François Bayrou, président du MoDem, était l'invité de Benjamin Duhamel dans C'est pas tous les jours dimanche.
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00:00Bonsoir François Bayrou. Bonsoir. Merci beaucoup d'être avec nous ce soir dans
00:07C'est pas tous les jours dimanche. Patron du modem, maire de Pau, haut-commissaire au plan.
00:11Je le disais tout à l'heure c'est souvent dans les moments où les gouvernements sont sur le
00:14point d'être composés qu'il faut tendre l'oreille à vos suggestions, vos exigences, parfois vos
00:21coups de semence et nous y sommes peut-être. Le Premier ministre Michel Barnier a prévenu que
00:24son gouvernement serait formé cette semaine. Plusieurs membres des Républicains sont
00:28pressentis pour l'intégrer et dans la presse du jour vos lieutenants préviennent déjà. LR ne peut
00:32pas imposer sa politique dit votre proche Marc Fesneau ministre des missionnaires. Est-ce que
00:38c'est ce que vous craignez qu'au fond le gouvernement soit composé majoritairement
00:43de ministres issus des Républicains que ce soit un gouvernement de droite ? C'est pas comme ça que
00:49je crains. On entend, vous l'avez rappelé, on entend beaucoup de rumeurs, beaucoup de bruits
00:58qui décrivent un gouvernement hypothétique dans lequel on aurait perdu de vue l'équilibre qu'on
01:11cherche pour aller vers une composition qui serait simplement la mainmise d'un parti et d'un parti
01:22minoritaire sur le gouvernement. Je connais Michel Barnier, je ne crois pas à ces rumeurs. Pour plein
01:34de raisons ça ne serait ni juste, pardon de ce grand mot, historiquement, ni juste politiquement,
01:42ni avec le minimum de bon sens qu'il faut avoir et que Michel Barnier est réputé pour avoir. Pourquoi ?
01:50Tout le monde voit bien. Qu'est-ce qu'on cherche aujourd'hui ? Qu'est-ce qui est vital à trouver ?
01:57C'est une union nationale. On est devant un paysage politique complètement éclaté avec un résultat
02:07d'élection qui a donné pire que la proportionnelle. Pendant longtemps on nous a dit que la proportionnelle
02:14ça ne faisait pas de majorité. Là on est encore pire et dans un moment où on a devant nous des défis
02:24incroyables à relever, incroyables, difficiles pour toute la nation et pas seulement pour nous, mais pour
02:31toute l'Europe comme on le voit dans toutes les élections. Et donc cette perspective qui voudrait
02:40qu'au profit d'une élection très compliquée à déchiffrer, devant un paysage de l'Assemblée nationale
02:49extrêmement morcelé, que ce soit un parti minoritaire qui impose ses vues, c'est impossible. Ça ne marcherait pas.
02:57On aurait un accident majeur et c'est pourquoi je n'y crois pas. Parce que le bon sens c'est les hommes en terre.
03:05Vous n'y croyez pas. On a vu des scènes de membres des Républicains, notamment à Annecy, à l'occasion de leur entrée parlementaire,
03:11qui se félicitaient de la nomination de Michel Barnier. Laurent Wauquiez qui disait qu'il faut qu'il y ait une politique
03:18de droite qui soit menée. Vous dites que c'est une rumeur. Mais si c'était le cas, si effectivement un certain nombre de membres
03:25des Républicains occupaient les principaux postes, la justice, l'intérieur, l'éducation nationale, là vous dites que ce serait
03:34un accident majeur, ce serait impossible ? Je suis persuadé que ça condamnerait le gouvernement. S'il y avait un basculement
03:43bord sur bord, ça condamnerait le gouvernement. Et comme vous le savez, je plaide depuis très longtemps pour que les Républicains
03:50fassent partie du gouvernement, soient actifs dans l'union nationale dont nous avons besoin. Mais vous avez dit quelque chose,
04:00Laurent Wauquiez dit qu'il faut une politique de droite. En effet, c'est une bonne question. La question, c'est quel contenu à la politique
04:14il va être, quelle composition du gouvernement. La composition, c'est très important. Vous savez qu'il y a vertueusement, d'habitude,
04:21en politique, les responsables politiques disent que la question, ce n'est pas qui, mais c'est ce qu'on va faire. Ce n'est pas vrai.
04:29C'est très important d'être dans le qui, dans la composition des équipes. Mais c'est vrai que ça mériterait une discussion approfondie
04:41avec les responsables des différentes sensibilités sur ce que va être la politique que Michel Barnier a l'intention de proposer.
04:50Pour être très concret, François Bayrou, vous dites que s'il y avait des ministres les Républicains au principaux postes, cela condamnerait le gouvernement.
