30% des chirurgiens orthopédistes déclarent un mal-être au travail selon une enquête du CNP-COT mais le sujet reste encore tabou. Parler du burn-out permet-il de le prévenir ou de l'éviter ?
Dr Philippe Tracol, Pr Laurent Obert et Elena Fournier étaient les invités de la table ronde Doc en Stock « Le burn-out des médecins : oser en parler c’est déjà améliorer la QVCT ? » à l’occasion du congrès 2024 de la Sofcot.
Dr Philippe Tracol, Pr Laurent Obert et Elena Fournier étaient les invités de la table ronde Doc en Stock « Le burn-out des médecins : oser en parler c’est déjà améliorer la QVCT ? » à l’occasion du congrès 2024 de la Sofcot.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00Bonjour à toutes et à tous.
00:02Bienvenue à cette 1re table ronde d'hoc en stock
00:05dans le cadre de la 1re journée du congrès de la SOFCOT.
00:08Donc ce matin, nous allons parler burn-out.
00:1230 % des chirurgiens orthopédistes
00:14déclarent un mal-être au travail, selon une enquête du CNP-COT.
00:18Alors est-ce que parler, oser parler du burn-out des médecins,
00:22ça suffit à améliorer la qualité de vie
00:25et les conditions de travail ?
00:27Pour répondre à cette vaste question,
00:28nous accueillons 3 personnes ce matin.
00:31Héléna Fournier,
00:32vous êtes ancienne interne et fondatrice de Colibri Libre,
00:36qui accompagne les étudiants en médecine qui sont en difficulté,
00:39puisque vous avez vous-même, on en parlera après,
00:41mais fait un burn-out lorsque vous étiez interne.
00:44Professeur Laurent Aubert,
00:46vous êtes chef de service au CHRU de Besançon
00:49et vous êtes l'un des auteurs d'une thèse, justement,
00:51sur le syndrome du burn-out
00:53chez les chirurgiens orthopédistes et traumatologues
00:56et ainsi que chez les internes.
00:58Et docteur Philippe Tracolle,
01:00vous êtes président d'Orthorisque,
01:02l'organisme d'accréditation des chirurgiens orthopédistes,
01:06et vous avez beaucoup travaillé sur le burn-out,
01:08notamment avec le docteur Aubin.
01:11Alors peut-être pour commencer,
01:13professeur Laurent Aubert, je vous tends le micro,
01:16pour savoir de quoi l'on parle.
01:19Déjà, qu'est-ce que c'est que le burn-out ?
01:21Comment le définir ?
01:23Alors c'est un concept...
01:28C'est un concept qui apparaît dès les années 70.
01:35Et c'est finalement une psychiatre qui,
01:37beaucoup plus récemment,
01:39va essayer de le définir
01:41avec 3 grands morceaux...
01:47situationnels qui vont tomber sur quelqu'un.
01:51C'est finalement
01:54un peu autre chose qu'une dépression,
01:56mais ça y ressemble.
01:57On peut avoir les deux,
01:59sachant que bien des spécialistes du moral
02:03arrivent à définir
02:05plusieurs sous-groupes
02:09ou plusieurs types de burn-out.
02:13Mais en tout cas, si on veut être très simple,
02:15c'est d'abord quelqu'un qui ne pourra pas aller au travail
02:19ce jour-là. Il est complètement cuit.
02:22Il ne peut pas marcher, il ne peut pas se lever.
02:24C'est quelque chose de terrible.
02:28Et il a 3...
02:30Finalement, c'est le Dr Maslach qui l'a bien démembré,
02:33il a 3 problèmes,
02:35si on peut parler de problèmes.
02:37Il a une sensation de déshumanisation.
02:42Il a, en parallèle, une perte de l'accomplissement.
02:48Et finalement, il a un 3e élément important
02:53qui le touche, en dehors de la déshumanisation
02:57et la perte de l'accomplissement.
02:59C'est qu'il est effectivement...
03:03Il a un rapport à l'autre qui n'existe plus.
03:08Et ces 3 paramètres vont rentrer
03:12dans la construction d'un score,
03:15un score qui est connu maintenant et qui permet d'évaluer
03:17si on rentre un peu, beaucoup, passionnément dans le burn-out.
03:21C'est ce qu'on appelle le MBI,
03:24le score de Maslach, de cet psychiatre,
03:27qui va nous permettre de dire,
03:28vous, vous êtes un petit peu ou beaucoup,
03:31ou en tout cas, vous avez des signes,
03:33puisque c'est un autocestionnaire avec une soixantaine de questions.
03:37Et donc, de façon assez simple,
03:39chacun et chacune d'entre nous peut répondre
03:43et regarder si ce qui ne va pas,
03:47c'est vraiment parce qu'il y a quelque chose qui ne va pas.
03:50Donc, voilà un peu, très schématiquement,
03:52sans être forcément un spécialiste du burn-out,
03:55c'est une vague qui nous détruit,
04:00qui nous met au sol avec 3 choses.
04:04Je ne m'accomplis plus, je suis déshumanisé.
04:09C'est-à-dire que je n'ai plus de rapport à l'autre
04:11et je ne m'accomplis plus.
04:13Il faut bien reconnaître une chose,
04:15c'est qu'il y a bien longtemps, des équipes de psychologues
04:17ont défini le bien-être.
04:19Le bien-être, c'est 3 choses.
04:21C'est la maîtrise, je maîtrise quelque chose.
04:23C'est l'autonomie, je suis dans un espace
04:26avec des règles qui me vont,
04:29mais j'ai une autonomie, et puis,
04:31je travaille pour quelque chose de plus grand que moi.
04:34Dans le burn-out, on va arriver
04:36avec des destructions de 2 paramètres.
04:40Et celui qui va être commun à nos métiers,
04:45c'est, d'un seul coup,
04:48la finalité n'existe plus ou n'est plus très claire.
04:51Je n'ai pas l'impression de travailler
04:53pour quelque chose de plus grand que moi.
04:55Cette perte de sens, vous avez sans doute, vous, dû la rencontrer.
04:59Est-ce que vous pouvez nous raconter, Elena,
05:01ce qui vous est arrivé ? Là, on a eu cette définition.
05:04Maintenant, est-ce qu'on pourrait avoir un peu votre témoignage ?
05:06Vous, vous avez souffert d'un burn-out.
05:08Racontez-nous un peu comment ça s'est passé.
05:10Oui, tout à fait.
05:12En fait, moi, mes études de médecine
05:14se sont très bien passées,
05:16de la passesse jusqu'au début de l'internat, à peu près.
05:19J'ai eu des difficultés pendant la 6e année
05:22à la préparation du concours,
05:23mais ça a resté supportable.
05:27Et en fait, au démarrage de l'internat,
05:29effectivement, je perds complètement le sens de ce que je fais.
05:33Je me sens plus animée par ce que je fais au quotidien
05:36et j'ai le sentiment, effectivement,
05:38de ne pas comprendre pourquoi je suis là,
05:41ce que je fais dans mes journées.
05:44Je n'ai pas l'impression de prendre soin des patients
05:46et je ne me sens plus du tout à ma place dans cet environnement.
05:49Et je pense que j'avais probablement de la fatigue
05:53qui s'était accumulée sur les années précédentes
05:55que je n'avais pas pris en compte.
05:57Et en fait, cette fatigue qui s'associe
05:59avec une perte de sens au quotidien
06:02a fait que je n'arrivais plus à aller en stage.
