La face cachée du marché du bio - Documentaire complet - AMP

  • il y a 3 mois
Le marché du bio est en pleine expansion. Depuis 1999, il affiche une croissance d'environ 10% par an et doit répondre à une demande de plus en plus forte. Du coup, certains producteurs cupides n'hésitent pas à mentir sur la provenance et la qualité de leurs produits. Fausses étiquettes, importations douteuses.... les escroqueries sont légion.
Transcript
00:00C'est le nouveau royaume du bio, un rayon immense où l'on trouve de tout, des saucisses,
00:08de la bière, du chocolat et même des frites surgelées, tout est bio.
00:12C'est énorme et là on a l'avantage d'avoir un regroupement total.
00:18Regardez là, vous avez du vin, vous avez de la limonade, vous avez des jus de fruits.
00:24Pour la responsable des marques, c'est l'heure du bio business.
00:28On est dans une véritable tendance de fonds, on n'est pas du tout dans un produit mode.
00:32On est dans une véritable tendance de fonds et le marché est un marché qui évolue de 10%
00:38à peu près depuis 1999, donc c'est énorme.
00:41Entre 99 et 2008, plus 10% tous les ans.
00:44Au fait, comment sait-on qu'un produit est bio ?
00:47C'est le logo certificateur qui nous assure que ce produit est véritablement bio.
00:53Evidemment, un cahier des charges et tout un système de traçabilité, de fabrication
00:58qui est certifié par ce logo, agriculture biologique.
01:03A B, on trouve le petit label vert sur tous les produits bio.
01:07Impossible de se tromper.
01:11Pas si simple.
01:12Le bio est une bonne affaire, c'est donc tentant d'en profiter.
01:15Oréon Bébé, par exemple.
01:18Donc là, on a des petits pots carottes, saumon.
01:22Alors, qu'est-ce qui est bio là-dedans, pareil ?
01:25Là, on n'est pas dans le bio, excusez-moi, je me suis trompée.
01:28Bio et non bio se ressemblent tellement que la responsable des marques elle-même s'en mêle les petits pots.
01:33Alors, vous avez le logo qui fait la différence.
01:36Là, ça se voit pas beaucoup, quand même.
01:38Effectivement, là, c'était un peu réduit.
01:42Même rayon, même marque, il y a de quoi les confondre.
01:45Et surtout, le distributeur a mis le petit pot pas bio dans un présentoir avec le label.
01:51C'est pas très réglo.
01:53C'est l'une des petites tricheries ordinaires sur un marché en pleine explosion.
01:574 Français sur 10 consomment bio régulièrement.
02:00Alors, des petits malins ont flairé le filon et tentent de vendre en bio des produits qui ne le sont pas.
02:05Comment être sûr de ce que nous achetons ?
02:08Qui contrôle ?
02:09Nous avons exploré les dessous du bio pour savoir si cette filière est bien digne de notre confiance.
02:22VOCAL Right Select right now
02:41Qu'est-ce qu'un agriculteur bio?
02:44C'est un agriculteur qui a des convictions.
02:46Ça fait presque 15 ans que je suis installé en bio.
02:53C'est la troisième année que je fais des poireaux
02:56et sans produit de traitement d'origine chimique.
02:59J'ai jamais compris ce qu'il y avait d'écrit sur une étiquette
03:02et rien que ça, déjà, ça ne me plaisait pas.
03:05C'est le bio qui m'a paru le plus évident.
03:08Le tout en plus, avec tout ce qui était lié à l'environnement.
03:17Dominique a 36 ans.
03:20Il gère une ferme de 75 hectares et emploie plusieurs salariés.
03:25Il produit des céréales et des légumes.
03:29Cultiver bio, c'est comme jouer une partie des chèques avec la nature.
03:33Sans engrais, sans désherbants ni insecticides.
03:37Un jeu où il faut toujours avoir un coup d'avance
03:40et l'œil rivé au sol.
03:44Un des gros postes, en fait, c'est l'observation.
03:49Parce que les moyennes interventions étant relativement faibles,
03:54souvent, ça demande d'être hyper réactif.
03:59À ce jeu-là, il n'y a pas de joker.
04:02Quand on perd, on perd tout.
04:05Vous n'êtes pas tenté à un moment de vous dire
04:08je vais utiliser un produit qui n'est pas autorisé en bio
04:11juste parce que j'ai envie de sauver ma récolte ?
04:14Non, ça ne m'est encore jamais arrivé.
04:18Je sais que peut-être une fois sur dix, je vais perdre la récolte, c'est possible.
04:22En bio, on sait que c'est plus facile de perdre sa récolte
04:25parce qu'effectivement, il n'y a pas de moyens de rattrapage.
04:28Un des gros avantages de la chimie, c'est qu'en gros,
04:30on peut faire à peu près n'importe quoi.
04:32On est toujours sûr de trouver un moyen pour rattraper.
04:34Après, c'est une question de compétence.
04:36Ça veut dire qu'il faut être meilleur en bio ?
04:39Dominique peut quand même utiliser certains produits.
04:42Des engrais sont autorisés en bio à condition d'être d'origine naturelle.
04:47Là, il est un peu vieux, il commence à être un peu dur.
04:51Voilà, il commence à se présenter, à défendre des petits bouchons.
04:58Alors ça, ça doit être une vinasse de betterave
05:04et ça doit être de la fiante de poux, de la plume.
05:09La plume est pas mal utilisée pour faire les engrais parce que c'est l'azote.
05:15Ça doit bien avoir au moins trois ans de stock.
05:19Tu ne l'utilisais pas en fait ?
05:22Pour l'instant, je n'en ai pas eu besoin.
05:24C'est un peu mon stock sécurité au cas où il y a de gros problèmes sur les légumes,
05:29à me dire une grosse carence en azote ou autre.
05:33L'agriculture bio est plus difficile que l'agriculture dite conventionnelle.
05:38Elle demande plus de temps, plus de main-d'oeuvre et donc elle coûte plus cher.
05:43On va être vite pour faire la commande de demain.
05:46Principal argument de vente, le label AB.
05:49C'est la garantie que les poireaux sont bio.
05:52Mais pour l'avoir, il faut se soumettre à un contrôle draconien.
06:03Un matin de février, dans le marais Poitvin.
06:07Les contrôles, c'est le boulot d'Audrey.
06:10C'est une sorte de gendarme du bio.
06:12Elle traque les fraudes et vérifie que les producteurs respectent bien les règles du jeu.
06:21L'accueil est cordial. Je ne rencontre pas de grosses difficultés avec les producteurs lors de contrôle.
06:30Ils ne m'attendent pas avec le fusil. Ils payent pour être contrôlés.
06:34C'est eux qui s'engagent. On ne les oblige pas.
