François Hommeril, président confédéral de la CFE-CGC, répond aux questions de Lionel Gougelot. Ensemble, ils réagissent à la réforme de l'indemnisation de l'assurance chômage annoncée par Gabriel Attal.
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00:00 - Europe 1, il est 6h40. - Le gouvernement va donc à nouveau réformer le système de l'assurance chômage pour viser le retour au plein emploi.
00:07 Gabriel Attal envisage une réduction de la durée d'indemnisation à 15 mois ainsi que des conditions plus restrictives pour avoir accès à cette indemnisation.
00:15 Le patronat applaudit mais les organisations syndicales sont au vent debout.
00:19 - Et vous en parlez avec votre invité Lionel ce matin sur Europe 1, il s'agit de François Ombril, président confédéral de la CFE CEC.
00:27 - Bonjour François Ombril. - Bonjour. - Merci d'être en ligne pour les auditeurs d'Europe 1 ce matin.
00:32 Alors je le disais, le gouvernement prévoit donc de durcir les conditions d'indemnisation du chômage à partir de l'automne prochain.
00:38 Il faudra désormais avoir travaillé 8 mois sur les 20 derniers mois pour bénéficier d'une indemnisation.
00:45 Indemnisation dont la durée va être réduite à 15 mois.
00:49 Tout simplement, François Ombril, comment vous réagissez à cette annonce faite hier par Gabriel Attal ?
00:54 - Moi je suis révolté, je trouve ça particulièrement scandaleux.
00:57 Cette réforme part du principe que les chômeurs indemnisés sont des personnages indolents qui se contentent de leur situation et ne recherchent pas activement du travail.
01:08 Et que quand on les juge avec plus de sévérité, et bien finalement ils vont être plus aptes à reprendre du travail.
01:14 Tout ça est faux, il est démontré que c'est faux.
01:16 Il y a des études depuis très longtemps, l'aide à reste, le ministère du travail, il y a aussi l'OFCE.
01:22 Tout ce concorde à dire que plus de 90% des chômeurs indemnisés sont en recherche active d'emploi.
01:30 Donc durcir les conditions d'indemnisation, ce n'est rien d'autre que de voler de l'argent aux salariés.
01:34 - Vous ne pensez pas donc, comme le Premier ministre le dit, que cette réforme c'est le carburant pour créer plus d'emplois dans le pays ?
01:40 - Ah bah non, mais moi je ne pense absolument pas comme Gabriel Attal qui pense de travers.
01:44 Moi je pense comme la communauté scientifique, comme tous les gens qui connaissent le sujet.
01:48 Gabriel Attal est un populiste qui désigne le chômeur comme un bouc émissaire des mauvais résultats de sa mauvaise politique.
01:56 Tout ça est absolument scandaleux.
01:58 L'UNEDIC est déjà en excédent, l'État a déjà prévu de prélever en trois ans 12 milliards d'euros.
02:04 12 milliards d'euros c'est l'argent des salariés, c'est l'argent qu'ils épargnent, qu'ils cotisent pour pouvoir s'assurer devant cet accident de la vie qu'est le chômage.
02:12 Il prévoit de leur en voler encore plus. Gabriel Attal invente des concepts, nie la réalité, il stigmatise une population.
02:21 Et moi je trouve que c'est très très grave, au-delà de ce qu'il a prévu de faire avec violence vis-à-vis des chômeurs et le fait qu'une fois de plus on vole de l'argent aux salariés.
02:30 - Le Premier ministre dit pourtant que les précédentes réformes visant également à réduire les durées d'indemnisation ont créé justement des emplois.
02:37 Il parle d'environ 90 000 emplois.
02:39 - Non mais tout ça est totalement bidon. Le Premier ministre dit bien ce qu'il veut.
02:42 C'est la campagne de com' autour de sa réforme qui n'est rien d'autre qu'une spoliation des salariés.
02:48 Ce qui est important, ce qu'il faut écouter, c'est ce que disent les gens qui s'y connaissent, les gens qui travaillent sur le sujet.
02:54 Les scientifiques, les sociologues, ceux qui travaillent sur les statistiques, qu'ils soient à l'ABS, je l'ai déjà dit, à Pôle Emploi, aujourd'hui France Travail, qu'ils soient à l'OFCE.
03:04 Et il y en a d'autres, des laboratoires, des universités, des spécialistes, des enseignants dont c'est le métier et qui viennent nous dire que les conditions d'indemnisation sont sans influence sur la reprise d'emploi.
