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Didier Migaud, ministre de la Justice, répond aux questions de Sonia Mabrouk au sujet des réquisitions contre Marine Le Pen à cinq ans d'néligibilité, à la réaction de Gérald Darmanin sur X, de la phrase de la procureur qui suscite la colère et l’indignation de Marine Le Pen, du laxisme des juges et de leurs responsabilités.
Retrouvez "La Grande interview Europe 1 - CNews de Sonia Mabrouk" sur : http://www.europe1.fr/emissions/linterview-politique-de-8h20
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Didier Migaud, ministre de la Justice, répond aux questions de Sonia Mabrouk au sujet des réquisitions contre Marine Le Pen à cinq ans d'néligibilité, à la réaction de Gérald Darmanin sur X, de la phrase de la procureur qui suscite la colère et l’indignation de Marine Le Pen, du laxisme des juges et de leurs responsabilités.
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NewsTranscription
00:00Didier Migaud, bienvenue à la grande interview sur CNE, vous êtes le garde des Sceaux, merci d'être notre invité exceptionnel ce matin, beaucoup de sujets à vous soumettre.
00:10Tout d'abord, c'est l'actualité judiciaire et politique après les réquisitions dans le procès des emplois présumés fictifs des assistants parlementaires du RN,
00:18procès dans lequel 5 ans d'inéligibilité ont été requis contre Marine Le Pen, assorti, je le précise, d'une exécution provisoire et puis de la prison.
00:25Cette dernière a dénoncé hier l'outrance de telles réquisitions et puis une atteinte à la démocratie.
00:30Si le juge Monsieur Migaud suit de telles réquisitions, ce serait pour elle une exclusion définitive de la vie politique.
00:36Est-ce à la justice de trancher ce qui devrait être l'être dans les urnes ?
00:41Vous savez que le garde des Sceaux n'a pas le droit de s'exprimer sur des affaires individuelles et à partir du moment où un procès est en cours.
00:50Donc je suis pratiquement le seul responsable politique à ne pas pouvoir commenter.
00:55Et ça tombe bien parce que je ne pose pas la question sur le champ judiciaire mais politique, puisque l'ancien ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a affirmé...
01:01Vous avez un lien, bien évidemment, puisque ce commentaire politique, il est à partir de réquisitions.
01:09Donc je ne peux pas commenter.
01:11Je vais quand même poser mes questions, Monsieur le ministre.
01:13L'ancien ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a affirmé qu'il serait profondément choquant que Marine Le Pen soit jugée inéligible.
01:18La question-là n'est pas judiciaire.
01:20Combattre Marine Le Pen, est-ce que ça se fait dans les urnes ou est-ce que ça se fait ailleurs ?
01:24Oui, mais vous voyez bien qu'à partir du moment où je dis quelque chose, il y aura un commentaire qui sera fait.
01:29Je pense qu'il faut bien évidemment combattre les idées sur le plan politique et devant le suffrage universel.
01:37Mais une fois de plus, je ne peux pas commenter un acte de justice.
01:42Alors autre question. Quoi qu'on pense de l'opposante Marine Le Pen, elle représente quand même des millions de Français.
01:46Vous serez d'accord, si le tribunal suit les réquisitions, que vont penser ces millions de Français qu'on a cherché à éliminer ou à dissoudre de l'opposition ?
01:53Qu'est-ce que vous dites et qu'est-ce que vous opposez à l'argument d'une justice politisée avec Marine Le Pen ?
01:58Une fois de plus, je ne peux pas rentrer dans votre raisonnement.
02:03Je ne peux pas m'immiscer dans un procès qui est en cours.
02:07La justice, elle est indépendante et les magistrats sont eux-mêmes indépendants.
02:12Et c'est un principe constitutionnel.
02:16Et le ministre peut définir une politique pénale, mais il n'a pas le droit d'intervenir dans des affaires particulières.
02:24Alors vous ne me répondez pas, c'est heureux, mais n'arrivant pas à combattre Marine Le Pen, quelle que soit d'ailleurs la personnalité politique,
02:30sur le plan démocratique, la justice de manière générale, vous en êtes quand même le garant,
02:34peut-elle devenir une arme justement contre la principale opposante et même la prétendante, la mieux placée à l'Élysée ?
02:41La justice, elle le juge et les magistrats jugent à partir de la loi qui est votée par le législateur.