06:37C'est eux qui viennent vers nous.
06:39Après, ils connaissent les règles du jeu. Ils s'informent avant de se lancer.
06:45En France, 6 entreprises privées sont chargées par l'État de certifier les agriculteurs biologiques.
06:5130 000 contrôles ont lieu chaque année.
06:54Audrey travaille pour l'une de ces sociétés.
06:58Bonjour. Audrey Picoulet, Ecocert.
07:04Je viens faire le contrôle annuel.
07:06Ce jour-là, Audrey doit passer une grosse exploitation à la loupe.
07:11Elle est fille d'agriculteur. Elle a un BTS de gestion agricole.
07:16C'est quoi, ça ? C'est de la bourrache ?
07:19Alors, on ne la lui fait pas.
07:21Si on regarde les feuilles, on voit qu'elles sont un petit peu mangées,
07:26qu'elles sont un petit peu jaunies.
07:28Donc, en fait, la plante n'est pas nickel.
07:34Et ça, c'est bon signe pour vous ?
07:36Disons qu'une maladie trop prononcée serait un risque que le producteur traite.
07:42Donc, il faut se méfier.
07:44Si elle était trop luxuriante, ça vous mettrait la puce à l'oreille ?
07:47Oui, tout à fait.
07:48Mais là, elle n'est pas… Elle est normale, quoi.
07:54Oui, il y a des choses.
07:56Là, je vais aller vérifier si le terreau qui a sa vie est bien bio.
08:01Donc, apparemment, je devrais trouver les garanties sur le sac.
08:05Voilà. Donc, c'est marqué bio.
08:08Vous regardez souvent les sacs vides, comme ça ?
08:11Tous. Il faut absolument avoir les garanties sur tout ce qu'on achète.
08:15La réglementation bio est très rigoureuse sur ces points-là.
08:19Donc, voilà. C'est ce qu'on contrôle.
08:21Et s'il y a une non-conformité, qu'est-ce que vous faites, alors ?
08:24Si le terreau n'est pas bio, les plantes sont déclassées.
08:26Donc, la production n'est pas certifiée.
08:30Je vois un autre sac, là-bas.
08:32C'est plus fort qu'elle. Audrey fouille dans tous les coins.
08:35En plus du contrôle annuel, elle fait aussi des visites surprises.
08:38De quoi se sentir fliquée.
08:40Est-ce que ce n'est pas un peu stressant, la visite de l'auditeur d'éco-certes ?
08:45Non, non.
08:47Ça fait partie, on va dire, des règles du jeu.
08:52Nous, on sait qu'on s'est engagé dans une démarche de qualité au niveau de la production.
08:57Donc, le contrôle fait partie de cette démarche.
09:03En élevage, les règles sont strictes.
09:06Pour être labellisés bio, les animaux doivent manger bio.
09:13Et là, au niveau complémentation, vous apportez quoi ?
09:16Je vois des petites bacilles.
09:18De l'orge et de la févrole.
09:20À hauteur de 500 grammes par bromie.
09:22Et de l'origine ?
09:24Tout ce qui est produit maison.
09:26L'orge et la févrole sont produits de sulcite.
09:28Et au niveau stock de céréales, vous allez pouvoir boucler pour alimenter vos bromies ?
09:34À peine.
09:36Donc là, on travaille avec les producteurs locaux qui sont bio.
09:39Et qui nous complètent ce qui nous manque jusqu'aux prochaines moissons.
09:42Très bien.
09:44L'essentiel du boulot d'Audrey, c'est donc d'inspecter par le menu ce que l'éleveur donne à manger à ses bêtes.
09:56Et ils mangent de foin. Ils sont en céréales et foin.
09:59C'est rare, des cochons qui mangent du foin.
10:03Toutes ces règles sont consignées dans la bible du bio.
10:07Le cahier des charges.
10:09Tant mieux, parce que c'est prévu au cahier des charges.
10:11Donc s'ils en mangent...
10:13Vous ne mettez pas de minéraux, rien ?
10:15Non.
10:16Comment vous êtes sûr de ce que vous dit, monsieur ?
10:19En fait, après, moi, je fais des ratios.
10:21Je vais aller vérifier le stock de céréales, le stock de foin.
10:25Qu'il y a bien les capacités pour fournir l'alimentation pour tout le monde.
10:29Il y a juste à regarder les surfaces, faire les rendements.
10:31Et après, on voit si c'est cohérent ou pas.
10:36Trois heures plus tard, fin de la visite.
10:38Mais le contrôle n'est pas terminé.
10:40Est-ce que vous avez mis de côté tous les certificats de vos fournisseurs ?
10:45Pour chacun de ces achats, l'agriculteur doit montrer pâte blanche, facture, certificat bio.
10:52Une montagne de paperasses à éplucher.
10:55Pire qu'un contrôle fiscal.
10:57Et Audrey ne laisse rien passer.
10:59Il me semble qu'il me manque la facture du maïs, justement.
11:02Si ça se trouve, c'est parti au siège.
11:05Il me laissera ressortir.
11:07Une facture qui manque, ça peut aller jusqu'à déclasser un produit.
11:12Si on n'a pas la certitude que c'est bio, on déclasse.
11:16En tout cas, on ne certifie pas.
11:20Après deux heures d'inspection, le producteur respire enfin.
11:23Il décroche son certificat.
11:26Au final, le contrôle lui aura coûté une journée entière et près de 1000 euros.
11:31Le label AB coûte cher.
11:33Alors certains tentent d'en contourner les règles.
11:36Le bio aussi a sa face cachée.
11:44C'est la nouvelle mode à Paris.
11:46Un marché 100% biologique.
11:48Le samedi matin, c'est jour d'affluence.
11:51Ici, les carottes s'arrachent comme des petits pains.
11:55Alors là, comment vous pouvez être sûr que c'est bien bio ?
11:58Alors j'espère pouvoir faire confiance.
12:00Je compte sur la confiance des gens.
12:03Le pis s'enlie à 13 euros le kilo.
12:06À ce prix-là, mieux vaut être sûr que c'est bien bio.
12:11Sur un marché aussi, les légumes doivent avoir leur label.
12:14On le retrouve sur les étiquettes.
12:17On peut même demander au vendeur.
12:19On peut même demander au vendeur de présenter leur papier.
12:25À chaque stand, vous avez des certificats indiqués.
12:27Nous, ils sont en caisse.
12:28Comme quoi, on est en bio et on est certifié.
12:30Le certificat est valable jusqu'au 31 décembre 2009.
12:33Vous pouvez nous montrer à quoi ça ressemble ?
12:35Ce vendeur ne fait aucune difficulté pour nous montrer son certificat.
12:39Il a été contrôlé par Ecosert.
