L'Assemblée nationale dissoute par Emmanuel Macron : "Une manière pour lui de maîtriser l'agenda"

  • il y a 3 mois

Visitez notre site :
http://www.france24.com

Rejoignez nous sur Facebook
https://www.facebook.com/FRANCE24

Suivez nous sur Twitter
https://twitter.com/France24_fr#

Category

🗞
News
Transcript
00:00Christophe Préaut, merci d'être en plateau avec nous. Vous êtes journaliste, directeur de l'excellent site Toute l'Europe Médias.
00:06La décision annoncée hier unilatérale d'Emmanuel Macron d'y soudre l'Assemblée a quelque peu éclipsé la soirée électorale.
00:13D'abord, est-ce que ça a eu un écho fort dans les autres pays européens ? Est-ce que ça a été repris et commenté ?
00:18Bien sûr. Alors ça a eu forcément un écho fort parce que la France est un pays leader et important au sein de l'Union européenne.
00:24Et Emmanuel Macron, tout le monde connaît ses convictions concernant l'UE et la force que l'UE doit avoir.
00:31Donc forcément... Alors personne ne s'attendait à ce qu'il y ait une dissolution de l'Assemblée nationale.
00:38Mais c'est pour lui, c'est pour le président de la République la manière de maîtriser toujours l'agenda,
00:43de garder la main, je pense, sur les prochaines étapes et puis aussi peut-être de pouvoir, malgré tout,
00:50vis-à-vis de ses autres interlocuteurs européens, puisqu'il a fait lui aussi quand même sa bataille de lutte contre l'extrême droite.
00:56Et la plus forte percée de l'extrême droite au sein des 27 aujourd'hui lors des élections européennes, c'est quand même en France.
01:03Donc c'est peut-être une manière pour lui aussi, comme je le disais, de reprendre la main et de pouvoir rediscuter aussi avec ses 26 homologues sur un autre pied.
01:13Voilà, un coup de poker pour se relancer.
01:15En Allemagne, Christophe Préot, le chancelier Scholl, s'enregistre la pire défaite de l'histoire du SPD.
01:21Son parti, 14% derrière l'extrême droite de l'AFD.
01:25Pourtant, là-bas, pas d'élection législative anticipée.
01:28On n'est pas dans la même configuration ?
01:30Non, on n'est pas dans la même configuration.
01:31L'Allemagne, c'est un État fédéral.
01:33Ce n'est pas un État comme chez nous, semi-présidentiel.
01:36Et puis, c'est la CDU-CSU qui est arrivée en tête en Allemagne avec 30%.
01:42Donc on n'est vraiment pas dans le même contexte.
01:44Néanmoins, évidemment, Olaf Scholz et sa coalition, il est extrêmement fragilisé.
01:48Ça, c'est une évidence.
01:50Donc aujourd'hui, on a peut-être quand même les deux États forts, le couple franco-allemand qui est quand même fragilisé sur ses bases.
01:58Donc c'est une interrogation aujourd'hui en ce qui concerne l'équilibre politique au sein de l'Union européenne.
02:05Continuons la discussion en regardant la configuration en image du nouvel hémicycle qui se dessine.
02:11La droite du PPE est en position de force.
02:14L'extrême droite progresse au détriment des centristes de Renew et des Verts.
02:20Valérie Astruc nous donne son commentaire et on retrouve donc Christophe Préaut.
02:24La victoire du RN à la une de nombreux médias européens.
02:28Emmanuel Macron a décidé, à l'imperceptible, de dissoudre l'Assemblée nationale.
02:33Ce n'est pas rien.
02:35C'est un tremblement de terre politique en France.
02:37Séisme politique.
02:38Macron dissout le Parlement.
02:41Au même moment, en Europe, trois leaders nationalistes célèbrent leur victoire.
02:45La post-fasciste italienne Giorgia Meloni, le patron du RN,
02:49et l'extrême droite autrichienne, tous arrivés en tête dans leur pays.
02:55Je me réjouis de pouvoir compter sur un groupe patriotique au Parlement européen.
03:00C'est une force et un enthousiasme qu'on va utiliser assurément et transformer en carburant.
