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00:00Mathieu Mabin, on vous retrouve comme chaque jour en direct de Washington, bonjour à vous.
00:03Cette année de guerre a prouvé beaucoup de choses, et notamment une,
00:07Joe Biden semble bien incapable de retenir le bras de Netanyahou.
00:13Oui, Julien, on peut retourner cette année dans tous les sens, c'est ce que vient de faire Anne Corbet avec nous.
00:18On ne voit pas comment on pourrait la voir autrement
00:21comme un gigantesque drame doublé d'un échec collectif au moins diplomatique.
00:26C'est d'ailleurs ce qui explique la frustration d'une part de l'aile gauche du parti
00:29et surtout de l'électorat démocrate ici.
00:32Cette vision souvent jugée simpliste mais pourtant cohérente,
00:36comme souvent les choses simplistes, vous me l'accorderez,
00:38Joe Biden avait et a toujours la main sur le dépôt de munitions de l'armée israélienne.
00:44Et pour faire simple, donc, dans l'imaginaire de ceux qui vivent loin des contraintes
00:48auxquelles sont soumises les nations et surtout les États,
00:50il avait le pouvoir de fermer le robinet des bombes et donc d'arrêter la guerre.
00:55Comment le leader d'un petit État de moins de 10 millions d'individus
00:59aurait-il pu contraindre le commandant en chef de la plus puissante démocratie de la planète ?
01:03Eh bien, c'est ce qui se passe quand la politique rencontre la diplomatie.
01:07Tout simplement, Joe Biden ne commande pas le peuple américain, il lui obéit.
01:11Et ici, après le 7 octobre, il faut le dire, l'écrasante majorité des citoyens en âge de voter
01:17et même les plus jeunes n'avaient qu'un seul désir, voir le Hamas rayer de la carte.
01:22Et là encore, cela s'est souvent traduit en des expressions un peu simplistes
01:26de la part de l'administration Biden, mais aussi et surtout de l'opinion américaine.
01:31Parce que même si, encore une fois, l'écrasante majorité de l'opinion américaine
01:35était tenaillée le 8 octobre après avoir découvert, sidéré l'horreur du pogrom,
01:40même si cette opinion était tenaillée par un désir de vengeance, il faut le dire,
01:45il n'était pas nécessaire d'être un visionnaire pour comprendre
01:48qu'une petite frange de l'opinion allait se cabrer et refuser une énième guerre à Gaza.
01:54Une minorité, c'est vrai, mais qui avec ses tambours, ses keffiers, ses slogans,
01:59s'est tout simplement emparée des universités, par exemple,
02:02ces universités américaines et des rues des grandes agglomérations depuis un an.
02:06Alors c'est vrai que si on ne s'était pas trouvé à un an de l'élection,
02:10Joe Biden en campagne aurait peut-être faim de ne pas aller voir ses contestataires de l'intérieur.
02:17Mais aujourd'hui, la réalité est la suivante, si le camp démocrate perd l'élection dans un mois,
02:22ce sera probablement à cause du conflit au Moyen-Orient.
02:26En tout cas, ce sera une des raisons. On en est là.
02:29Et donc, pour répondre directement à votre question, Julien,
02:32on comprend alors beaucoup mieux le pouvoir qui s'est trouvé entre les mains de Benjamin Netanyahou.
02:37On comprend beaucoup mieux que le Premier ministre d'une petite nation en guerre,
02:40là-bas au Moyen-Orient, a pu dicter ses conditions au géant américain
02:45jusqu'à donner au discours de Joe Biden l'apparence d'une contradiction permanente.
02:50Voici toutes les bombes que vous voulez, mais surtout ne les utilisez pas.
02:54C'est un petit peu ce qu'on a entendu depuis un an.
02:55Le camp démocrate n'aurait pas pardonné à Joe Biden de ne pas voler au secours de l'État d'Israël.
03:02Mais cette part du camp démocrate qui ne pardonne pas Gaza à l'administration Biden-Harris
03:08se prépare à sanctionner la candidate dans les urnes.
03:11Et je termine avec un rappel.
03:13La diplomatie américaine a tout mis en œuvre pour transformer le drame atroce du 7 octobre
03:18en opportunité de régler la crise, une bonne fois pour toutes.
03:22Pour ça, Antony Blinken est allé 10, 12 fois sur le terrain pour trouver une autorité de substitution au Hamas,
03:29des figures palestiniennes appuyées par les pays arabes voisins d'Israël
03:34et dans le sillage des accords d'Abraham.
03:36Mais non, ça n'a pas marché, ça n'a pas marché.
03:39Et on ne prend pas beaucoup de risques en précisant que dans un mois,
03:42l'Amérique aura un nouveau président ou une nouvelle présidente
03:47qui trouvera toujours, face à lui, Benjamin Netanyahou dictant ses conditions.
03:51Et puisque vous parlez de raisonnement simpliste, Mathieu, parlons de Donald Trump.
03:56Pour lui, la question serait en fait vite réglée, comme à chaque fois l'ex-président le dit le 7 octobre.
04:02Il n'aurait pas eu lieu s'il avait été aux commandes.
04:08Oui, et puis c'est l'un des chocs de cette campagne.
04:10Si on exclut le retrait tardif de Joe Biden, on se l'est dit,
04:14traditionnellement, la communauté juive américaine est fortement marquée,
04:17non pas à gauche, comme on peut le dire parfois dans la presse française,
04:21mais bien dans le camp démocrate,
04:23aux côtés de cette classe politique américaine qui tolère le progressisme.
04:27Vous savez à quel point l'Amérique s'organise en communauté, de manière tout à fait décomplexée.
04:32C'est une des différences notoires entre nos deux rives de l'Atlantique, vous le savez.
04:37Or, le choc ressenti par la communauté juive ici, après le 7 octobre,
04:42et l'explosion des actes antisémites aux Etats-Unis,
04:45qui sont encore supérieurs à ce que vous pouvez observer en Europe,
04:49ont ouvert la tentation de se tourner vers Donald Trump,
04:53qui, durant son mandat, avait apporté les accords d'Abraham,
04:57le déménagement de l'ambassade des Etats-Unis à Jérusalem,
05:00la fermeture d'un consulat de Palestine à Washington, etc.
05:03Et globalement, un soutien à l'État d'Israël post-7 octobre,
05:08sans aucune forme de retenue, pas même diplomatique.
05:11Le 7 octobre, Donald Trump présidait plusieurs cérémonies
05:14à la mémoire des quelques 1 200 victimes de ce qui reste ici dans les consciences,
05:19comme la pire épreuve qui a frappé le peuple juif du monde
05:24depuis la seconde guerre mondiale, le pogrom d'octobre évidemment.
05:27Alors attention, cela ne signifie pas qu'une majorité de citoyens américains
05:31de culture ou de confession juive vont voter Donald Trump le 5 novembre.
05:36Mais une chose est certaine, dans le secret des isoloirs,
05:39Donald Trump se prépare à gagner des points.