12:41Ses produits sont bien bio.
12:43Nous avons voulu savoir si tous les commerçants respectaient ces règles du jeu.
12:48Munis d'une caméra discrète, nous jouons donc les candides.
12:52Sur cet étal, aucun label, aucune étiquette.
12:58Je voudrais des courgettes, s'il vous plaît.
13:00Vous m'en mettez trois.
13:02Elles sont bio ?
13:04Tous nos produits sont bio.
13:06D'accord.
13:07Et comment je sais que c'est vraiment bio, alors ?
13:11La réponse est pourtant simple.
13:13Le label AB, c'est la garantie officielle du bio.
13:18Comment je sais que c'est vraiment bio ?
13:22C'est une bonne question.
13:24Vous ne pouvez pas savoir.
13:26C'est nous qui vous garantissons la bio-attitude.
13:29Tout le marché est bio.
13:31Tout le monde est contrôlé.
13:33D'accord, mais vous n'avez pas de label, de papier ?
13:36Non, on est contrôlé à partir du moment où on s'installe sur ce marché-là.
13:40Ah, d'accord.
13:41Parfois, il y a des... Vous savez, le label...
13:44Comment ça s'appelle ?
13:46AB ? Ah oui, mais c'est pas un label.
13:48Ah oui, donc vous, vous n'avez pas le label AB, par exemple, marqué ?
13:51AB, ça ne veut rien dire.
13:52Ah, d'accord.
13:53Merci.
13:54La bio-attitude de cette vendeuse nous laisse quelques doutes.
13:58Le prix, en revanche, est bien bio.
14:009,20 euros, madame, s'il vous plaît.
14:029,20 euros pour 3 courgettes, 1 céleri et 1 brocoli.
14:06Le juteux marché du bio aiguise l'appétit des fraudeurs.
14:09Et pas seulement sur les légumes, sur la viande aussi.
14:16Le dernier scandale de fausse viande bio a éclaté dans un petit village de l'arrière-Pays basque.
14:23L'affaire remonte au printemps 2008.
14:27Les services vétérinaires font une saisie chez un éleveur de porc.
14:31Rillettes, terrines, tout était vendu sous le label bio, sans certification.
14:38Pire, l'abattage et la transformation de la viande se faisait sous ce hangar de tôle,
14:43dans des conditions d'hygiène plus que douteuses.
14:49L'éleveur est mis en examen pour tromperie sur la qualité de la marchandise,
14:53faux et usage de faux, non-respect des règles d'hygiène et d'écarissage.
15:02Mais comment a-t-il pu écouler de faux produits bio durant près d'un an et demi ?
15:07Nous décidons de nous rendre sur place pour tenter de le rencontrer.
15:14Nos coups de téléphone sont restés sans réponse.
15:18Visiblement, il continue son activité.
15:24Mais au détour d'un bâtiment, nous allons faire une découverte étonnante.
15:29Des cadavres de cochons, abandonnés au milieu du passage.
15:33Triste spectacle d'un élevage qui semble bien mal tenu.
15:37Des détritus, des médicaments jonchent le sol et traînent un peu partout derrière les bâtiments.
15:45Comment ce producteur a-t-il pu passer pour un éleveur bio
15:49et commercialiser ses produits dans quatre départements du Sud-Ouest ?
15:58Les faux produits bio ont été vendus dans une trentaine de grandes surfaces,
16:02dont cet hypermarché de Pau et ce magasin pourtant expert en produits biologiques.
16:09Ludivine en est la gérante.
16:11Un beau matin, elle a vu débarquer la répression des fraudes au rayon charcuterie.
16:16Voilà, c'est ce rayon-là que les fraudes nous ont obligés à vider
16:20quand l'histoire du producteur s'est passée.
16:24Nous allons rencontrer la responsable du frais qui a suivi l'affaire avec moi.
16:30Ludivine avait toute confiance en son fournisseur.
16:34Voilà Aurélie.
16:36Il lui a toujours présenté des certificats bio en règle, au moins en apparence.
16:41Pour nous, on avait tous les agréments.
16:43Quand on lui demandait l'agrément, on avait l'agrément.
16:46Quand on lui demandait les papiers qu'il fallait, on avait tous les papiers.
16:49Nous, tout était suivi, tout était fait, tout était...
16:52Et c'est vrai qu'on peut pas contrôler tout le monde.
16:54Tant qu'on a les papiers, on peut pas être suspicieux sur tout le monde, quoi.
16:57Sinon, on vend plus rien.
17:00Les produits ont été retirés des magasins, mais le trafic durait depuis longtemps.
17:05Beaucoup ont été consommés.
17:07Par chance, aucun problème de santé n'a été signalé par les clients.
17:12Le dossier est toujours en cours d'instruction au palais de justice de Pau.
17:17L'éleveur risque de lourdes amendes et jusqu'à 3 ans d'emprisonnement.
17:21Pour le procureur, la fraude est grave.
17:24Ça porte atteinte au crédit du label.
17:26Lorsque vous avez ce type de produit sur les rayonnages d'un magasin,
17:29vous l'achetez en toute confiance.
17:31Vous pensez que puisqu'il a un label bio, c'est qu'il correspond à des normes
17:35et que donc vous allez pouvoir donner ce produit à manger à vos enfants, à votre famille,
17:39en ayant des garanties sur sa qualité.
17:41Donc l'atteinte, elle est individuelle ou collective pour le consommateur,
17:44mais elle est surtout pour le label,
17:46parce que du coup, ça décrédibilise complètement l'utilisation de ce genre de label.
17:49Donc il y a une sorte d'atteinte à l'ordre public, économique et commercial.
17:55Malgré ces dérapages, le bio reste une des filières alimentaires les plus sûres.
17:59En 2007, la répression des fraudes a mené 1200 enquêtes.
18:03Bilan ? Quelques rappels aux règlements, 7 procès verbaux, une seule mesure de police.
18:18Au programme d'Audrey, aujourd'hui, des contrôles à l'improviste.
18:22Je voulais savoir si éventuellement tu avais un peu de temps en début d'après-midi pour faire un petit contrôle.
18:27Juste un coup de fil, pour s'assurer que l'exploitant est bien chez lui.
18:32Merci, bonne matinée, à tout à l'heure.
18:35Ces contrôles inopinés ont lieu à tout moment, pour dissuader les tricheurs, même s'ils sont rares.
18:44Ce qu'Audrey voit plus souvent, en revanche, ce sont des contaminations.
18:48Des produits chimiques venant de champs voisins, qui polluent une parcelle bio.
18:56J'ai eu le cas cette année d'une parcelle de vignes qui a été contaminée par un désherbant.
19:03Et donc le producteur a dû déclasser la totalité de sa parcelle en conventionnel.
