François Bayrou, haut-commissaire au Plan, président du MoDem et maire de Pau, était l'invité de Benjamin Duhamel dans C'est pas tous les jours dimanche, sur BFMTV.
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00:00 Bonsoir François Bayrou.
00:01 Bonsoir.
00:02 Merci beaucoup d'être avec nous.
00:03 Je le rappelle, vous êtes maire de Pau, patron du Modem et l'un des plus proches d'Emmanuel Macron.
00:09 Et ça compte dans un moment où l'on s'attend à un remaniement.
00:12 On dit souvent, je le disais tout à l'heure, que dans ce genre de moment, vous êtes un faiseur de roi.
00:17 On y reviendra.
00:19 Pour commencer, est-ce que l'on est dans le vrai si on s'attend dans les heures, dans les jours qui viennent,
00:24 à un changement d'équipe ?
00:25 Vous qui êtes un homme informé.
00:29 Je pense qu'un changement est nécessaire.
00:32 Je l'ai dit déjà depuis plusieurs semaines.
00:34 On a atteint la fin d'une séquence avec ces textes difficiles, mais qui sont passés.
00:41 Notamment la loi immigration.
00:43 Les retraites, l'immigration, qui étaient deux textes majeurs que le président de la République s'était engagé à présenter aux Français.
00:51 Ça n'a pas été simple.
00:53 Ça a été chahuté.
00:54 Ça a été avec des sentiments de difficulté à apprendre cette nouvelle situation politique,
01:06 qui est de ne pas avoir de majorité absolue.
01:09 Donc d'être obligé de travailler, de mettre au point une nouvelle manière de gouverner.
01:16 On n'est pas au bout.
01:18 Ça sera un des sujets de la nouvelle période qui s'ouvre.
01:22 Et donc comme il y a forcément une nouvelle période qui s'ouvre,
01:26 que vous savez bien pour l'instant l'agenda de cette période n'est pas fixé.
01:30 Il faudra qu'il le soit.
01:32 Alors oui, je pense qu'il est légitime qu'il y ait du renouvellement.
01:36 Du renouvellement dans les personnes, pour être très clair, qu'il y ait une nouvelle équipe dans ce gouvernement.
01:44 Vraisemblablement aussi une nouvelle personne à Matignon.
01:48 Nouvelle équipe, nouvelle architecture de l'équipe.
01:51 Enfin tout ça ce sont des hypothèses.
01:53 J'entendais dire tout à l'heure, ça me fait toujours rire,
01:57 comme vous faites semblant de croire à ce qu'écrivent vos confrères.
02:01 Parce que vous savez très bien comme les articles sont écrits.
02:06 C'est-à-dire par exemple, vous pensez à quoi ?
02:07 Vous disiez "feseur de roi".
02:08 Il y a un feseur de ministre en tout cas et de Premier ministre.
02:12 Vous avez de l'influence François Bayrou, pas de fausse modestie.
02:16 Non mais je ne cherche pas ça.
02:18 Je ne cherche pas la fausse modestie.
02:20 Mais cette manière d'écrire l'actualité comme si c'était un western.
02:28 Johnny n'aime pas Billy, qui n'aime pas Peter,
02:32 et donc ils vont en chanclot régler cette question.
02:36 François Bayrou, en 2022, quand il était question que Catherine Vautrin soit nommée à Matignon,
02:40 vous faisiez partie de ceux qui vous y étiez opposés.
02:42 C'était une façon de peser auprès du président de la République.
02:47 Je ne connais pas Madame Vautrin.
02:49 Et donc, j'avais simplement exprimé cela.
02:55 Mais je ne cherche pas à me défausser le moins du monde.
02:58 Parce que cette période-là, c'est la période où le président de la République
03:02 choisit les visages de l'action.
03:04 Or, un visage est un message.
03:07 Et c'est ça qui est important.
03:10 Qu'est-ce que le visage dit de la ligne politique
03:14 et du caractère, à mes yeux, nécessaire pour la fonction de chef de gouvernement ?