03:09Ces forces d'extrême droite totaliseraient environ 176 sièges.
03:12Mais elles sont loin d'être unies.
03:14A l'échelle européenne, leur poussée est moins forte qu'en France.
03:18L'autre vainqueur, c'est la droite traditionnelle, le PPE,
03:21qui conforte sa position de premier groupe.
03:24Sa tête de liste, Ursula von der Leyen,
03:26espère se maintenir présidente de la Commission, mais avertie.
03:30On va construire un rempart contre les extrêmes.
03:34De gauche comme de droite.
03:36On va les stopper, c'est sûr.
03:40L'actuelle majorité composée de la droite, du PS et des libéraux
03:44devrait donc être reconduite, mais une majorité fragile
03:47qui sera forcément sous pression des droits radicals.
03:51Il y a un petit risque sur certains dossiers, notamment les migrations,
03:55d'un glissement vers la droite, et donc d'une politique plus sévère
04:01et d'une Europe plus fermée.
04:03Autre leçon, le couple franco-allemand sort très affaibli.
04:06Des routes d'Emmanuel Macron comme du chancelier allemand
04:09qui auront du mal à imposer leur vue sur la scène européenne.
04:13Christophe Préaut, pas de gros changements dans l'hémicycle,
04:16mais donc un glissement assez net vers la droite,
04:19on le voit dans ce camembert.
04:21Oui, le Parlement européen muscle sa droite, si on peut dire.
04:24A la fois le PPE, qui arrive en tête dans de nombreux pays
04:28au sein de l'Union Européenne.
04:30Enfin, je dis le PPE, les partis affiliés aux groupes politiques
04:34de droite conservatrice et républicaine au sein du Parlement européen.
04:38Et puis aussi l'extrême droite.
04:40Mais il n'y a pas eu le rat de marée qui était annoncé,
04:44comme certains l'espéraient et d'autres qui essayaient de faire peur.
04:48Il n'y a pas eu ce rat de marée.
04:50On l'a dit, Georgia Meloni, l'extrême droite autrichienne.
04:53L'extrême droite ici en France, bien sûr.
04:56La France et la FD aussi.
04:58Mais en Pologne, le Parti droit et justice est en net recul.
05:03Le fidège de Viktor Orban en Hongrie est aussi en recul.
05:08Et puis, par exemple, aux Pays-Bas,
05:10Gerd Wilder, qui a remporté législative en novembre,
05:13finalement, il n'arrive pas en tête aux élections européennes.
05:17C'est la coalition verte et socialiste menée par Franz Niemann,
05:21ancien vice-président de la Commission européenne, qui s'impose.
05:24Donc, il y a à la fois dans certains pays une forte poussée,
05:28et puis dans d'autres aussi du recul,
05:30ce qui fait que l'extrême droite gagne des sièges au Parlement européen,
05:35mais pas tant que cela.
05:37Et donc, pas de pouvoir de blocage.
05:39C'est ce qui était redouté aussi par les pro-européens avant le 9 juin.
05:43Aujourd'hui, dans les estimations et les projections,
05:46on ne peut pas dire qu'il y aura des situations de blocage.
05:50Ce n'est pas possible aujourd'hui.
05:52Si on regarde le Parlement européen tel qu'il se présente aujourd'hui dans l'hémicycle,
05:58entre le PPE, les libéraux, les socialistes et les démocrates,
06:03on est à un petit peu plus de 400 eurodéputés.
06:06Je ne compte pas les verts, qui seront peut-être aussi dans cette grande,
06:10je ne vais pas dire coalition, mais force qui construise l'Europe,
06:14à plus de 450, 460 sur 720 eurodéputés, où la majorité est à 361.
06:20Donc, il reste encore une marge assez large.
06:24Les verts qui ratent la marche nettement, ils obtiendraient 52 sièges.
06:29C'est beaucoup moins qu'en 2019, notamment en France, en Allemagne aussi.
06:34Le pacte vert à peser, est-ce qu'il est en péril aujourd'hui ?
06:37Les verts sont les grands perdants de cette élection.