19:08Même moi, en tant que contrôleuse, ça me peine toujours qu'il y ait des accidents comme ça.
19:14En même temps, c'est la règle du jeu et on est tous conscients que pour le consommateur,
19:18c'est pas acceptable de faire rentrer des produits contaminés dans la chaîne bio.
19:24Le bio n'est pas à l'abri dans une bulle.
19:26Même quand tout est sous contrôle, il y a des failles.
19:30Nous allons vite le comprendre chez cet éleveur.
19:37Benoît est producteur de volailles, alors il est très vigilant sur ce qu'il donne à ses poussins.
19:43Là, tu mets des additifs alimentaires ?
19:45Non.
19:46Ah oui, c'est vrai.
19:47Non, mais tu pourrais mettre des additifs dans l'eau.
19:51Toi, l'état sanitaire de tes poussins, tout ça, tu le fais ?
19:54Là, ça va, j'ai eu une grosse casse au démarrage.
19:58À l'arrivée, mais moi, je pense qu'il y a un problème de couvoir.
20:03Les céréales font partie des cultures dites à risque.
20:06On va regarder rapidement ce que tu as dans les silos.
20:09Les contaminations y sont plus fréquentes.
20:13Alors, les contrôles y sont aussi plus pointus.
20:19On remplit des sacs de prélèvements pour envoyer à l'analyse au laboratoire, à créditer.
20:24Ils vont chercher quoi ?
20:26Ils peuvent chercher tout ce qu'on leur demande.
20:30Ça peut être aussi bien des pesticides que des OGM,
20:33que des produits interdits dans l'alimentation animale.
20:38Et là, c'est le soja que j'achète.
20:40D'accord. Donc là, le soja est l'un d'eux.
20:44Les importations, Audrey s'en méfie.
20:47Et Benoît, encore plus.
20:51Ça vous plaît pas, on dirait, d'importer du soja ?
20:54Non, ça me plaît pas.
20:56Ça me plaît pas. Et intéressez-vous, d'ailleurs...
20:59Elle s'est trop intéressée.
21:01Pourquoi on importe du soja, ici ?
21:04Les produits bio qui viennent de l'étranger, c'est le point faible de la filière.
21:09Et Benoît en sait quelque chose.
21:11Il s'est fait piéger avec du soja importé de Chine.
21:16Du soja qui venait de cette usine.
21:19C'est une filiale du puissant groupe Terena,
21:22un poids lourd de l'agroalimentaire français,
21:25qui compte 10 000 salariés et plus de 3 milliards d'euros de chiffre d'affaires.
21:32Donc là, on trouve, en fait, l'aliment qu'on fabrique dans cette usine,
21:37qui est de l'aliment pour des volailles, essentiellement des volailles de chair.
21:41Christophe Courousset en est le directeur de la communication.
21:44Donc du blé, du maïs, du tourteau de soja, de la luzerne.
21:49Ces petits granulés servent de complément à l'alimentation des volailles.
21:53Ils sont produits à partir de céréales bio,
21:56du sorgho, du maïs, du blé, de l'orge,
22:00et bien sûr, du soja bio, pour l'apport en protéines végétales.
22:05Il se trouve que sur les protéines, on n'a pas la production en France et en Europe,
22:10et qu'en grande majorité aujourd'hui, elle est importée.
22:13Donc ce tourteau de soja-là, c'est un tourteau de soja brésilien.
22:16Au début de l'année 2008, nos producteurs brésiliens ont connu une baisse de récolte importante,
22:22et il a fallu qu'on assure la jonction entre deux campagnes,
22:24entre celle du début de l'année 2008 et celle-ci.
22:27Et c'est là où, effectivement, on a fait appel à une importation chinoise.
22:31C'était la première fois, et ce sera la dernière aussi,
22:34compte tenu de ce qu'on a découvert dans le tourteau.
22:38L'alerte est donnée en octobre.
22:40Il y a de la mélamine dans les produits chinois,
22:43une substance dangereuse qui augmente le taux de protéines,
22:47et donc le prix du soja.
22:49L'usine fait des prélèvements.
22:51Le stock qu'elle vient d'acheter est contaminé.
22:54Du soja pourtant certifié bio, qui avait même subi 200 analyses en laboratoire,
23:00toutes étaient négatives.
23:03N'est-ce pas un peu mal au coeur d'avoir fait autant d'analyses
23:05pour se rendre compte qu'il y a quand même des fraudeurs qui passent à travers ?
23:10On n'est pas à l'abri d'une fraude, la preuve.
23:12Après, c'est aussi à ça que servent les plans de contrôle.
23:15Il se trouve que sur la mélamine, on ne pouvait pas la trouver
23:17puisqu'on ne la cherchait pas.
23:18Donc ça, elle n'était pas inclue auparavant sur les autocontrôles.
23:22Donc là, on est sur non pas une non-conformité,
23:24on est sur une fraude, ce qui est très différent.
23:27Donc on a une procédure judiciaire d'engager contre le fournisseur chinois.
23:31Les doses de mélamine étaient trop faibles pour présenter un risque alimentaire.
23:35Mais les 2000 tonnes de soja suspects ont été retirées des élevages en urgence.
23:40Coût de l'opération pour Terena, 2 millions d'euros.
23:48Après analyse, les volailles de Benoît n'étaient pas contaminées.
23:52Mais le mal était fait.
23:54Plusieurs clients ont annulé leur commande de poulet.
23:57Ce producteur si vigilant s'est fait piéger par le seul maillon qu'il ne contrôle pas.
24:05Je suis forcément en colère que ce type de situation arrive.
24:09Dès qu'on rentre dans des logiques de gros volumes et d'échanges internationaux,
24:14il y a des risques, il y a des cahiers des charges qui vont être à peine respectés.
24:17Donc on triche un petit peu pour rentrer dans...
24:20Quand le bateau est chargé, si on n'a pas le bon taux qui correspond à la commande,
24:24qu'est-ce qu'ils font ? On utilise 2-3 artifices pour tricher.
24:28Pour moi, le problème, c'est le fait qu'il y ait des céréales qui voyagent aussi loin.
24:34Ce que dénonce Benoît, c'est une forme de mondialisation du bio.
24:38Une affaire de gros sous qui n'est pas près de s'arrêter.
24:45Si le bio n'a plus de frontières, il finit toujours de la même façon, dans nos assiettes.
24:51Donc voilà, on arrive au niveau du rayon biologique pour les fruits et légumes.
24:57Des fruits et légumes bio, certes, mais sous cellophane, car eux aussi ont voyagé.
25:03Alors au niveau des approvisionnements, on est majoritairement sur des approvisionnements français.