03:20 Vous savez très bien qu'il y a beaucoup de gens,
03:24 très expérimentés ou en tout cas extrêmement reconnus dans leur rôle,
03:30 qui pensent que le Premier ministre, ça ne sert à rien.
03:32 Je n'ai jamais appartenu à cela.
03:38 Je pense que la fonction de chef du gouvernement est une fonction en soi
03:42 et que l'équilibre créé par le fait qu'il y a un chef de l'État
03:48 et un chef du gouvernement, avec au fond deux vocations différentes
03:52 et deux missions différentes, pour moi, c'est absolument nécessaire à la Ve République.
03:58 Vous dites que les personnes, c'est un message.
04:04 Alors là, quel est le message que doit incarner ce changement de personnes,
04:10 ce remaniement qui vraisemblablement se dessine ?
04:12 Je pense que l'enjeu aujourd'hui, et c'est un enjeu très lourd,
04:20 c'est de reconstruire une confiance qui s'est hélas délitée
04:26 entre les Français et l'État, entre les Français eux-mêmes
04:32 et même, si j'ose dire, entre les Français et la France.
04:36 L'idée française, ce que nous portons en 2024 dans le monde
04:44 et que nous portons déjà depuis des décennies et des siècles,
04:47 est-ce que ça a du sens et de la pertinence ?
04:50 Moi, je crois que oui.
04:51 Je pense que dans le désordre du monde où on vit
04:54 et que vous décriviez tout à l'heure et que vos images décrivent
04:58 ce qui se passe aux États-Unis, ce qui se passe en Ukraine,
05:02 ce qui se passe au Moyen-Orient, ce qui se passe en Corée,
05:07 dans tout cela, il y a un projet français,
05:13 quelque chose qui est de l'ordre, de l'équilibre
05:17 entre la modernité et l'enracinement.
05:20 Et plus que ça encore, quelque chose qui est du devoir
05:24 de rassembler les Français, de fédérer les Français.
05:27 C'est pourquoi je me suis battu toute ma vie
05:29 pour sortir du clan contre clan, qui était la règle,
05:35 la loi dont on n'imaginait pas qu'on puisse jamais s'extraire.
05:39 Donc ça, c'est pour le message, le message d'unité.
05:41 Mais il faut parler des visages.
05:43 D'unité et de projets portés dans la vie.
05:46 Et de projets portés. Il faut parler des visages.
05:48 Aujourd'hui, vous avez Amatignon, Elisabeth Borne,
05:51 dont on dit que vraisemblablement, elle pourrait quitter son poste.
05:54 Voilà ce que vous disiez en juin 2022,
05:56 après les élections législatives, vous disiez la chose suivante.
05:58 Les temps exigent que le Premier ministre
06:00 ou la Premier ministre soit politique,
06:02 qu'on n'ait pas le sentiment que c'est la technique
06:05 qui gouverne le pays.
06:06 Est-ce que le François Bayrou de janvier 2024, d'aujourd'hui,
06:09 pourrait redire ce que disait le François Bayrou de juin 2022 ?
06:12 Eh bien, vous vérifierez là que je ne change pas d'avis tous les jours.
06:16 Je pense en effet, vous voyez bien qu'il y a là une différence.
06:21 Nicolas Sarkozy disait de François Fillon, c'est un collaborateur.
06:26 Je n'ai jamais pensé ça.
06:28 Alors peut-être, il y a beaucoup de gens, y compris des mieux informés,
06:35 qui pensent que je me trompe.
06:37 Je pense qu'un Premier ministre, c'est quelqu'un
06:39 qui porte une partie du projet du pays.
06:42 Il est naturellement choisi par le Président de la République
06:45 qui lui est investi par les Français.
06:47 Ce n'est pas la même chose.
06:48 Le Président de la République, il n'est pas un chef politique seulement.
06:51 C'est un chef, c'est le représentant, le défenseur, le promoteur
06:57 de l'unité nationale.
06:59 Donc si je vous suis François Bayrou, Elisabeth Borne n'est plus
07:03 la bonne personne pour diriger le gouvernement.
07:05 Ça veut donc dire qu'il faut qu'elle laisse sa place.
