Marc Mortureux, directeur général de la Plateforme Automobile, répond aux questions de Christophe Lamarre.
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00:00Europe 1 bonjour, Christophe Lamarre, on bline Roche.
00:03La France et l'Europe veulent accélérer sur la voiture électrique d'ici 2030.
00:06Problème, la Chine menace d'inonder le continent avec des voitures beaucoup moins chères.
00:11Bruxelles pourrait être tentée de les taxer à l'entrée, mais évidemment on va le voir ce n'est pas si simple.
00:15On vous en parle avec votre invité Christophe Lamarre, il s'agit de Marc Mourtureux, directeur général de la plateforme automobile.
00:21Bonjour Marc Mourtureux.
00:23Bonjour.
00:24Alors je rappelle que vous représentez 4000 sites industriels, c'est environ, dites-moi si je me trompe, mais 350 000 emplois.
00:29Si l'on prend en compte bien sûr les constructeurs, les équipementiers et les sous-traitants.
00:34Question simple pour commencer, est-ce que notre industrie automobile est en danger aujourd'hui ?
00:41Alors elle est confrontée à une transformation absolument sans précédent du véhicule thermique vers le véhicule électrique.
00:50Il faut savoir qu'en 5 ans, la part de marché des véhicules électriques a été multipliée par 10.
00:56Aujourd'hui, un véhicule sur 4 qui est vendu en France est soit 100% électrique, soit hybride rechargeable.
01:05Et ça c'est une transformation extrêmement importante.
01:08Et c'est vrai que l'Europe a fait le choix d'aller vers le tout électrique.
01:11C'est clair que ça a du sens pour le climat.
01:14C'est un choix qui est pertinent pour baisser les émissions de CO2 dans une approche globale d'analyse de cycle de vie,
01:20c'est-à-dire où on tient compte à la fois de la fabrication du véhicule et de son usage jusqu'à la fin de vie.
01:26Et pour ça, la filière automobile aujourd'hui est vraiment à l'avant-garde du combat climatique.
01:32Elle investit résolument dans ce cadre-là.
01:35Mais évidemment, la conséquence quand même, c'est que c'est un choix qui condamne une technologie dont on avait la maîtrise,
01:41le véhicule thermique, pour une technologie dans laquelle les Chinois ont investi depuis plus de 25 ans.
01:47Et un chiffre qui est assez marquant, l'année dernière, 22% des véhicules électriques vendus en France étaient importés de Chine.
01:55Donc c'est vrai qu'on est face à une nouvelle concurrence qui est extrêmement forte.
01:59Et c'est la raison pour laquelle la filière automobile dans son ensemble se mobilise,
02:03dans le cadre notamment d'un contrat de filière que nous avons signé avec l'État, avec les régions,
02:09pour se donner les moyens de faire face à cette concurrence et effectivement créer les différents maillons nécessaires en France et en Europe
02:19pour gagner en souveraineté dans cette nouvelle étape finalement de l'industrie automobile.
02:24Le ministre de l'économie Bruno Le Maire a signé avec la filière automobile un contrat d'engagement jusqu'en 2027.
02:31Le but c'est bien sûr, vous l'avez esquissé, d'accélérer le développement de la voiture électrique.
02:35Est-ce que cet accord est un bon accord tout simplement ?
02:38Alors on est dans un contexte où depuis cinq ans on s'est résolument engagé tous les acteurs, les grandes entreprises, les petites entreprises,
02:46l'industrie mais également les services puisque quand on bascule vers le véhicule électrique,
02:51la question de la maintenance des véhicules, leur réparation, ça demande beaucoup d'adaptation, d'évolution.
02:57C'est à la fois les outils industriels et c'est à la fois les emplois et ce contrat de filière définit toute une série d'actions
03:03pour réussir ensemble, fixer des engagements les uns avec les autres et globalement le grand défi qu'on a aujourd'hui
03:11ce n'est pas tant de fabriquer les véhicules électriques, on s'est d'ores et déjà adapté, on a créé des nouvelles plateformes,
03:16on a des usines en France qui fabriquent des véhicules électriques,
03:20on va avoir en 2024-2025 de très nombreux nouveaux véhicules fabriqués en France comme la R5 électrique, la R4 électrique,
03:29après la Scénic et la Mégane électrique et puis côté Stellantis, c'est-à-dire Peugeot, on va avoir la 3008 électrique, la 5008 électrique, la 308 électrique.