25:10Mais il faut savoir que ce ne sont pas des approvisionnements à 100% français,
25:15puisque vous avez dû en entendre parler, les terres agricoles bio sont un peu petites en France
25:21pour répondre à la totalité des approvisionnements nécessaires à une consommation grandissante.
25:28En fait, à y regarder de plus près, ils ont fait beaucoup de kilomètres et viennent souvent de l'étranger.
25:35Ces pommes viennent d'Italie. Ce sont des poires d'Argentine.
25:39Et à côté, nous avons des pommes qui viennent également de l'Italie.
25:46Mais alors, la tomate bio d'Espagne est-elle aussi bio que la française ?
25:52Aujourd'hui, la question ne se pose plus. L'Union européenne s'est dotée d'un cahier des charges commun.
25:57Depuis le 1er janvier 2009, les règles en bio sont les mêmes partout.
26:01À terme, notre label AB sera même remplacé par ce logo, le logo bio de l'Europe.
26:09Le problème, c'est que ce nouveau cahier des charges européen est moins exigeant.
26:15Donc là, ton bâtiment, il fait quelle surface ?
26:18Donc lui, il fait 36.
26:19Le bio à la française avait les règles les plus strictes d'Europe.
26:23Les nouvelles règles pour Benoît sont trop laxistes.
26:26Là, je suis au cahier des charges. Le cahier des charges, il n'est pas suffisant.
26:31Avec ces nouvelles règles, un éleveur peut par exemple avoir des volailles bio et des non bio dans la même ferme.
26:37Ou encore utiliser plus de médicaments pour soigner ses animaux.
26:42On a le droit depuis le 1er janvier 2009 à un traitement allopathique comme volaille de chair ?
26:46Moi, je trouve ça inadmissible alors que des volailles qui vivent 3 mois, 4 mois,
26:51enfin moi, je suis sur des durées d'élevage un peu plus longues,
26:53mais sur 4 mois, on peut faire vivre des volailles sans utiliser de traitement allopathique.
26:56Attention, il y a quand même un cadre précis.
26:59Et ce n'est pas parce que le cadre est un peu plus laxiste que le voisin, il va sauter sur toutes les opportunités.
27:06Non, mais ce que je veux dire, c'est qu'on va perdre en clarté dans cette histoire.
27:10On perd en clarté, mais ce n'est pas parce qu'il y a une possibilité que tout le monde va sauter dessus.
27:14Moi, je raisonne vraiment dans la logique où ce que je produis, c'est pour qu'il y ait des gens qui le mangent.
27:19Et donc, si je peux éviter d'avoir mis telle ou telle molécule dans la viande,
27:23moi, je m'attends à ce que très vite, on me dise la bio, c'est bon, vous avez le droit à tout.
27:28Donc, ça n'a rien de bio.
27:33Le bio va-t-il perdre son âme ?
27:37C'est ce que redoutent les puristes.
27:40Nous partons pour Limoux, dans l'Aude.
27:44Michel est éleveur de vaches.
27:47Il appartient à Nature et Progrès, une association d'agriculteurs bio encore plus bio.
27:53Bonjour Michel.
27:57Oui, il y a un assortiment, il y a de la sauce.
28:01Une fois par semaine, Michel livre lui-même sa viande à ses clients.
28:06Vous êtes sûr que sa viande, c'est de la viande bio ?
28:10Oui, oui, oui, je suis sûr, oui.
28:13Mamie m'a parlé comment il soigne ses vaches.
28:16Tout le réseau, c'est par la confiance comme ça.
28:19Parfois, c'est des gens qui se groupent, je livre 4-5 dans le même endroit.
28:24Et donc, à certains moments, j'en ai manqué.
28:28J'ai plus de demandes parfois que ce que je peux donner.
28:35Nature et Progrès a ses propres règles de production, encore plus strictes que le label AB.
28:42L'association a donc mis en place ses propres contrôles.
28:48Où ? Par où on entre ?
28:51Aujourd'hui, Michel vient inspecter Jacqueline, une ancienne vétérinaire devenue éleveuse.
28:57Il y a les vaches là.
28:59Ça marche toujours ton bois là ?
29:01Oui, oui, je peux te le montrer.
29:03A Nature et Progrès, chaque éleveur est contrôlé par un autre éleveur et un consommateur, membre de l'association.
29:13Mireille, institutrice à la retraite, est venue aider Michel.
29:17Et ça vient d'où ton foin et ta paille ?
29:21Ça vient de Cassaigne.
29:23Et le foin ?
29:25Le foin, c'est le foin d'ici et une partie achetée.
29:28On s'autocontrôle entre nous.
29:31Et ça, c'est une bonne garantie ? Parce que si tout le monde se connaît, il ne peut pas y avoir de petits arrangements ?
29:36On ne se connaît pas forcément. Par exemple, les consommateurs ne connaissent pas tous les producteurs.
29:41Pour le consommateur, il s'arrangerait avec le producteur.
29:44Oui, il n'a pas de raison.
29:47Et je trouve intéressant de voir d'où viennent les produits qu'on utilise ensuite.
30:00Pour une puriste du bio comme Jacqueline, le nouveau règlement européen vient de commettre l'irréparable.
30:06Il tolère en effet la présence d'OGM dans les produits bio en cas de contamination accidentelle, jusqu'à 0,9 %.
30:15C'est infime, mais des OGM dans le bio, Jacqueline se sent trahie.
30:21Moi, je l'ai perçu presque comme un couteau dans le dos.
30:25Parce que j'étais juste en bio pour ça, pour que les gens puissent se fier là-dessus.
30:30S'ils achètent du bio, c'est qu'il n'y a pas ces produits dedans.
30:34Et là, tu n'as plus la garantie.
30:37Alors, les plus militants de Nature & Progrès se rebellent contre le bio officiel.
30:42On les appelle les boycotteurs.
30:47Jean-Claude est vigneron. Il produit un vin pétillant, la Blanquette de Limoux.
30:52A l'ancienne, son vin est 100 % bio.
30:56Il n'y a que du jus de raisin fermenté, pas de soufre, pas de collage, rien du tout.
31:05En 1972, c'est Nature & Progrès qui a rédigé le tout premier cahier des charges bio.
31:13Jean-Claude faisait partie de ses pionniers.
31:17Nature & Progrès, c'est plus bio que bio ?
31:21C'est plus bio que bio, disons que c'est la bio comme on l'a conçue aux origines.
31:27Alors que maintenant, la bio qui se généralise a plus tendance à être un segment de marché,
31:34plutôt qu'une philosophie de vie.
31:39Ce soir-là, Eole et Pascaline, jeunes militants de Nature & Progrès, ont rendez-vous chez Jean-Claude.
31:49Pour goûter la Blanquette, refaire le monde en plus bio,
31:53et critiquer le label AB, jugé trop commercial.