06:40Et avec les libéraux aussi, chacun va perdre au moins une vingtaine de sièges.
06:47Pour les verts, en fait, ce qui a joué contre eux,
06:50c'est qu'aujourd'hui, la question de la transition écologiste,
06:53elle est assez partagée par tous les partis,
06:55ce qui fait que tout le monde s'en est bien emparé.
06:57Et puis aussi, il y a eu sans doute quelques discours un petit peu extrêmes,
07:00qui fait qu'on est passé un peu d'une écologie transition nécessaire
07:05à une sorte d'écologie punitive.
07:07Et sans doute que ça a fait peur à de nombreux électeurs.
07:10Et puis, on a aussi peut-être la suite des mouvements des agriculteurs
07:15qui ont enflammé l'Europe, quand même.
07:17Vous vous souvenez, en février et mars.
07:19Et la commission, avec les États membres, ont fait un petit recul aussi sur le pacte vert.
07:25Un petit et un grand recul.
07:27Arrêtons-nous, si vous le voulez bien, Christophe Préot, sur une femme,
07:31l'italienne Giorgia Meloni, qui s'impose avec près de 29% des voix,
07:37la dirigeante post-fasciste, qui renforce donc sa stature nationale,
07:41mais aussi sur la scène européenne, comme nous l'explique Léo Péchard.
07:45Elle arrive sur scène sous innovation de ses militants.
07:49Giorgia Meloni a remporté son pari.
07:52La liste fratellite d'Italia, dont elle a pris la tête, arrive en première position dans son pays.
07:57Avec 28,6%, la chef du gouvernement augmente même son score de 2 points
08:02par rapport aux législatives de 2022.
08:05Ce qui se passe aujourd'hui est à la fois une satisfaction et une grande responsabilité.
08:11Nous devons être conscients de cette responsabilité.
08:17Giorgia Meloni est la seule chef de l'exécutif des pays d'Europe de l'Ouest à sortir renforcée de ce scrutin.
08:24C'est un gouvernement qui n'a pas perdu le consensus, le seul gouvernement, je pense, en Europe.
08:30C'est une situation très stable par rapport à celle des Français ou des Allemands, où c'est plus compliqué.
08:38Giorgia Meloni restera première ministre d'Italie et ne siègera pas au Parlement.
08:43Mais son score permet de renforcer son groupe dans l'hémicycle strasbourgeois, celui des conservateurs et réformistes européens.
08:51Elle compte aussi avoir une influence sur les politiques de la Commission, notamment en termes d'immigration.
08:57La chef de gouvernement a aussi reçu des appels à fusionner sa formation avec l'autre groupe d'extrême droite au Parlement,
09:03Identité et démocratie, où siège le Rassemblement national.
09:07Mais les deux forces restent éloignées sur plusieurs sujets, notamment sur la guerre en Ukraine.
09:12Meloni affiche ouvertement son soutien à l'OTAN et à l'Ukraine, contrairement aux autres parlementaires d'extrême droite.
09:19Et avec nous, Christophe Préaut, directeur de toute l'Europe Média.
09:23Giorgia Meloni qui s'impose donc comme une actrice incontournable, vous diriez, du nouveau Parlement européen et du Conseil européen.
09:30En tout cas, dans les grands pays de l'Union européenne, c'est vraiment le gouvernement en place qui a renforcé ses positions.
09:37Je dirais que c'est peut-être quasiment la seule.
09:40Partout ailleurs, on le disait, en Allemagne où Olaf Scholz est en difficulté.
09:44En France, Emmanuel Macron.
09:46En Espagne même, c'est la droite qui s'est imposée sur ces élections européennes, alors que c'est la gauche, Pedro Sanchez, qui a eu le pouvoir.
09:53Donc évidemment, elle renforce sa position.
09:57Alors est-ce qu'elle a l'ambition, vraisemblablement, d'essayer de faire une grande force de droite au sein du Parlement européen ?
10:03Je pense que ça va être difficile.
10:05C'est-à-dire entre le PPE, donc le Parti conservateur, l'ECR et ID ?
