Le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti a déclaré avoir "ordonné une enquête confiée à l'Inspection générale de la justice" sur la dangerosité de Mohamed Amra, qui avait été sous-estimée avant son évasion.
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00:04 On en parle avec Sébastien Nicolas, secrétaire général FO Direction, c'est le syndicat majoritaire chez les directeurs de prison.
00:10 Merci d'être en direct avec nous, Monsieur Nicolas, ce matin.
00:13 Vincent Vantighem du service Police Justice de BFMTV nous accompagne également.
00:17 Alors que cela fait 16 jours et 16 nuits que Mohamed Amra est donc en cavale avec ses complices
00:23 qui lui ont permis de s'évader à ce péage dans l'heure le 14 mai dernier.
00:28 Il y a une autre enquête qui est en cours, qui a été confiée à l'inspection générale de la justice.
00:33 La question porte sur les erreurs, l'absence de communication
00:37 qui ont sans doute entraîné la sous-évaluation de la dangerosité du détenu Mohamed Amra.
00:42 Écoutez ce qu'en disait hier au Sénat le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti.
00:46 J'ai la ferme intention de faire toute la lumière sur la prise en charge du détenu Amra
00:53 et notamment en ce qui concerne le partage d'informations.
00:56 C'est pourquoi j'ai ordonné une inspection confiée à l'inspection générale de la justice.
01:02 Mais de manière plus générale et bien sûr je partage votre interrogation sur l'adaptation
01:08 de notre modèle carcéral à ces détenus particulièrement violents et sans aucune limite.
01:14 Il faut savoir ce qu'il s'est passé le ministre de la Justice en termes de partage d'informations.
01:18 Qu'est-ce que ça veut dire Vincent Vantighem ? Il fait allusion à quoi Éric Dupond-Moretti ?
01:21 Il faut imaginer la maison justice avec différentes pièces
01:24 qui ont parfois du mal à communiquer entre elles.
01:26 En l'espèce la cellule de Mohamed Amra, on le sait, elle a été mise sur écoute
01:30 par un juge d'instruction marseillais.
01:32 Il y a des informations qui sont remontées.
01:33 Le ministre veut savoir pourquoi ces informations n'ont pas été transmises
01:36 à l'administration pénitentiaire qui aurait pu évaluer, surévaluer la dangerosité de Mohamed Amra.
01:42 Alors je vous arrête une seconde parce que ça c'est une notion très importante
01:44 et je vais me tourner vers Sébastien Nicolas.
01:46 Est-ce que d'ordinaire vous devez l'être, vous les patrons de l'établissement pénitentiaire,
01:51 vous devez être informé, un, qu'il y a des écoutes
01:55 et deux, est-ce que vous devez être informé des résultats de ces écoutes ?
02:01 Alors, chez nous, l'information qui nous permet d'assurer un profilage efficace
02:07 de la personne détenue est fondamentale.
02:10 Après cette information, elle se heurte très concrètement à différents obstacles,
02:16 le secret de l'instruction, le secret médical,
02:19 le secret de la défense pour les activités de renseignement.
02:23 Et effectivement, nous n'avons pas besoin de connaître les détails d'une enquête,
02:27 d'une pathologie ou de pratiques de renseignement qui sont mises en place,
02:32 mais nous avons besoin, sur le principe du besoin d'en connaître,
02:37 la nécessité de disposer d'informations qui nous permettent d'appréhender un risque
02:43 et de mieux gérer la personne détenue.
02:45 Donc, M. Nicolas, la justice, pour être très clair,
02:48 n'a pas l'obligation de vous transmettre ces informations,
02:52 mais vous, vous aimeriez bien les avoir ?
02:55 Nous, ces informations, elles nous permettent de protéger les personnes détenues,
03:00 de protéger les personnels qui gèrent les personnes détenues,
03:04 de protéger la société, l'ordre public,
03:07 quand ces personnes détenues sont extraites pour aller à l'hôpital
03:11 ou pour aller devant un tribunal.
03:12 Donc, effectivement, nous n'avons pas besoin du détail,
03:16 d'une instruction, d'une enquête, ça ne nous regarde pas.
03:18 Mais dès lors que des éléments nous permettent d'appréhender un risque majeur
03:25 et qu'il est connu d'un magistrat ou d'un service de renseignement,
03:30 nous devons avoir communication.
03:32 Mais là, pour le cas en question, pour le cas AMRA,
03:34 ces infos, vous ne les avez pas eues, on ne vous a rien dit, on est d'accord.
03:38 Alors, ce sera à l'enquête, effectivement,
03:40 confiée à l'inspection générale de la justice de le déterminer.
03:44 Très clairement, il y a deux options.
03:45 Soit nous avions ces informations à disposition
03:49 et là, donc, il faut interroger les mesures qui ont été mises en place
03:54 pour assurer la gestion de Mohamed Amra,
03:57 peut-être se poser la question aussi de savoir si une prête main-forte,
04:02 par exemple, a pu être demandée à la police ou à la gendarmerie
04:05 dans le cas de cette extraction.
04:07 Ça, c'est la première option.
04:08 La deuxième option, si on ne savait pas,
04:11 si ces informations ne nous ont pas été communiquées
04:13 concernant le profit de Mohamed Amra,
04:15 il faudra que les personnes qui disposaient de ces informations
04:18 expliquent pourquoi elles n'ont pas communiqué ces éléments.
