• l’année dernière
Chaque semaine dans Viva Cinéma, le tour de l'actualité cinéphile avec des sujets inédits, des entretiens, des analyses de séquences, des archives, des montages et des nouvelles rubriques pour combler les amoureux du cinéma.
Transcription
00:00 [Générique]
00:21 - Nous sommes le 6 mars.
00:22 - Ça fait 35 jours que vous refusez de collaborer avec nous.
00:25 - Le parti est informé tous les jours sur votre attitude négative.
00:30 - Non.
00:31 - Nous allons reprendre depuis le début.
00:34 - Je veux bien répondre à condition que le procès...
00:36 - Quelle condition ? Vous jouez avec votre tête !
00:39 Vous n'avez qu'une possibilité.
00:41 Tout avouer sur vous-même et sur les autres.
00:43 Salut à tous, vous êtes bien sur Ciné+ Classique
00:46 et c'est parti pour votre Viva Cinema consacré cette semaine à Costa Gavras.
00:50 Au sommaire également le Rosebud de Irving Pitchell,
00:53 la mélodie du bonheur de Leila Olivesi
00:56 et une brève rencontre avec Rosalie Varda autour des parapluies de Cherbourg.
01:00 C'est parti !
01:01 - Je ne viens à table, ma chérie !
01:04 Réalisée par Yannick Kergoat et écrite par Edouie Plenel,
01:12 la série documentaire "Le siècle de Costa Gavras"
01:15 voit la filmographie de l'immense cinéaste franco-grec
01:18 comme un portrait du XXe siècle.
01:21 A l'occasion de la présentation à Cannes Classics
01:23 de l'épisode consacré au film "L'Aveu" 1970,
01:26 votre Viva a rencontré à Cannes le réalisateur Costa Gavras
01:30 ainsi que l'auteur de la série, le journaliste Edouie Plenel.
01:33 Portrait du cinéaste en raconteur du siècle.
01:36 - "Z", un film politique, "L'Aveu", un film politique,
01:43 c'est pour vous à chaque fois un acte politique un film
01:45 et ça sera toujours comme ça ?
01:47 - C'est un acte politique, oui, bien sûr.
01:49 Je ne sais pas si ça sera toujours comme ça,
01:51 probablement le prochain, mais l'avenir, on verra bien.
01:54 Peut-être, peut-être, puisque le monde est fait
01:57 de plein d'événements politiques qui nous concernent tous les jours,
02:00 qui nous bouleversent tous les jours.
02:02 Je crois qu'on ne peut pas rester indifférents.
02:04 - J'étais jeune adolescent, j'étais à Alger,
02:08 on était dans une génération très cinéphile, les années 60,
02:12 on vibrait avec le cinéma et j'étais présent
02:16 parmi les Badaud au tournage de "Z".
02:20 Donc moi, j'ai grandi avec ce cinéma.
02:22 Pour moi, le cinéma de Costa-Gavras a été, j'allais dire, mon imaginaire.
02:27 On allait voir les films de Costa pour se regonfler.
02:32 Ils peuvent raconter des histoires tristes,
02:35 des histoires de vaincus, des histoires terribles,
02:38 mais la force, la magie, le miracle de ce raconteur hors pair,
02:44 c'est qu'on en sort regonflé.
02:46 On se dit, de toute façon, un jour ou l'autre, l'espérance vaincra, elle reviendra.
02:50 - Ils savent déjà ?
03:07 - Bien sûr, madame, et ça ne fait que commencer.
03:11 - Le maturité ! Le maturité !
03:14 - Il naît quelques semaines après l'arrivée d'Hitler au pouvoir, en 1933,
03:19 et quand on regarde toute sa filmographie,
03:21 je pense qu'il n'y a pas de réalisateur qui ait été aussi important pour le siècle.
03:27 Il n'a loupé aucune grande question de ce siècle,
03:31 mais en ne faisant pas un cinéma politique
03:33 qui prétendrait dire aux gens ce qu'il faut en penser,
03:35 en racontant, en donnant à penser.
03:38 Avec vraiment la technique de quelqu'un qui sait raconter,
03:42 qui sait filmer, qui sait diriger des acteurs,
03:45 qui a de l'empathie, qui a de l'émotion, qui sait la faire passer.
