• il y a 2 mois
vilebrequin : le vrai du faux de la vidéo de Pierre CHABRIER
Le 15 août, Pierre Chabrier a publié une vidéo dans laquelle il explique notamment les raisons de la fin de la chaine. Il aborde aussi quelques points de droit du travail.
Transcription
00:00Le 15 août, Pierre Chabrier, un des deux youtubeurs de l'ancienne chaîne Villebrequin,
00:28a publié une vidéo dans laquelle il explique notamment les raisons de la fin de la chaîne.
00:33Il aborde aussi, et ce sera l'objet de la vidéo, quelques points de droit du travail.
00:38J'ai déjà sorti une vidéo à propos de la chaîne Villebrequin,
00:41sur la façon dont les deux acolytes traitaient la sécurité des personnes qu'ils employaient,
00:46et sur les conséquences sociales de l'arrêt de la chaîne sur les contrats de travail.
00:50Pour rappel, la chaîne Villebrequin appartient aux deux associés,
00:53à hauteur de 50% chacun, au travers d'une entreprise qu'ils détiennent.
00:57Pour plus de précision sur ce point, vous pouvez visionner la vidéo d'un comptable
01:01qui a effectué un travail de recherche sur l'entreprise et fournit nombre d'explications.
01:06Sur l'embauche, donc dans la vidéo,
01:09Pierre dit que c'est lui qui a recruté sa copine comme assistante de production.
01:13Je vais vous parler d'une personne, précisément ma copine,
01:16que j'ai ramenée dans cette aventure, non pas parce que c'était ma copine,
01:20pas du tout, elle avait déjà un boulot.
01:22Visiblement, il avait l'habitude de recruter le personnel oeuvrant dans l'équipe,
01:26peut-être d'ailleurs était-ce lui qui s'occupait de cette tâche
01:29et non de manière paritaire avec son associé.
01:32Mais parce que, comme tous les recrutements dans cette société que j'ai fait,
01:36ils étaient motivés par un besoin, alors une recherche précise d'un profil.
01:40Est-ce que le profil de la copine matchait avec celui demandé ?
01:44Et qu'elle remplissait parfaitement le profil qu'on recherchait.
01:47Dans la dynamique dans laquelle nous étions, où nous avions besoin rapidement de ce profil,
01:51j'ai suggéré cette idée, qui a été acceptée.
01:53Et parce que durant toute cette aventure, j'ai pu ramener des profils dans la société
01:57qui étaient pertinents et qui ont été là jusqu'à la fin,
02:00signe du bon casting que j'avais pu faire.
02:02Et je le sais puisque dans mon ancien métier,
02:04j'étais amené à souvent travailler avec de nouvelles personnes que je recrutais.
02:07Et donc ça, c'est une compétence que j'avais.
02:09Revenons au recrutement. Ah ben c'est une chance,
02:12elle remplissait parfaitement le profil recherché.
02:14Quel genre de profil est recherché ?
02:16Assistant de production.
02:18Comment pouvons-nous connaître le profil qui est recherché ?
02:21Déjà en regardant ce qui est dit dans la convention collective applicable.
02:24Quelle est-elle ?
02:25Que dit le registre des sociétés ?
02:27Celui-ci indique que la convention collective appliquée est celle de la production audiovisuelle.
02:31Comme toutes les conventions collectives,
02:33elle est disponible gratuitement sur le site institutionnel Legifrance.
02:37Que dit la convention sur les assistants de production ?
02:40Alors, assistants de production niveau 4 assurent des tâches de production
02:44et ou d'administration d'un programme.
02:46Ce métier fait partie de la filière F,
02:48ce qui a son importance, nous le verrons plus tard.
02:51Le niveau 4 requiert, selon l'article 4.1 de la convention,
02:55une formation initiale baccalauréat.
02:58Et ces emplois ont comme définition
03:00« emploi qui requiert le niveau 4 de l'éducation nationale
03:03ou une expérience professionnelle équivalente
03:06ainsi qu'un degré d'autorité, d'initiative et de responsabilité relativement restreint. »
03:10C'est assez vague.
03:11Voyons les offres d'emploi disponibles.
03:13Dans la première, il convient d'être issu d'une formation
03:16avec une spécialisation dans la production.
03:18Et les députants sont bienvenus.
03:20Il s'agit d'un CDD.