06:05J'ai continué pendant un long moment quand même,
06:07mais en fait, au bout d'un moment, c'est devenu vraiment...
06:10Je ne supportais plus de me lever le matin.
06:12C'était très compliqué à gérer
06:15parce que forcément, on se pose toujours la question
06:17des conséquences pour les co-internes,
06:19pour le service, etc.
06:21Et c'est ce qui m'a mis en difficulté à cette période-là
06:24et c'est ce qui m'a donné envie, justement,
06:26de créer quelque chose pour en parler
06:28et que ça devienne quelque chose de naturel,
06:30de discuter de ces sujets-là pour trouver des solutions
06:33pour les internes et pour les médecins
06:35et que ce ne soit pas une cata, justement, quand ça survient.
06:40Est-ce qu'aujourd'hui, vous arriveriez à dire
06:43ce qui a pu vous mener à faire ce burn-out ?
06:45Est-ce que vous avez quelques causes, peut-être ?
06:48Je pense que les causes sont multiples.
06:50De mon côté, il y avait aussi le fait
06:52que je pense que je n'avais plus envie d'être médecin.
06:55Depuis, je pense, un an ou deux,
06:58je me questionnais à propos de l'envie de poursuivre ce métier.
07:02Et après, ça s'est associé avec tout un tas d'autres choses
07:04qui peuvent concerner effectivement beaucoup d'internes,
07:07qui est le rythme de travail.
07:09Et je pense que l'organisation et la gestion de l'internat,
07:15qui est parfois compliqué et qu'il n'y a pas forcément de place,
07:21je trouve, aujourd'hui pour discuter de la santé mentale,
07:24c'est en train de s'améliorer effectivement dans plein d'endroits
07:27et c'est super.
07:28Et d'ailleurs, c'est très chouette de parler de ça
07:30dans un congrès de médecine, je trouve ça très cool.
07:33Donc voilà, je pense que c'est un mélange de plein de facteurs
07:37associés au fait qu'on n'en parlait pas assez.
07:40Et je pense que ça peut vraiment améliorer les choses
07:43de commencer en tout cas à en discuter.
07:45On évoquera évidemment les solutions, les pistes de solutions après,
07:49mais d'abord, peut-être faire un petit état des lieux
07:51avec vous deux.
07:53Vous, justement, orthorisque,
07:57vous avez mené 2 enquêtes en 2018 et en 2022
08:01sur l'épuisement professionnel.
08:03Est-ce qu'entre ces 2 études, la situation s'est améliorée ?
08:07Non, en ce moment, ça ne s'est pas amélioré,
08:08mais ça s'est même aggravé, c'est à dire parce qu'entre
08:11les deux, il s'est passé quelque chose qui est le Covid.
08:15Et ça, ça a été un élément très, très, très compliqué pour tous.
08:20Voilà.
08:22Effectivement, les 2 enquêtes, c'était le test de massage
08:26et les gens répondaient à l'enquête avec des questions
08:28personnelles et on a sorti des scores.
08:30Et c'est là qu'on s'est rendu compte que 30% des orthopédistes
08:34avaient un score de massage très, très, très dégradé.
08:38Et je suis assez d'accord avec ce que vous avez dit tous les deux.
08:40Ce qui est important, c'est d'en parler et des gens
08:44n'en parlent pas.
08:45Quand on échangeait avec Fabien Auba, qui devait être là et que
08:47je remplace au pied levé,
08:51les orthopédistes, on est un peu des surhommes.
08:53Enfin, on se croit, on se croit être des surhommes,
08:56les chirurgiens et Fabien Auba dit ce sont les plus costauds,
09:00les plus solides qui craquent le plus vite, le plus brutalement
09:04et le plus fort.
09:05Les pompiers, les policiers, les militaires, les gens qu'on
09:10croit invincibles et c'est la brutalité du burnout dans nos
09:15spécialités.
09:16Et souvent, malheureusement, ce n'est pas que le fait de ne pas
09:18se lever le matin.
09:19C'est aussi de se jeter par la fenêtre.
09:21C'est aussi une autre façon de faire un burnout.
09:25Et donc, c'est vraiment très important, un, d'en parler.
09:28Et quand on a fait cette enquête, on a vu des retours.
09:31Je ne sais pas si France est là, mais on a vu des
09:33retours de personnes qui nous ont dit mais j'ai fait cette
09:36enquête, je l'ai refaite avec ma femme et on s'est rendu compte
09:40qu'on n'allait pas bien.
09:41Et grâce à cette enquête, il y a des gens qui se sont rendus
09:44compte qu'ils n'allaient pas bien et qu'ils étaient dans une
09:46mauvaise voie.
09:48Et c'est très important.
09:49Un message qu'il faut faire passer ici, c'est il n'y a pas
09:54honte.
09:55On n'a pas à avoir honte de ne pas aller bien.
09:57Et quand on n'en va pas bien, on va sur Internet, on fait ce
10:00test, ça prend deux minutes et on se rend compte qu'on a un score
10:04peut-être pas tout à fait dans ce qu'on entendait.
10:08Alors, en parler, ça passe, vous l'avez dit, par des enquêtes,
10:10mais aussi par le travail que vous avez mené.
10:14Justement, pourquoi avoir consacré deux études sur le syndrome
10:18du burn-out chez les chirurgiens orthopédistes et traumatologues ?
10:21Racontez-nous un petit peu comment ça s'est passé,
10:23puisque il me semble que cette étude était assez inédite
10:26en France.
10:27Oui, c'est vrai qu'on ne s'est pas rendu compte tout de suite
10:30que c'était inédit parce qu'on ne savait pas ce qu'on ne savait
10:32pas.
10:33C'est parce qu'un interne a refusé un premier travail de thèse
10:36que je lui avais confié.
10:37Et quand les internes refusent un travail de thèse,
10:40ils ont le droit.
10:41Mais il faut que dans le mois qui vienne, ils me proposent
10:42une autre thématique.
10:44Et il m'a dit je voudrais travailler sur le burn-out
10:47en orthopédie.
10:48Alors, j'ai été un peu troublé parce que je lui ai demandé
10:52si c'était autobiographique, parce que j'avais entendu
10:55parler de ça.
10:56Mon épouse, qui était gastro-entérologue et qui est
10:57devenue médecin du travail, me ramenait du travail à la maison
10:59et commençait à me sensibiliser à ce problème que j'ignorais.
11:03Et je ne savais pas bien ce que c'était.
11:04Et cet interne qui s'appelle Grégoire Fèvre, qui est un
11:06chirurgien hors du commun et qui est un humain à la hauteur
11:10du chirurgien qu'il est, s'est lancé dans ce projet et a
11:13organisé les choses, a lancé une étude que Philippe
11:18poursuivra par la suite grâce à OrthoRisk avec une grande
11:22cohorte de collègues interrogés.
11:24Mais ce qu'a fait Grégoire, c'est qu'il a interrogé
11:27des internes, 400 internes en France d'orthopédie,
11:31et il a interrogé presque 2 000 chirurgiens du public
11:35ou du privé.
11:36Je vous coupe juste quand vous dites que vous ne saviez pas
11:38ce que c'était, qu'on ne le connaissait pas.
11:39On est en quelle année quand le projet démarre ?
11:41Quand Grégoire fait sa thèse, je l'ai oubliée puisque je suis
11:45vieux et je n'ai plus la notion du temps.
11:47Non, mais ça fait une dizaine d'années.