02:48Ça a été le cas pour ces réquisitions ?
02:51Pas les réquisitions, mais les peines. Les peines sont dans la loi.
02:55Et le juge utilise les possibilités que lui donne la loi, que lui donne le législateur.
03:01L'exécution provisoire ne vous choque pas ?
03:04Le juge ne se substitue pas au pouvoir politique, il n'en a pas le pouvoir.
03:09Vous avez une indépendance entre les pouvoirs, vous avez la séparation des pouvoirs,
03:14mais le juge n'est pas, c'est une autorité d'ailleurs judiciaire, ça n'est pas un pouvoir au sens des pouvoirs publics traditionnels,
03:23tels qu'on les conçoit dans notre constitution, et le juge applique la loi.
03:28Mais Marine Le Pen, inéligible, M. Migaud, garde des Sceaux, mais aussi responsable politique, ça c'est une question politique, ça vous choque ?
03:36Vous pouvez me poser dix fois la même question, je ferai toujours la même réponse, je ne peux pas.
03:41Donc je comprends votre obstination à me faire parler, mais là je ne peux pas m'exprimer sur ce sujet.
03:46Ce n'est pas tant de l'obstination que des questions que se posent les Français, là peut-être que vous aurez une réaction.
03:51Ils ont un ministre de la Justice, les principes sont importants.
03:56Si le ministre de la Justice se met à commenter un certain nombre d'actes,
04:02ou de réquisitions tant du parquet que de décisions du juge, la justice n'est plus indépendante.
04:10Est-ce qu'elle est vraiment indépendante ? Est-ce que là, hier, avec de telles réquisitions...
04:13Je pense qu'elle est totalement indépendante, et je dois garantir l'indépendance de la magistrature.
04:19Avec une exécution provisoire contre une responsable politique prétendant d'aller liser, vous dites qu'elle est indépendante ?
04:24Oui, la loi le permet. Alors on peut contester que la loi le permette et que ça remette en cause des principes, mais la loi le permet.
04:35Peut-être que vous pourriez réagir sur cela, parce qu'une phrase de la procureure a suscité la colère et l'indignation, pas seulement de Marine Le Pen.
04:42Cette phrase a été certifiée par nos journalistes.
04:44Également, sur l'un des prévenus, la procureure ou l'une des procureurs a lancé au sujet d'un contrat.
04:49Donc, lors de ce procès, je cite,
04:51« Je n'ai aucun élément, mais je ne peux pas demander la relâche, ça me fait trop mal. »
04:54Monsieur le garde des Sceaux, est-ce qu'une procureure peut dire cela ?
04:58Je n'ai pas de commentaire à faire.
05:01Est-ce qu'une procureure peut dire cela ?
05:03Je n'ai pas de commentaire à faire.
05:06Il y a des procédures qui permettent de récuser un juge, de faire appel, le conseil supérieur de la magistrature peut être saisi.
05:18Est-ce que Marine Le Pen est en droit de saisir le supérieur hiérarchique de cette procureure ?
05:23Mais le justiciable a des droits et c'est heureux.
05:26Donc, elle pourrait vous saisir vous-même, puisque vous êtes son supérieur hiérarchique, cette procureure.
05:30Est-ce que c'est possible, monsieur le garde des Sceaux ?
05:33Une fois de plus, les membres du parquet sont libres quant à leur expression.
05:41Mais le parquet n'est pas indépendant ?
05:43Le parquet est indépendant dans ses réquisitions sur des affaires individuelles.
05:50Certes, mais quand il peut entrer un caractère personnel comme cette phrase-là, est-ce qu'il reste ?
05:55Je ne peux pas, en tout cas, porter une appréciation devant vous comme ça.
06:02Il faut être saisi, ça mérite une instruction, ça mérite des vérifications.
06:10La justice doit conserver et respecter un certain nombre de formes.
06:15Mais si tel était le cas, vous me confirmez qu'un procureur ne peut pas faire état de caractère personnel ?
06:20Je n'ai rien dit du tout, je ne veux pas commenter.
06:22Pourquoi tant de prudence ?
06:23Parce que si un procureur dit ça, il n'en a pas normalement la possibilité ni le droit.
06:27Madame, la justice ne se fait pas sur un plateau de télévision.