03:21Dans la deuxième offre, pour un poste d'assistant de production adjoint,
03:25il est requis d'avoir été diplômé d'une formation de production
03:28dans les médias ou école de commerce,
03:30de disposer de connaissances administratives, sociales et fiscales de l'audiovisuel.
03:34Et l'annonce précise qu'il s'agit d'un CDDU,
03:37un contrat à durée déterminée dit d'usage.
03:40Sur Indeed, je n'ai trouvé que deux offres d'emploi,
03:42mais beaucoup plus de stages et de contrats d'alternance.
03:46Sur Glassdoor, il y a une autre annonce en CDD également.
03:49Il est demandé d'avoir un bac plus deux minimum.
03:52Un bac plus deux en quoi ? Mystère.
03:54D'avoir une première expérience professionnelle réussie
03:56dans le domaine de la production audiovisuelle.
03:58Il faut maîtriser parfaitement les logiciels du back-office
04:01et les outils informatiques.
04:03Et il faut parler anglais. Bon, très bien.
04:05Et voyons le profil de la dite copine.
04:07Alors, formation CAP coiffure et coiffeur styliste.
04:10Formation hygiène et salubrité pour les tatouages.
04:13Hum, ouais.
04:14Et expérience professionnelle.
04:16Apprentie coiffeuse, contrat en alternance, deux ans, un mois.
04:19Assistante d'éducation dans un collège CDD, temps partiel, huit mois.
04:23Commis de cuisine dans un bar à vin, un an, un mois.
04:27Tâche de sept mois comme chargée de diffusion et régie générale
04:31dans une structure d'organisation de concerts.
04:33Maroquinière dans une fabrique de maroquinerie CDD, six mois.
04:37Animatrice pendant quatre mois d'été
04:39dans une association locale de services publics orientée jeunesse.
04:43Au menu, gestion de projet, technique d'animation, communication,
04:46sans plus de précision.
04:48Puis, deux mois plus tard, elle devient assistante de production audiovisuelle
04:51chez AMP Holding pendant huit mois, jusqu'à juillet 2023,
04:54où elle a pu déployer ses talents professionnels.
04:57Alors, technique d'écoute et de relation à la personne.
05:00Capacité de négociation, planification de projet, préparation de devis.
05:05Oui.
05:07Peut-on reprocher à Pierre d'avoir participé à l'embauche de sa copine
05:10du fait de défauts de formation académique adaptée
05:14ou d'un parcours professionnel zigzaguant
05:16et minoritairement lié à la production audiovisuelle ?
05:19Peut-on le reprocher aux deux associés ?
05:21Pierre a-t-il jeté un œil sur la communication de sa copine
05:24sur les réseaux sociaux au moment de l'embauche et après ?
05:27Cela a peut-être son importance.
05:29Alors, un juge peut-il reprocher à un employeur d'avoir procédé à une embauche
05:33alors que le profil n'est pas les plus brillants ?
05:35Eh bien, pas du tout.
05:36Tout employeur détient le droit fondamental de la liberté d'embauche
05:39ou liberté de contracter avec qui il souhaite
05:41du moment que ce choix n'est pas discriminatoire.
05:44Ce droit fondamental est dérivé du droit de propriété
05:47issu de la Déclaration des droits d'hommes et du citoyen de 1789.
05:51L'entreprise AMP Holding et ses dirigeants
05:54ne sont donc pas fautifs de cette embauche du fait du profil.
05:57Pour entrer un peu plus dans le détail et vous expliquer cette situation au mieux,
06:01pour ne pas prendre de risques et ne pas imposer mon choix,
06:04nous avons décidé de la prendre en CDD.
06:07L'embauche s'est donc faite en CDD pour ne pas prendre de risques.
06:10Mais de quels risques parle-t-on ?
06:12Le risque qu'elle n'ait pas les compétences requises ?
06:14Pour cela, il existe la période d'essai.
06:16L'article L1242-10 du Code du Travail
06:19indique que le CDD peut comporter une période d'essai.
06:22Donc, le recours au CDD comme période d'essai n'est pas valable.
06:25Le motif de recours figure sur le contrat.
06:27Le CDD est un contrat d'exception.
06:29La règle, c'est le CDI.
06:31L'article L1242-2 du Code du Travail précise
06:34quels sont les motifs de recours au CDD autorisés.
06:37Remplacement d'un salarié,
06:39accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise,
06:42emploi à caractère saisonnier ou dans les secteurs d'activité
06:45dans lesquels il est l'usage de recourir au CDD.