11:49Voilà, c'est autour de 2015 qu'on commence à réfléchir
11:53dans le service.
11:55Le travail va être publié 2 ans après.
11:58Donc, à l'époque, on a entendu, mais pour mettre des mots
12:03et puis pour lancer quelque chose et pour en tirer autre chose,
12:07et c'est là qu'on va s'apercevoir que 10 % des chirurgiens du privé
12:11ont des signes graves et 30 % des internes, presque 40,
12:16ont des signes graves.
12:17C'est-à-dire que dans les 3 échelles du score,
12:20les gens ne vont pas bien.
12:22Et donc là, ça pose un problème parce qu'on n'avait pas
12:26de problème jusque-là.
12:28Alors, on n'a toujours pas beaucoup de solutions,
12:29même si Philippe a raison.
12:30Il faut en parler, il faut savoir que ça existe.
12:32Déjà, savoir que ça existe, c'est important.
12:35Et puis, pouvoir dire ça ne va pas, c'est pas mal.
12:39Même s'il ne faut pas confondre, effectivement, de l'inconfort
12:43avec ça ne va pas, avec ça ne va pas, avec je ne vais pas bien,
12:47et puis je ne vais pas bien, et puis je ne peux rien faire
12:50du tout.
12:51Mais le primum movin, c'est un conflit de valeurs.
12:55Même si c'est une accumulation de choses,
12:59comme tu l'as très bien dit, c'est, à un moment,
13:04j'ai une maladie où on m'annonce quelque chose.
13:06Puis, par exemple, j'ai une complication avec un patient.
13:09Et puis, d'un seul coup, je change d'outil informatique.
13:14Mais je suis nul avec ça.
13:16Mais c'est cette accumulation de petites choses
13:18qui, prises individuellement, ne vont pas être très,
13:21très, très critiquables.
13:23Mais c'est cette montagne qu'on se fait de ces accumulations.
13:27Et deuxièmement, ce qui est très embêtant,
13:31c'est effectivement que chez les seniors,
13:35chez les chirurgiens, il y a un âge, c'est 50 ans.
13:39Il se trouve que des études montrent bien que la sensation
13:41du bien-être est la plus basse à 50 ans.
13:43Donc, cette accumulation de choses bien connues et publiées,
13:48eh bien, elle va s'accumuler avec des aventures de la vie.
13:53On me découvre un cancer, j'ai tué un patient,
13:57mon enfant se drogue, on m'annonce d'autres...
14:01On se quitte dans le couple.
14:04Et d'un seul coup, on en arrive avec la part professionnelle
14:08où ça ne s'améliore pas.
14:09Parce que quand on va mal, on soigne mal, quand même.
14:13On l'a un petit peu déjà évoqué avec le Dr Tracol.
14:16Mais justement, est-ce que vous auriez le portrait robot,
14:20entre guillemets, du chirurgien orthopédiste Robert Nowt ?
14:24Vous l'avez dit, peut-être l'âge qu'il a.
14:26Est-ce qu'on a un portrait robot un petit peu de la personne ?
14:29C'est toujours très excitant de pouvoir dire
14:31qu'il est là, mais malheureusement, il n'est pas là.
14:35Mais c'est une accumulation, c'est une dose.
14:37C'est la dose qui fait le poison, disait un pharmacien
14:39il y a très longtemps.
14:40Mais c'est une accumulation.
14:42Donc, c'est quelqu'un qui a des problèmes personnels.
14:45Ça veut tout dire, problème personnel.
14:46On me découvre une hypertension qui m'a fait faire un AVC.
14:49On a des problèmes dans le couple.
14:52Et puis, on a des problèmes physiques.
14:55Et puis, on a des problèmes au boulot,
14:57de relations, d'impossibilité d'aller au bout de ce qu'on fait.
15:00On est dans une pénurie,
15:02dans une pénurie d'accès au bloc
15:04ou dans des conflits avec des collègues.
15:07Et puis, d'un seul coup, on a une couche de conflits de valeurs.
15:10Par exemple, on peut ne pas partager la même chose
15:11avec des anesthésistes
15:13qui ne voient pas forcément les patients
15:14dans tous les établissements,
15:15alors que nous, on doit les suivre.
15:17Donc, on a ce machin du conflit de valeurs
15:20qui tombe au milieu de plein d'autres machins.
15:23Et à un moment, on n'en peut plus.
15:25On ne s'y retrouve plus.
15:27Et effectivement, à un moment, on se dit...
15:31Ça me trottait dans la tête, mais qu'est-ce que je fous là ?
15:34Et ça n'est pas acceptable,
15:36parce que je dois réussir tout ce que je tente
15:39et que vont-ils penser de moi ?
15:42Et socialement, ça n'est pas possible.
15:44Alors, on s'enquiste dans ce bazar
15:46et on souffre de plus en plus.
15:48Donc, je ne sais pas s'il y a un portrait robot,
15:50mais il y a un chemin.
15:52Il y a un chemin avec des signaux,
15:55et comme le disait Philippe, qu'on doit identifier, je crois.
15:59On le disait... Enfin, vous l'avez vu, en tout cas,
16:01vous l'avez montré dans votre étude,
16:03ça touche aussi beaucoup les jeunes.
16:05J'aimerais qu'on parle un petit peu
16:06de ce qu'Hélèna, vous avez mis en place.
16:09Ça s'appelle Colibri libre.
16:11Et l'idée, c'est d'accompagner des étudiants en médecine
16:14qui, comme vous, peuvent être en situation de mal-être
16:17ou de burn-out,
16:18mais qui ne vont peut-être pas arrêter la médecine
16:20comme vous l'avez fait.
16:21Est-ce que vous pouvez nous raconter un petit peu,
16:22puisque là, on est en plein dedans, il faut en parler,
16:24il faut accompagner les gens.
16:25Racontez-nous un petit peu ce que c'est que ce Colibri libre.
16:29En fait, moi, l'idée m'est venue au moment
16:32où j'étais en plein burn-out, justement,
16:34où j'avais complètement perdu le sens
16:36de ce que je faisais à l'hôpital
16:37et où je me suis retrouvée, du coup,
16:39d'interne à temps plein.
16:42Je suis chez moi toute la journée, je fais rien
16:43et je m'ennuie.
16:44Et j'ai, je pense, un profond mal-être, justement,
16:49du fait de me sentir plus utile.
16:52Et j'ai eu envie de partager ce que je vivais.
16:55Je me suis dit, je pense que je ne suis pas la seule
16:57à traverser ça.
16:58Et j'ai commencé par créer un groupe Facebook un peu comme ça,
17:01en me disant, je pense que ça peut être intéressant
17:03de partager autour de ces questions-là.
17:06Et donc, je crée ce groupe en mars 2023, il me semble.
17:11Et en fait, ça prend super vite.
17:12Il y a énormément d'étudiants qui rejoignent le groupe.
17:15Et dans les questions, pour entrer dans le groupe,
17:17j'avais mis une question où j'avais mis comment ça va.
17:20Et en fait, je pense que c'était une grosse erreur.
17:23Parce que la lecture des réponses à cette question
17:25m'ont fait très peur et je me suis dit, en fait,
17:28effectivement, il n'y a pas que moi qui suis concernée.
17:31Et au-delà de ça, on est vraiment beaucoup
17:33à être dans des situations qui peuvent être très graves,
17:35parce que les réponses allaient parfois
17:38jusqu'à des personnes qui avouaient des idées suicidaires
17:41sur un groupe Facebook à une personne qu'ils ne connaissent même pas.