07:07 Ne me faites pas dire ça.
07:09 Je sais très bien que le métier de journaliste, c'est d'essayer
07:11 de faire se battre les montagnes.
07:13 Non, mais d'essayer de parfois de traduire ce qui est dit
07:15 en des termes élégants.
07:17 Si vous dites que le François Bayrou de juin 2022
07:20 est le même qu'aujourd'hui, ça veut donc dire que
07:22 Elisabeth Borne n'est pas sa place.
07:24 C'est le même qu'aujourd'hui, mais Elisabeth Borne,
07:26 elle a aussi appris la politique dans des circonstances
07:31 qui ne sont pas simples à l'Assemblée nationale.
07:33 Mais il peut-il y avoir une nouvelle impulsion
07:35 avec la même Première ministre ?
07:37 C'est au Président de la République et à elle,
07:39 Premier ministre, de le dire.
07:41 C'est le Président de la République qui tranche.
07:43 C'est lui qui sent le moment dans lequel nous sommes.
07:46 Et ce moment, pour moi, il est terriblement exigeant.
07:49 Vous voyez, tous les papiers que vous entendez
07:54 ou que vous faites, ils portent tous la même entienne.
07:59 C'est la fin du cycle.
08:04 C'est comme le Président de la République
08:07 ne peut pas se représenter.
08:09 Tout ça va s'achever.
08:11 Les uns disent en que nouilles, les autres...
08:13 Je crois exactement le contraire.
08:15 Je pense d'une certaine manière que les choses commencent aujourd'hui.
08:19 Parce que c'est comme ça dans l'histoire.
08:22 C'est après avoir un temps d'expérience,
08:24 après avoir vécu des tempêtes,
08:28 et Dieu sait que le Président de la République
08:31 a connu des tempêtes lourdes,
08:33 probablement sans précédent,
08:36 dans une période de cette année comme celle qu'on vient de vivre.
08:41 Je pense que ça commence maintenant.
08:44 Et pour que ça commence,
08:46 il faut que l'on sente que ceux qui ont la charge des affaires
08:51 prennent cette charge avec l'optimisme et la détermination
08:56 de porter pour le pays une politique exemplaire.
09:00 C'est quoi le portrait robot du bon ou de la bonne Premier ministre ?
09:04 Si on suit cette volonté que vous exprimez ce soir ?
09:09 Vous savez, il y a une vieille expression française
09:14 qui dit "vous faites l'âne pour avoir du son".
09:16 Je vois à peu près l'idée.
09:19 Je vais continuer à faire l'âne.
09:21 Vous voyez bien, je n'ai pas envie d'entrer dans le jeu des noms.
09:25 Ce que je pense, et je vais vous répondre sérieusement et sur le fond,
09:32 c'est qu'il faut qu'il y ait une cohérence
09:35 entre le projet qu'a porté Emmanuel Macron
09:41 quand il a été élu président de la République,
09:43 cet immense projet de renouvellement,
09:48 cet immense projet de refondation
09:52 de tout ce qui est aujourd'hui en France affaibli.
09:56 L'idée républicaine est affaiblie, l'idée de l'État est affaiblie.
09:59 On a besoin d'y croire de nouveau.
10:02 On a besoin que ce que se projette dans l'avenir,
10:05 cette vision-là, et cette vision-là,
10:08 elle n'est pas seulement importante pour la France aujourd'hui.
10:11 Parce que l'Europe est dans la crise que vous savez,
10:14 et qui est une crise décisive pour son avenir,
10:19 et que le monde est dans une série de crises
10:22 qui sont autant de tremblements de terre
10:24 qui retentissent les uns sur les autres.
10:26 – Je vais vous demander dans un instant, mais pardon de rester sur les noms,
10:29 est-ce que, parmi ceux qui sont cités,
10:31 il y a le ministre de la Défense Sébastien Lecornu ?
10:33 Est-ce que Sébastien Lecornu correspond,
10:35 dans son profil idéologique, à ce que vous venez de dire ?
