Pascal Praud et vous - Rugbymen français inculpés de viol en Argentine : leur avocat dénonce la «déflagration atomique» de la médiatisation de l'affaire

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00:00Antoine Vey est avec nous, c'est l'avocat des deux joueurs du XV de France, Oscar Gégou et Hugo Auradou.
00:06Ils nous racontent précisément ce qui s'est passé depuis le 6 et 7 juillet.
00:10Vous les avez eus de nombreuses fois, je l'imagine en visio.
00:13Dans quel état d'esprit aujourd'hui sont-ils ?
00:15Depuis le début, de toute façon, ils sont combattifs et ils ont la chance, si vous voulez, d'être très entourés
00:21au niveau des clubs, au niveau de leur famille, par des gens qui n'ont jamais douté de leur innocence une seule seconde.
00:26Donc ça, c'est déjà différent de beaucoup de dossiers dans lesquels la simple accusation fait qu'on vous fragilise énormément
00:33la famille, le travail... Donc là, ils ont été soutenus et ils ont évidemment toujours clamé leur innocence de manière très claire
00:42et surtout, leur version colle parfaitement avec les éléments objectifs qu'on a recueillis petit à petit.
00:47Donc ça les a quand même confortés que, d'une part, ils disaient la vérité, qu'elle était établie par des éléments objectifs
00:54et heureusement qu'il y a ces éléments. Je veux dire, s'il n'y a pas de vidéosurveillance, s'il n'y a pas de téléphone portable,
00:58s'il n'y a pas de témoignages, vous comprenez que dans ces dossiers-là, la présomption d'innocence, ça ne veut plus dire grand-chose.
01:04Donc ils ont été là et puis maintenant, comme c'est des sportifs, si vous voulez, il y a quand même le corps, la préparation.
01:11C'est des sportifs qui devaient reprendre la saison maintenant. Donc maintenant, ils vivent un petit peu quelque chose qui est difficile pour eux,
01:17qui est l'idée de savoir est-ce que ça va se déboucler ou pas et comment le faire. Mais c'est des gens qui ont un très gros mental
01:22et qui ne se sont pas disputés parce que, vous savez, ils sont aussi confinés et le confinement, moi, j'ai connu ça dans d'autres affaires avec deux personnes,
01:30fait qu'après, on refait tout le match justement et voilà. Donc ils sont restés solidaires. Tout le monde autour d'eux est resté solidaire
01:36et c'est pour ça qu'on a à cœur maintenant que le dossier se termine et qu'il avance. Il n'est pas terminé. Il n'est pas terminé.
01:41Et une des raisons pour lesquelles on intervient aussi aujourd'hui, c'est qu'on est dans une phase très sensible où on espère un classement
01:46et il faut que les choses se fassent avec le respect des institutions et des autorités judiciaires.
01:52Il ne faut pas faire de pression. Ce qu'on a vu là depuis deux semaines, c'est de la pression et de l'instrumentalisation des médias
01:58pour essayer de faire en sorte que la chose judiciaire déraille. Donc il faut faire ce qu'on a fait depuis le début.
02:04Là, vous parlez du camp adverse et notamment de ces photos qui ont été publiées hier dans un magazine argentin sans doute.
02:11On n'a pas parlé d'ailleurs de l'opinion publique argentine et du traitement de l'affaire en Argentine.
02:16Tous les pays sont très différents et en Argentine, c'est un pays qui, d'une certaine façon, ressemble un peu plus aux États-Unis,
02:23mais qui a aussi cette dominante d'Amérique latine dans laquelle le droit des femmes est très protégé dans la loi.
02:28C'est par exemple en Amérique latine qu'on reconnaît le terme féminicide, qu'en France, on ne reconnaît pas.
02:33Donc il y a effectivement un courant très fort en faveur du droit des femmes.
02:37Et le problème, c'est qu'on a l'impression qu'en défendant des innocents, on se trouve en contradiction
02:44avec cette volonté de défendre le droit des femmes, ce qui est complètement grotesque.
02:49Donc le débat judiciaire, c'est impartial, c'est à charger, à décharger.
02:53Les droits de la plaignante sont les mêmes que les droits des mises en cause.
02:56Et c'est vrai que depuis le début, le jour 1, l'avocat de la plaignante est monté au créneau médiatique,
03:02à mon avis en donnant même une version aux médias avant même que la version soit donnée à la justice.