03:48 - Moi j'ai vécu du film au film.
03:50 D'ailleurs, je n'en ai pas fait beaucoup, j'en ai fait qu'une vingtaine.
03:53 Je voulais qu'il y ait une histoire qui me touche profondément,
03:55 c'est qu'il y ait un film.
03:56 Il fallait soit faire le scénario, celle ou avec quelqu'un,
03:59 comme Jean-Claude Gréber, par exemple,
04:01 ou alors avoir un livre sur lequel je pouvais me baser,
04:04 parce qu'il y a un livre sur une vraie histoire,
04:07 comme "La Veu", par exemple, ou comme d'autres qui vous aident, etc.
04:10 Et ça, ça m'intéressait beaucoup,
04:12 parce que je pouvais, mes émotions,
04:14 les transmettre aux spectateurs à travers un film.
04:17 C'était ça l'idée essentielle, il n'y avait aucun programme,
04:20 et chaque fois j'ai réagi du coup au coup,
04:22 et je dis ce que je pensais.
04:24 - L'immigration, c'est, vous trouverez Eden à l'Ouest.
04:28 Trump, "Betrayed",
04:30 le passé qui ne passe pas,
04:32 et le souvenir des génocides, des crimes contre l'humanité,
04:35 c'est présent.
04:37 Israël-Palestine, "Annaka",
04:39 le premier grand film.
04:41 Les dictatures et les régimes autoritaires,
04:43 la question du chagrin communiste,
04:45 il y a tout ça dans le cinéma de Casta.
04:47 Le capitalisme, la crise de l'Europe,
04:50 il n'a loupé aucun des grands sujets.
04:52 - Cette année, les tracts jetés par avion
04:56 parlent à nos paysans d'une autre sorte de mildieu idéologique
05:00 qui commence à faire ses ravages dans notre pays.
05:03 Cette nouvelle variante, plus diffuse, plus insidieuse,
05:07 c'est un ennemi sournois
05:09 qui s'éloigne de plus en plus de Dieu et de la Couronne.
05:12 C'est contre cet ennemi tout particulièrement
05:15 que portera notre effort préventif.
05:17 - Si on pourrait prendre un exemple de nos jours,
05:20 on pourrait dire que c'est un cinéma qui pense à l'Ukraine,
05:23 mais qui pense à la Palestine en même temps.
05:25 Il n'évacue aucune des questions.
05:27 Il ne se dit pas "parce qu'il y a une cause, je vais oublier l'autre".
05:31 Et d'ailleurs, on pourrait dire
05:34 le coup de cymbale qui le rend très connu dans le monde entier,
05:38 c'est Z, un coup d'État militaire
05:42 soutenu par les États-Unis d'Amérique,
05:45 dans un pays capitaliste, la Grèce,
05:47 et puis l'aveu, un procès tout à fait digne de l'Inquisition
05:54 dans un pays socialiste soutenu par l'Union soviétique.
05:58 Donc il tient les deux bouts.
06:00 Il nous dit quelque chose pour aujourd'hui.
06:02 Il ne faut pas être borgne. Il ne faut pas penser que d'un côté.
06:05 - Quelles étaient vos dispositions vis-à-vis du peuple travailleur ?
06:10 - J'étais indifférent aux intérêts du peuple travailleur.
06:29 Je n'ai jamais été lié.
06:31 L'aveu, c'est l'histoire du stalinisme,
06:33 c'est l'histoire des procès staliniens
06:36 avec un procès en Tchécoslovaquie,
06:38 des gens qui sont prisonniers de leur croyance,
06:40 qui avouent des crimes imaginaires.
06:42 Mais en fait, le propos, il est d'aujourd'hui.
06:45 Penser contre soi-même, ne pas être prisonnier de son préjugé,
06:49 de sa communauté, être capable de s'élever,
06:53 être capable de ne pas être indifférent au sort de l'autre,
06:57 c'est un propos d'aujourd'hui.
06:59 - Gustave Ambrasse, dans "Aide", vous dénonciez le fascisme,
07:03 le colonel grec. Dans "La Veuille", vous dénoncez le stalinisme.
07:07 Est-ce que vous ne croyez pas que c'est un coup à droite
07:10 et maintenant un coup à gauche ?