31:57On peut très bien être producteur AB et faire une production bio simplement pour le fric.
32:06Je ne mets plus AB parce que j'estime que je fais de la bio différemment de mes collègues.
32:13Je ne communique plus que sur Nature & Progrès.
32:17Je mets le petit sigle Nature & Progrès, je mets un petit texte disant
32:22« Produit par un agriculteur sous mention Nature & Progrès depuis 1981 ».
32:28100% bio, mais sans label.
32:31Et les puristes n'ont pas fini de s'inquiéter, car dans les rayons, les affaires continuent.
32:38Cette chaîne d'hypermarché vient de créer sa propre marque bio,
32:42et elle ne compte pas s'arrêter à l'alimentation.
32:46Vous pouvez voir dans ce rayon, c'est la gamme qu'on a sorti en cosmétiques biologiques et écologiques.
32:52Le cosmétique bio, c'est la tendance du moment.
32:55Gels douches, lait démaquillant et même dentifrice.
32:59Mais surprise, le label AB a disparu.
33:03Pourquoi on ne retrouve pas de logo AB sur les produits cosmétiques ?
33:07Parce que le logo AB est dédié à l'alimentaire, tout simplement.
33:13Pas de label, pas de règle. En cosmétique, tout est permis.
33:17Les logos privés se multiplient. Comment s'y retrouver ?
33:21Ces produits sont-ils vraiment biologiques ?
33:26Pour le savoir, nous sommes allés demander à une spécialiste des cosmétiques bio.
33:32Voici Kali, 32 ans, fan de produits de beauté au point de les fabriquer elle-même dans sa cuisine.
33:40Vous allez nous préparer quoi ?
33:42Une crème au coco pour le corps.
33:45Tout est propre et on va pouvoir commencer à faire la recette.
33:5160 ml d'eau que je vais placer au bain-marie.
33:56C'est de l'huile de sésame, toujours biologique.
34:01Ensuite, je vais ajouter l'huile de coco, toujours biologique.
34:11J'ai toujours été une grosse consommatrice de produits de beauté, de maquillage.
34:17Quand j'ai commencé à regarder les compositions,
34:21et surtout après, à faire des recherches,
34:24parce que le problème, c'est que les compositions ont souvent changé.
34:27J'ai fait des recherches et je me suis rendu compte qu'il y avait beaucoup d'ingrédients
34:31qui étaient nocifs pour la peau, à moyen ou long terme pour la santé,
34:35qui pouvaient provoquer l'origine de graves maladies.
34:39Du coup, je me suis orientée vers les recettes de grand-mère.
34:43Je vais incorporer le conservateur.
34:46Je vais mettre 15 gouttes.
34:48Qu'est-ce que c'est exactement qu'on va mettre ?
34:50C'est du benzyl alcool DHA.
34:53Malgré que le terme soit un peu barbare,
34:57c'est quand même du benzyl alcool DHA.
35:00C'est du benzyl alcool DHA.
35:02C'est du benzyl alcool DHA.
35:04C'est du benzyl alcool DHA.
35:06C'est du benzyl alcool DHA.
35:08C'est du benzyl alcool DHA.
35:10Malgré que le terme soit un peu barbare,
35:13c'est quand même une substance naturelle
35:15que l'on trouve dans les cosmétiques bio du marché.
35:25Et voilà, j'ai une crème pour le corps
35:28avec un très léger parfum de coco.
35:32Kali n'achète plus de cosmétiques en magasin.
35:35Pas question de consommer des produits
35:37qui contiendraient des substances chimiques.
35:39Quant à ce qui s'affiche bio,
35:41elle va nous apprendre ce qui se cache vraiment
35:43derrière les étiquettes.
35:45Direction le rayon parfumerie,
35:47en caméra cachée pour éviter les vendeuses.
35:51Première leçon, la composition d'un produit.
35:55En fait, les trois ou quatre premiers ingrédients
35:58qui vont être répertoriés au niveau de la liste
36:01qui est faite sur le produit,
36:03ça correspond à peu près à 80% du produit fini.
36:07En gros, ça fait vraiment l'essentiel du produit.
36:10Quand le cosmétique est censé être fait à base d'argan,
36:14s'il arrive dans les derniers composants
36:16au niveau de l'étiquette,
36:18c'est vraiment très faible.
36:21Deuxième leçon, le mot bio sur le flacon ne suffit pas.
36:25Toujours regarder ce qu'il y a derrière.
36:27Ce gel douche, par exemple, a l'avoine bio.
36:30A priori, on se dit que tout est naturel,
36:32voire même bio.
36:34Par contre, on voit des labels nulle part.
36:36Si on décortique, il n'y a que les extraits d'avoine
36:40qui sont bio.
36:42En fait, c'est une jolie pub.
36:44Voilà comment se faire avoir, en gros.
36:48Troisième leçon, se méfier des produits garantis
36:51sans produits chimiques.
36:530% d'alcool, 0% de parabènes, 0% de colorants.
36:57Juste génial.
36:59C'est bien.
37:00On commence par du pétrolatome album,
37:02paraffine, parfum.
37:05Alors là, on est dans le top
37:07de tous les dérivés pétrolés, en fait, d'office.
37:10Donc les deux premiers ingrédients,
37:12plus les parfums allergisants.
37:14Donc moi, je dis, on va le remettre à sa place.
37:18Voilà, ce sera pour quelqu'un d'autre.
37:22Pour s'y retrouver, mieux vaut donc savoir lire les étiquettes.
37:25On y trouve de plus en plus souvent ce petit logo rond,
37:28bio, charte, cosmé, bio.
37:31Que signifie donc ce label ?
37:33Quelle valeur lui accorder ?
37:35En fait, c'est un label privé
37:37créé de toutes pièces par des fabricants de cosmétiques
37:40regroupés dans une association, Cosmé Bio.
37:43D'accord, donc là, on a vraiment tous les produits,
37:45les dernières recettes.
37:47Thierry Recouvraud en est le président.
37:49Il a sa propre marque et vient d'ouvrir son cinquième magasin.
37:52Un produit avec le label Cosmé Bio,
37:55obéi à la charte définie par cette association.
37:58Alors, un produit bio, c'est un produit qui est fabriqué
38:01à partir d'ingrédients d'origine naturelle.
38:04Et dans ces ingrédients d'origine naturelle,
38:07notre cahier des charges impose qu'un certain nombre,
38:10un certain pourcentage soit issu de l'agriculture biologique.
38:13Et ce pourcentage actuellement est de 10 % au niveau français.
38:1710 % seulement d'ingrédients bio, ça ne fait pas lourd.
38:21Pour l'instant, vous voyez ici, par exemple, on est à 68 %,
38:25alors que la règle, c'est 10 %.