17:44Donc je me suis dit, en fait, c'est dramatique
17:47de voir qu'ils peuvent m'en parler
17:49parce qu'il n'y a tellement pas d'autres solutions
17:51qu'ils vont partager ça dans cet espace-là.
17:56Et c'est suite à ça que j'ai voulu créer un accompagnement.
17:59Ça s'est fait un peu naturellement.
18:01D'abord, j'ai échangé avec des étudiants qui m'ont dit,
18:04comment toi, t'as fait pour aller mieux ?
18:07Quel parcours t'as mis en place ?
18:10Et c'est comme ça que ça a démarré.
18:12Et maintenant, ça fait un an et demi que je fais ça.
18:14Et c'est ce qui m'a redonné beaucoup de sens dans ma vie au quotidien.
18:19Et je me suis rendu compte que, en fait,
18:22j'avais envie, plutôt que d'être médecin,
18:24d'aider tous mes collègues et mes amis,
18:27et mon frère et ma soeur et mon père, qui sont tous médecins,
18:31à être bien dans leur métier
18:32et donc à pouvoir s'accomplir complètement en tant que médecin,
18:36parce que je pense que c'est un métier qui est exceptionnel.
18:39Et je trouve ça dommage de ne pas en profiter,
18:41vivre pleinement l'aventure que ça peut être d'être médecin
18:44quand on est à sa place.
18:46Et donc c'est un accompagnement qui a vraiment pour objectif
18:52d'aider un étudiant en médecine ou un interne
18:55ou un jeune médecin à retrouver dans son quotidien
18:59les actions à mettre en place pour trouver un équilibre
19:02et retrouver l'épanouissement dans tous les domaines de sa vie,
19:05donc au niveau professionnel et personnel.
19:08Est-ce que vous auriez un exemple concret, un petit truc ?
19:11Un exemple d'outil ?
19:13Oui, il y en a plein.
19:15Je pense qu'il y a beaucoup d'outils
19:18que j'ai un petit peu piqués en psycho, en TCC, etc.
19:24Il y a beaucoup de discussions, en fait,
19:27sur arriver à communiquer ses émotions,
19:31exprimer ce qu'on ressent, partager ses besoins
19:34et identifier, justement,
19:35quelles peuvent être les choses qu'on a envie de faire dans notre journée
19:39qui vont amener un équilibre avec notre vie professionnelle
19:41et donner la possibilité de se donner d'autres objectifs,
19:45en fait, comme des objectifs sportifs,
19:48je ne sais pas, faire un trail, un marathon, n'importe quoi,
19:51qui va donner l'impression à la personne
19:54que médecine, c'est son métier et que ça lui permet de se réaliser,
19:58mais qu'il n'y a pas que ça et qu'en fait, on existe en dehors du métier.
20:02Et je pense que c'est ce qui permet, en fait,
20:03de ne pas, justement, se noyer dans la difficulté
20:07quand on a des difficultés au niveau professionnel.
20:10Si on a un très bon équilibre au niveau personnel,
20:12ça va compenser.
20:14Combien, aujourd'hui, de jeunes est-ce que vous suivez ?
20:17Vous accompagnez, par exemple ?
20:19Là, en ce moment, il y en a une dizaine qui sont dans l'accompagnement
20:22et au total, depuis un an et demi,
20:24il y en a un peu plus de 35, je crois, qu'on a accompagnés.
20:27Et ça va un peu de...
20:28Enfin, on en a accompagnés qui étaient dans le cursus encore externe
20:32et d'autres qui sont internes,
20:35voire même certains qui ont passé leur thèse
20:37et qui se questionnaient suite à, justement, la fin de l'internat
20:41sur...
20:42Voilà, maintenant, je me sens pas épanouie.
20:44Comment je fais pour travailler dans ce domaine ?
20:47Je viens de terminer.
20:48Ça y est, j'ai atteint le bout.
20:49Et comment je fais, maintenant, pour être épanouie là-dedans ?
20:53Donc on l'a vu, que ce soit avec le Colibri Libre,
20:55même les chiffres sont quand même forts pour, entre guillemets,
20:58c'est quelque chose qui n'est pas encore forcément très connu.
20:59Vous avez déjà suivi plus de 35 personnes en un an et demi.
21:02Vos études le montrent aussi.
21:04Donc là, on en a déjà évoqué certaines,
21:07mais on peut parler aussi des pistes.
21:08Comment faire pour éviter cela ?
21:12Quand on s'est entretenu avec vous, docteur Tracol,
21:18vous m'avez dit qu'il fallait faire en sorte
21:20de ne pas se mettre en difficulté.
21:21Alors comment on fait et qu'est-ce que ça veut dire
21:23quand on est chirurgien ortho ?
21:25Alors déjà, je vais répondre à Laurent.
21:29Fabien Auba avait décrit les deux personnalités types
21:33du candidat au burn-out.
21:34J'ai, sous les yeux, retrouvé son diaporama.
21:37Vous l'avez, le portrait robot.
21:38Vous allez peut-être vous reconnaître.
21:39Il y a l'hystérique.
21:41L'hystérique, il est mythoplastique,
21:42avec un goût de la séduction.
21:44Il est bordélique.
21:45Il est anxieux.
21:47Il a un idéal narcissique.
21:48Et puis surtout, il a besoin d'imaginaire.
21:51Et il sait s'adapter.
21:53Et après, il y a l'obsessionnel.
21:55Et l'obsessionnel, lui, il est rigide.
21:56Il a un goût de la maîtrise.
21:58Il est maniaque.
21:59C'est un anxieux de la performance.
22:01Il est un peu masochiste.
22:04Et puis surtout, il est incapable de s'adapter.
22:06Et ce sont ceux-là les plus fragiles, en fait.
22:09Voilà. Non, mais c'est important.
22:11Et puis, un sujet, un 2e élément, c'est le stress.
22:16On dit tous, on vit dans le stress.
22:19Heureusement qu'on vit dans le stress.
22:21Et je cite encore Fabien, mais...
22:25Il y a le bon stress, il y a le mauvais stress.
22:27Le bon stress, c'est l'adrénaline.
22:29C'est celle qu'on a avant une partie de tennis
22:32ou faire une opération.
22:34On est anxieux.
22:36Mais ça, c'est du bon stress.
22:37Parce que c'est un stress qui va nous stimuler.
22:39Et après, il y a le mauvais stress.
22:41Le mauvais stress, c'est tout ce que tu as dit tout à l'heure.
22:43C'est-à-dire tout ce qui se rajoute,
22:45qui sont les effets parasites autour de notre activité
22:49et qui, eux, vont venir polluer cette activité
22:52et nous amener à l'irréparable.
22:55Les internes, c'est combien ?
22:58Un interne se suicide tous les 18 jours, c'est ça.
23:01Tous les 18 jours, en France,
23:04un interne fait une tentative de suicide.
23:07Je ne sais pas si vous vous rendez compte ce que ça veut dire.
23:09C'est quand même dramatique.
23:12Et 10 à 12 %, si ma mémoire est bonne,
23:14des chirurgiens orthopédistes consomment des substances.
23:18On ne parle pas de l'alcool et du tabac,
23:21on parle d'autre chose.
23:22Donc, non, non, mais pour tenir le coup.
23:25Donc, c'est un vrai sujet de santé publique.
23:29Et alors, justement, comment on fait
23:31pour que les chirurgiens orthopédistes
23:32arrêtent de consommer des substances pour tenir ?