10:37 Parce que, pardon François Bayrou, ce qu'on lit partout dans la presse,
10:41 c'est que vous ne souhaiteriez pas la nomination de Sébastien Lecornu,
10:44 que vous y opposeriez.
10:46 – Je ne suis pas faiseur de Premier ministre,
10:48 mais je répète que pour moi, l'adhésion profonde
10:58 du futur chef du gouvernement, du ou de la future chef du gouvernement,
11:03 à cette idée que non, on n'est pas dans une fin de cycle,
11:08 non, on n'est pas dans la continuation de la politique
11:11 comme elle s'est faite depuis des décennies,
11:14 et au fond dans lequel il suffirait d'être bien placé,
11:17 non, ce n'est pas ça le portrait robot.
11:19 Le portrait robot, c'est quelqu'un qui croit que cet engagement,
11:24 si nécessaire aujourd'hui, qu'on va retrouver confiance dans quelque chose,
11:30 qu'on va pouvoir de nouveau avoir confiance les uns dans les autres,
11:35 qu'on n'est pas un pays dans lequel on reconstitue perpétuellement
11:39 les guerres d'un clan contre l'autre, regardez Trump contre Biden.
11:42 – Attendez, juste François Bayrou, pardon, mais je fais la traduction,
11:45 vous dites "il ne faut pas reconstituer les clans les uns et les autres",
11:47 Sébastien Lecornu est quelqu'un qui vient de la droite,
11:50 est-ce que vous qui, comme vous l'avez dit,
11:52 avez toujours été attaché à l'idée d'un centre indépendant,
11:54 est-ce que ça vous pose un problème ?
11:56 – On n'a pas été seulement attaché, Marcel Raduamel.
11:59 – Non, mais est-ce que ça vous pose un problème d'envisager
12:01 qu'arrive à Matignon quelqu'un qui vient de la droite comme Sébastien Lecornu ?
12:06 – Mon problème ou mon débat n'est pas avec telle ou telle personne,
12:10 même si ça vous ferait plaisir, ça vous ferait un titre…
12:12 – Non mais j'essaye de décrypter pour ceux qui n'en gardent.
12:14 – Ça vous ferait un titre, je crois qu'ils ont compris,
12:16 ça vous ferait un titre pour demain matin.
12:18 – Ils ont compris que vous n'étiez pas favorable.
12:20 – Je suis attaché à ce renouveau inédit et totalement imprévu
12:28 qui en 2017 a fait abattre les deux clans
12:34 qui tenaient par un monopole absolu le pouvoir depuis 50 ans,
12:39 qui nous ont entre parenthèses conduit où nous sommes,
12:43 cet affrontement-là nous a conduit où nous sommes,
12:46 parce qu'il a empêché de réunir le pays au moment
12:48 où il n'avait plus besoin d'être réuni.
12:50 – Donc si je comprends, il faut plutôt quelqu'un
12:52 qui soit garant de la poursuite de ce sens du dépassement.
12:55 – Oui.
12:57 – C'est clair, quelqu'un qui soit dans cet épure du macronisme.
13:01 – Le mot de dépassement est une autre manière de dire
13:04 le centre qui réunit le pays.
13:06 – Est-ce que donc, par exemple, quelqu'un comme Julien Denormandie,
13:09 ancien ministre de l'Agriculture, compagnon de route historique
13:12 du président de la République qui avait fait le choix
13:14 de quitter la vie politique en 2022,
13:16 correspond à cette idée de dépassement ?
13:18 – En tout cas, c'est quelqu'un de très estimable
13:20 et en phase avec cette idée, il n'est pas le seul.
13:23 Mais pour moi, là est la clé.
13:27 Les Français ont fait quelque chose
13:31 qui était absolument inattendu de tout le monde,
13:34 y compris d'eux-mêmes.
13:36 Ils ont dit "écoutez, tous ces gens-là qui bloquent
13:41 la vie politique depuis des années, et nous étions,
13:44 vous en conviendrez très très peu, à proposer une autre idée de l'avenir".
13:49 Et non seulement on était peu à la proposer,
13:51 mais il y avait encore moins de gens qui pensaient que c'était possible.