03:38Donc l'enjeu n'est pas tant de les fabriquer mais de les vendre et le gros sujet aujourd'hui c'est le prix.
03:43Alors pour ça on a trois exigences vis-à-vis des pouvoirs publics en particulier.
03:47D'une part c'est réussir à baisser le coût de fabrication des véhicules, c'est évidemment du ressort de l'industrie.
03:55Marc Mortureux, comment vous vous y prenez pour baisser le coût de fabrication d'une voiture
03:58parce que vous savez bien que c'est sur ce point-là précis que vous pouvez jouer le plus facilement en dehors des aides de l'État ?
04:06C'est évidemment l'optimisation des process industriels,
04:10donc il y a aujourd'hui un travail collectif fait sur l'ensemble de la chaîne, c'est-à-dire à la fois les constructeurs mais également les fournisseurs
04:17pour gagner en compétitivité mais on demande à l'État de nous aider aussi par un environnement suffisamment compétitif.
04:23On a encore trop d'impôts de production qui pèsent sur la production des véhicules.
04:29C'est aussi le soutien à l'achat, c'est-à-dire que les consommateurs on continue à les accompagner,
04:36à les aider pour basculer vers le véhicule électrique parce que le grand enjeu dans l'industrie automobile c'est de vendre en grand volume.
04:43C'est la massification de la production qui permet de réduire les coûts et donc pour cela comme aujourd'hui un véhicule électrique c'est encore 40% plus cher que son équivalent thermique,
04:54on a besoin de bonus pour pouvoir accompagner cette montée en puissance du véhicule électrique.
04:59On a vu en Allemagne que quand on enlève les bonus il y a une chute très forte des ventes de véhicules électriques.
05:04Et puis le troisième élément ce sont les infrastructures de recharge.
05:08On a absolument besoin de développer encore la possibilité de se recharger, c'est une des conditions pour que le consommateur bascule vers l'électrique.
05:17On était à 100 000 points de recharge fin 2022, début 2023, l'objectif est d'atteindre 400 000 en 2030.
05:25Marc Mortureux rapidement, dernière question, qu'en est-il de la concurrence des véhicules chinois ?
05:30Parce que eux produisent beaucoup et pas cher et à l'arrivée sur le marché quand vous l'achetez évidemment ça revient moins cher dans le porte-monnaie.
05:38Ils ont été énormément aidés et ils sont énormément investis au cours de ces 20 dernières années et vous avez raison,
05:44il y a aujourd'hui énormément de marques chinoises qui font des véhicules de qualité et qui sont moins chers,
05:51on les voit arriver progressivement sur l'Europe.
05:53Nous ce qu'on dit c'est qu'on n'a pas peur de la concurrence mais il faut qu'elle soit équitable, qu'elle soit réciproque.
05:59On a aidé il y a 20 ans l'industrie chinoise au travers notamment de JV, de Joint Venture,
06:04on est tout à fait ouvert à cette compétition mais aussi à des partenariats pour pouvoir effectivement bénéficier aussi des avancées qu'ils ont pu faire
06:13mais cela doit se faire dans des conditions équitables et puis on a quand même un atout en France, pour fabriquer en France,
06:19c'est qu'on a de l'électricité décarbonée et comme la fabrication d'un véhicule électrique c'est assez émetteur de CO2,
06:25le fait de fabriquer en France a vraiment du sens puisque ça permet de réduire les émissions de CO2 globales de l'industrie automobile.
06:32Merci Marc Mortureux, la concurrence n'a même pas peur mais à condition qu'elle soit équitable avec les voitures d'origine chinoise,
06:40je rappelle que vous êtes le directeur général de la plateforme automobile, merci.