23:36Je crois qu'il n'y a pas de recette.
23:38Et c'est tellement plus facile quand on est vieux
23:40et qu'on ne travaille plus,
23:42parce que, bon, quand on est dans l'action,
23:46on ne se rend pas compte.
23:48Parfois, je veux dire, mais...
23:52Exemple.
23:54Il n'y a pas de TGV en ce moment entre Lyon et Paris,
23:56donc j'ai pris l'avion pour venir à Marseille-Orly.
24:00Et quand j'étais président de la Sauvecôte,
24:01toutes les semaines, j'ai pris l'avion
24:04en me levant à 5h du matin pour venir à Paris.
24:07Et j'ai dit à ma femme, mais comment j'ai pu faire ça
24:10pendant 3 ans tout en travaillant sans craquer ?
24:14Voilà. Mais parce que, justement,
24:17j'avais cette activité à la Sauvecôte
24:19qui me sortait de mon quotidien chirurgical.
24:22Et je crois que s'il y a un conseil à donner à quelqu'un,
24:25c'est qu'il n'y a pas que la chirurgie dans la vie.
24:27Franchement, il n'y a pas que la chirurgie dans la vie.
24:29Et moi, j'ai posé mon bistouri.
24:33Voilà.
24:35J'ai retrouvé le sommeil instantanément.
24:3870% des chirurgiens dorment mal, donc ici.
24:41Et je vous promets que le soir même,
24:43j'ai retrouvé le sommeil.
24:45Non, mais voilà, c'est tellement important, ça.
24:48Et donc, il faut avoir autre chose dans sa vie.
24:52Voilà.
24:53Le profit type, c'est l'obsessionnel
24:55dont je vous parlais tout à l'heure.
24:57On s'installe, on a des patients,
25:00on gagne bien sa vie, heureusement.
25:04Et puis l'année d'après, on paye des impôts,
25:06on pâche des charges sociales,
25:07donc on travaille encore plus
25:09pour payer les charges sociales, évidemment.
25:11Et c'est une espèce de spirale infernale
25:14qui amène les gens à travailler, travailler, travailler.
25:17Je dis toujours, ils ont la tête dans le guidon
25:19et ils relèvent jamais la tête.
25:20Et ils voient pas le mur arriver devant eux.
25:22Et le mur arrive d'un coup.
25:24Et le mur, c'est quoi ?
25:26C'est sa compagne ou son compagnon qui s'en va
25:28parce qu'il en aura le bol.
25:30C'est la lettre de l'huissier de trop
25:33qui te fait péter un plomb.
25:35Le directeur de la clinique d'hôpital qui te dit
25:37qu'on va te sucrer un créneau opératoire parce que si.
25:40Voilà. Il y a toujours un élément déclencheur
25:42qui fait que j'en peux plus
25:44parce que c'est un sentiment d'injustice.
25:47Avec tout ce que je fais, pourquoi, moi ?
25:51C'est le côté narcissique du chirurgien
25:54qui ne supporte pas cette sensation d'injustice.
25:57Et donc le conseil, en parler, c'est super important.
26:02Fabien Robat dit toujours, il faut pas en parler à la maison.
26:04Votre femme ou notre mari ou notre compagne,
26:07elle n'est pas là pour nous raconter
26:09nos histoires de la journée.
26:11Les histoires de la journée, on les garde pas pour soi,
26:13mais on en parle avec les collègues.
26:15Mais on raconte pas ces histoires à la maison.
26:19Fabien Robat a une très belle diapositive de l'épicier.
26:23On ferme le rideau et quand on rentre à la maison,
26:25on pense à autre chose.
26:27Alors, c'est pas facile parce que quand on a un patient
26:30qui va pas bien, c'est pas facile de faire le rideau.
26:37Mais au moins, les histoires de l'établissement
26:39avec les anesthésistes, etc., franchement,
26:41il faut les laisser à côté.
26:42C'est tellement dérisoire.
26:44Et puis, il faut s'occuper de sa famille, de ses enfants.
26:47C'est tellement important.
26:49Et vous, professeur Robert, en tant que chef de service,
26:53après avoir en plus travaillé sur ces 2 études,
26:56est-ce que vous avez changé des choses ?
26:58Est-ce que vous avez mis des choses peut-être en place
27:01dans votre service ?
27:03C'est vrai que ça pose un problème énorme
27:04quand on est chef de service
27:06et qu'on voit peut-être qu'il y a 1 interne sur 3 de l'équipe
27:10qui a des idées suicidaires ou qui va très mal.
27:13Alors, il y a 2 situations.
27:14C'est l'interne qui va très mal, il faut l'aider par des soins.
27:19Il est parfois hospitalisé.
27:22Après, il y a l'interne qui, comme tu en parlais très bien,
27:25se pose des questions.
27:26Donc, si j'ai mis des choses en place,
27:28c'est qu'on essaie de se voir régulièrement
27:30avec les internes pendant leur stage,
27:32surtout quand ils arrivent, parce que la température de l'eau,
27:36quand on arrive comme nouvel interne le 1er novembre,
27:40filiarisé après 4 mois sans rien faire,
27:43sans imaginer vraiment ce qui arrive,
27:47on peut être dans une situation extrêmement troublante.
27:51Extrêmement troublante.
27:52Sur le plan physique, par le rythme,
27:55sur le plan du soin,
27:57alors que les gens arrivent avec un bagage assez dense
28:00et des connaissances musclées,
28:02d'un seul coup, ils découvrent quelque chose
28:03qu'ils n'avaient pas forcément voulu ou pensé.
28:08Et c'est cette nouvelle réalité.
28:09Alors, qu'est-ce qu'on peut mettre en place ?
28:11Moi, ce que j'aime faire avec les étudiants
28:13dans leur cursus très tôt, quand ils passent dans le service,
28:15c'est de leur demander des choses très simples,
28:17simplement pour qu'ils se posent des questions
28:18qu'ils ne se sont jamais posées.
28:20Pourquoi t'as fait médecine ?
28:23Qu'est-ce qui te plaît comme spécialité ?
28:25Puisque c'est celle que l'on comprend le mieux
28:27qui nous attire.
28:30Est-ce que tu l'as fait par une pression familiale ou pas ?
28:34Mais je n'ai aucune réponse
28:35et je ne veux induire aucun scénarii.
28:37Mais au moins que quelqu'un se pose des questions.
28:39Pourquoi je vais faire ce sport ? Pourquoi j'aime ça ?
28:42Est-ce que je préfère les sports d'adresse ou d'endurance ?
28:44Pourquoi j'aime...
28:46Se poser ces questions, ça prépare à se dire,
28:48est-ce que je préfère travailler assis ou debout ?
28:50Est-ce que je préfère travailler avec les humains ou avec les animaux ?
28:53Est-ce que je préfère rentrer dans le corps des gens
28:55ou surtout pas regarder un humain ?
28:57Mais ça doit se poser, ces questions,
28:59au moment du cursus étudiant.
29:01Et ça, vous faites comment ? Vous prenez...
29:03Parce que c'est prendre du temps aussi sur votre...
29:05Il ne faut pas que vous finissiez vous en burn-out non plus.
29:07Chaque fois que j'essaie d'accueillir les 2e années,
29:10les 3e années ou dans le stage,
29:12on passe un moment pour savoir, est-ce que ces gens se connaissent ?
29:15Est-ce qu'ils ont fait médecine pour soigner, pour aider,
29:17pour comprendre ?
