu'on a trop de fonctionnaires ? Il y a à peu près 20% de notre population active
11:44 qui est dans la fonction publique, c'est 19,7%.
11:47 On a trop de fonctionnaires ou c'est mal prendre le problème que de le poser comme ça ?
11:52 - Alors le poser par un exercice comptable, c'est méconnaître l'exercice des services publics,
11:59 je dirais les services publics en ordre général.
12:03 Quand on regarde à l'hospitalière, si vous allez dans n'importe quel service,
12:07 bon ben ils vous le disent, on est en tension.
12:10 Aujourd'hui, il y en a qui partent, qui quittent la fonction publique hospitalière,
12:14 pourquoi ? Parce qu'ils sont éreintés.
12:16 - Oui, épuisés, c'est clair.
12:18 - Je vais parler d'autres professions, les enseignants, on me dit "il en faut moins",
12:23 alors pourquoi il en manque 1300 à chaque rentrée scolaire ?
12:26 - Alors ils sont où ces fonctionnaires en trop ?
12:28 Je vous ai vu réagir à ma question parce qu'elle renvoie à plein de sujets, cette question.
12:32 Où est-ce qu'il y a trop de fonctionnaires ?
12:34 - Trop ou pas assez, vous l'avez su, direz-vous-même.
12:37 Ce n'est pas ça la question, parce que c'est trop ou pas assez par rapport à quoi ?
12:41 C'est un moyen, le service public c'est un moyen, ce n'est pas une fin en soi.
12:45 - C'est un véhicule, on est d'accord.
12:47 - Et ce qui fait la différence, ok, il y a un peu plus de fonctionnaires en France qu'ailleurs,
12:52 mais ce n'est pas ça quand on regarde le détail.
12:54 Ce qu'on regarde, c'est que la proportion de fonctionnaires qui ne sont pas vis-à-vis du public,
13:00 qui ne sont pas en front office, comme on dit dans le secteur privé,
13:03 elle est beaucoup plus forte que dans les autres pays.
13:07 - Vous vous rappelez Gérald Darmanin, qui trouvait que les policiers n'étaient pas assez sur le terrain ?
13:11 - Pour 100 fonctionnaires, mais c'est pareil, il y a plus d'administratifs dans les Ducs que de profs,
13:15 proportionnellement qu'en Allemagne, c'est pareil dans l'administration de l'hospitalière.
13:20 Et c'est vrai, me semble-t-il, je pense que le bon débat il est là,
13:24 c'est-à-dire qu'on pourrait, à nombre de fonctionnaires équivalents, améliorer le service public
13:29 en en mettant davantage face au public, à condition de les défendre face aux abus du public, etc.
13:34 Et tout ça c'est aussi des réformes de protection.
13:37 - C'est d'ailleurs pour ça qu'ils ne veulent plus être en public.
13:39 - Nous on porte un gros dossier qu'on a imposé,
13:44 et j'espère que ça c'est ce qui sortira de meilleur dans le projet de loi de fonction publique,
13:49 c'est la protection des agents publics, qui est vraiment un des enjeux majeurs.
13:53 Aujourd'hui quand vous voyez 35 000 agressions physiques et verbales,
13:57 incivilité, je l'ai fait bannir.
13:59 J'ai dit au ministre "vous allez arrêter d'employer ce terme".
14:01 - Bon bah je le retire. - Non, non, non, vous le retirez,
14:03 parce que, en fait, quand on commence à dire "incivilité", vous savez ce que c'est ?
14:06 - Ça minimise. - C'est ne pas tenir la porte à une personne âgée.
14:09 - On est d'accord. - On n'est pas du tout dans le cadre là aujourd'hui.
14:11 - C'est trop d'embauché, la violence physique et la verbale. - C'est très très important.
14:13 Après sur l'histoire de dégraisser, c'est-à-dire en fait faire du remplacement,
14:18 de mettre des administratifs derrière des agents publics.
14:21 Attention, parce qu'il y a aussi une expertise,
14:24 parce que nous on a constaté quand même dans beaucoup de services
14:27 qu'il y a eu une transition qui s'est faite.
14:29 Effectivement, dans la police ça s'est fait,
14:31 il y a des agents qui sont retournés sur le terrain,
14:33 ils ont été remplacés par des administratifs dans les bureaux,
14:35 mais l'expertise notamment de ce qui se fait dans la spécificité du métier,
14:39 il faut aussi qu'elle soit comprise de l'intérieur.