07:12 - Puisque vous identifiez, les colonels, le mal avec la droite,
07:17 je dirais que le stalinisme, l'ancien et le nouveau,
07:21 c'est aussi le mal, donc c'est toujours la droite.
07:25 Je ne considère pas cette période,
07:27 en tout cas, je ne considère pas le stalinisme
07:30 comme la gauche, comme le socialisme.
07:33 C'est toujours la droite.
07:36 - Vous êtes un homme de gauche.
07:38 Vous ne croyez pas que la droite va s'emparer de votre film
07:41 pour faire le procès du socialisme ?
07:43 - Je ne pense pas. Je crois que la droite a bien des choses
07:46 à se réprocher. La droite, je ferais mieux de penser
07:49 à la guerre d'Indochine, celle de l'Algérie,
07:52 les Algériens dans la Seine et bien d'autres crasses.
07:58 Donc je crois que c'est un film qui reste quand même
08:01 complètement dans le problème du socialisme
08:06 et je ne crois absolument pas que la droite puisse s'en emparer.
08:10 - Costa, c'est un artisan. Il s'est d'abord fait la main
08:14 avec des films, on pourrait dire, d'action,
08:17 "Compartimentueur", "Un moment de trop".
08:20 Il sait la technique, il sait comment utiliser ça.
08:27 Il est dans l'atelier du cinéaste.
08:30 - On ne peut pas dire "je vais faire un film grand public".
08:33 Il faut le rendre facile, accessible au public.
08:36 C'est tout. Après, il arrive ce qu'il arrive.
08:38 Le public, parfois, a envie de voir, ou il n'a pas envie de voir.
08:41 Mais il faut le rendre accessible et éviter surtout
08:44 de le rendre obtu et trop explicatif parce que là,
08:47 les gens s'y perdent. Comme j'ai mis "Père moi"
08:50 parfois dans certains films que j'aime et puis à la sortie,
08:53 je ne suis pas très heureux. Il est important que les gens
08:56 comprennent le film et après, ils pensent ce qu'ils pensent.
08:59 ♪ ♪ ♪
09:05 - J'ai entendu ce mot-là qui disait "laissez-le"
09:08 en le reprenant dans un instant.
09:10 On m'a laissé par terre et j'ai eu une vision merveilleuse.
09:13 Je suis à Monte-Carlo où je n'étais jamais allé,
09:16 sur une plage très belle.
09:18 ♪ ♪ ♪
09:22 - Que ça gaverasse, pour moi, notre raconteur.
09:25 Il n'accepterait pas cette comparaison.
09:27 Mais vous savez, il est grec, Konstantinos Gavras.
09:31 Et l'histoire, elle vient de Grèce, c'est Hérodote.
09:35 Le premier raconteur, c'est Hérodote. Il est grec.
09:38 Et il nous raconte notre histoire.
09:40 C'est ce qu'il fait avec l'art le plus populaire,
09:44 le plus accessible qui est le cinéma.
09:46 - C'est quand même une responsabilité énorme.
09:49 C'est le cinéma qui est le raconteur.
09:51 Si on arrive à mettre une image, c'est qu'on ressent.
09:54 En parole, je ne suis pas un raconteur.
09:56 Je suis un mauvais raconteur même.
09:58 Mais le cinéma permet, avec des images, des plans,
10:01 le montage permet de raconter beaucoup de choses.
10:05 - Un grand merci à Kostas Gavras, Edoui Plenel
10:08 et la productrice Michèle Rey Gavras,
10:10 ainsi qu'aux équipes de Cannes Classics,
10:12 pour cet entretien.
10:13 - Vous avez de la chance, vous finirez tout de même sur la potence.
10:17 Votre peuple sera vengé.
10:19 ♪ ♪ ♪
10:23 - "La nuit sans lune", 1943, est l'adaptation
10:26 du roman "Lune noire" de John Steinbeck
10:29 par Nonnally Johnson, déjà auteur du scénario
10:31 "Des raisins de la colère" de John Ford.
10:33 Réalisée en pleine guerre, "La nuit sans lune" raconte
10:36 l'histoire d'un village minier en Norvège
10:38 qui lutte contre l'occupation allemande.
10:40 Un colonel allemand, Cédric Hardwick,
10:42 tente de persuader les habitants de coopérer en vain.
10:46 ♪ ♪ ♪
10:49 - What's your name?