04:58J'essaie de dire les choses avec prudence. Et j'essaie de les résumer de la façon la plus précise qui soit. Est-ce que, si c'était le cas,
05:07s'il y avait une forme de mainmise de membres des Républicains sur le gouvernement, est-ce que cela remettrait en cause la participation
05:16de membres du MoDem au gouvernement ?
05:18Heureusement, on n'en est pas là parce que je vous ai dit que je n'y croyais pas. Mais s'il y avait une espèce de coloration qui serait interprétée par tout le monde,
05:30comme vous avez employé le mot de mainmise, ça ne pourrait pas marcher. Ce gouvernement-là n'aurait aucune espérance de vie.
05:40Vous voyez bien que ces élections, leur sujet n'était pas de donner le pouvoir à l'un ou à l'autre. Leur sujet était au premier tour d'exprimer une insatisfaction.
05:55Et ça s'est porté sur le Rassemblement national, qui a fait un très haut score, comme vous savez, et qui a le groupe le plus important à l'Assemblée nationale.
06:03Pourquoi j'ai regretté, j'ai trouvé scandaleux qu'il ne soit pas associé au poste de responsabilité à l'intérieur de l'Assemblée ?
06:11Ça, c'était le premier tour. Et au deuxième tour, c'était un rassemblement extrêmement large de gens qui n'ont pas les mêmes opinions politiques pour dire
06:21qu'on ne veut pas que le Front national ait la majorité absolue. C'est ça, le résultat de cette élection. Et donc, il est du devoir, je ne parle pas d'opportunité,
06:33mais il est du devoir de ceux qui vont avoir à former le gouvernement de veiller à ce que cette diversité, ce pluralisme qui a traduit en réalité...
06:47Je le lui ai dit quasiment dans ses termes.
06:50Et qu'est-ce qu'il vous a répondu ?
06:52Il m'a dit que bien entendu. Et donc, c'est pourquoi je ne crois pas à ces rumeurs.
06:59Il n'allait pas vous dire l'inverse ?
07:01Oui, mais quand on me dit quelque chose, je le crois.
07:04En politique ?
07:05Oui, quand j'ai des interlocuteurs qui sont en situation de responsabilité, je les crois.
07:10Mais vous voyez bien, le but de cette élection n'était pas de désigner un vainqueur, c'était d'écarter des gens dont on ne voulait pas et des extrêmes.
07:22Mais le message de cette élection, et le message politique, le message historique, le message national de cette élection, c'est qu'on a besoin de rassembler nos forces pour affronter les défis qui sont devant nous.
07:37Et on va dérouler précisément ce que pourrait être la feuille d'or de ce gouvernement.
07:40Mais juste, François Bayrou, encore une fois, pour que les choses soient parfaitement claires.
07:43Vous dites, si mainmise, le gouvernement ça ne pourrait pas marcher.
07:47Si c'était l'option retenue par Michel Barnier, puisque visiblement il y a une forte pression de l'appareil politique Les Républicains.
07:52Ça veut donc dire, si vous considérez qu'un gouvernement ne peut pas marcher, que vous, vos troupes, le MoDem, ne pourrez pas y trouver la place.
08:00Pardon de reposer la question, mais pour que les choses soient claires pour ceux qui nous regardent et qu'il n'y ait pas d'ambiguïté possible.
08:05Je vois bien que, tout à fait intelligemment, vous essayez d'obtenir une déclaration qui soit une déclaration qui mette le feu.
08:12Non, non, je ne crois pas. J'essaye de préciser les choses.
08:15Oui, alors précisons les choses. Le groupe Les Républicains, c'est 8% des sièges à l'Assemblée nationale.
08:2247 sièges.
08:2447 sur 577. 8%.
08:28Et ce groupe ne s'est pas présenté ou n'a pas été présenté aux Français comme étant une option de gouvernement.
08:36Un très grand nombre de leurs membres, et c'est vrai d'ailleurs aussi pour la gauche, un très grand nombre de leurs membres n'ont pas eu de candidats contre eux.
08:45Nous n'avons pas présenté de candidats contre eux.
08:48Simplement parce qu'il nous semblait que ce front républicain devait être cultivé dès le premier tour, ou présenté dès le premier tour, ou qu'il y ait des signes.
08:57Par exemple, François Hollande n'a pas eu de candidats contre lui.
09:00Donc quand il dit c'est un camp qui a gagné, ce qui lui arrive quelquefois, évidemment ça n'a pas de sens.
09:08Et donc les Républicains n'étaient pas, n'ont pas été investis par le suffrage.
09:16Et vous savez bien, c'est un angle d'attaque aujourd'hui très important de la gauche et de l'extrême droite de dire mais voilà un Premier ministre qui n'est pas du tout d'un parti qui a été choisi par les Français.