29:19C'est toujours un peu de tout, mais il y a des gens qui disent,
29:21moi, je veux comprendre ou je veux aider, etc.
29:23Quand ils commencent à vouloir aider,
29:24ils vont s'apercevoir que déjà, les gens ne se laissent pas aider
29:27facilement et c'est ce que disait Philippe.
29:29Si on a une personnalité à vouloir aider, c'est très bien.
29:33Mais peut-être qu'on va rencontrer des gens
29:34qui ne veulent pas se faire aider
29:36ou des patients qui ont une addiction terrible
29:39et qu'on ne sortira jamais du trou, par exemple.
29:41Bref, ça n'est pas à ce moment-là qu'on apporte des réponses.
29:44On veut juste s'entendre parler ensemble
29:47de j'aime pas ça, j'ai fait ça pour ça,
29:49je me vois comme ça dans telle année, etc.
29:52Déjà, ce qui m'intéresse,
29:54c'est qu'ils s'entendent poser des questions.
29:56Et après, quand ils sont internes, je leur demande,
29:59en tout cas, je leur fais comprendre qu'ils ont 2 ans
30:01pour savoir si c'est ça.
30:03Et on essaie de poser...
30:06Je dois réussir du 1er coup tout ce que je tente.
30:08Et que vont-ils penser de moi à côté ?
30:12Justement, Héléna, quand vous, vous avez vécu
30:14cet épisode de burn-out, vous-même avant,
30:16est-ce qu'en tant qu'interne, vous vous êtes sentie accompagnée...
30:19Avant, j'imagine que non, et après, je sais pas.
30:21Qu'est-ce que vous vous êtes sentie accompagnée, vous ?
30:24Au moment où ça a été compliqué pour moi pendant l'internat,
30:27j'ai été très bien encadrée et entourée
30:30par mes chefs de service
30:32et les chefs avec qui je travaillais.
30:34Mais je voudrais revenir justement sur ce que vous disiez
30:37par rapport à le fait de se poser des questions.
30:39Je pense que c'est un petit peu la problématique
30:42que j'ai rencontrée où je me suis pas posée de questions
30:44pendant tout mon cursus de médecine,
30:48parce que tout s'est passé du 1er coup.
30:50Justement, j'ai eu ma passesse du 1er coup,
30:51j'ai très bien réussi, j'avais de très bons résultats
30:53au niveau scolaire, on va dire.
30:55Donc je me suis pas posée de questions sur...
30:58Est-ce que je suis épanouie là-dedans ?
30:59Est-ce que ça me plaît ?
31:00Est-ce que je me projette à être médecin ?
31:03Et donc j'ai un peu avancé sans réfléchir.
31:06Et je pense que le fait de se poser des questions
31:09même au début du cursus, ça pourrait être très intéressant.
31:11Déjà, pendant l'internat, c'est super de pouvoir y réfléchir,
31:15mais je trouve que ça devrait être
31:17même intégré à notre cursus très tôt
31:20pour pouvoir justement déjà avoir des raisons d'avancer,
31:24parce que quand on sait pourquoi on fait ça,
31:25forcément, ça a beaucoup plus de sens.
31:27Et puis au-delà de ça, pour se rendre compte
31:29qu'en fait, c'est normal de se poser des questions.
31:31Et quand moi, j'ai été reçue par mes chefs de service
31:34au moment où j'ai dit
31:36que je veux arrêter l'internat, je veux arrêter médecine,
31:40j'ai pas envie de continuer,
31:42je pense que la quasi-totalité de mes chefs m'ont dit
31:45que moi aussi, en fait, je me suis posé des questions
31:48et j'ai pas osé en parler.
31:49Et en fait, je pense que ça devrait être normal
31:51de discuter de ça parce que sur un cursus aussi long
31:55dans lequel il y a beaucoup de difficultés,
31:57c'est hyper important de comprendre
31:59que c'est normal de se questionner,
32:01que ça veut pas dire qu'on va pas arriver au bout,
32:03que ça veut pas dire qu'on n'est pas fait pour ça,
32:05mais que c'est super sain, en fait, de se questionner
32:07et de se demander pour quelle raison on est là,
32:10pourquoi on a envie de continuer.
32:12Et je trouve ça vraiment important.
32:14Si vous étiez pardon, posé ces questions,
32:17est-ce que vous pensez qu'aujourd'hui, vous seriez médecin ?
32:21Je sais pas. C'est super difficile de répondre à cette question
32:24parce que je pense qu'au moment où je démarre médecine,
32:27je suis certaine de vouloir faire ça
32:29jusqu'à la fin de ma 6e année.
32:32Et c'est très difficile, je pense, de faire la distinction
32:35entre les symptômes du burn-out, justement,
32:37la perte de sens et le manque d'épanouissement,
32:41et toutes les autres réflexions qu'il y a eu derrière de mon côté
32:43par rapport à, justement, le fait d'avoir fait ça,
32:45peut-être parce que mon père était médecin.
32:47Mon frère et ma soeur ont aussi fait médecine.
32:50On est trois à avoir fait médecine.
32:52Je me dis qu'il y avait peut-être un petit paterne chez nous.
32:55Donc, justement, je pense que c'est super dur de savoir
32:58si ça aurait été différent,
33:00si j'avais été accompagnée différemment
33:03ou si les études avaient été différentes.
33:05Je pense que pour plein d'étudiants,
33:08ça peut faire une vraie différence.
33:10Moi, je sais pas. C'est dur parce que je sais pas
33:12comment ça aurait pu être avec l'accompagnement nécessaire.
33:16Par contre, je pense que c'est essentiel
33:18et c'est justement un peu le projet que moi, j'ai sur le long terme
33:22de vraiment créer un espace de parole autour de ça
33:25dès la 1re, 2e année de médecine
33:29et que ça fasse partie intégrante du cursus, en fait,
33:32de se questionner et de, justement,
33:34avoir des discussions autour de notre santé mentale
33:37et d'avoir peut-être, je sais pas, des points,
33:40des moments réguliers pour échanger sur notre parcours
33:44et notre santé mentale et physique.
33:47Je veux dire, c'est qu'on traverse tous
33:48des périodes difficiles dans notre métier.
33:50Heureusement, heureusement, des périodes de doutes,
33:53de difficultés, on arrive quand même à les surmonter.
33:57Tout ce qui ne nous détruit pas nous rend plus forts.
34:00La difficulté ou le doute, c'est pas le burn-out.
34:03C'est pas la même chose, quand même.
34:04Il faut pas dire...
34:06Je me suis disputé avec mon anesthésiste,
34:08je me suis décidé, non, on n'est pas là, quand même.
34:11C'est important, les difficultés,
34:13heureusement qu'il y en a dans la vie.
34:15C'est le bon stress, c'est la bonne adrénaline
34:17dont on parlait tout à l'heure.
34:19Et là, on a parlé...
34:20Vous voulez peut-être réagir, non ?
34:22Non, mais je suis complètement d'accord.
34:24Et je pense que, les études de médecine,
34:26on est exposés à plein de stress qui est tout à fait utile,
34:30même pour se développer en tant que médecin.
34:33Et je pense que c'est justement faire la distinction
34:35entre le stress qui va nous rendre plus forts
34:38et le moment où ça devient vrai.
34:40Et le moment où ça devient vraiment pathologique
34:42et où on n'est plus capable de gérer ce stress.
34:45C'est difficile de les connaître.
34:48C'est difficile de les...