06:47Mais attention, un CDD d'usage ne peut avoir pour finalité
06:51de pourvoir durablement un emploi pérenne.
06:53Alors, CDD ou CDI ?
06:55On a vu rapidement que le Code du Travail
06:57permettait le recours au CDD dans ce secteur d'activité.
07:00Quels sont ces secteurs ?
07:02Les voici, listés à l'article D1242-1 du Code du Travail.
07:06Et l'audiovisuel figure dans cette liste.
07:08Et donc ?
07:09Donc, cela veut dire que le recours au CDD d'usage
07:11est possible dans ce secteur d'activité.
07:13Mais cela concerne-t-il tous les salariés de ce secteur ?
07:16Pour le savoir, il faudra regarder ce que dit la Convention collective.
07:19Commençons par le commencement et ce qu'indique le préambule.
07:22Le sixième alinéa de cet article précise
07:24que le recours au CDD d'usage est permis
07:26lorsqu'il a une exploitation commerciale du film produit.
07:29Pour Villebrequin, c'est le cas.
07:30Voyons ce que dit l'article portant sur les contrats de travail.
07:33Contrat à durée déterminée d'usage. Bien.
07:35Alors cet article renvoie vers l'article L122-1-1 troisième alinéa.
07:39Or, il s'agit de l'ancienne numérotation du Code du Travail,
07:42le changement ayant eu lieu en 2008.
07:44Donc, les signataires de la Convention
07:46n'ont toujours pas mis à jour cet article.
07:48Il serait temps qu'ils le fassent.
07:49Mais cela n'invalide pas cette disposition de la Convention pour autant.
07:52Parce que la nouvelle numérotation du Code du Travail
07:54s'est faite à droit constant.
07:56Donc, pas de changement.
07:57Le recours n'est possible que pour un objet déterminé temporaire
08:00et déterminé par un événement certain.
08:03Donc, le tournage d'un film, par exemple.
08:05Ce système est bien connu sous un autre nom,
08:07les intermittents du spectacle.
08:08Et l'article 2.1 indique que seuls les emplois de catégorie B et C
08:13pourront faire l'objet d'un contrat à durée déterminée d'usage.
08:16D'ailleurs, ces mêmes contrats peuvent faire l'objet d'une période d'essai.
08:19Alors, où trouve-t-on les catégories d'emplois B et C ?
08:22Eh bien, toujours à l'article 4.1,
08:24qui indique que la catégorie A correspond aux emplois liés à l'administratif,
08:28donc le nom productif,
08:29et que la catégorie B correspond aux emplois de la filière A-A-I
08:33et que la catégorie C correspond aux emplois de la filière Q.
08:36Dans les emplois F, on trouve assistants de production.
08:39Conclusion, il est donc possible de recourir à des emplois en CDD d'usage
08:43pour les emplois d'assistants de production.
08:45C'est plus l'usage de recourir au CDD qu'au CDI.
08:48D'ailleurs, les trois annonces d'emplois que l'on a vues plus haut recourent au CDD.
08:52C'est plus la norme de ce secteur d'activité que l'inverse.
08:55La Convention collective permet le passage de CDD d'usage en CDI,
08:58mais sous condition d'ancienneté et de volume de travail.
09:01D'ailleurs, les demandes de requalification de CDD en CDI sont nombreuses
09:05et émanent des salariés précaires.
09:07Et les employeurs se défendent devant les juridictions pour éviter ces passages en CDI,
09:11y compris pour un directeur de production,
09:13comme nous pouvons le constater dans ces quatre exemples.
09:15Je ne peux donc que féliciter Pierre Chabrier,
09:18professionnel du monde de l'audiovisuel,
09:20qui a lutté en tant qu'employeur contre la précarité
09:23pour avoir voulu faire passer en CDI son assistante de production,
09:26sans même que cette dernière ait atteint l'ancienneté
09:28et le volume du travail requis par la Convention collective applicable.
09:31Voilà qui ravira le syndicat CGT lié au spectacle,
09:34qui relève que le vrai sujet est de sortir de la précarité liée au CDD,
09:38et qui rappelle que chaque année, ce sont des centaines de salariés
09:41qui saisissent le juge du travail pour faire requalifier leur CDD en CDI.