09:28Et je vais répondre à votre question.
09:31Il n'est pas possible que ce gouvernement soit présenté par Michel Barnier.
09:37Je n'en crois pas un mot.
09:39Je connais assez pour savoir que le bon sens fait partie de sa nature et de ses options.
09:47Et s'il était présenté, il n'y aurait aucune chance de succès.
09:51Aucune.
09:52Je peux me tromper, mais je suis absolument sûr que tous les responsables politiques qui m'écoutent partagent ce sentiment.
09:59Et si c'était le cas, vous ne le soutiendriez pas ?
10:01Soutenir, c'est autre chose.
10:03Mais en tout cas, pour moi, ça n'est pas une hypothèse qui permettrait notre participation.
10:09C'est donc très clair.
10:10Si c'était un gouvernement majoritairement à l'air, vous ne pourriez pas y participer.
10:13Et je n'y crois pas.
10:14Et vous n'y croyez pas.
10:15Mais c'est important pour le travail.
10:17Je répète devant vous.
10:19Michel Barnier, sa désignation a été bien accueillie par les Français.
10:25Pourquoi ?
10:26Parce que tout le monde voyait qu'on avait besoin d'apaisement d'un côté.
10:30On avait besoin d'expérience.
10:32Et qu'il avait des atouts.
10:35Il a des atouts qui sont considérables.
10:37Qui comptent dans le moment, par exemple, un atout européen.
10:41Au moment où nous avons, avec Bruxelles, des discussions un peu ardues à avoir.
10:47Est-ce que vous croyez qu'il va aller s'enfermer dans une option partisane hyper minoritaire ?
10:55Il ne fera pas ça.
10:57Et je crois pouvoir l'affirmer avec certitude.
11:02Et en tout cas, nous, nous avons la responsabilité peut-être plus que d'autres.
11:08Parce que nous avons très souvent plaidé pour ce pluralisme.
11:12Pour ce respect des différentes opinions.
11:14Oui, mais François Bayrou, vous dites le mot pluralisme.
11:16On a effectivement entendu, c'était la semaine dernière je crois, sur ce même plateau,
11:20Jean-Pierre Raffarin, assez proche de Michel Barnier,
11:23qui disait, vous verrez, il y aura des gens de gauche.
11:26Vous voyez en l'état des gens de gauche participer à un gouvernement de Michel Barnier ?
11:32Tous disent non.
11:33J'ai dit à Michel Barnier que c'était une nécessité.
11:38Qu'il y ait des gens de gauche dans ce gouvernement.
11:42Relisons la situation. Relisons l'IRM de la situation dans laquelle nous sommes.
11:49Il y a des gens qui croient que la question c'est de savoir quel bord va gouverner.
11:53Et moi je dis la question, la seule question, c'est,
11:56est-ce qu'on peut avoir une unité nationale, une entente nationale,
12:02de partis différents, mais qui disent cette fois-ci l'heure est tellement grave
12:07qu'on ne peut pas se mettre sur le bord de la route
12:10pour ne rien faire, ou plus exactement, pour parler franchement,
12:15pour espérer l'échec de ceux qui vont gouverner.
12:19On ne peut pas faire ça. Et de toutes mes forces, je l'empêcherai.
12:24Mais très bien, mais vous dites que c'est une nécessité qu'il y ait des gens de gauche,
12:26François Bayrou, qui, aujourd'hui, à gauche,
12:28accepterait de participer à un gouvernement avec Bruno Retailleau ou Laurent Wauquiez.
12:31Pardon, mais si vous avez entendu quelqu'un de gauche cette semaine dire pourquoi pas,
12:35je veux bien que vous me le présentiez parce que moi je ne l'ai pas trouvé.
12:38Je ne veux pas participer à ce jeu des noms et des personnalités.
12:43C'est la responsabilité du Premier ministre.
12:46Et vous pensez qu'il y aura des gens de gauche dans ce gouvernement ?
12:48Je pense qu'il en faut. J'ai dit à Michel Barnier qu'il avait absolument besoin
12:54d'élargir l'espace de ceux qui vont le soutenir, c'est-à-dire l'espace des Français
13:02qui, à juste titre, se posent des questions sur leur avenir
13:06et qui ne veulent pas qu'on tombe dans des considérations partisanes.
13:10Les considérations partisanes, ce sont des fatalités de division.
13:16Le jeu des partis, hélas, depuis des décennies, contre tous mes avis et tous mes engagements,
13:26le jeu des partis, c'est de s'affronter entre eux.
13:29Au lieu d'essayer d'affronter la situation pour faire avancer le pays,
13:33les partis s'affrontent entre eux.
13:35Et ceci, on a construit, il y a 80 ans, la Vème République, contre cette fatalité-là.