06:32Est-ce que la justice politisée, parfois, se fait au tribunal ?
06:37La justice n'a pas à être politisée.
06:39La justice, une fois de plus, applique le droit.
06:41Et le droit, ce sont des politiques, c'est le Parlement.
06:45Vous réfutez, M. le garde des Sceaux, qu'une partie de la justice soit politisée ?
06:49Mais la justice n'a pas à être politisée.
06:53La justice, elle fait son travail et elle doit appliquer la loi.
06:57Alors expliquez-nous.
06:58Et respecter la loi.
06:59J'entends bien.
07:00Pourquoi alors, un exemple parmi d'autres, le syndicat de la magistrature est-il politisé ou pas
07:05quand ce syndicat publie un communiqué affirmant que l'autorité judiciaire n'est pas au service d'une répression sociale ?
07:11C'était lors des manifestations contre la réforme des retraites.
07:13Quand ce syndicat de la magistrature participe activement à la fête de l'Humain
07:17pour une table ronde sur les violences policières et le racisme systémique,
07:21vous estimez que ce syndicat n'est pas politisé ?
07:24Il y a une liberté syndicale.
07:26Les magistrats, ensuite, dans leur travail, doivent se montrer indépendants de toute opinion politique.
07:37Alors là, de la liberté, monsieur le garde des Sceaux, d'affirmer qu'il y a un racisme systémique et de s'opposer à la police ?
07:44Vous n'entendrez jamais, de ma part, un discours contre la police.
07:51Il y en a qui, parfois, opposent police et justice.
07:56Nous avons un rôle complémentaire.
07:58Et en ce qui me concerne, je joue plutôt cette complémentarité.
08:03Je rends hommage, d'ailleurs, au travail des policiers,
08:07de la même façon qu'on doit rendre hommage aussi au travail des magistrats
08:11qui font leur travail dans des conditions souvent extrêmement difficiles.
08:15Et quand certains sont syndiqués et participent activement à cette fête ?
08:19Il y a des procédures qui permettent de mettre en cause le côté partisan des choses.
08:28Vous avez le Conseil supérieur de la magistrature, mais pas seulement.
08:31Vous avez des procédures d'appel.
08:33Le justiciat peut, bien évidemment, utiliser l'ensemble de ces procédures.
08:38Dans l'actualité, monsieur Didier Migon a appris hier l'arrestation d'un individu camerounais
08:42suspecté de plusieurs tentatives d'homicide, dont un acte d'une grande barbarie,
08:46une grande sauvagerie sur un SDF.
08:48Ce suspect est sous OQTF.
08:50En réagissant à cette affaire hier, votre collègue de l'intérieur Bruno Rotailleux a déclaré ceci.
08:54On a construit un droit trop protecteur pour ceux qui menacent les Français.
08:58Il a raison ?
09:02Un droit trop protecteur. Ce droit, il existe.
09:06Après, je suis pour une extrême fermeté quand des personnes ne respectent pas
09:13les règles de la société et on doit être extrêmement sévère quant à ses comportements.
09:22La justice, là aussi, doit raisonner de façon objective.
09:26Vous avez une personne qui commet un délit, un crime,
09:31eh bien, il doit être poursuivi et puis il doit être condamné, sanctionné.
09:39Le rôle de la justice, c'est à la fois de protéger les citoyens,
09:45c'est aussi de les sanctionner quand ils doivent l'être,
09:49et puis c'est de réparer aussi, d'accompagner les victimes.
09:53Ce suspect sous OQTF a pu voyager aux quatre coins de la France et de l'Europe,
09:57au mépris de nos lois, tout comme le meurtrier présumé de Philippines,
10:00libéré par un juge des libertés de la détention,
10:02qui estimait, et je cite simplement l'ordonnance, M. le garde d'Esso datée du 3 septembre,
10:06avait pourtant pour ce Marocain multirécidiviste le risque de réitération de faits délictueux.
10:11Est-ce qu'on peut interroger la responsabilité du juge ?
10:14Attention, vous savez, c'est caricatural.
10:16Et une fois de plus, la justice ne le fait pas sur les plateaux.
10:18Non, oui, mais vous ne connaissez pas le contexte.
10:20Vous n'avez pas la totalité du dossier.
10:22J'ai lu simplement l'ordonnance datée du 3 septembre.