03:07Et ça, on le voit dans les dossiers en France et c'est vraiment très négatif.
03:10Ça détruit les gens, ça ne donne pas à l'opinion publique une version objective des choses.
03:15Il faut toujours avoir une opinion avant même que l'on sache ce qui s'est passé.
03:18Et ça peut faire dérailler la justice, ça peut faire condamner des innocents,
03:22ou ça peut au contraire enrayer les droits des victimes.
03:24Est-ce que vous avez des précisions à nous donner sur la tentative de suicide de la plaignante ?
03:31Déjà, moi je suis avocat de la défense, donc je ne suis pas là pour juger des éléments par rapport à cette plaignante.
03:37Est-ce qu'ils sont à votre disposition ?
03:39Non, ils ne sont pas à ma disposition.
03:41Je n'ai pas d'élément objectif qui vise à savoir ce qui s'est passé.
03:44Ce que j'ai, c'est une lettre.
03:45En fait, la question c'est si la tentative de suicide,
03:49alors j'imagine il y a quelques degrés, si elle n'est pas en état de pouvoir comparaître,
03:56ou en tout cas de venir devant le tribunal,
03:58est-ce que les deux rugbymans sont contraints de rester plus longtemps en Argentine ?
04:03C'est ça qu'il y a derrière ma question.
04:04Non, pas forcément.
04:05D'abord, il faut évaluer, si c'était cet élément qui avait expliqué un report,
04:11ça serait assez audible, mais ça fait déjà trois fois qu'on attend,
04:13et avant ce n'était pas une tentative de suicide,
04:16c'était un problème gastrique et avant c'était quelque chose d'autre.
04:20Ça peut être le cas qu'une personne soit tellement marquée qu'elle ne puisse pas se présenter à une expertise.
04:24Dans ce cas-là, la justice le reporte, c'est ce qui est en train de se passer.
04:27Est-ce que ça auberge la possibilité de retour en France ?
04:29Non, si on estime que les éléments objectifs qui sont rentrés
04:33ne sont pas de nature à être infirmés par cette expertise qui doit être conduite.
04:36Et nous, on est assez demandeurs de cette expertise,
04:38parce qu'il faut pouvoir expliquer pourquoi une personne irait globalement dire des choses
04:42qui ne se sont pas passées, dans quel contexte, etc.
04:45Si on est innocent, on ne craint pas les éléments de la justice,
04:47et c'est vraiment notre position dans ce dossier.
04:49Ça peut également nous interroger sur le traitement médiatique,
04:52parce qu'effectivement, lorsqu'on a eu cette information, lorsqu'on l'a lue dans les journaux,
04:57sans doute que beaucoup de gens ont pensé que ces deux rugbymans étaient coupables.
05:03Parce qu'aujourd'hui, on est dans un certain climat
05:06qui nous pousse à penser que la parole des femmes est sacrée.
05:13La parole des femmes n'est pas sacrée, bien sûr, elles peuvent mentir.
05:16Il y a des femmes comme des hommes qui peuvent raconter des choses fausses,
05:21et l'avocat que vous êtes, peut-être, doit nous dire à la presse,
05:27et puis à l'opinion publique, d'être peut-être plus vigilants.
05:31Oui, ce qui est clair, c'est qu'on n'est pas dans une époque qui est consolidée.
05:34On a eu forcément une époque où la parole des victimes,
05:37et des femmes, il y a des femmes victimes, il y a des hommes victimes,
05:38mais la parole des victimes n'était pas suffisamment écoutée.
05:41Il y avait effectivement un jeu de pouvoir qui faisait qu'il y avait des gens qui étaient écrasés par le système.
05:46Et puis, sous le vent de ce qui s'est passé notamment aux États-Unis,
05:50on a eu des victimes toutes puissantes.
05:51C'est-à-dire, plus la nécessité de démontrer ce qu'on dit,
05:54le simple fait de le dire le matérialise.
05:56Aujourd'hui, on est dans une période où il faut faire très attention,
05:59parce qu'on voit bien la succession de gens qui ont été innocentés.
06:03Vous savez, il y a le footballeur anglais, enfin, Mandy, qui est français, mais qui a été innocenté.