13:44Et je pense que plus que jamais, leur est à cette unité nationale.
13:52Vous dites, je ne veux pas rentrer dans le jeu des noms des uns et des autres.
13:55Malgré tout, il y a ce que l'on voit, ce que l'on peut lire,
13:59le fait que visiblement le patron des députés de droite à l'Assemblée nationale,
14:03Laurent Wauquiez, briguerait le ministère de l'Intérieur.
14:07Je vous rappelle ce que disait Laurent Wauquiez au moment de la décision
14:11du Conseil constitutionnel sur la loi immigration, c'était en début d'année,
14:14il parlait d'un coup d'État de droit.
14:17Est-ce que cette ligne politique que porte Laurent Wauquiez,
14:20il est comptable des déclarations qui ont été les siennes ces dernières années,
14:24est-ce que ça, ça peut faire de lui un ministre de l'Intérieur,
14:28précisément d'un gouvernement qui dépasserait les clivages,
14:30tels que vous l'appelez de vos voeux ?
14:32– J'ai aucune envie d'entrer dans les approches,
14:36comme on dit ad hominem, contre quelqu'un, aucune envie.
14:40Je ne veux pas faire ça, mais vous voyez bien qu'une approche
14:46qui consisterait à mettre en cause le Conseil constitutionnel,
14:50ce que j'espère n'est dans l'esprit de personne.
14:54– Ce qui était le cas de Laurent Wauquiez à l'époque.
14:56– Sauf de Mélenchon, qui très souvent, et même du Front national certain.
15:00– Et de Laurent Wauquiez à l'époque.
15:02– À certaines époques.
15:03Si on se met à mettre en cause les institutions,
15:06le pays va en souffrir jusqu'au drame.
15:11Heureusement qu'on a des règles et qu'on a des lois.
15:15Et heureusement qu'il y a, alors c'est impensable,
15:20parce que Laurent Wauquiez appartient au parti de ceux qui,
15:24ou appartient, dit-on, ou dit-il, au parti de ceux qui ont construit la Constitution.
15:31Et je relisais à l'instant, tout à l'heure, le discours
15:36que le Premier ministre qui a porté la Constitution, Michel Debré, faisait…
15:41– Vous avez des lectures intéressantes.
15:43– Ce qu'il faisait au Conseil d'État, devant le Conseil d'État,
15:48pour le projet de Constitution, en septembre 1958.
15:52Et qu'est-ce qu'il dit, précisément sur ce point ?
15:55Et je ne savais pas que vous alliez m'interroger,
15:58mais le sujet des institutions m'intéresse.
16:01Il dit, on met en place un Conseil constitutionnel
16:04pour que le Parlement ne puisse pas faire n'importe quoi.
16:07Et précisément, dit-il, pour que l'Assemblée nationale
16:11ne puisse pas faire n'importe quoi.
16:13– Mais donc François Bayrou, vous dites encore…
16:15– Alors je suis absolument sûr, il réfléchit,
16:17il y a des moments où on dit un peu…
16:20– Oui, mais alors attendez, est-ce que vous savez qui disait,
16:22il y a 6 ans, Laurent Wauquiez cultive des passions
16:24qui alimentent l'extrême droite ? – Non.
16:26– C'est vous. – Oui, c'est possible, vous voyez…
16:29– Ah ben oui, mais ça fait beaucoup.
16:32Mise en cause du Conseil constitutionnel dont vous dites à l'instant
16:34qu'il faut évidemment l'éviter, qu'il faut protéger les institutions.
16:38Vous-même, 25 avril 2018, Laurent Wauquiez cultive
16:40des passions qui alimentent l'extrême droite.
16:42– Oui, je pense que c'était assez juste.
16:45– Et donc je me mets à la place de ceux qui nous regardent là,
16:48qui se disent, mais à un moment donné, la politique, c'est aussi de la constance.
16:51Comment imaginer des membres du modèle parti dirigé par François Bayrou
16:55avec Laurent Wauquiez ? – Et je ne manque pas à la constance.
16:59Et puis je pense que les gens peuvent, à certaines époques,
17:03se tromper et changer leur jugement.
17:08J'espère qu'ils sont assez intelligents pour ça.
17:11Moi, je m'efforce de ne pas me tromper au début
17:15pour ne pas avoir à changer de direction après.
17:19Mais vous voyez bien que tout ça, encore une fois,
17:23le Conseil constitutionnel, c'est le général de Gaulle et Michel Debré
17:27qui l'ont mis en place, précisément, disent-ils,
17:31pour que le Parlement ne puisse pas faire n'importe quoi.
17:34– Un mot toujours sur la composition du gouvernement.