09:45Et ça s'est tellement bien passé que nous l'avons renouvelé une fois,
09:49puis deux fois, et ne pouvant la renouveler plus de deux fois,
09:51rapport au code du travail où nous devons transformer ce CDD en CDI,
09:55nous lui avions promis avant la fin de ce deuxième CDD de la passer en CDI.
09:58Donc deux CDD maximum, c'est pour les CDD liées au surcroît d'activité.
10:03On vient de voir que dans le secteur de l'audiovisuel,
10:05que Pierre connaît bien, il existe les CDD d'usage
10:08que l'on peut utiliser pendant au moins trois ans,
10:10avant que la Convention oblige l'employeur à proposer un CDI.
10:14Motivé en plus de ça par une prime qu'on lui avait donnée le mois précédent,
10:19pour lui symboliser qu'on était content de son travail.
10:22Prime qu'on avait évidemment acceptée tous les deux.
10:24Alors c'est bien une prime, mais ça n'a rien à voir avec un passage en CDI.
10:28Il n'existe aucun lien juridique entre une prime et le passage en CDI.
10:31Eh bien, qu'elle ne fût pas nos surprises, la sienne d'abord, mais ensuite la mienne,
10:36que son CDI n'était en fait plus envisagé à deux jours de la fin de son contrat de CDD.
10:42Elle a reçu un appel, dont je n'étais évidemment pas au courant,
10:45lui signifiant que non, nous ne la reprendrions pas, sans évoquer aucun motif.
10:49Ce passage pose trois questions.
10:51La première, c'est le délai.
10:52Est-ce qu'avertir un salarié deux jours avant sa fin de contrat,
10:55s'il n'y aura pas de renouvellement, est-ce que c'est légal ?
10:57Il n'existe aucun délai légal pour prévenir un salarié du non-renouvellement d'un contrat dur et déterminé.
11:02Mais le contrat de travail prévoit-il un tel délai de prévenance ?
11:05Deuxième question, cette salariée a été avertie par téléphone.
11:08Fallait-il obligatoirement la recevoir en entretien ?
11:10Eh bien non, comme il n'y a pas d'obligation de prévenir du non-passage en CDI ou de non-renouvellement de CDD,
11:16avertir par téléphone est légal.
11:18Même le fait de ne pas avertir, de ne pas passer de coup de fil, n'est pas plus répréhensible.
11:22Elle a donc eu la chance d'avoir été prévenue avant et donc de pouvoir commencer sa recherche d'emploi ailleurs.
11:27Troisième question, fallait-il un motif pour ne pas la prendre en CDI ?
11:30Eh bien, pas plus.
11:31Il faut un motif pour recourir à un CDD, et l'usage en est un dans l'autovisuel.
11:35Mais pas de motif pour cesser toute relation, temporairement ou définitivement.
11:39Question subsidiaire, le directeur général Pierre Chabrier devait-il être au courant de cette décision ?
11:44Eh bien, ça dépend des statuts de l'entreprise.
11:46En effet, le fonctionnement interne d'une SAS est essentiellement défini par les statuts,
11:50c'est-à-dire par la volonté de ses associés et non par la loi.
11:53Tout dépend donc des statuts de l'entreprise AMP Holding.
11:57Il avait eu des mots durs parce qu'il était très extrême, très peu nuancé dans toutes les choses qu'il disait, qu'il faisait.
12:04Ah, à propos du non-renouvellement de l'assistante de production,
12:07n'y aurait-il pas eu, incidemment, une sombre histoire de propos extrêmes pas du tout nuancés
12:13sur la page de présentation d'un réseau social utilisé par l'assistante de production,
12:18sous couvert d'humour ?
12:20Et je vois déjà celles et ceux qui parleront de ne pas mélanger la vie pro et la vie perso,
12:25et je leur répondrai tout simplement que, dans ce cas de figure, ce n'était pas du tout le problème.
12:30On ne sait absolument pas si le mélange vie pro et vie perso a été le problème ou pas.
12:34Peut-être que l'autre associé a découvert que le passage en CDI n'était en rien obligatoire,
12:38que c'était même rarissime, surtout en dehors du cas d'un profil très recherché.
12:43Une femme très forte que j'admire beaucoup, vraiment,
12:47qui pourtant s'est vue confronter à des situations qui l'ont mis dans des états dont j'ai seulement pu être témoin,
12:53des moments où elle sortait d'un voyage uniquement avec lui,
12:57où elle sortait, venait me voir et s'écroulait en pleurs,
13:01parce qu'il avait eu des maux durs, parce qu'il était très extrême,
13:05très peu nuancé dans toutes les choses qu'il disait, qu'il faisait.