04:21 Parce qu'en fait, Vincent Vantinghem, le garde des Sceaux,
04:25 sans doute comme le directeur de la prison de Mohamed Amra
04:27 et ses gardiens, ont découvert dans la presse la semaine dernière
04:31 le résultat de ces écoutes téléphoniques.
04:33 Grâce à BFM TV.
04:34 La semaine dernière, jusqu'à ces écoutes,
04:36 on pensait, et on le disait, que Mohamed Amra, c'est un petit caïd.
04:40 On disait, ce n'est pas un gros bonnet.
04:41 On se demande bien pourquoi ils sont allés le chercher
04:43 comme ça à une barrière de péage.
04:44 C'est à ça que fait l'allusion Eric Dupond-Moretti
04:48 quand il dit qu'il faut du partage d'infos
04:50 et quand M. Nicolas parle du besoin d'en connaître ?
04:53 Oui, c'est exactement ça.
04:54 Parce que vous l'avez dit, depuis le départ,
04:55 on disait que Mohamed Amra, c'est une petite frappe
04:58 pour reprendre les termes de plusieurs enquêteurs.
05:00 Et c'est vrai qu'avec les révélations de BFM la semaine dernière
05:03 et aussi de nos confrères du Parisien,
05:04 on a découvert que Mohamed Amra, c'était quelqu'un
05:07 qui comptait dans la hiérarchie criminelle
05:09 à tel point qu'il bénéficiait de facilités en cellule.
05:12 Qu'est-ce qu'on appelle facilité ?
05:13 De la drogue qui lui était livrée,
05:14 balancée par les murs d'enceinte de la prison de la santé,
05:17 des téléphones portables grâce auxquels il continuait
05:19 à gérer ses affaires, trafic de drogue, point de deal,
05:22 tentative d'acheter des fusils d'assaut depuis sa cellule
05:26 et même participait à un enlèvement,
05:28 à une séquestration au téléphone depuis sa cellule.
05:30 C'est ça le profil de cet homme qui s'est dessiné avec ces écoutes.
05:33 Mais alors, dans ces conditions,
05:34 Eric Dupond-Moretti a rencontré hier
05:36 le directeur inter-régional des services pénitentiaires
05:38 pour essayer de savoir ce qu'il faudrait faire,
05:39 M. Nicolas, pour les détenus les plus dangereux.
05:42 Vous, à l'épreuve tous les jours face à ces détenus,
05:46 vous dites qu'il faudrait faire quoi ?
05:49 Concrètement, un des sujets que l'on aborde souvent
05:54 et qui est pratiqué au quotidien,
05:56 qui est un besoin quotidien pour nous,
05:58 c'est le partage d'informations.
06:01 Encore une fois, j'insiste là-dessus,
06:03 la première protection de l'administration pénitentiaire,
06:07 c'est la connaissance du profit d'une personne détenue.
06:10 Et donc, il faut que le partage d'informations
06:14 dans un cadre du secret partagé
06:16 puisse être le plus complet possible
06:18 pour nous permettre d'anticiper justement ces risques-là.
06:21 Le premier travail, c'est celui-là.
06:23 Mais parce que ça veut dire que des Mohamed Amra,
06:26 enfin du profil de Mohamed Amra,
06:27 il y en a plein dans vos établissements pénitentiaires,
06:29 mais peut-être que vous ne le mesurez pas.
06:32 Si on ne le mesure pas, c'est que peut-être
06:35 qu'on n'a pas tous les éléments d'information
06:36 qui nous permettent de le mesurer.
06:38 Bien sûr, bien sûr.
06:39 Et c'est évidemment une difficulté pour vous.
06:41 Juste un mot quand même avec vous sur l'enquête policière,
06:44 déjà policière, des gendarmes, d'ailleurs,
06:46 tous les services de police ou de force de l'ordre
06:48 sont sur le kivi.
06:50 Alors, on est où cette enquête ?
06:50 Parce qu'il y a beaucoup de gens qui se disent,
06:52 enfin, ça fait 15 jours que Kamra et ses complices sont en fuite,
06:56 qu'il y avait des caméras,
06:57 il y a sans doute eu pas mal d'ADN
06:58 qui a été prélevé sur la scène de crime.
07:00 Alors ?
07:01 Alors, le dernier point qu'on a,
07:02 c'est celui qui a été fait par l'Orbécu,
07:04 la procureure de la République de Paris,
07:05 qui était invitée sur BFM la semaine dernière,
07:07 qui a évoqué des pistes sérieuses,
07:09 sans en dire davantage pour ne pas perturber l'enquête.
07:11 Et c'est vrai que, vous l'avez dit,
07:12 ça fait 16 jours, un peu plus de 15 jours.
07:14 Il faut juste se rappeler, Edouard Nfail,
07:16 vous vous souvenez, en 2018,
07:17 95 jours avant qu'il ne soit interpellé,
07:19 plus de trois mois.
07:20 Donc, ça risque de prendre du temps
07:21 parce que c'est une enquête qui est complexe.
07:23 Il y a les complices qu'on voit
07:24 sur les images de vidéos surveillance.
07:25 Il y a aussi, sans doute, ceux qu'on ne voit pas.
07:27 Autant de profils sur lesquels les enquêteurs travaillent.
07:29 Il sont 350 à travailler là-dessus
07:31 pour tenter de savoir où ils se cachent,
07:33 en France, à l'étranger,
07:34 et de voir si on va réussir à les interpeller.