34:49Complètement. C'est ça qui est assez compliqué, justement.
34:52Là, on a parlé des étudiants, des internes, des jeunes médecins.
34:56Maintenant, est-ce que vous pourriez nous dire
34:58comment est-ce qu'on reconnaît un collègue,
35:00peut-être plus âgé ?
35:02Est-ce qu'on peut avoir des clés aussi pour savoir
35:04si on a un collègue, un confrère qui souffre de burn-out ?
35:07Est-ce qu'il y a des petites choses qui doivent nous attirer ?
35:10C'est quelqu'un qui change.
35:12C'est quelqu'un qui casse un téléphone.
35:15Il y a une violence dans ses rapports ou dans ses actes.
35:20C'est... Il souffre.
35:22Il souffre et il ne se donne pas le droit de pouvoir le dire
35:26parce qu'il sait pas pourquoi.
35:28Mais il a raté quelque chose.
35:31Il est à la croisée des chemins par cette succession de problèmes.
35:36Des problèmes médicaux, des problèmes psychologiques,
35:39des problèmes...
35:41Il s'absente pour de vraies raisons.
35:45Il est malade.
35:46Mais, comme on reconnaît, c'est quelqu'un qui change.
35:49Et puis, le problème, c'est que socialement,
35:51le groupe va dire, ouais, mais tu connais bien Titi.
35:55Tu connais bien Titi, il est un peu comme ça.
35:57Ouais, c'est Titi.
35:58Mais il faut pas confondre ce que sont les gens et ce qu'ils font.
36:02Une tendance, en fait, à relativiser, parce que, vous l'avez dit,
36:05ce sont souvent des grosses personnalités qui peuvent craquer, c'est ça ?
36:09D'abord, c'est le déni.
36:10C'est le déni.
36:11Jamais un chirurgien ne va dire, je vais pas bien.
36:14Voilà, donc, jamais.
36:16Ca ne peut être que les autres.
36:17Ca ne peut être que les autres. Et c'est l'équipe.
36:19Et c'est l'équipe qui doit avoir le courage d'aller dire à quelqu'un,
36:22alors c'est peut-être plus dur quand c'est le patron,
36:24quand c'est le chef de service, vous allez pas bien,
36:27je sais pas, voilà, mais jamais...
36:30Ou parfois, c'est l'épouse, ou à la maison,
36:33on lui dit, ça va pas,
36:34il faut que tu changes de comportement, etc.
36:36Mais je vois qu'il y a Philippe Paris qui est là
36:37et souvent, on en discute aussi,
36:40des gens qui changent de comportement,
36:43qui deviennent violents au bloc.
36:45On a tous été parfois un petit peu coléreux au bloc.
36:49Ca fait partie aussi de notre métier.
36:52Mais en vieillissant, on le devient de moins en moins.
36:54Et quand, en vieillissant, on devient comme ça,
36:56c'est peut-être que c'est des mauvais signes, voilà.
37:00Mais encore une fois, c'est l'entourage.
37:02C'est l'entourage qui va faire la différence.
37:05Sinon, ça sera trop tard.
37:09C'est complètement ça.
37:11C'est l'entourage qui est la sentinelle.
37:13Mais on ne peut pas encore en parler facilement
37:17parce que c'est un aveu de faiblesse
37:20que de changer de voie.
37:22Et il faut beaucoup de courage pour faire ce que tu as fait.
37:26Enfin, c'est pas possible.
37:28C'est pas possible pour le groupe, pour la tribu,
37:30et c'est pas possible pour l'individu.
37:32Donc tout le monde continue à alimenter la bête.
37:34Et on fait comme si...
37:36Et puis jusqu'au moment où il n'est pas là,
37:39où elle n'est pas là.
37:40Et puis on apprend que ça ne va pas du tout.
37:42Et alors comment ça change ?
37:44Peut-être, bon, déjà, parce qu'on est en train de faire là,
37:45peut-être qu'on va en parler devant d'autres personnes,
37:47mais comment est-ce qu'on pourrait concrètement changer ça ?
37:49Dans une structure publique,
37:51dans un établissement hospitalier public.
37:53Moi, quand je vois que les gens vont pas bien
37:55parce qu'ils viennent me voir et qu'ils me disent ça va pas,
37:58ça arrive, hein.
37:59J'ai eu un interne le dernier semestre qui m'a dit
38:02j'ai l'impression que j'ai envie de voir autre chose.
38:06Il m'a juste dit ça.
38:08Je me suis dit tu peux aller voir autre chose,
38:09on va imaginer quelque chose.
38:11Mais en fait, c'était plus profond.
38:12Et c'est les autres internes qui m'ont dit,
38:13monsieur, quand même, il va pas bien.
38:16Alors je l'ai revu, je lui ai dit, mais c'est vrai ?
38:18Il m'a dit ouais.
38:20Donc là, j'appelle la médecine du travail,
38:22et la médecine du travail voit
38:24pour qu'il y ait un espace de discussion
38:26qui ne soit pas celui d'un lien hiérarchique.
38:29Parce que moi, je peux pas être le consolateur, la nounou,
38:33celui qui apprend à opérer, celui qui fait des études,
38:36celui qui aide les chirurgiens,
38:38celui qui rentre à la maison avec un sac plein de tout ça
38:40et qui ne peut pas, effectivement, pour le bien de sa famille,
38:43verser son sac au milieu de la table le soir
38:46parce que l'autre en face a la même chose.
38:47Donc la médecine du travail.
38:49La 1re chose en système public, c'est la médecine du travail.
38:52Il n'y en a pas en privé.
38:53Le problème, c'est qu'il n'y en a pas en privé,
38:54la médecine du travail.
38:55Ca, c'est la 1re des choses.
38:57C'est pour ça qu'on fait une campagne à haute risque
38:59en incitant les gens à avoir un médecin traitant,
39:01qu'ils ne soient pas eux ou leur femme.
39:03Ca, c'est tellement important.
39:06Et puis, toi, tu es sensibilisé à ça.
39:10C'est-à-dire que tu as compris.
39:12Il y a quand même beaucoup de nos collègues, de tes collègues
39:15qui ne sont pas du tout formés à ça.
39:17Quand on avait fait déjà un déjeuner débat
39:19sur le burn-out en 2020,
39:23un certain nombre de chefs de service disaient
39:24mais nous, on peut être de très bons chirurgiens,
39:26de très bons universitaires,
39:27mais on n'est pas forcément de bons managers.
39:29On n'est pas forcément de bons meneurs d'hommes.
39:31Et savoir déguiser dans son équipe quelqu'un qui ne va pas bien,
39:34c'est tout un métier d'écoute, de regard, de choses comme ça.
39:38Et dans le privé, on n'a pas tout ça.
39:40Et dans le privé, la seule vertu, c'est l'équipe.
39:43Il n'y a rien de pire que le chirurgien solitaire.
39:45Ca n'existe quasiment plus aujourd'hui.
39:48Mais ça, c'est le pire.
39:50Moi, j'ai travaillé en équipe toute ma vie.
39:52On était 7.
39:54On essayait de se voir au moins une fois par mois
39:58au resto tous ensemble
39:59pour parler d'autre chose que de chirurgie, etc.
40:02Et il faut que ça soit dans l'équipe,
40:04en disant, écoute, tu ne vas pas bien.
40:06Fais quelque chose.
40:07Ouais, mais je ne suis pas fou, je ne vais pas aller voir un psychiatre.