17:37Si, pour le coup, ces alertes-là étaient entendues,
17:40c'est-à-dire que s'il ne s'agissait pas d'un gouvernement LR,
17:43aujourd'hui, il y a quatre membres du gouvernement
17:45issus de votre parti du Modem.
17:47Vous en demandez quoi ? Autant ? Plus ?
17:50– Dans ma vie, il m'est arrivé de vendre des veaux au marché.
17:56Au marché de Morlace et de Soumoulou, dans le pays de Berne.
18:01– Là, il ne s'agit pas de veaux, mais ne nous expliquez pas, François Bayrou,
18:04que dans vos discussions avec les uns et les autres,
18:06il n'y a pas un sujet de combien de membres du Modem au gouvernement.
18:09– Eh bien, peut-être que vous ne me croirez pas,
18:11mais je n'ai pas eu cette discussion une seule seconde avec Barnier.
18:16Et je n'avais pas eu cette discussion une seule seconde avec ses prédécesseurs.
18:20Ce qui m'intéresse, c'est que quand nous sommes au gouvernement,
18:25nous soyons respectés et avec des postes de responsabilité qui nous intéressent.
18:30Si vous voulez m'amener au marché aux bestiaux,
18:33j'irai, mais pas pour acheter des ministères.
18:37C'est une vision qui compte, je ne vais pas vous dire que ça ne compte pas.
18:43Mais je ne veux pas faire de ça le premier pas d'un engagement.
18:48– Vous pourriez, vous, rentrer au gouvernement ?
18:49– Non. – Pourquoi ?
18:51– Parce que j'ai des responsabilités à peau que je ne veux pas quitter.
18:59– Vous en aviez aussi en début d'année, quand il était envisagé
19:01que vous soyez nommé ministre de l'Éducation nationale.
19:03– Et j'ai refusé d'entrer au gouvernement, comme vous savez.
19:06– Parce qu'il y avait un désaccord avec Gabriel Atalpa,
19:08parce que vous considériez que vous ne pouviez pas abandonner la mairie de Pau.
19:11– D'abord j'ai dit, si vous m'aviez écouté,
19:13que j'aurais essayé d'exercer les deux responsabilités en même temps.
19:18Mais j'ai d'autres moyens d'aider, et notamment j'ai en tête ou au cœur
19:24l'espoir qu'on va reconstruire en France une autorité du plan digne de ce nom,
19:29qui soit capable de prospective sur les 10, 20, 30 ans qui viennent,
19:34parce que ça manque terriblement à l'action des pouvoirs publics,
19:38d'avoir un horizon plus lointain.
19:42– Donc, pas d'entrée au gouvernement.
19:44Un mot avant de parler de la question de l'immigration,
19:46pour résumer au fond ce que vous nous dites.
19:48On a bien compris, si main mise à l'air ça ne marchera pas,
19:51pas de membre du Modem, plus généralement,
19:54c'est quoi les lignes rouges vis-à-vis du gouvernement ?
19:57Qui pourrait justifier, au-delà de la composition du gouvernement,
20:00de dire là, on arrête, on ne soutient plus ?
20:02Ou est-ce qu'au contraire, vous dites, moi je ne veux pas fixer les lignes rouges,
20:05c'est ce que me disait Edouard Philippe mercredi soir,
20:07qui dit on ne rentre pas dans une négociation en fixant des lignes rouges.
20:10– Oui, je n'aime pas du tout l'idée des lignes rouges,
20:13parce que les lignes rouges c'est absolument la même approche que LFI.
20:18Mon programme, rien que mon programme, et tout mon programme,
20:23c'est ça les lignes rouges.
20:26Mais vous savez bien les lignes rouges,
20:29nous sommes un mouvement politique qui considère que l'éducation doit être prioritaire,
20:37qui considère que l'Europe est une nécessité absolue,
20:40mais on va avoir l'occasion d'en dire un mot je pense,
20:43qui considère que l'équilibre de la situation,
20:48c'est qu'on est un marché qui est autant de liberté que nécessaire,
20:54et autant de volonté sociale qu'exigée.
20:58Voilà, ce sont des équilibres comme ça.
21:01Si on partait tout à fait de notre côté sur l'Europe par exemple,
21:05évidemment nous ne pourrions pas l'accepter.
21:08Mais je ne veux pas entrer dans cette idée que…
21:12Vous voyez ce que j'essaie de vous dire,
21:15je ne peux pas croire que l'essentiel soit menacé,
21:19l'essentiel des idéaux du pays et l'essentiel du bon sens.
21:24Je ne veux pas croire ça, si c'était le cas on s'en occuperait,
21:28mais je ne veux pas le croire.