06:07Bien sûr.
06:07Il y a des acteurs, il y a...
06:08Harry Habitant, l'affaire Harry Habitant est très intéressante,
06:11même si elle n'est pas tout à fait terminée,
06:13il n'empêche qu'elle est en passe de se terminer.
06:16La justice ayant finalement rattrapé un peu ce débat médiatique qui s'est calé,
06:19on commence à avoir des occurrences dans lesquelles les gens sont condamnés,
06:22mais il y a aussi des gens qui ne le sont pas.
06:23Et même quand ils ne le sont pas,
06:25on voit bien qu'ils ne peuvent plus reprendre le fil de leur vie d'avant.
06:28On a un vrai problème de toute façon de régression
06:30quand il y a un mouvement qui se crée.
06:32Celui-là, c'était de libérer la parole des victimes,
06:35le fait de croire les victimes, qui est positif en fait.
06:37Ce n'est pas parce qu'on est avocat de la défense
06:39qu'on ne pense pas que les victimes devraient être entendues.
06:41Et puis, dans le mot victime, il y a mille choses.
06:43Comprenez la femme qui a parlé hier et qui a perdu son mari,
06:46elle est victime, quoi qu'il se passe.
06:47Ce n'est pas la même chose que quelqu'un qui se plainte de quelque chose
06:50qui ne s'est pas produit.
06:51Donc, c'est pour ça qu'on a un mot qui s'appelle plaignant.
06:53Et ça, je pense que la société ne l'a pas encore totalement intégrée
06:57parce qu'elle a voulu épouser cette vague.
07:00Elle n'a pas intégré les dommages collatéraux que ça crée.
07:02Et aujourd'hui, clairement, si on prend la parole,
07:05c'est pour dire qu'on a encore l'espoir que quand ces deux genres vont revenir,
07:08ça ne va pas empêcher la possibilité qu'ils jouent dans leur club,
07:11mais surtout qu'ils soient encore sélectionnés en équipe de France.
07:13Et ça ne va pas remettre en cause la bonne opinion
07:15qu'on pouvait avoir d'eux avant cette soirée.
07:17Dernière chose, c'est une déflagration quand ce type d'affaires arrive.
07:23J'imagine que vous avez peut-être eu les parents au téléphone régulièrement
07:28de ces deux joueurs, Hugo Radou, Oscar Gégou,
07:31peut-être également leur compagne avec qui ils étaient.
07:35Et forcément, c'est une déflagration
07:38et que la vie ne sera pas exactement sans doute comme avant.
07:42Oui, parce qu'il y a une double déflagration.
07:44Il y a le fait de voir rentrer l'autorité judiciaire dans votre vie privée.
07:47Et si c'est légitime, on peut le faire.
07:49Mais si on pense que c'est illégitime, c'est très dur
07:52et il faut pouvoir avoir des avocats pour se battre.
07:54Et puis, il y a la médiatisation qui est une deuxième déflagration,
07:57j'ai envie de dire atomique, parce que du jour au lendemain,
08:00vous ne devenez attaché qu'à l'image qu'on a créée de vous.
08:04Et cette image, elle ne correspond pas.
08:05Mais vous avez des compagnes, peut-être, ces deux joueurs.
08:07Donc forcément, ça pose...
08:08Ils ont une vie privée, ils ont effectivement plein de choses
08:11qui sont finalement les remparts de la vie privée.
08:13Aujourd'hui, ils sont facilement démolis.
08:16Et là, j'ai expérimenté avec ce dossier, mais on le voit de plus en plus.
08:19Vous savez, il y a une presse dite d'investigation,
08:21mais qui n'est pas la presse d'investigation politique.
08:23C'est un autre truc.
08:23C'est ceux qui vont faire les poubelles, les photos, les choses comme ça.
08:26Si elles vous pourchassent, votre vie devient impossible.
08:30Et ça, c'est une autre protection.
08:32C'est pour ça qu'il y a la défense pénale,
08:34mais il y a aussi la protection de la réputation,
08:35qui est quand même un domaine du droit qui doit évoluer.
08:38Bon, et de ce point de vue-là, je ne sais pas leur étape psychologique.
08:42C'est des grands gaillards, ils sont psychologiquement forts,
08:45mais il va falloir leur laisser le temps de revenir.

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