13:08J'ai eu le droit à des tournages avec des gens qu'on ne connaissait pas,
13:11avec des gens qui sont venus me voir, un réalisateur par exemple,
13:14en me demandant si c'était normal, si, je cite, il était tout le temps comme ça.
13:19Tellement c'était des comportements compliqués à gérer au quotidien.
13:22Et quand j'étais dans le jus, je trouvais toujours des excuses.
13:25Oui, parce qu'il y a la fatigue, parce que telle ou telle chose, le stress,
13:29mais c'est excusable une fois, deux fois, trois fois, mais cinquante, cent fois.
13:33Non, on ne peut plus trouver d'excuses, et pourtant j'en trouvais encore.
13:37Ce qui vient d'être présenté ici, ce sont des conditions de travail dégradées.
13:40On peut même dire que le travail est malade.
13:42Cela n'arrive pas qu'à Villebrequin.
13:44Quasiment toutes les entreprises sont touchées à un moment ou à un autre,
13:46selon différentes amplitudes.
13:48Cela peut même aller jusqu'au suicide de plusieurs salariés dans l'entreprise,
13:51comme cela a été le cas chez France Télécom.
13:53C'est pourquoi on évite de qualifier les salariés de fragiles, avec mépris,
13:56sans savoir de quoi on parle.
13:58Le climat de travail, les conditions de travail,
14:00cela fait partie intégrante des risques professionnels,
14:02comme le fait de se couper avec une machine.
14:04Mais quand on est blessé par des mots ou des attitudes,
14:07on appelle ça des risques psychosociaux.
14:09Vous trouverez sur le site de l'INRS, en description,
14:12des explications sur ces fameux RPS, risques psychosociaux.
14:15... à aller en tournage, à avoir des appels avec lui.
14:18Mais malgré tous ces red flags, je me suis rendu compte de tout ça beaucoup trop tard.
14:22Beaucoup trop tard, et je m'en veux pour ça.
14:24Je suis désolé des personnes qui, peut-être par ma faute,
14:27ont été amenées dans cette situation.
14:29Je les ai amenées dans le même bateau que moi sans m'en rendre compte.
14:31Peut-on croire sincèrement que Pierre ne s'est pas rendu compte
14:33de la dégradation des conditions de travail ?
14:35Bien sûr qu'il s'en est rendu compte, mais trop tard.
14:37Et pour son propre cas, rares sont les salariés qui se plaignent,
14:40et surtout quand ils sont en CDD, car il faut bien remplir le frigo.
14:43Et comment mettre la frontière entre ce qui est acceptable
14:45et ce qui ne l'est pas, ou ce qui ne l'est plus ?
14:47Quelle est la frontière entre la vitesse et la précipitation ?
14:50Entre le possible et l'impossible ?
14:52Mettre la pression, ça veut dire quoi pour un employeur et pour un salarié ?
14:54Surtout dans une structure dépourvue de représentants du personnel.
14:57Qui risque quoi en disant non ?
14:59Qui risque quoi en acceptant tout,
15:01comme de travailler une nuit entière pour cause de délais intenables ?
15:04Il y a chez Villebrequin en général, et chez Pierre en particulier,
15:07une inconscience problématique sur les conditions de travail et la sécurité.
15:10Comme le fait de laisser un caméraman à côté d'un bus qui se fait renverser,
15:14ou 4 techniciens qui risquent de se prendre d'un panneau de chantier en pleine tête.
15:17Et d'autres encore, il suffit de regarder la première vidéo.
15:20Alors Gunther Bendi, qui dit bonjour, a fait des trucs de dingue avec Villebrequin.
15:24Je trouve que dans Top Gear France, vous êtes moins foufou.
15:26Ça ne reste que mon ressenti.
15:28Je dirais que, c'est pas qu'on est moins fou parce qu'on est les mêmes personnes.
15:33C'est juste qu'on a forcément des brides qui sont différentes.
15:36Par exemple, il y a des choses qu'on ne peut pas faire en termes d'assurance.
15:39On a moins de liberté que ce qu'on avait sur YouTube,
15:43parce que c'était nous-mêmes qui prenions les risques, avec nous-mêmes.
15:46C'est-à-dire que, tant qu'on ne faisait prendre de risques à personne d'autre que nous-mêmes,
15:48c'était nous qui décidions.