10:25Non, c'est beaucoup trop facile de faire ce type de commentaire.
10:28Il y a des règles, il y a des lois.
10:31Sont-elles respectées par tous ?
10:34Quand elles ne sont pas respectées, il faut pouvoir agir, bien évidemment.
10:37Et vous estimez que le juge a agi comme il le fallait ?
10:39Mais le juge, il agit dans le cadre de la loi.
10:43Alors est-ce que la loi doit être changée,
10:46notamment pour ce qui concerne les conditions d'une libération
10:50lorsque vous êtes au niveau d'une quatrième demande
10:54de prolongation d'une rétention,
10:59dans un centre de rétention administrative ?
11:01Oui, peut-être que la loi peut être modifiée
11:04pour permettre au juge des libertés
11:06justement d'analyser à la fois les faits sur les dernières semaines,
11:11mais également à partir de la personnalité même de la personne
11:15et ce pourquoi elle a été condamnée.
11:17Donc on peut tout à fait...
11:19Et on peut demander, monsieur le garde des Sceaux,
11:21si nos lois sont adaptées à cette ultra-violence.
11:23Est-ce qu'il est possible d'adapter l'état de droit
11:25et de changer à la marge ?
11:27L'état du droit.
11:30Il faut faire une distinction entre l'état de droit
11:33avec un certain nombre de principes qui s'appliquent à nous
11:36et qui sont protégés par la Constitution,
11:39qui sont dans la Constitution,
11:41qui sont protégés par le Conseil constitutionnel,
11:43qui sont protégés aussi par des conventions internationales
11:45qu'a signées la France,
11:47et l'état du droit qui peut effectivement être modifié.
11:51Donc est-ce qu'on peut adapter l'état des lois du Parlement,
11:54du Conseil d'État, du Conseil constitutionnel
11:56et des cours européennes qui, parfois,
11:58peuvent aller à l'encontre
12:00de notre souveraineté populaire et nationale ?
12:02Ça, c'est votre point de vue,
12:05mais le Parlement,
12:08c'est lui qui fait la loi, une fois de plus.
12:11La loi, elle est votée par l'Assemblée nationale et le Sénat.
12:14Et les lois peuvent être ajustées.
12:17Je ne suis pas contre, je l'ai dit,
12:20pour un certain nombre de dérogations
12:23concernant par exemple la justice des mineurs.
12:25On y reviendra peut-être,
12:27tout en respectant l'état de droit.
12:29La justice des mineurs ne peut pas être la même
12:31que la justice des majeurs.
12:33Là, il y a un certain nombre de principes
12:35qui s'imposent aussi à nous.
12:37Mais, dans un certain nombre de situations,
12:39des dérogations sont tout à fait possibles.
12:43Et j'y suis, pour ma part, favorable.
12:45S'agissant des criminalités,
12:47de la criminalité organisée,
12:49on y reviendra peut-être, je suis là aussi
12:51pour une extrême fermeté,
12:53dans la revisite d'un certain nombre de procédures,
12:57on s'aperçoit que dans un certain nombre de procédures,
13:01il y a des avocats qui abusent de ces procédures.
13:05Donc, il faut pouvoir trouver les moyens,
13:07tout en respectant, bien sûr,
13:09un certain nombre de principes,
13:11de faire en sorte qu'on ne dévoie pas les procédures.
13:15Et face à l'ultra-violence que vous dénoncez,
13:17d'ailleurs, dans notre société,
13:19un récent sondage publié en septembre dernier
13:21expliquait, monsieur le garde des Sceaux,
13:23que 80% des Français estimaient que la justice
13:25était trop laxiste, quelles que soient leurs opinions politiques.
13:27Je le précise.
13:29Quasiment au même moment, vous avez déclaré,
13:31c'est important comme phrase,
13:33le laxisme de la justice n'existe pas.
13:35Alors, est-ce qu'une écrasante majorité de Français a tort,
13:37ou est-ce qu'elle a un sentiment d'impunité ?
13:39Ce n'est pas facile pour le ministre de la Justice
13:43d'expliquer que non, la justice n'est pas laxiste.
13:47Elle fait son travail.
13:49Mais je suis tout à fait conscient
13:53de l'opinion des Français à ce sujet.
13:57Mais lorsque vous regardez la durée moyenne
13:59des condamnations,
14:01aujourd'hui, elle est supérieure
14:03à celle qui pouvait
14:05exister il y a quelques années.