10:51 ♪ ♪ ♪
10:53 - I've got a little girl back home too.
10:56 Just about your age.
10:58 But her hair is light.
11:00 Almost yellow.
11:03 Won't you tell me your name?
11:05 My little girl...
11:07 - Didn't you hear the soldier ask your name?
11:09 - Her name is Kari.
11:10 - Is the child deaf or simple?
11:12 - No, but... - Then let her answer.
11:14 ♪ ♪ ♪
11:16 - Answer the man, darling.
11:18 Tell the soldier your name.
11:20 Kari, do you hear me?
11:23 Tell the soldier your name.
11:25 ♪ ♪ ♪
11:30 - In Germany, children are better trained.
11:34 Or perhaps there is some influence
11:36 in your particular home that has affected the child.
11:39 Now listen to me!
11:40 All of you!
11:41 There's a limit even to our patience.
11:43 And I warn you now
11:45 that you are doing yourselves no service
11:47 by this persistent attitude of antagonism and surliness
11:50 toward your protectors.
11:52 Either you will correct it, and quickly,
11:55 or we will find some means to impress upon you
11:58 the error of such an attitude.
12:01 You will repeat what I've said
12:03 to your families, to your friends,
12:06 to everyone. You...
12:08 ♪ ♪ ♪
12:26 Étonnante résonance avec la vie de Irving Pitchell,
12:29 qui fut placé sur la liste noire du sénateur McCarthy
12:32 et dont la carrière fut stoppée
12:34 avant de mourir prématurément en 1954.
12:37 Ironie encore, Irving Pitchell, également acteur,
12:40 avait incarné Joseph Stalin pour Michael Curtis
12:43 dans British Agents.
12:45 Mais revenons à Cette nuit sans lune,
12:47 où comment les habitants d'un village occupé
12:49 restent libres en demeurant en accord avec leur conscience,
12:52 alors que leurs occupants sont, eux,
12:54 aliénés au régime nazi.
12:56 Tiré d'une réplique de Macbeth,
12:58 The Moon is Down,
13:00 le titre suggère que les ténèbres ne vont pas tarder
13:02 à tomber sur le royaume, à l'instar des nazis sur le monde.
13:05 Jean-Pierre Melville, cinéaste et résistant,
13:08 fut un des partisans du film qui,
13:10 s'il n'a rien de remarquable formellement,
13:12 emporte par son discours et sa foi.
13:14 Cette foi en l'humain, c'est aussi celle de John Steinbeck.
13:17 Alors pour retrouver le souffle romanesque
13:20 du prix Nobel de littérature au cinéma,
13:22 précipitez-vous sur le cycle John Steinbeck
13:25 avec Les raisins de la colère de John Ford, 1940,
13:28 Lifeboat d'Alfred Hitchcock, 1944,
13:31 et le très rare La nuit sans lune de Irving Pitchell, 1943,
13:35 actuellement sur Ciné+ Classique
13:37 et à tout moment sur My Canal.
13:39 Leila Olivesi est chef d'orchestre et pianiste de jazz.
13:49 Entre plusieurs albums et de nombreux concerts,
13:51 elle est également autrice d'un travail de musicologie
13:54 dont une publication autour du rôle du piano
13:57 dans l'orchestre de Duke Ellington.
13:59 Sa mélodie du bonheur explore justement l'œuvre du Duke
14:02 avec l'une de ses compositions pour le 7e art,
14:05 Autopsie d'un meurtre d'Otto Preminger.
14:07 Aujourd'hui, ça fait 65 ans que
14:19 Anatomy of a Murder d'Otto Preminger est sorti au cinéma
14:23 et ça demeure, je pense, jusqu'à présent
14:25 un des meilleurs films de procès.
14:27 Ce film est vraiment illuminé aussi par la musique
14:30 de Duke Ellington qui a écrit la bande originale du film
14:34 à une époque où c'était très très rare
14:37 d'avoir des artistes afro-américains
14:39 qui écrivent des musiques de film.
14:41 Et donc c'était vraiment le premier artiste afro-américain
14:44 à signer une bande originale de film de ce calibre.
14:55 Cette musique a été enregistrée par l'orchestre d'Ellington.
14:59 Donc c'est un big band, à peu près 17 personnes.