15:49Là, il y a un problème.
15:50C'est-à-dire qu'on est animateur de Top Gear.
15:51Il y a des contrats, etc.
15:52On ne peut pas se permettre de se foutre en danger,
15:54de se tuer ou de tuer la moitié de l'équipe.
15:56Donc, il y a un tout petit peu de jeux qu'on ne peut plus avoir là-dessus,
16:01mais on essaie d'en avoir le maximum.
16:02On a quand même une liberté.
16:03On a un chef sécu, etc.
16:04Enfin, on peut quand même prendre des choses,
16:06mais tout prend une autre dimension.
16:08Quand tu veux le faire à la télé, c'est un petit peu différent.
16:10Il y a des règles un peu plus chartées, on va dire, que sur YouTube.
16:15Il y a des règles un peu plus chartées à la télé que sur YouTube.
16:18Mais quelle erreur, Pierre Chabrier !
16:20Mais quelle erreur monumentale !
16:21Car le code du travail est le même pour tout le monde.
16:24Sauf que les producteurs de Top Gear sont de réels professionnels,
16:28conscients des conséquences, des risques qu'il faut encourir aux gens qui les emploient,
16:31conséquences financières, judiciaires.
16:33Chez YouTube, c'est différent.
16:34Chez Top Gear, c'est différent.
16:37Chez YouTube, c'est différent.
16:38Mais la bonne blague !
16:39YouTube n'est que l'hébergeur de la vidéo, pas le producteur.
16:41Quelle inconscience !
16:42La sécurité des travailleurs qu'on emploie, oui, ça coûte cher.
16:45Et il y a sans doute moins d'images spectaculaires à montrer quand on les applique.
16:49Et l'épisode est moins rémunérateur.
16:51On ne faisait prendre de risques à personne d'autre que nous-mêmes.
16:53Et c'est faux !
16:54Et ma première vidéo l'a démontré.
16:55Le fait qu'il puisse dire cela après la publication de ma première vidéo
16:58prouve qu'il n'a rien compris.
17:00Sachez que pour certaines personnes,
17:01ça en a été tellement trop qu'ils en ont un peu trop.
17:04Pour d'autres personnes, ça en a été tellement trop qu'ils en ont arrêté leur métier.
17:07Et basé en grande partie, pas uniquement évidemment,
17:10mais en grande partie sur cette problématique-là.
17:12Oui, ce qui motive les salariés à venir, il y a l'argent.
17:15Et ce qui les motive à partir, ce sont les conditions de travail.
17:18Entre autres, les mauvaises conditions de travail.
17:20Les démissions représentent la moitié des causes de rupture de CDI.
17:24Et j'ai donc appris par le biais d'intermédiaires,
17:27des amis communs, très proches à nous deux,
17:29qui m'ont rapporté des faits surprenants, et le mot est faible.
17:32Mon associé avait demandé à ces personnes, donc des amis,
17:35de signer des contrats leur interdisant de travailler avec moi,
17:39de s'exposer sur les réseaux avec moi,
17:41et même de s'exposer avec moi sur de l'événementiel et autres.
17:44Alors cette fameuse histoire de contrats, déjà je ne les ai pas vus,
17:46donc je me baserai uniquement sur ce que vient de le dire Pierre Chabrier.
17:49Est-ce une clause de non-concurrence ?
17:51Non, car une clause de ce type n'est active que lorsque le contrat a été rompu,
17:54ce qui n'est pas le cas ici, car ne serait concerné des gens
17:57qui ne travailleraient plus pour son associé Sylvain Lévy.
18:00Alors c'est quoi ? Ce serait plutôt une clause d'exclusivité.
18:02La clause d'exclusivité est présente dans le Code du Travail deux fois.
18:05La première, elle ne concerne que les VRP,
18:07et la deuxième fois, elle concerne les salariés qui quittent leur emploi
18:09pour monter dans une reprise.
18:11Bon, que dit la jurisprudence ?
18:13Alors il y a une jurisprudence sur une clause d'exclusivité
18:15avec des CD d'usage, mais cela concerne la production d'albums
18:18pour un groupe de musique, donc out.
18:20Plus intéressant, l'arrêt du 11 juillet 2000.
18:22C'est un arrêt de principe, c'est-à-dire que c'est un arrêt
18:25qui va au-delà de l'arrêt d'espèce et concerne toutes les situations.