14:42 - Non mais c'est... - Et ça c'est important de ne pas perdre...
14:44 - C'est ça que ça se veut. - Cette partie-là.
14:47 - Moi j'entends de plus en plus de fonctionnaires dévoués et engagés,
14:49 parce qu'il y a beaucoup de gens qui croient en leur travail à l'administration,
14:53 qui se retirent du public et préfèrent aller en back-up
14:56 pour les raisons que vous évoquez, c'est-à-dire qu'ils ne veulent plus être au frontal.
14:59 On voit aujourd'hui des professeurs démissionnaires qui disent
15:01 "je ne veux plus avoir une classe devant moi, je veux être au CDI",
15:04 enfin je veux dire c'est une réalité.
15:05 - Mais c'est là où c'est super dur je trouve, comme réforme très honnêtement,
15:08 parce que, et pour tout le monde, pour le ministre comme pour les organisations syndicales,
15:12 c'est qu'il faut faire deux choses qui pour l'opinion publique peuvent sembler contradictoires.
15:16 C'est-à-dire à la fois réorganiser les services publics pour les usagers,
15:20 c'est les horaires, c'est le service, c'est la réactivité, c'est le droit à l'erreur, etc.
15:27 Et aller encore plus dans ce sens-là pour redonner la noblesse du mot "service",
15:31 le service au public, et en même temps, pardon de le dire comme ça,
15:36 défendre bec et ongle les fonctionnaires contre la petite partie du public qui abuse.
15:42 Et donc donner aussi le sentiment...
15:44 - Faut tenir les deux bouts.
15:45 - Ou qui abuse, c'est-à-dire qui agresse.
15:47 Et pour tenir les deux bouts, je dis ces deux messages qui peuvent apparaître contradictoires,
15:53 parce qu'à la fois, c'est vrai, les fonctionnaires contre les usagers,
15:58 et en même temps, les fonctionnaires pour les usagers.
16:02 Mais il faut tenir les deux bouts.
16:04 - Un mot.
16:05 - Oui, juste un mot.
16:06 Pour avoir un service public qui soit efficient et qui rende...
16:10 - De qualité.
16:11 - Voilà, de qualité, exactement.
16:13 Et bien, il faut aussi faire de l'investissement.
16:16 Sur quoi ? Sur les conditions de travail.
16:18 C'est-à-dire les logiciels, avoir des ordinateurs dignes de ce nom, du réseau internet,
16:23 avoir de la formation continue tout au long de la carrière.
16:26 Parce qu'on parle beaucoup de la formation initiale.
16:28 Mais aujourd'hui, dans beaucoup de services, vous n'avez pas la possibilité de faire de la formation continue.
16:32 Pourquoi ? Parce qu'on vous dit "ah ben non, non, il faut que tu sois au guichet,
16:35 non, non, non, il faut que tu sois sur le voie public, non, non, non, il faut que tu interviennes sur les feux d'incendie".
16:38 Bon, c'est impossible.
16:39 Alors, essayons de calibrer.
16:41 C'est pour ça que quand on dit "moins de fonctionnaires", "moins de fonctionnaires", c'est moins de formation.
16:44 Vous voyez ce que je veux dire ?
16:45 Donc, il faut en mettre plus. Pourquoi ?
16:47 Pour permettre la formation continue.
16:49 - Non, vous n'aurez pas le mot de la fin, Antoine Fouché.
16:51 Je sais que vous le désirez.
16:52 Mais c'est Stanislas Godon qui a clos ce débat, parce que ce débat est passionnant.
16:55 - Je ne voulais pas aller dans le même sens.
16:56 - Et donc, ça tombe bien.
16:57 - Alors, tout va bien.
16:58 - Et alors, tout va bien, il n'y a plus de débat.
16:59 Merci à vous deux.
17:00 Stanislas Godon, président de la Fédération Service Public CFE-CGC,
17:04 vous avez un égo qui est en cours, parce qu'il y a un projet de loi sur la table.
17:07 Donc, vous êtes en première ligne.
17:09 - Là, pour l'instant, c'est un peu compliqué.
17:11 Le dialogue social est un peu rompu.
17:13 - Et merci Antoine Fouché, président de Quintet de Conseil.
17:15 Nous sommes très en retard, on me tire les oreilles tout de suite.
17:17 C'est Fenêtre sur l'emploi et j'accueille mon invité.

Recommandations