13:55 Ce choix que le pays a fait, il y a des gens qui croient
13:58 que c'est un accident, pas du tout, moi je crois
14:00 que c'est quelque chose de profond.
14:02 Les Français ressentent que tout ce qui s'est affaibli,
14:06 dissous, délité au travers du temps, on doit le reconstruire.
14:10 Et j'ajoute moi qu'on peut le reconstruire.
14:13 Mais ça se fait, vous voyez bien, dans une cohérence
14:16 qui suppose une équipe des hommes et des responsables
14:20 qui partagent cette vision.
14:21 – Et vous dites Julien Denormandie "homme estimable" pour vous citer.
14:25 – Jeune homme estimable.
14:27 – Est-ce que, pardon d'y revenir, puisqu'il est aussi cité,
14:30 Sébastien Lecornu a les épaules pour être Premier ministre.
14:33 – Non mais je ne veux pas juger un tel et un tel.
14:36 – Vous me dites que Julien Denormandie est un homme estimable,
14:38 jeune homme estimable.
14:39 Je remarque que vous n'avez pas eu le même adjectif
14:41 pour qualifier Sébastien Lecornu.
14:43 – Je vois bien dans quoi vous voulez m'entraîner,
14:45 mais comme vous avez parfaitement compris ce que je voulais dire,
14:47 on ne va pas continuer.
14:48 – Alors dans ce cas-là, j'ai une autre question.
14:49 Le fait que Julien Denormandie n'ait jamais été élu,
14:51 est-ce que ça ne pose pas un problème pour arriver à Matignon ?
14:54 Encore plus quand on est en majorité relative.
14:56 – C'est sans doute… je pourrais faire d'autres portraits robots.
15:02 Je pourrais plaider pour une expérience plus importante,
15:06 je pourrais plaider pour un enracinement plus important.
15:09 – On se demande à qui vous pensez.
15:11 – J'arriverais à trouver des éléments de portrait
15:17 que je trouverais adaptés à la situation.
15:20 Mais je ne veux pas interférer de cette manière
15:24 en apparaissant comme jouant à ces batailles de cours de récréation.
15:29 Je vous assure, Sébastien Lecornu, je le connais très très peu.
15:34 Je connais son parcours.
15:36 – Et de ce que vous voyez de lui ?
15:38 – Je connais son parcours, mais je le connais très peu.
15:41 Je ne suis pas dans une querelle, moi.
15:44 J'espère ne jamais être dans une querelle,
15:46 ça fait très longtemps que j'ai quitté ces rangs querelleurs.
15:50 Non, je pense que, je vous l'ai dit, un visage c'est un message.
15:56 Et pour moi, ce qui m'importe c'est le message.
15:59 – Vous vous feriez un bon Premier ministre ?
16:03 – Je crois que ce serait marrant, oui.
16:05 – Et alors pourquoi ?
16:07 – Parce que vous savez bien que je suis bloqué
16:09 pendant encore un certain nombre de semaines.
16:11 – Jusqu'au 5 février, je crois ?
16:13 Et pourquoi le Président n'a-t-il pas attendu début février
16:15 pour ensuite pouvoir éventuellement vous choisir ?
16:17 – Je suis sûr que c'est une question que vous lui poserez quand vous le verrez.
16:20 – Oui, peut-être, d'ailleurs, s'il veut venir et s'il nous regarde, il pourrait venir.
16:23 Pourquoi vous dites "marrant" ? Parce que vous aimeriez, c'est pas…
16:26 – Vous savez bien que vous ne pouvez pas être un responsable politique
16:32 et éluder une responsabilité de cet ordre si elle vous est confiée.
16:38 – Et peut-être que cela arrivera au cours du quinquennat.
16:40 – Je crois que le futur est long, je crois que l'avenir est long.
16:45 Et j'ai toujours pensé ça, j'ai toujours pensé qu'il y a des moments
16:48 où en effet s'imposent des parcours qui sont un peu différents et un peu atypiques.