40:09On ne s'y dit pas d'aller... Non, mais c'est...
40:11Voilà.
40:12Je ne vais pas bien, je suis fou, je vais voir un psychiatre.
40:15C'est ça, le raccourci dans la tête d'un chirurgien
40:17qui est dans le déni.
40:19Et alors, justement, est-ce que vous pensez
40:20que tout ça, ça va changer ?
40:21Est-ce qu'il y a une nouvelle génération, peut-être,
40:24qui est plus à l'écoute d'elle-même et des autres ?
40:27Alors, moi, j'avais échangé quand j'étais président du CNP
40:30avec Jimmy Pécheur.
40:31Je ne sais pas, il n'est pas là, mais voilà.
40:33Et je m'en rappelle, il m'avait dit,
40:35mais ce n'est pas parce que je vais faire de la planche à bois
40:37l'un après-midi dans la semaine que je suis un glandeur.
40:40J'en ai besoin.
40:42Et quand j'ai échangé avec mes collègues chefs de service,
40:45ils disaient, oui, mais tu comprends,
40:46si on laisse partir les internes une demi-journée par semaine,
40:49qui va faire tourner le service ?
40:50Et donc, il y a une espèce de système d'autobroyage,
40:55si j'ose dire, qui fait qu'on n'arrive pas à méliorer
41:00la qualité de vie au quotidien.
41:03On a un métier difficile.
41:04Moi, je vais toujours dire, est-ce que qualité de vie
41:05au travail et chirurgie orthopédiste
41:07est compatible ?
41:09Je ne sais pas. Je ne sais pas répondre à ça.
41:11Voilà. C'est tellement facile à 67 ans,
41:13quand on a fini sa carrière, de dire, il faut faire comme ça.
41:16C'est tellement facile après.
41:17Moi non plus, je n'ai pas vu grandir mes enfants.
41:20Comme les autres, comme les autres, voilà.
41:22Mais c'est après qu'on se rend compte
41:24qu'on est passé à côté de choses importantes.
41:28Un mot pour dire que ce que l'on peut faire,
41:31c'est essayer de mettre de la cohérence.
41:34Quand on fait faire des choses complètement stupides aux gens
41:37et qu'on ne peut pas l'expliquer
41:38et que ça ne sert ni aux patients ni aux chirurgiens,
41:41tout le monde s'aperçoit, surtout les plus jeunes,
41:44qu'il y a un problème.
41:45Quand il y a un problème, c'est qu'il y a un problème.
41:46Donc, nous, tout ce qu'on peut faire,
41:48moi, en tant que chef de service,
41:50en tout cas, qui aime travailler en groupe,
41:52parce que, comme l'a dit Philippe, c'est ce qui nous sauve,
41:55c'est d'amener de la cohérence.
41:57Ca ne veut pas dire que tout ce que je fais est cohérent,
41:59mais au moins, on peut transmettre ces valeurs-là
42:04qui vont nous faire basculer.
42:06Parce qu'aujourd'hui, on ne supporte plus l'incohérence
42:08qui est partout.
42:09Et ce qui manque dans la cohérence, c'est bien la gouvernance.
42:11C'est-à-dire que dans les structures publiques comme privées,
42:13des fois, on a un machin qui tombe,
42:17et ça ne rime à rien.
42:18Et c'est ça qui nous manque, c'est de la cohérence.
42:22Oui, je suis tout à fait d'accord.
42:23Et je voulais rebondir sur le fait
42:27de, justement, changer peut-être cette vision-là.
42:30Vous parliez de celui qui allait faire de la planche à voile.
42:34Et moi, je me bats en discutant avec mes amis
42:38pour dire qu'en fait, c'est normal d'avoir une vie à côté,
42:42de demander peut-être une fois par semaine
42:43de finir un peu plus tôt pour aller faire du sport,
42:46des choses qui paraissent un peu aberrantes
42:48quand on est interne,
42:49et on n'ose pas trop demander ce genre de choses.
42:51Et je pense que c'est ce qui nous a mis en difficulté tous.
42:54En fait, moi, j'ai pas osé demander, justement,
42:57à aller faire du sport,
42:59à avoir une demi-journée de lit pour faire quelque chose d'autre,
43:01parce qu'on a l'impression même...
43:04Oui, voilà, on a l'impression d'être un glandeur.
43:05Et je pense qu'il y a cette culture de la réussite en médecine
43:08auquel, je pense, on est beaucoup à adhérer,
43:11et moi, la première,
43:12qui fait que quand on a ce genre de besoin-là,
43:15on se dit, si je dis ça, on va me voir comme, justement,
43:19celui qui fout rien,
43:21celui qui s'intéresse pas, qui a pas envie de progresser,
43:24alors que je pense que ça devrait être vu différemment,
43:26juste comme, en fait, un besoin,
43:28comme n'importe quel être humain de faire autre chose que travailler.
43:32Et je pense qu'en plus, ça peut être un vrai moyen
43:34de devenir bon, en fait,
43:36parce que quand on va bien,
43:38il n'y a pas mieux, en fait, pour être un bon médecin
43:40qu'être en bonne santé physique et mentale.
43:43Et donc, voilà, ça me faisait sourire,
43:45parce que je sais que mon frère, qui est cardiologue,
43:47fait beaucoup de kitesurf.
43:49Et en fait, je pense que c'est hyper important
43:51d'avoir un équilibre à travers ça, justement,
43:53de trouver d'autres activités
43:55et peut-être de donner l'opportunité aux internes
43:57de demander ce genre de choses.
43:59Et justement, vous demandiez,
44:01comment est-ce qu'on pourrait faire évoluer ça ?
44:04Je pense qu'en formant un petit peu, peut-être, les personnes,
44:07pas au management, parce que c'est un autre métier, effectivement.
44:10On peut pas faire...
44:12On peut peut-être pas faire ça...
44:13On y travaille, j'ai entendu, trop bien.
44:16Donc voilà, former un petit peu les personnes
44:18qui encadrent les internes
44:19pour qu'ils soient capables, justement,
44:21de faire ce rôle-là de manager,
44:24qui est un métier à part entière.
44:29C'est quand même une révolution culturelle,
44:31parce que toi, comme moi, comme les plus anciens ici,
44:34on a été formatés à travailler jour et nuit,
44:38on se posait pas de questions,
44:39on comptait pas nos heures, etc.
44:42Quand on a vu arriver les repos compensateurs pour les internes,
44:44on a dit, mais qu'est-ce qu'ils veulent, encore, ces jeunes ?
44:47Et chaque fois, les anciens disent,
44:49ouais, mais avant, les jeunes, ils travaillaient plus,
44:50ces jeunes, ils veulent plus travailler, etc.
44:52Mais moi, je pense que les jeunes, ils ont raison.
44:54Je suis désolé, mais ils ont raison.
44:58Et quand je dis à quelqu'un,
44:59pourquoi tu prends pas une journée pour aller te reposer ?
45:02Ouais, mais tu comprends, il faut que je travaille.
45:04Je dis, mais si tu barres une journée opératoire,
45:06tu crois que tu seras moins riche à la fin de l'année ?
45:08Non, mais il faut sortir de ce schéma,
45:10il faut que je travaille, quoi.
45:12Il n'y a pas que ça dans la vie, franchement.
45:14Eh bien, merci beaucoup, vous 3, pour votre participation.
45:18Et voilà, on espère que, grâce à vous,
45:19les choses avanceront petit à petit.
45:21Merci beaucoup.
45:22Merci.