38:27Et je pense que plus on va aller dans le temps,
38:30plus on saura aller vers des pourcentages beaucoup plus élevés.
38:33Pour certains, c'est surtout une belle opération marketing.
38:37A l'association UFC que choisir,
38:40Florence Imbert a mené son enquête sur les cosmétiques bio
38:43et les labels privés.
38:45Cosmé Bio, par exemple, qui affiche 10 % d'ingrédients bio
38:48et 95 % d'ingrédients naturels.
38:51En fait, un joli tour de passe-passe.
38:55Les cosmétiques sont généralement des émulsions
38:59composées d'huile et d'eau majoritairement.
39:02Et donc l'eau, c'est un ingrédient naturel.
39:05Donc quand il y a 80 % d'eau dans un produit,
39:08c'est évident que c'est assez facile d'obtenir 95 % d'ingrédients naturels.
39:13L'association a analysé en laboratoire une quarantaine de produits.
39:18Bilan, c'est mieux avec un label,
39:20mais certaines crèmes contiennent encore des molécules de synthèse
39:23qui n'ont rien de biologique.
39:25Vous voyez, propyl et butylparabène,
39:28ils n'ont absolument rien à faire sur un cosmétique biologique.
39:33On a aussi retrouvé des parabènes et du phénoxyéthanol
39:38dans un produit qui est pourtant bio.
39:40Alors évidemment, c'est à des teneurs très faibles,
39:43mais il n'empêche que ce n'est pas normal de retrouver ce type d'ingrédients.
39:48Autre mauvais point, les conservateurs chimiques sont remplacés
39:51par des produits naturels, mais qui peuvent provoquer des allergies,
39:55comme dans cette crème de jour ou même ces laits pour bébés.
39:59Il faudrait quand même améliorer la lisibilité du message
40:04et je pense qu'indiquer bio sur des étiquetages à l'heure actuelle,
40:10compte tenu des cahiers des charges,
40:12je trouve que c'est une mention qui est un peu abusive.
40:17Les industriels de la cosmétique ne sont pas pressés d'avoir un label officiel,
40:22car le marché est en plein essor.
40:24Du coup, chacun peut mettre le bio à sa propre sauce.
40:28Et parfois, ça dérape.
40:32Dans les allées du salon de l'agriculture, nous avons rencontré Murielle.
40:38C'est du cochon bio ?
40:41En fait, elle n'est pas venue pour la dégustation, mais en repérage.
40:45Elle distribue des cosmétiques bio auprès des comités d'entreprise et des pharmacies.
40:55Toujours à la recherche de nouveaux fournisseurs,
40:58Murielle est devenue un peu méfiante.
41:01Et c'est bio-certifié en Italie ?
41:07Voilà le code.
41:10C'est que Murielle a été victime d'une belle arnaque.
41:14En mai 2008, une société lui demande de distribuer ses produits 100% bio.
41:20Les échantillons portent le label Cosmé Bio.
41:23Murielle est en confiance.
41:26Elle passe commande.
41:28Elle achète même des affiches publicitaires pour les vitrines des pharmacies.
41:33On voit bien apparaître les logos Cosmé Bio et Cosert.
41:38C'est quand même des publicités qui valent 150 euros pièce.
41:42Tout ce qui fait penser que c'est quand même une société qui tient la route.
41:47Malheureusement, elle ne tient pas du tout la route.
41:50Les commandes de Murielle n'arriveront jamais.
41:53Ecosert lui affirme par ce courrier qu'aucun produit de la société McCann n'a été certifié bio.
42:00Certains contiendraient même des produits chimiques.
42:04À partir du moment où on a des produits quand même où il y a les logos,
42:07on se dit bon, on n'a pas eu trop de doutes.
42:10Après, j'en ai eu quand même pas mal.
42:13Et ça a été difficile, c'est vrai, de repartir après parce que j'ai été grugée.
42:21Au final, il vous a pris combien ?
42:24Il y avait un droit d'entrée par zone qui était de 3000 euros.
42:28Un stock de départ que j'ai payé, que je n'ai jamais eu, qui était de 1000 euros.
42:34Et puis tous les frais annexes.
42:38Nous avons essayé de contacter la société McCann.
42:41L'entreprise est domiciliée à Versailles, dans ce petit immeuble.
42:46Aucune plaque sur la porte, rien non plus sur les boîtes aux lettres.
42:51C'est une simple adresse postale.
42:54Seul contact possible, le site Internet.
42:58Malgré plusieurs plaintes en cours,
43:01la société McCann vend toujours des cosmétiques sous le label Cosmébio
43:06et affiche encore sans aucun scrupule la mention 100% biologique sur la plupart de ses produits.
43:16Le bio est à l'aube d'une ère nouvelle.
43:19Victime de son succès, il doit maintenant veiller à son avenir.
43:24Les Français consomment bio, mais le monde agricole est à la traîne.
43:29Le gouvernement veut donc développer l'agriculture biologique,
43:33passer de l'agriculture biologique à l'agriculture biologique.
43:37L'agriculture biologique, c'est l'agriculture biologique.
43:41Le gouvernement veut donc développer l'agriculture biologique,
43:45passer de 2% des terres cultivées à 6%.
43:49Mais il manque de volontaires.
43:52Nous retournons chez Dominique, notre producteur de poireaux.
43:56Bonjour tout le monde.
43:58Vous êtes sur une ferme en bio depuis 95.
44:05Ce jour-là, il reçoit la visite des étudiants du lycée agricole voisin.
44:10C'est eux, les agriculteurs de demain.
44:14Au niveau de la fertilisation, vous faites comment ?
44:17Fertilisation, beaucoup sur les composts.
44:20Comme je fais de la serrée à la paille, j'échange du fumier contre la paille.
44:25Parce que moi, j'ai pas d'élevage.
44:28Sinon, j'ai essayé de faire plein de choses. J'ai fait des frites aussi.
44:32Mais la valorisation du kilo de pommes de terre en frites, c'est royal.
44:37Dominique doit les convaincre de prendre la relève.
44:41Mais les jeunes ne semblent pas tout à fait convaincus.
44:45Pour moi, si je m'installe en agriculture, ça sera en bio.
44:49Pour moi, c'est l'agriculture de demain.
44:52Mais le problème, c'est de vivre de l'agriculture qui me semble difficile en ce moment.
44:57Pour pouvoir en vivre, avec le cris financier actuellement, c'est pas...
45:03S'il est bio, il est plus cher.
45:06Ça vous paraît difficile économiquement, en tout cas ?
45:09Je pense que pour moi, oui.
45:11La bio, c'est dur, hein !
45:16Pas facile de passer en bio.
45:20D'ailleurs, on appelle ça se convertir.