16:55 – Parlez du poste de Premier ministre, vous dites "le futur est long",
16:59 ça veut aussi dire que pour éventuellement être candidat à l'élection présidentielle en 2027,
17:03 ça rentre dans le futur est long aussi ?
17:05 – Mais c'est très simple, c'est une question qui est bizarre
17:09 parce qu'on croirait que c'est une question de carrière.
17:14 Il se trouve que pour moi je ne le vis pas comme ça.
17:17 Ce n'est pas une question de carrière, c'est une question de vocation.
17:20 – Et c'est votre vocation d'être candidat à l'élection présidentielle ?
17:23 – Attendez, c'est ma vocation d'être citoyen, je pourrais le dire autrement.
17:27 – Tous les citoyens ne veulent pas être président de la République ?
17:29 – Je pourrais le dire autrement, c'est ma vocation d'être père de famille.
17:33 Je vois depuis des années, et entre nous et au passage
17:39 s'en mettre souvent trompé sur les problèmes qui se posent.
17:44 Je vous rappelle qu'on a fait de la dette une question centrale lors de l'élection de 2007.
17:50 Si on avait écouté peut-être aujourd'hui, on n'en serait pas exactement là.
17:54 De l'investissement, de la reconquête de la production,
17:59 ce sont les thèmes qui sont… de la démographie,
18:03 des thèmes centraux dont personne ne parlait ou dont personne ne parle aujourd'hui.
18:08 Donc oui, je suis un citoyen engagé, totalement engagé.
18:15 – On a compris, un mot encore sur ce remaniement,
18:17 est-ce que vous faites partie de ceux qui disent
18:19 "il faut que ce soit un gouvernement resserré" ?
18:21 Qui est beaucoup moins de ministres, des grands pôles, et est-ce que c'est crédible ?
18:25 Parce qu'au fond, François Bayrou, on entend ça à chaque fois,
18:27 c'est donner une sorte de bon chiffre.
18:29 – Je ne peux pas vous donner tort, vous avez raison,
18:31 chaque fois on dit ça, puis chaque fois les chiffres vont tutoyer les sommets.
18:37 – Vous avez le sentiment que cette fois, ça peut se faire ?
18:41 – Je vais vous dire, ce que j'observe, pardon pour les ministres qui vont m'en vouloir,
18:44 mais ceci est dit de bonne foi, les messages des ministres se contredisent
18:51 ou se marchent sur les pieds entre eux tout le temps.
18:55 Vous êtes préfet aujourd'hui, je vous assure que préfet aujourd'hui,
18:59 ça va s'arracher les cheveux, parce que les cabinets de tous les ministres
19:02 vous appellent pour une action nouvelle, formidable, essentielle,
19:08 et tout ça se contredit ou en tout cas se marche sur les pieds.
19:14 – Il y a des ministres qui s'apparentent, si je dois résumer.
19:16 – Non, ce n'est pas ce que je veux dire, je ne dis pas que…
19:19 Je dis que trop souvent, les membres du gouvernement considèrent
19:26 que leur destin est plus important que le destin général.
19:32 Et eux, leur cabinet, leurs équipes, passent leur temps à inventer des choses nouvelles.
19:37 Par exemple, je pense, je crois que le président de la République le pense aussi,
19:40 je pense qu'on fait trop de lois, je pense que les débats éternels…
19:45 c'est utile, mais on peut gouverner autrement
19:49 qu'en créant des polémiques perpétuelles à l'intérieur du pays.
19:53 – Je voudrais aborder avec vous deux sujets d'actualité.
19:57 Le premier, c'est la question de l'immigration.
20:00 On a vu cette loi qui est passée, vous l'avez vu au pied tout à l'heure,
20:04 le Conseil constitutionnel a jusqu'au 26 janvier pour se prononcer,
20:07 et on voit une situation assez singulière,
20:09 où vous avez à la fois les partis de gauche qui espèrent
20:11 que le Conseil constitutionnel censure tout ou partie de la loi,
20:14 mais aussi on a entendu le président de la République
20:16 espérer qu'au fond le Conseil constitutionnel fasse le ménage.