15:03 Et il y a pas mal de passages de piano solo,
15:07 il y a des passages aussi en plus petite formation,
15:10 notamment certains passages avec clarinette basse,
15:14 clarinette où on entend juste deux instruments.
15:17 Donc c'est assez varié au niveau des timbres.
15:19 Et Billy Strayhorn joue aussi du Celesta
15:22 dans un des morceaux du film.
15:25 (musique)
15:27 Ellington, à chaque fois qu'il est apparu à l'écran pratiquement,
15:35 il était toujours dans son propre rôle.
15:37 Et Otto Preminger avait insisté pour qu'il apparaisse à l'image.
15:41 Donc on le voit jouer son propre rôle dans un lieu
15:45 que James Stewart aime bien, où il aime bien sortir.
15:48 Il y a un groupe de jazz qui joue, donc on voit Ellington jouer.
15:51 James Stewart s'assoit à côté d'Ellington,
15:53 ils font même un petit peu le buff, ils jamment tous les deux.
15:56 Ellington a deux phrases à dire, mais il les dit quand même.
16:00 Et en fait cette scène a valu une censure extrêmement dure
16:05 de la part de l'Afrique du Sud,
16:07 où il y avait encore l'apartheid à l'époque.
16:10 Ils ont demandé à Otto Preminger de couper la scène
16:13 et Otto Preminger a refusé.
16:15 Donc ce film n'a pas été diffusé là-bas à l'époque.
16:18 (musique)
16:20 Hey, you're not splitting the scene man,
16:22 I mean you're not cutting out.
16:24 Ellington, pendant les quelques jours qui ont précédé l'enregistrement,
16:28 est allé sur le tournage.
16:30 Il s'est dit qu'au moment où il a vu l'actrice,
16:32 le thème qu'il avait composé pour elle,
16:35 lui est allé comme un gant et que c'était vraiment parfait comme musique.
16:38 Donc ça c'est le thème qui s'appelle "Flirty Bird".
16:40 Et ensuite il lui a fait écouter la musique
16:43 et il lui a dit "Voilà, ça c'est toi".
16:45 Et elle a dit "Oh yes, that's me".
16:48 (rires)
16:50 Donc ça lui a beaucoup plu et il était ravi.
16:52 (musique)
17:17 Il utilise la section de saxophone à la fois pour accompagner la mélodie
17:21 et en même temps pour faire tout ce qui est background, dans les graves.
17:26 Et quand on entend la musique, on ne se rend pas compte
17:28 que c'est les mêmes personnes qui jouent ces deux moments de la musique.
17:32 La mélodie principale est jouée par la trompette.
17:35 (musique)
17:45 Il y a tous les saxophones qui accompagnent en dessous de la trompette
17:49 avec des jolis voicings.
17:51 Au ralenti ça donne ça.
17:53 (musique)
17:55 On entend bien toute la couleur très douce et veloutée des saxophones.
18:02 Et ensuite ils se retrouvent dans le grave et ils font aussi les réponses.
18:05 Comme ceci.
18:06 (musique)
18:08 Et ensuite ils reviennent dans l'aigu pour réaccompagner la trompette
18:13 dans une forme de question-réponse.
18:15 (musique)
18:17 Accompagnée par les saxes, ça donne ça.
18:20 (musique)
18:22 Et les saxophones reviennent dans le grave
18:27 pour redonner un petit peu de velouté et ça fait comme ça.
18:30 (musique)
18:33 (musique)
18:59 Ellington a composé cette musique au cours d'un séjour à Los Angeles.
19:04 Il en a gardé un souvenir extrêmement agréable.
19:07 Il a dit que c'était un peu comme des vacances.
19:09 Pendant deux semaines, ils avaient un appartement gigantesque avec Billy Strayhorn.
19:13 Puisque d'habitude, Ellington était tout le temps en tournée ou en studio.
19:17 En fait, il travaillait 50 semaines par an non-stop avec son orchestre.
19:22 Et donc là, c'était vraiment très inhabituel pour lui.
19:25 Un jour, un gars du studio est arrivé et leur dit
19:27 "Monsieur Ellington, vous savez, on enregistre dans deux jours."
19:31 Et donc Ellington raconte, ça nous laissait 48 heures pour composer la musique du film.