14:07Il n'y a jamais eu
14:09autant de détenus dans les prisons.
14:11En tenu du nombre de places,
14:13ce n'est pas étonnant.
14:15Oui, mais enfin, on n'a jamais eu autant,
14:17c'est un record.
14:19Non, on a quand même
14:21un nombre
14:23de détenus aujourd'hui
14:25qui est record.
14:27Donc, la justice
14:29fait son travail. En revanche,
14:31oui, je suis conscient
14:33que la justice peut être considérée
14:35comme trop lente.
14:37Il y a un vrai sujet
14:39d'exécution de la peine
14:41et d'un délai
14:43parfois trop long entre le prononcer de la peine
14:45et l'exécution de la peine.
14:47J'ai mis en place un groupe
14:49de travail, je suis conscient de ça,
14:51et les magistrats sont conscients de cela.
14:53Est-ce qu'on peut affirmer ce matin que dès qu'une peine
14:55est prononcée en France, parce qu'elles le sont,
14:57il y a la certitude de son exécution
14:59sans de multiples aménagements
15:01qui la vident souvent de sa substance ?
15:03Il faut veiller à ce que les peines
15:05soient exécutées.
15:07Y compris, d'ailleurs, les peines alternatives.
15:09On met aujourd'hui
15:11trop de temps dans
15:13l'exécution des peines
15:15et ça, c'est un sujet
15:17qu'il faut que je puisse traiter.
15:19Je comprends tout à fait le sentiment que peuvent avoir
15:21les Français.
15:23C'est un sentiment d'impunité ou une réalité ?
15:25C'est comme le sentiment d'insécurité.
15:27Oui, mais on voit tout de suite...
15:29C'est une question importante.
15:31Oui, c'est une question importante, mais on voit tout de suite
15:33les commentaires qui peuvent être faits
15:35par rapport... Je sais que vous êtes au-dessus
15:37de ces commentaires. Vous nous dites ce que vous pensez ce matin
15:39sur CNE. C'est-il un sentiment d'impunité ?
15:41C'est ce que je pense.
15:43Il ne faut pas
15:45que des délits,
15:47des infractions soient impunis.
15:49Et ça, en tant que
15:51ministre de la Justice, que garde des Sceaux,
15:53je suis pour une politique pénale
15:55ferme. Je suis pour une réponse
15:57pénale ferme. On entend votre fermeté
15:59avec, évidemment, la justice.
16:01Je n'ai pas posé la question tout à l'heure
16:03concernant le syndicat de la magistrature
16:05ou alors l'association Anticor. Est-ce que vous savez
16:07combien de magistrats font partie
16:09du syndicat de la magistrature, soit appartiennent
16:11à une association comme Anticor ?
16:15Vous focalisez
16:17là-dessus une fois de plus
16:19la justice. D'ailleurs, le plus souvent,
16:21ce sont des décisions collégiales.
16:23Donc, voilà,
16:25si quelqu'un peut
16:27éventuellement
16:29se voir reprocher
16:31une approche partisane, vous avez
16:33les deux autres magistrats qui sont dans la
16:35collégialité. Je connais bien la collégialité.
16:37Je suis moi-même magistrat financier. J'étais à la Cour
16:39des Comptes. La question, vous l'avez compris, c'est comment
16:41dépolitiser la justice. Je pense que vous y
16:43tenez beaucoup. On ne peut pas considérer
16:45que la justice est politisée.
16:47Vous avez un certain nombre de...
16:49Oui, mais bon,
16:51c'est une fois de plus
16:53la liberté syndicale.
16:55Ça relève de la liberté
16:57d'avoir des opinions. Mais vous avez le Conseil supérieur
16:59de la magistrature qui a
17:01exprimé justement ce
17:03qu'une organisation
17:05syndicale pouvait dire et ne pas dire.
17:07Donc, il y a des règles, il faut les respecter
17:09et tout le monde doit pouvoir les respecter.
17:11Alors, votre fermeté, vous l'affichez
17:13sur un sujet important et délicat qui est celui
17:15de la justice des mineurs
17:17qui se rendent parfois coupables d'actes
17:19d'une grande sauvagerie. Vous avez récemment déclaré
17:21que vous n'étiez pas hostile à l'atténuation
17:23de l'excuse de minorité et sur l'idée
17:25d'une comparation immédiate.