21:30Par exemple François Bayrou sur la question de l'immigration,
21:32il y a un contexte, l'Allemagne à partir de demain va renforcer ses contrôles aux frontières,
21:36décidé par un chancelier social-démocrate, Olaf Scholz,
21:39qui gouverne avec des écologistes, avec des libéraux.
21:42En France, Michel Barnier a dit,
21:45sentiment que les frontières sont des passoires,
21:48et Laurent Wauquiez, toujours lui,
21:50dit qu'il faut une politique avec moins d'immigration.
21:53Est-ce que ça, ça doit être la ligne du gouvernement, moins d'immigration ?
21:57C'est un sujet sur lequel je trouve qu'on n'est pas sérieux.
22:03Alors je vais vous dire ce que je crois moi.
22:06Faire de l'immigration le sujet obsessionnel du pays,
22:12c'est refuser de voir la réalité.
22:15Pour qui c'est obsessionnel ?
22:17Pour un grand nombre de forces publiques.
22:20Pour Laurent Wauquiez ?
22:22Il suffit que vous vous promeniez dans toutes les villes de France.
22:25Vous voyez des échafaudages.
22:28Qui y est sur les échafaudages ?
22:31Qui ?
22:33Des immigrés.
22:36Des hommes, en général,
22:39qui sont arrivés en France tout à fait récemment
22:42et qui essaient de gagner leur vie.
22:45Qui va nettoyer les bureaux à 5h du matin ?
22:48Qui ?
22:50Quel est ce prolétariat qui va nettoyer les bureaux ?
22:54Ce sont des femmes, généralement,
22:57qui viennent des milieux qui sont considérés par certains...
23:02Ce que vous dites là, c'est votre ligne politique ?
23:06Ce n'est pas du tout ce que dit Michel Barnier ?
23:09J'ai l'intention de défendre ma ligne politique sur ce sujet.
23:13Il est de bon ton d'ignorer tout ça.
23:16Je ne le ferai pas.
23:18En revanche, est-ce qu'on a besoin de réguler ces mouvements de population ?
23:23Ma réponse est oui, on a besoin de les réguler.
23:26Et vous me citiez, Scholz, le chancelier allemand,
23:30qui a annoncé qu'il allait fermer les frontières
23:35de la République fédérale allemande.
23:38Vous savez ce qu'il a fait, monsieur Scholz, hier ?
23:42Vous savez ce qu'il a fait hier, monsieur Scholz ?
23:45Hier, vendredi.
23:47Il a signé un accord avec le gouvernement du Kenya
23:51pour que 250 000 Kenyans entrent en Allemagne.
23:56Où est la logique de tout ça ?
24:00Et je vous rappelle que madame Mélanie, alliée de l'extrême droite...
24:06A régularisé 450 000 étrangers en leur donnant un titre de travail.
24:11Vous passez là-dessus comme si c'était...
24:13Non, pas du tout, et on a passé la campagne des européennes
24:15à le signaler aux uns et aux autres sur ce plateau.
24:18Laissez-moi articuler ça,
24:20parce que vous ne pouvez pas poser la question de l'immigration
24:24comme si c'était uniquement un sujet politique et passionnel.
24:28Madame Mélanie, extrême droite,
24:30elle s'est fait élire en Italie
24:32en disant avec moi « zéro immigration ».
24:35Et elle a régularisé cette année
24:38350 000 ou 450 000 immigrés
24:42à qui elle a donné des papiers.
24:44Qui est sérieux dans tout ça ?
24:46Je dis, monsieur Scholz,
24:48il va signer le jour même où il annonce la fermeture des frontières
24:52un accord avec le Kenya
24:55et que 250 000 Kenyans,
24:57dont j'imagine le Kenya aurait eu besoin chez lui,
25:00aillent en Allemagne.
25:02Je ne participe pas à ces mouvements
25:04qui sont des mouvements de mépris obsessionnel
25:10de la réalité et de la vérité.
25:12Je pense qu'il faut faire la différence
25:15entre les immigrés qui sont sur notre sol,
25:18qui travaillent, qui apprennent le français
25:21et qui acceptent nos coutumes et nos principes.
25:24Et les autres.
25:26Est-ce qu'il faut moins d'immigration ?
25:29Il faut en tout cas la réguler.
25:31On ne peut pas se trouver placé
25:33devant des situations qui créent autant de rejets
25:36et autant de passions.
25:38Le jour où on aura des moyens,
25:40et ils existent,
25:42et les accords européens qu'on vient de signer
25:44et que, paraît-il, certains des Pays-Bas veulent dénoncer,
25:47ces accords européens permettaient
25:49d'avoir cette régulation un peu meilleure.
25:53Mais il faut aller encore beaucoup plus loin.
25:55J'ai encore trois sujets à aborder avec vous.
25:58Le premier, je vais vous demander une réponse assez rapide.
