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À l’Assemblée nationale, ce mercredi 2 octobre, lors des questions au gouvernement, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau s’est exprimé au sujet de l’expulsion des délinquants clandestins.

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Transcription
00:00La politique de M.Croissanteau, Bruno Retailleau, le ministre de l'Intérieur, a évoqué hier, lors des questions au gouvernement, la possibilité de renvoyer les sans-papiers dans des pays tiers.
00:10On l'écoute.
00:11On va pouvoir enfin inverser la charge de la preuve pour l'éloignement des irréguliers et même, parfois, ne pas obtenir leur accord pour les éloigner dans des pays tiers, qui ne seront pas leurs pays d'origine.
00:24Ce sera un chantier.
00:25Croyez-moi que jamais je ne me résoudrai à l'inaction.
00:28Jamais.
00:29Jamais.
00:30Alors Mathieu ?
00:31Pour l'instant, ce n'est pas possible.
00:33Ce n'est pas possible et on voit, contre leur accord, renvoyer des migrants dans des pays tiers.
00:38D'abord, qu'est-ce que c'est qu'un pays tiers ?
00:39Quand on parle d'immigration, c'est un pays qui est jugé stable et sûr.
00:43Stable, ça veut dire que ce n'est pas un pays en guerre, par exemple, et sûr, ça veut dire que les droits du migrant qui sera envoyé seront respectés, qu'il ne sera pas pourchassé ou, s'il a demandé l'asile, qu'il ne sera pas expulsé dans son pays d'origine.
00:54Voilà, pas son pays d'origine.
00:56Je disais que ce n'est pas possible, mais on voit bien que le ministre de l'Intérieur tourne autour de cette idée de pays tiers, déjà avec deux idées.
01:01La première, ce serait de sous-traiter l'examen des demandes d'asile dans des pays à l'extérieur des frontières de l'Union européenne.
01:06Et puis, la deuxième idée, on voit l'entendre, expulser des sans-papiers dans des pays tiers si leurs pays d'origine ne veulent pas les reprendre.
01:13On voit bien l'idée générale, c'est d'externaliser notre politique d'immigration à d'autres pays.
01:18Ça fait bondir les ONG, ça fait bondir les juristes, tous les spécialistes des droits humains et ça pose évidemment beaucoup de questions.
01:26Est-ce que ça marche ?
01:27Alors, ça marche, je vais y venir, mais d'abord, les questions que ça pose, ça pose une question philosophique.
01:31C'est un peu cacher cette misère que je ne saurais voir.
01:34Quand l'humanité riche est dérangée par l'humanité pauvre, tu ouvres une humanité un peu moins pauvre pour s'en occuper.
01:39Et il faut se souvenir que derrière tous ces chiffres de migrants, Nicolas disait tout à l'heure que derrière des chiffres, il y a des vies, on est commis,
01:45c'est évidemment la même chose en matière d'immigration.
01:47En gros, tu viens d'Afghanistan, tu veux aller en Angleterre, tiens, va faire un tour au Rwanda, tu vas voir si ça va te plaire.
01:53Ce n'est pas comme ça qu'on traite les gens.
01:55Ensuite, ça pose un problème éthique, car on n'est pas toujours très regardant sur la prétendue sûreté du pays.
02:00Je ne citais pas le Rwanda par hasard, c'est le pays qui avait choisi, avant d'y renoncer, le Royaume-Uni pour externaliser sa politique migratoire.
02:06Or, le Rwanda, certes, est un pays stable, ce n'est pas en guerre, mais un pays sûr, c'est quand même un régime très autoritaire.
02:11Même la Cour suprême au Royaume-Uni avait dit que ça posait problème.
02:15Ça pose aussi une question économique, j'allais dire.
02:17Tout ça, ça coûte.
02:18Le Royaume-Uni avait versé 280 millions d'euros au Rwanda déjà pour un an et demi.
02:22L'Italie, qui vient de signer un accord, cette fois-ci pour l'examen des demandes d'asile avec l'Albanie, prévoit de verser 600 millions en cinq ans.
02:28Et puis enfin, dernier problème, ça pose un problème juridique, car le traitement des migrants est à la fois encadré par le droit international et par des directives européennes.
02:37Alors, ça marche ou ça peut marcher ?
02:37Alors, ça n'a pas marché au Royaume-Uni, où le nouveau Premier ministre, en juillet, Keir Starmer, l'a jugé inefficace, cette politique.
02:45Quatre migrants seulement avaient été renvoyés au Rwanda, parce qu'il y avait eu de nombreux recours, et puis il l'avait surtout jugé non-dissuasif.
02:51Pour l'Italie, elle vient de signer cette année, il faudra attendre de voir ce que ça donne avec l'Albanie.
02:55Dans la philosophie, ça ressemble quand même un petit peu à ce qu'a fait l'Union européenne quand elle avait demandé, en pleine crise migratoire à la Turquie,
03:01de renforcer ses contrôles aux frontières pour les migrants, contre de l'argent.
03:05Mais est-ce que Bruno Retailleau peut mettre en place une telle mesure ?
03:07Non. En tout cas, pas tout de suite et pas tout seul. Ça, il faut le savoir.
03:12Et puis alors, encore, cette idée de renvoyer les gens contre leur accord, je pense que ça ne tiendra pas la route juridiquement.
03:17D'abord, ça se joue au niveau européen. Il en a dit un mot, le ministre, notamment dans le cadre de la rediscussion d'une directive qui s'appelle la directive Retour.
03:23Elle date de 2008 et elle encadre le retour des étrangers dans leur pays d'origine.
03:27C'est une directive qui est assez protectrice des migrants, qui a été renforcée par des décisions de la Cour de justice européenne.
03:33Et en gros, on voit bien que le taux de retour dans l'Union européenne, il est de 20 %.
03:36C'est-à-dire qu'il y a un peu plus de 100 000 décisions de retour qui sont prononcées, mais 20 % seulement qui sont effectuées.
03:40Mais en mai dernier, 15 pays emmenés par le Danemark ont lancé un appel commun pour développer l'externalisation de la politique migratoire.
03:47Et donc le recours à ces pays tiers. Je disais, ça ne se jouera pas tout seul. Il faudra en discuter avec l'Europe.
03:50Et puis ensuite, il faut en discuter ici. Et là, Bruno Rotailleau, il va peut-être avoir du mal à trouver une majorité pour voter un truc pareil.

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