20:19 Est-ce qu'il n'y a pas une forme de singularité institutionnelle
20:22 où vous espériez que le Conseil constitutionnel
20:25 soit une sorte de voie de rattrapage pour un texte qui est passé
20:28 et qui ne vous satisfait pas tout à fait ?
20:29 – Pardon, je ne traduis pas le président de la République,
20:31 mais il n'a pas dit "espérer qu'il fasse le ménage".
20:34 Le président de la République, c'est le défenseur de notre Constitution
20:38 et dans notre Constitution, pour s'assurer qu'il n'y a pas d'entorse
20:43 aux principes majeurs, il y a une institution
20:46 qui s'appelle le Conseil constitutionnel.
20:48 Et il lui a fait jouer son rôle.
20:50 Conformément à la Constitution, il a saisi le Conseil constitutionnel
20:54 pour vérifier que les principes sacrés, j'allais dire, essentiels…
20:58 – Mais vous espérez que cette loi soit amodiée, purgée
21:01 d'un certain nombre d'éléments qui ont fait débat.
21:03 La question de la caution pour les étudiants étrangers,
21:05 la question des prestations sociales, des éléments au cœur du débat.
21:08 – J'ai dit assez souvent sur votre plateau aussi, je crois,
21:11 que oui, j'étais contre une caution pour les étudiants étrangers.
21:15 Parce que ce n'est pas avec les moyens des parents
21:18 qu'on choisit les étudiants qui vont faire des études en France
21:21 et donc à partir de cet instant, porter aussi une part de l'avenir
21:25 de la francophonie, c'est-à-dire de ce que nous avons de plus précieux.
21:29 – Vous étiez opposé au texte de loi, tel qu'il était fagoté,
21:34 si vous me permettez l'expression, sorti du Sénat ?
21:36 – Je pensais qu'il y avait des amodiations.
21:39 Je n'ai jamais pensé qu'il y avait dans le texte de la loi
21:44 des principes sacrés qui soient mis en cause.
21:47 Si je l'avais pensé, je m'y serais opposé.
21:50 Mais quand je regarde, par exemple, l'exigence qui est faite
21:55 qu'un jeune fille ou un jeune homme qui veut devenir français
21:59 formule ce souhait ou ce vœu, alors je me dis qu'il n'y a rien là
22:05 que de très normal. Et quand on me dit "mais il y a quelque chose
22:09 de terrible, c'est qu'un type qui a la double nationalité
22:14 et qui commet un crime en France, on lui enlève sa nationalité française".
22:18 Mais où est le problème ? De quoi ? De quoi parle-t-on ?
22:24 Il n'y a aucune atteinte au principe…
22:27 – Pardon François Bayraud, mais le fait de faire une différence
22:29 dans certaines allocations entre les Français et les étrangers,
22:32 ça ressemble à ce que Marine Le Pen et Jean-Marie Le Pen, son père,
22:36 défendaient depuis près de 30 ans, à savoir ce qu'il s'appelle
22:38 la priorité nationale.
22:39 – Oui, vous savez très bien que cette différence, elle existe.
22:43 – Dans certaines allocations, le renseignement de la priorité active,
22:45 la prime d'activité, mais pas quand il s'agit comme des allocations
22:48 familiales pour les enfants, des aides au logement, c'est pas pareil.
22:51 – Pour les allocations familiales, vous savez très bien que je pense
22:54 qu'en effet, ce n'est pas justifié et que là, la précision ou la décision
23:03 qui va être celle du Conseil constitutionnel sera attendue et bienvenue.
23:07 – Un dernier mot d'actualité avec vous François Bayraud,
23:10 est-ce que Gérard Depardieu rend fière la France ?
23:14 – Non, alors je sais très bien le Président de la République,
23:20 ce qu'il avait en tête, il déteste la chasse aux sorcières.
23:22 – C'est ce qu'il a dit, il a dit que Gérard Depardieu rendait fière la France
23:24 et vous dites à l'instant non.