26:01Est-ce que les ministres actuels, les ministres démissionnaires,
26:04doivent quitter le gouvernement ?
26:06Est-ce qu'il faut qu'il y ait un renouvellement
26:08pour que les Français ne se disent pas
26:10qu'on se retrouve avec à peu près la même chose ?
26:12Je suis pour le renouvellement intégral
26:14ou quasi intégral du gouvernement
26:16pour qu'on ait une autre approche,
26:18une autre sensibilité, d'autre visage.
26:20Quasi intégral, ça veut donc dire que,
26:22à l'exception d'un ou deux ministres,
26:24l'idéal serait même qu'il y ait un renouvellement intégral.
26:26Ce n'est pas moi qui forme le gouvernement.
26:28J'aurais pu, mais ce n'est pas moi qui forme le gouvernement.
26:30Mais si j'avais eu cette responsabilité,
26:33j'aurais proposé un renouvellement intégral.
26:36Renouvellement intégral, c'est dit.
26:39Il me reste deux questions.
26:41La première, elle concerne Édouard Philippe.
26:43Il a renouvelé cette semaine, c'était sur BFM TV,
26:46son ambition présidentielle.
26:48C'est la phrase que vous aviez eue en disant,
26:50en politique, les fautes de temps sont pires que les fautes de grammaire.
26:53Il a balayé ça d'un verre de main en disant,
26:55il n'y a pas de déloyauté, simplement,
26:57je ne suis pas impatient, mais je me prépare.
26:59Est-ce qu'il n'a pas raison, c'est l'avis politique,
27:01de déclarer sa candidature à l'élection présidentielle ?
27:03Je ne veux pas faire de polémique avec lui,
27:05mais quand même,
27:07annoncer sa candidature,
27:09précisément au moment
27:11où on est
27:13dans cette extrême difficulté nationale,
27:18est-ce que vous croyez que c'est un signe
27:21d'entente, d'union,
27:23de respect réciproque
27:25et de respect des institutions ?
27:27Dites-moi,
27:29vous êtes un observateur,
27:31vous trouvez que...
27:33Vous voulez que je vous dise ce que je pense, François Bayrou ?
27:35Je pense que si vous n'aviez pas vocation,
27:37éventuellement, à être candidat à l'élection présidentielle
27:39en 2027 et donc d'avoir Édouard Philippe sur votre route,
27:41vous n'auriez peut-être pas réagi de cette façon-là.
27:43Vous dites des bêtises.
27:45Oui.
27:47Parce que j'aurais dit exactement la même chose
27:49et que je ne suis pas, moi,
27:51dans l'obsession présidentielle.
27:53J'ai été candidat trois fois.
27:55J'ai une petite idée de ce qu'est l'élection présidentielle
27:57et de ce qu'elle représente
27:59dans le contact entre
28:01un responsable politique
28:03qui veut
28:05assumer les responsabilités de l'État
28:07et le peuple qui va les lire.
28:09Je suis absolument
28:11épris
28:13de cette élection-là.
28:15Mais je ne juge pas tout
28:17à l'aune de cette élection.
28:19Et je pense que
28:21chaque fois qu'on peut montrer,
28:23dans les moments les plus difficiles du pays,
28:25de la solidarité
28:27et du désintéressement pour soi-même,
28:29c'est mieux.
28:31Et ce n'est pas ce qu'il a fait, selon vous ?
28:33Non, je n'en sais rien.
28:35C'est vous qui essayez de me faire dire des choses
28:37que je ne veux pas dire.
28:39Vous êtes très bien à dire ce que vous avez envie de dire
28:41et ce que vous n'avez pas envie de dire.
28:43C'est mieux, vous ne m'inviteriez pas autrement.
28:45Pour terminer, François Bayrou, on ne sait pas
28:47combien de temps va tenir ce gouvernement Barnier,
28:49puisque, rappelons-le, la configuration politique
28:51est scalée, avec le risque que
28:53notamment Marine Le Pen et le RN
28:55décident de l'enverser.
28:57Il faudrait alors trouver un nouveau Premier ministre,
28:59si c'était le cas. Écoutez ce que vous disiez
29:01sur ce plateau. C'était en janvier,
29:03précisément au moment où on s'interrogeait
29:05sur la personne qui allait succéder
29:08Je crois que ce serait marrant, oui.
29:10Et peut-être que cela arrivera au cours du quinquennat.
29:12Je crois que
29:14le futur est long.
29:16Je crois que l'avenir est long.
29:18Et j'ai toujours pensé ça.
29:20J'ai toujours pensé qu'il y a des moments où, en effet,
29:22s'imposent des parcours
29:24qui sont un peu différents
29:26et un peu atypiques.