45:24Entrerait-on en bio comme en religion ?
45:28Sur les hauteurs de Montbassier,
45:30l'un des plus grands crus français a commencé son passage en bio.
45:37A gauche, Bruno, vigneron en conversion.
45:40A ses côtés, Eric, conseiller technique.
45:43Une sorte de coach du passage en bio.
45:46Il faut trois ans pour quitter le monde chimique,
45:49purger la terre des pesticides et le producteur de ses vieilles pratiques,
45:53comme désherber.
45:56Avec une adaptation sur le rouleau,
45:59et surtout pour éviter qu'elle revienne,
46:02donc l'aérer régulièrement
46:04et également maintenir une hauteur de coupe importante.
46:07Parce que plus on tombe ras, plus la mousse va revenir vite
46:11et plus on va favoriser les plantes à rosettes, notamment,
46:15et on va perdre en biodiversité du couvercle.
46:18Il faut qu'on adapte aussi notre matériel,
46:21parce que c'est vrai que le matériel que tu utilises,
46:24c'est fait pour ton endroit.
46:26Tu peux changer d'habitude, mais si tu n'as pas le matériel qu'il faut,
46:30il faut que nous, on adapte, pour qu'on devienne bricoleur.
46:34Le plus dur, c'est la conversion psychologique de l'agriculteur,
46:38parce qu'il faut qu'il change la façon
46:41d'aborder son vignoble et son métier.
46:44Le domaine de Tirkul à Gravière
46:47produit des vins de présence,
46:50comme le Mont Basillac.
46:57Perdre sa récolte ici, c'est une catastrophe économique.
47:01Mais Bruno est prêt à prendre le risque de passer en bio.
47:05Evidemment, ça fait peur, puisqu'on part d'une situation ouatée,
47:09où on a des filets, où on a le matelas, si on tombe,
47:13on appelle son marchand de produits, on dit qu'il est mort,
47:17on peut plus raisonner comme ça.
47:20On a un peu peur quand on se lance,
47:23parce qu'on se dit que c'est un monde inconnu.
47:26Je prends des risques, surtout quand on veut faire du très bon.
47:30Mais il faut se dire que si on travaille bien,
47:33il faut avoir confiance en soi.
47:36Si on travaille bien, si on est propre, méticuleux, attentif,
47:40il n'y a pas de raison que ça ne suffise pas
47:43avec les moyens dont on dispose.
47:46L'année prochaine, Bruno aura fini sa conversion.
47:50Celui-là, c'est le 1er tri, ça, c'est le 2e tri,
47:54un peu moins riche, ça fait 21-22.
47:57Sur l'étiquette d'un grand cru de Mont Basillac,
48:01vendu dans le monde entier,
48:04fleurira le petit logo vert AB.
48:071 300 agriculteurs,
48:10s'installent en bio chaque année.
48:13Mais ils sont aussi 800 à abandonner.
48:16Nous partons pour Sainte-Gabelle, au pied des Pyrénées.
48:25Alain est aujourd'hui ce qu'on appelle
48:28un agriculteur conventionnel,
48:31qui utilise des engrais, des pesticides, du désherbant.
48:35Mais il y a quelques années, c'était un paysan bio.
48:39Les gestes d'autrefois lui reviennent malgré lui.
48:43C'est un geste que j'avais l'habitude de faire en bio.
48:47En bio, la seule solution, c'est de passer comme ça.
48:51Alors, du colza, c'est inimaginable
48:54de désherber le colza à la main comme ça.
48:57Vous le faites plus, ça?
48:59Ah non, jamais.
49:01Ca m'arrive des fois de passer à la main
49:04pour enlever quelque chose.
49:06Mais il faut pas que ce soit trop long,
49:09il faut que ce soit vraiment local.
49:12Alain était maraîcher.
49:14Après 5 années en bio, il a abandonné.
49:17Il travaillait 60 heures par semaine
49:20pour gagner la moitié du SMIC.
49:22C'était trop juste.
49:24Le déclic s'est fait à 2h du matin, une fois.
49:27Je lavais des légumes, des salades et des céleris
49:30à la lumière des phares de ma camionnette
49:33et je me suis dit, attends,
49:35le moindre employé municipal du village,
49:38il y a longtemps qu'il est au lit,
49:40il gagne autant que toi, sinon plus.
49:43Il se fait beaucoup moins de soucis.
49:46On peut pas continuer comme ça.
49:48Si la société veut crever, qu'elle crève,
49:51mais y a pas de raison qu'on crève avant.
49:54Passer toute l'agriculture en bio,
49:57une utopie, selon Alain.
49:59La société n'est prête ni à dépenser plus
50:02pour l'alimentation, ni à travailler plus
50:05pour la produire.
50:07Pour moi, le problème, c'est la manoeuvre.
50:09On trouvera pas les hommes pour le faire.
50:11Je souhaite que le bio se développe,
50:13tant mieux si ça se développe pour ceux qui en vivront,
50:16mais je suis sceptique parce que je pense
50:19qu'on trouvera pas les jeunes qui veuillent
50:22travailler dur pour gagner peu pour faire ça.
50:25Pour vous qui avez commencé en bio,
50:27utiliser du désherbant,
50:29ça vous fait pas toujours un peu mal au cœur ?
50:31Si, ça me fait mal au cœur,
50:33mais c'est toute la société qui fait ça.
50:36L'agriculteur, c'est celui qui le met,
50:38mais on est tous solidaires.
50:40C'est notre façon de vivre au XXIe siècle.
50:43C'est toute la société qui est responsable de ça.
50:46Et ça permet, du fait qu'il y a très peu de monde
50:49qui travaille la terre, de réduire les prix alimentaires
50:52et qu'on fait plein d'autres trucs
50:54avec ce qu'on a économisé sur l'alimentation.
50:59Il est 21h, Dominique travaille encore.
51:04Il gagne 1000 euros net par mois,
51:06mais il garde le sourire.
51:09Ça vous arrive souvent de travailler la nuit comme ça ?
51:12Ouais.
51:14C'est quand même un sacerdoce.
51:16Vous y êtes encore, il fait nuit noire,
51:18vous êtes encore en train de bosser.
51:20Vous pouvez être prêt à ça ?
51:22Non, non, non, non, c'est pas...
51:24Enfin, ça va, c'est pas...
51:26C'est pas tous les jours.
51:28Le rythme n'est pas non plus tout le temps à fond.
51:31C'est pas...
51:33C'est pas bien.
51:36Trouvera-t-on les hommes
51:38pour faire vivre une agriculture plus propre ?
51:42Saurons-nous payer le prix d'une alimentation plus saine ?
51:47A nous de choisir si le bio est une voie d'avenir
51:51ou juste un beau rêve.
51:58Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org

Recommandée