23:26 – Il déteste la chasse aux sorcières, mais moi je vais vous dire,
23:31 quelqu'un qui parle des femmes de la manière dont il en a parlé,
23:39 quelqu'un qui parle des enfants et singulièrement des petites filles
23:45 de la manière dont il en a parlé, et quelqu'un qui regarde les petites filles
23:49 comme ça, je n'ai aucune indulgence, aucune espèce de…
23:55 enfin on ne me trouvera pas parmi ces défenseurs,
23:58 je ne doute pas que ce soit une dérive, enfin quelque chose,
24:02 vous savez bien que personnel avec le temps, mais pour moi,
24:09 il y a là une offense à ce que je crois de plus sacré,
24:13 et que ce soit un acteur, même un grand acteur, je m'en fiche,
24:17 je ne veux pas prêter le moindre complaisance avec des mots,
24:26 des attitudes et peut-être pire encore, des regards de cet ordre.
24:30 – Mais alors comment vous expliquez que le président de la République
24:32 ait tenu ses propos, Gérard Depardieu rend fière la France,
24:35 je n'aime pas les chasses à l'homme en ayant à peine un mot pour les victimes,
24:38 vous qui le connaissez très bien, comment est-ce que vous expliquez
24:40 qu'il ait pris au fond une position qui est orthogonale
24:42 à celle que vous venez de prendre ?
24:44 – D'abord on a tous le droit d'avoir des positions différentes.
24:48 – C'est une faute ?
24:49 – Non, ce que je crois c'est que ce qui l'atteint le plus,
24:54 c'est quand une meute se jette sur quelqu'un.
24:58 – Mais parfois…
24:59 – Mais ce jour-là, parfois, la meute, et Dieu sait que ce n'est pas plaisant,
25:04 les meutes, et Dieu sait que ce type de halalie est détestable,
25:10 mais parfois il y a de l'indéfendable dans un certain nombre d'attitudes,
25:15 et en tout cas pour moi, on est dans cet ordre-là.
25:19 – C'était une erreur ?
25:20 50% des Français considèrent que le président de la République
25:23 a trop défendu Gérard Depardieu, c'était une erreur ?
25:25 – Oui, je pense que le début de ces phrases était juste,
25:27 et après qu'il s'est laissé entraîner,
25:31 alors je sais très bien que Gérard Depardieu est un grand acteur,
25:36 je sais très bien qu'il a joué des rôles…
25:38 – Ce que d'ailleurs personne ne conteste.
25:40 – … qu'il a joué des rôles formidables,
25:43 mais je ne confonds pas l'artiste et l'homme,
25:48 c'est l'homme qui pour moi dans cette question a dérivé,
25:53 et vous savez bien, j'ai souvent exprimé ça,
25:57 je n'accorde pas la moindre indulgence à ce genre de dérive,
26:01 parce que sexualisé, comme on dit des enfants,
26:07 je trouve qu'il n'y a pas pire dans l'ordre de ce qu'un homme doit être.
26:14 – Il faut lui retirer la Légion d'honneur, Gérard Depardieu ?
26:16 – Je ne suis pas membre du comité de la Légion d'honneur.
26:19 – Il pourrait y avoir un avis ?
26:22 – C'est en cours, c'est un débat, je ne suis pas juge et parti,
26:27 dans cette affaire, je ne suis pas juge, je suis parti,
26:30 je suis défenseur de quelque chose qui s'appelle la décence
26:35 à l'égard des femmes, et plus encore,
26:40 et beaucoup plus encore à l'égard de l'enfance.
26:43 – Merci beaucoup François Bayrou d'avoir été l'invité de C'est pas tous les jours dimanche,
26:47 on retient qu'il pourrait donc y avoir un changement dans les heures qui viennent,
26:51 et que vous considérez que Julien Denormandie est un jeune homme estimable,
26:54 qu'à l'inverse Sébastien Lecornu, vous le connaissez assez peu,
26:57 on n'en saura pas plus, mais sans doute ceux qui nous ont regardés
26:59 sauront décrypter ce que vous venez de nous dire, merci beaucoup.
27:02 – En tout cas vous les y aurez aidés. – J'espère, modestement, merci beaucoup.