29:28Ce serait marrant, parce que je vous interrogeais
29:30pour savoir si vous pourriez être
29:32nommé Premier ministre.
29:34Aujourd'hui, ce serait moins marrant.
29:36Je rappelle qu'à l'époque...
29:38Il y avait une configuration politique
29:40qui n'était pas la même.
29:42Est-ce que ça reste une possibilité d'ici la fin du quinquennat ?
29:44C'est toujours une possibilité.
29:46Je pense que...
29:48Vous passez un extrait
29:50où je parle
29:52de ce que j'ai toujours cru.
29:54J'ai toujours cru, curieusement et bizarrement,
29:56que
29:58le type de parcours
30:00qui était le mien
30:02conduisait plutôt à exercer
30:04les responsabilités quand la situation
30:06était très grave.
30:08Ça n'était pas...
30:10Le chemin que j'ai choisi
30:12n'est pas le chemin
30:14de la facilité
30:16dans un parti majoritaire
30:18où on se met à aller dans le sens
30:20de l'opinion et où on dit
30:22ce que les sondages veulent entendre.
30:24J'ai toujours pensé
30:26que les hommes politiques
30:28que je respectais, mettons Churchill,
30:30par exemple, toujours des gens qui n'ont
30:32pas hésité à aller à contre-courant
30:34et qui ont pu exercer
30:36les responsabilités les plus graves
30:38dans les moments les plus graves.
30:40Oui, bien sûr.
30:42Vous n'imaginez pas que
30:44j'ai un engagement politique
30:46qui m'entraîne
30:48à occuper des responsabilités superficielles.
30:50Ce n'est pas du tout ça.
30:52Une toute dernière question.
30:54On a l'impression que c'est la deuxième fois que je dis
30:56toute dernière question.
30:58C'est bien.
31:00À la question qui lui était posée par
31:02l'hebdomadaire Le Point, Edouard Philippe,
31:04où en êtes-vous personnellement ?
31:06Il répondait, ce n'est un mystère pour personne
31:08que je serai candidat à la prochaine élection présidentielle.
31:10Est-ce que là aussi,
31:12venant de vous, il n'y aurait pas une forme de franchise
31:14à dire, oui, j'ai 2027
31:16en ligne de mire ? Ça ne veut pas dire que vous allez déclarer
31:18votre candidature ce soir, mais juste au moins d'assumer que
31:20parmi les possibilités, vous dites
31:22je suis un homme politique qui est fait
31:24pour les situations délicates.
31:26Est-ce que là, il n'y aurait pas une forme de franchise à assumer
31:28que ça vaut pour 2027 ?
31:30Là, on ne parle pas de présidentielle, on parle
31:32de gouvernement.
31:34Et puis vous voyez bien, je vais faire une petite
31:36explication de texte. Au fond,
31:38je dis que
31:40avant l'heure, ce n'est pas l'heure
31:42et après l'heure, ce n'est plus l'heure
31:44et que quand on
31:46choisit un moment,
31:48il vaut mieux le faire
31:50en adéquation avec ce que
31:52les gens attendent.
31:54Et que c'est
31:56très perturbant
31:58pour nos concitoyens de voir un monde
32:00politique qui s'excite
32:02autour de problèmes
32:04qui ne sont pas posés
32:06et qui ne le seront que dans plus de deux ans.
32:08Mais vous y pensez.
32:10Mais vous essayez de me mettre
32:12en contradiction avec cette déclaration.
32:14Si je vous faisais la déclaration
32:16que vous attendiez, vous diriez
32:18c'est exactement ça.
32:20Non, pas du tout.
32:22Et donc, quand
32:24c'est de lui qu'il trouve
32:26que les choses sont normales.
32:28Eh bien, ce n'est pas vrai.
32:30J'essaie d'avoir
32:32un minimum
32:34de justesse dans
32:36ce que je défends. Et ce que je défends
32:38pour les autres,
32:40je le défends pour moi-même aussi.
32:42Merci beaucoup, François Mayer, d'avoir été l'invité
32:44de CPAC tous les jours dimanche. Je précise,
32:46puisque c'est important, vous avez dit ce soir,
32:48si c'était un gouvernement avec
32:50une mainmise des Républicains, ça ne pourrait
32:52pas marcher. Il ne pourrait pas y avoir
32:54deux membres du Modem dans ce gouvernement.
32:56Ça, c'est ce que vous avez dit. Et je précise aussi
32:58que vous avez expliqué que si
33:00vous aviez été en charge de former ce gouvernement,
33:02vous auriez pratiqué un renouvellement
33:04intégral, c'est-à-dire pas
33:06de ministre sortant. On verra si
33:08ces conseils sont suivis
33:10ou non par le Premier ministre
33:12Michel Barnier. Merci beaucoup.