17:27Oui, oui, oui.
17:29Il y a eu des protestations, si on peut le dire,
17:31des principaux syndicats, de la magistrature.
17:33Une fois de plus, c'est le Parlement
17:35qui vote la loi.
17:37On peut entendre les réactions.
17:41La justice des mineurs, une fois de plus,
17:43ne peut pas être la justice des majeurs.
17:45Là, c'est un principe fondamental.
17:47Mais il peut y avoir
17:49des dérogations
17:51encadrées, notamment en cas
17:53de récidive, en cas de crime.
17:55Et tout cela,
17:57ça doit pouvoir être débattu
17:59au niveau du Parlement. Mais en ce qui me
18:01concerne, je suis ouvert
18:03à des dérogations
18:05par rapport à la fois
18:07à l'excuse de minorité
18:09et par rapport aux principes
18:11de comparation immédiate
18:13qui s'intitulent d'une autre façon,
18:15en s'agissant des mineurs.
18:17D'ailleurs, ces mineurs qui sont utilisés par des adultes,
18:19parfois des mineurs isolés, est-ce que vous faites le lien ?
18:21Oui, j'ai pu voir, si vous voulez,
18:23sur ce que l'on appelle la criminalité organisée,
18:25sur les trafiquants
18:27de stupéfiants,
18:29combien les mineurs pouvaient être
18:31utilisés.
18:33Les adultes savent que les mineurs auront une peine plus légère.
18:35Non, parce que
18:37vous avez des pressions
18:39sur ces mineurs, des pressions qui sont
18:41exercées sur les familles.
18:43Vous savez, nous étions
18:45à Marseille avec le ministre de
18:47l'Intérieur, nous avons eu des réunions de travail avec
18:49la police judiciaire, avec les magistrats.
18:51Ce qu'il nous remonte
18:53est horrible.
18:55Et nous avons changé de dimension
18:57au niveau de cette criminalité
18:59organisée, avec
19:01des délinquants
19:03qui utilisent
19:05la torture, la barbarie
19:07sur un certain nombre de personnes,
19:09sur les familles. On a changé
19:11de dimension. Donc il faut que
19:13l'État s'arme davantage
19:15pour lutter contre cette criminalité organisée.
19:17Vous savez, ce sont les magistrats, d'ailleurs,
19:19de Marseille qui ont
19:21dit que, devant la commission d'enquête
19:23qui avait été mise en place au niveau du Sénat,
19:25on était en train de perdre la guerre.
19:27Vous ne l'admettez pas, si je puis dire.
19:29Non, je ne l'admets pas.
19:31Je reconnais...
19:33Je suis
19:35heureux que les magistrats se soient exprimés
19:37librement et qu'ils aient pu dire...
19:39Il y a eu quelques remontrances après.
19:41Oui, elles ne sont pas de mon fait.
19:43Parce que je préfère la vérité,
19:45je préfère qu'on puisse
19:47constater la réalité,
19:49parce qu'à partir du moment où vous constatez la réalité,
19:51vous pouvez mieux la combattre. Et pour moi,
19:53c'est indispensable, justement,
19:55de se donner les moyens, de faire en sorte
19:57que l'État puisse se réarmer face
19:59à cette délinquance.
20:01Et là, ils trouveront un garde des Sceaux
20:03qui sera d'une extrême fermeture.
20:05Et c'est pour cela que je souhaite
20:07bien sûr que les propositions
20:09qui ont été faites aussi bien par l'Assemblée nationale
20:11que par le Sénat... Il y a une commission
20:13d'enquête qui a, au Sénat, remarquablement
20:15travaillé, formulé des propositions.
20:17Cette proposition de loi...
20:19Qui a dénoncé une arpoétatisation de notre pays.
20:21Oui, je suis tout à fait...
20:23J'ai dit que j'étais tout à fait d'accord pour qu'on puisse
20:25travailler à partir de cette proposition de loi.
20:27Elle est inscrite en janvier.
20:29Elle sera inscrite en mars prochain
20:31au niveau de l'Assemblée nationale. Donc j'espère
20:33que nous pourrons trouver
20:35les solutions pour
20:37armer davantage l'État.