10:10Alors ça, évidemment. Mais je pense que ça va être très difficile.
10:14Parce qu'il y a quand même beaucoup de... D'abord sur les questions d'État de droit, je pense, avec le PPE.
10:19C'est ce qui avait suscité le retrait du fidège du PPE.
10:25Et puis aussi entre CRE, les conservateurs réformistes européens, et ID, où siège le RN.
10:32Il y a quand même des divergences fortes, notamment relatives à la guerre en Ukraine,
10:37où CRE sont plutôt atlantistes, l'OTAN, les États-Unis.
10:40Là où ID sont plutôt russophiles.
10:43Donc pour rapprocher, et sur les sujets migratoires aussi, pour rapprocher tout le monde, je pense que ça va être très compliqué.
10:50Donc vous n'y croyez pas vraiment.
10:52Et on l'a entendu, Ursula von der Leyen, finalement, presque abandonner son projet d'être soutenue par Georgia Melanie.
10:58Parce que le PPE, les sociodémocrates et les centristes devraient être suffisants, peut-être avec les Verts aussi ?
11:05Ursula von der Leyen, elle a eu une ambition, c'est d'être de nouveau présidente de la Commission européenne.
11:10Donc à un moment, elle a tendu la main vers les conservateurs réformistes européens.
11:15Elle a vu un peu une levée de bouclier au sein de son groupe du PPE.
11:22Donc aujourd'hui, le PPE étant renforcé, elle fait un petit peu marche arrière.
11:26Mais je pense que les discussions vont s'engager dès maintenant.
11:31Parce que nous, en France, on parle beaucoup de dissolution de l'Assemblée nationale.
11:34Mais au sein du Parlement européen, les groupes politiques, maintenant, vont se réunir.
11:37Il y a aussi, il faut quand même le dire, sur ces 720 eurodéputés, il y a quand même encore beaucoup de non-inscrits.
11:43Et aussi beaucoup de députés qui ne sont encore rejoints à aucun groupe.
11:49Et des députés de poids. Les hongrois d'Orban, l'AFD aussi, qui a été exclu par Marine Le Pen.
11:5615 eurodéputés pour l'AFD.
11:58Donc il va sans doute y avoir encore une petite recomposition.
12:02Donc c'est à regarder avec attention.
12:06Et puis, on a un calendrier, comme je le dis, les groupes politiques se réunissent aujourd'hui, en ce moment,
12:10pour essayer de négocier, justement, des accords.
12:13Et puis, on a un Conseil européen, le 27 et 28 juin.
12:17Deux jours avant les premiers tours de législatives chez nous, ici, en France.
12:22Donc il y a quand même encore beaucoup d'étapes.
12:24Il va falloir élire un nouveau président du Parlement européen.
12:27Un nouveau président ou présidente de la Commission européenne.
12:29Donc il y a beaucoup de choses qui se mettent en place.
12:32Avec quel sujet majeur attendent ce nouveau mandat ?
12:36La guerre en Ukraine, bien sûr.
12:38Les questions écologiques, la défense ?
12:41Alors, la guerre en Ukraine, c'est une évidence.
12:45Les questions écologiques, surtout écologistes.
12:48Est-ce que le pacte vert, encore ou stop ?
12:52Ça, c'est une question.
12:53On a bien vu, au moment des élections, que Ursula von der Leyen, comme on l'a dit tout à l'heure,
12:57a mis un petit peu le frein, pour des raisons, sans doute, électorales.
13:01Les questions migratoires, même si le pacte asile-immigration a été signé,
13:06tous les sujets ne sont pas complètement résolus.
13:08Il y a tout ce qui concerne aussi la protection de l'Union européenne,
13:11en ce qui concerne la problématique économique, la relance industrielle,
13:14comment l'Europe va agir entre la Chine et les États-Unis.
13:17Il y a quand même encore beaucoup de sujets sur la table.
13:19Ça, c'est une évidence.
13:20Vous reviendrez nous en parler.
13:21Merci beaucoup, Christophe Préot, journaliste et donc directeur de toute l'Europe sur Internet.
13:26Merci encore.

Recommandée