18:28Il fournit la définition que la haute cour donne du contrat d'exclusivité
18:32et son régime d'application.
18:34La cour indique que la clause par laquelle un salarié s'engage
18:37à consacrer l'exclusivité de son activité à un employeur
18:40porte atteinte à la liberté du travail, qui est un droit fondamental.
18:43La cour rappelle que cette clause n'est valable que si elle est
18:46indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise
18:49et si elle est justifiée par la nature de la tâche à accomplir
18:53et proportionnée au but recherché.
18:55Elle ne doit donc pas être proposée ou imposée à la légère.
18:57Pour la cour, il n'en résume que la clause d'un contrat de travail
19:00par laquelle un salarié s'engage à travailler pour un employeur
19:03à titre exclusif et à temps partiel ne peut lui être opposé
19:06et lui interdire de se consacrer à temps complet à son activité professionnelle.
19:10C'est donc d'autant plus valable pour un salarié sous statut intermittent,
19:13c'est-à-dire en contrat dur et déterminé d'usage, car cela reviendrait
19:16à considérer que le salarié travaille de façon permanente pour son employeur,
19:20un risque que n'oserait pas prendre son employeur de craindre
19:23de voir le juge requalifier les CDD en CDI si le salarié
19:26le saisissait.
19:27Ça, c'est valable pour tout type de salarié, y compris pour un VRP
19:30dont les contrats d'exclusivité sont prévus au Code du travail.
19:33Et la cour n'est pas revenue sur ce principe depuis,
19:35comme en témoignent les arrêts ultérieurs.
19:37Que craindre pour pouvoir exiger une telle clause dans un contrat de travail ?
19:40Une concurrence déloyale ?
19:42Mais ce n'est pas utile, car les juges ont depuis longtemps décidé
19:45que tout salarié devait exécuter loyalement son contrat de travail.
19:49Cette obligation de loyauté implique celle de ne pas se livrer
19:52à une activité concurrente à celle de son employeur
19:54pour son propre profit ou pour celui d'un tiers.
19:56La Chambre sociale de la Cour de cassation considère en effet
19:59que même en l'absence de clauses d'exclusivité,
20:01le salarié ne peut sans commettre de fautes concurrencer son employeur,
20:05soit directement, soit indirectement pendant l'exécution du contrat,
20:08y compris pendant la période de préavis, sauf cas de dispense.
20:11La Cour de cassation a ainsi jugé, notamment,
20:13que pendant l'exécution du contrat de travail,
20:15le salarié ne devait pas exercer une activité pour le compte
20:18d'une entreprise concurrente ou une activité concurrentielle
20:21pour son propre compte ou en détournant son profit
20:23ou au préjudice de l'employeur, sa clientèle.
20:25Et on peut assimiler à la clientèle les internautes
20:28visionnant les vidéos YouTube des associés de Villebrequin.
20:31On voit mal comment, pour exister un contrat d'exclusivité
20:34sur des salariés en CDD, et surtout motiver cela
20:37en arguant que travailler pour l'autre associé
20:39pourrait faire perdre du public, donc de la clientèle,
20:42pour un technicien audiovisuel.
20:44Juridiquement, cela ne tient pas une seule seconde.
20:46Le technicien audio ne va pas embarquer les viewers habituels
20:48des vidéos de la chaîne de Sylvain Lévy
20:50pour les rapatrier vers la chaîne de Pierre Chabrier.
20:52Ils ne sont pas des clients, ils ne vont pas acheter quelque chose.
20:55Alors s'il est bien conseillé, le YouTuber Sylvain Lévy
20:57n'aurait donc pas commis une telle bêtise.
20:59Voilà tout ce qui m'est venu en tête après avoir visionné
21:01la vidéo de Pierre Chabrier du 15 août dernier.
21:04Si vous avez des questions, posez-les en commentaire.
21:06Je profite de cette vidéo pour vous faire connaître
21:08une autre chaîne, Epic Teaching of History,
21:11dûe nommée Ra'ak.
21:12Découvrez tout un tas de choses inutiles,
21:14mais parfois passionnantes, parmi ces 300 vidéos disponibles.
21:17Les vidéos de la Minute du Droit du Travail
21:19sont publiées de manière irrégulière.
21:21Pour être prévenu de la sortie de la prochaine vidéo,
21:23pensez à vous abonner.
21:24Et vous avez trois playlists.
21:26Les YouTubers, l'actualité et les prod'hommes.

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