19:36 Et finalement, on a pas mal travaillé puisqu'on a eu un Oscar.
19:40 Il faut vite vous replonger dans l'oeuvre de Duke Ellington
19:43 et votre viva vous recommande chaudement "Astra", le dernier album en date de Leila Olivesi.
19:48 (musique)
19:56 Il y a 60 ans pile, les parapluies de Cherbourg recevaient la Palme d'Or au Festival de Cannes.
20:01 Et pour fêter cet anniversaire, votre viva a discuté de ce chef-d'oeuvre intemporel de Jacques Demy
20:06 en compagnie de sa fille adoptive, Rosalie Varda.
20:09 Retour sur un classique qui ne vieillit pas.
20:11 (musique)
20:14 (musique)
20:16 Je dirais que c'est un film qui est un peu comme une Madeleine de Proust pour beaucoup de personnes.
20:32 C'était hors mode au moment où le film est sorti
20:36 puisque c'était quand même assez culotté et radical de faire un film entièrement chanté.
20:42 Et il a traversé, je pense, les époques parce que justement, il n'y a pas vraiment de référence.
20:47 Donc, où on adhère, où on n'adhère pas, mais quand on adhère, c'est quelque chose qu'on aime toute sa vie.
20:54 (musique)
20:56 (musique)
20:58 Il y a très peu de films qui ont parlé de la guerre d'Algérie au moment de la guerre d'Algérie.
21:23 C'est-à-dire qu'on a peu remarqué ça à la sortie du film.
21:26 Et aujourd'hui, avec le recul, on se rend compte que finalement, on oublie.
21:31 Parce qu'on voit du film simplement l'histoire d'amour.
21:35 Et on oublie un tout petit peu toute la partie beaucoup plus ancrée dans son époque
21:42 entre la bourgeoisie de province, la guerre d'Algérie, le camp d'Iraton,
21:48 le problème de tomber enceinte et de ne pas avorter, de ne pas pouvoir avorter, de se marier.
21:55 C'est quand même des thèmes qui sont abordés dans le film.
21:59 Il y a eu toute une enquête par une historienne du cinéma
22:03 qui a écrit tout un long article sur le fait qu'elle pensait que Jacques Demy faisait un cinéma féministe.
22:10 C'est très intéressant comme angle de vue.
22:13 Mais je ne pourrai jamais vivre sans toi
22:22 Je ne pourrai pas, ne pas, pas
22:27 J'amourais, je te cacherais
22:33 Et je te garderais
22:37 Mais mon amour ne me quitte pas
22:43 Pour Jacques Demy, cette Palme d'or a changé sa vie.
22:47 Ça a changé aussi la vie de Michel Legrand.
22:49 Ça a fait sa carrière américaine.
22:51 Ça a été un énorme succès au Japon, en Amérique du Sud.
22:56 C'est extraordinaire.
22:58 Aux États-Unis, ils ont eu cinq nominations aux Oscars.
23:02 Une nomination au Golden Globe comme meilleur film étranger.
23:06 Et l'année d'après, il a eu encore une nomination aux Oscars pour la meilleure chanson.
23:11 Mon amour, je t'aime, je t'aime, je t'aime
23:20 En 90, quand il est mort, Jacques Demy, ses films étaient au purgatoire.
23:25 C'est-à-dire que ses films étaient considérés comme ringards, démodés,
23:30 comédie musicale, trois petits points comme ça.
23:35 C'est une nouvelle génération de journalistes qui n'avaient pas connu Jacques, quasiment,
23:41 qui ont redécouvert le cinéma de Demy quelques années après sa mort
23:47 et qui ont recommencé à le mettre en avant.
23:50 Il inspire des metteurs en scène très différents, de Quentin Tarantino à Damien Chazelle,
23:55 même Greta Garoui qui me dit "moi, tous les films de Demy, je connais tout".
24:00 Donc il y a quand même une nouvelle génération qui aime les films de Jacques Demy,
24:05 qui évidemment me touche, puisque le cinéma, c'est quand même aussi du partage.
24:11 Redécouvrez très prochainement les parapluies de Cherbourg de Jacques Demy
24:15 dans une superbe version restaurée grâce à Ciné Tamaris et MK2.
24:19 Et d'ici là, votre viva vous attend, en chantant évidemment,
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24:27 [Générique]