03:15 Sauf à dire que, et ça c'est vrai, que quand quelqu'un est menacé par le RSA, parce qu'il s'agit bien de ça, quand il n'a plus d'indemnisation disponible, finalement il est prêt à reprendre n'importe quel emploi.
03:26 Et ça, là encore, les mêmes experts, les mêmes spécialistes nous expliquent que c'est très mauvais.
03:30 Parce que quand on a une certaine qualification et que tout d'un coup, parce qu'on est acculé à le faire, on prend n'importe quel emploi, et bien on le prend à quelqu'un qui est moins qualifié que soi.
03:40 Et donc, en fait, on renvoie encore plus vers la précarité les gens qui sont peu qualifiés.
03:45 Selon les estimations qui sont faites, cette réforme permettrait à l'État de faire 3,6 milliards d'euros d'économie.
03:53 La réforme précédente de 2023 aurait permis à elle de réaliser plus de 5 milliards d'euros.
03:58 Ça, c'est plutôt bon pour les finances publiques.
04:01 Mais les cotisations des salariés vers l'assurance chômage, ça n'est pas des finances publiques.
04:06 L'État, il dépense bien l'argent qu'il veut, il le jette par les fenêtres.
04:09 Plus de 200 milliards d'euros de subventions de toute nature aux entreprises qui finissent pour la moitié en dividendes et en rachats d'actions, de l'argent gaspillé, brûlé.
04:18 Ça, effectivement, c'est l'usage dispendieux que l'État fait de son argent collecté des impôts de la TVA et de la CSG.
04:25 Là, il s'agit de cotisations et de contributions sur les salaires.
04:29 L'État n'est absolument pas à venir nous les prendre pour pouvoir en faire un autre usage.
04:34 Franchement, c'est culotté.
04:36 Les chômeurs de plus de 57 ans, les seniors, sont épargnés par cette réforme, pour dire les choses plus simplement.
04:42 La nouveauté également annoncée par Gabriel Attal, c'est ce bonus emploi senior.
04:46 Ça veut dire que les seniors au chômage pourront toucher une indemnisation complémentaire de l'assurance chômage,
04:51 quand ils retrouveront un emploi au salaire moins élevé que celui qu'ils percevaient auparavant.
04:56 Ça, c'est plutôt intéressant, non, François Umbril ?
04:58 Mais non, c'est le pire, en fait. C'est le senior discount.
05:01 Deux choses. D'abord, on décale la barne d'âge de 53 à 57 ans.
05:05 Les ministres nous disent que c'est pour tenir compte du décalage de deux ans de l'âge de retraite.
05:10 Comptez avec moi, on passe de 53 à 57 ans.
05:13 Ça fait quatre ans. Et deuxièmement, ils décalent tout de suite les bornes d'âge,
05:17 alors même qu'on n'a observé aucune différence s'agissant du taux d'emploi en conséquence de la réforme des retraites,
05:24 puisque le patronat s'était engagé à maintenir dans l'emploi les gens,
05:27 et visiblement, il ne tient pas ses promesses.
05:29 Les plans sociaux continuent. Il est fort probable, d'ailleurs, que dans les mois et dans les années qui viennent,
05:33 ça va continuer, parce que nous, on a l'habitude, avec un patronat qui prend l'argent et qui ne tient pas ses promesses.
05:38 Donc on en est là aujourd'hui. Vous êtes ingénieur informatique au chômage à 57 ans.
05:44 Eh bien, on va vous inviter à venir prendre un emploi de gardien de parking ou de plongeur dans un restaurant.
05:51 J'ai rien contre ce genre d'emploi.
05:52 C'est un peu la caricature, François-Homer Hildenhoff.
05:53 C'est particulièrement noble, mais simplement, il faut normalement, dans un pays bien organisé,
05:59 dans lequel on recherche à avoir si possible une forme de compétitivité économique,
06:03 il faut que les gens occupent des emplois qui sont conformes à leurs compétences et à leurs expériences.
06:07 Voilà où on en est aujourd'hui d'un pays qui va à volo et qui est en pleine dérive
06:10 et qui avance petit à petit sur la voie du sous-développement.
06:14 Merci François Ombril, président confédéral de la CFE CGC, d'avoir été en ligne ce matin sur Europe 1.
06:19 Merci, bonne journée.