20:39Mais, en attendant,
20:41je me suis battu
20:43pour qu'un certain nombre de mesures immédiates
20:45soient prises. On ne peut pas...
20:47On ne peut pas considérer...
20:49Oui, on ne peut pas considérer
20:51que c'est un problème gravissime
20:53et, dans le même temps, attendre
20:55le résultat de la loi. Donc c'est pour ça
20:57que je mets en place, je renforce
20:59un parquet national qui existe au niveau
21:01de la procureure
21:03de Paris. Je souhaite
21:05qu'il y ait une coordination nationale. Je souhaite imposer
21:07les échanges d'informations
21:09entre l'ensemble des juridictions
21:11parce qu'il y a telle ou telle
21:13situation qui montre que
21:15l'origine
21:17d'un problème peut se trouver
21:19dans une absence d'échanges
21:21d'informations. Donc il faut
21:23renforcer les moyens d'investigation.
21:25Il faut renforcer les moyens
21:27de juger. Et il faut que ces
21:29criminels, lorsqu'ils sont
21:31condamnés, puissent être isolés
21:33dans des quartiers spécifiques,
21:35dans des cellules isolées pour qu'on puisse
21:37brouiller toute possibilité
21:39de discuter
21:41avec l'extérieur. On entend votre détermination. Est-ce que vous faites le lien
21:43entre ultra-violence et immigration hors de contrôle ?
21:45Non.
21:47Parce que
21:49d'ailleurs, les faits montrent
21:51qu'on ne peut pas toujours le faire.
21:53Est-ce que parfois on peut le faire ?
21:55Parfois on peut le faire, bien évidemment. Vous avez donné
21:57un exemple.
21:59Mais est-ce que
22:01c'est quelque chose
22:03qui est systématique ? Non.
22:05Mais il faut lutter
22:07avec... Quand les mineurs isolés sont
22:09utilisés, la question se pose. Il faut lutter avec la même
22:11fermeté s'agissant de l'immigration
22:13clandestine et irrégulière.
22:15Et là, vous aurez
22:17aussi un garde des Sceaux qui sera ferme là-dessus.
22:19Il nous reste
22:21vraiment quelques secondes. Est-ce que la victime est au centre
22:23de notre justice, de notre système
22:25judiciaire ? Oui. En tout cas, je n'oublie pas
22:27que le garde des Sceaux,
22:29que le ministre de la Justice est aussi le ministre
22:31des victimes. Donc nous devons
22:33accompagner les victimes. Nous devons
22:35faire en sorte de
22:37les accompagner plus que
22:39nous le faisons. Vous savez,
22:41avec Bruno Rotaillon, nous avons rencontré
22:43les familles des
22:45victimes à Marseille. C'était un moment
22:47bouleversant. Et nous avons trouvé
22:49des personnes d'une dignité remarquable.
22:51Mais il faut pouvoir
22:53faire davantage en leur direction.
22:55Et je le souhaite. Nous allons
22:57là aussi prendre un certain nombre d'initiatives
22:59et je souhaite que la loi
23:01qui sera, je l'espère, votée par le Parlement
23:03ait aussi des dispositions concernant
23:05les victimes. On va conclure, mais je vais revenir
23:07à ma première question, monsieur le garde des Sceaux, parce qu'on
23:09entend votre détermination. Vous êtes aussi dans un combat politique.
23:11C'est tout à fait normal qu'une
23:13opposante comme Marine Le Pen, et quel que soit
23:15ce qu'on pense de cette opposante,
23:17soit inéligible dans notre pays,
23:19ce n'est pas un déni démocratique.
23:21Vous la respectez aussi ?
23:23Vous respectez son parcours ?
23:25Il puisse s'arrêter dans quelques semaines, ne vous pose aucun problème ?
23:27Je respecte tous les élus du suffrage
23:29universel. J'ai eu l'occasion
23:31d'ailleurs d'inviter tous les
23:33députés et sénateurs
23:35des commissions des lois,
23:37quelle que soit leur sensibilité, j'ai été moi-même
23:39député, je respecte
23:41le suffrage universel.
23:43Pas plus, pas moins, concernant
23:45la prétendante de l'Elysée
23:47qui pourrait se voir interdire,
23:49si je puis dire,
23:51d'être candidate à la présidentielle.
23:53Reconnaissez, monsieur Migaud,
23:55que ça interroge dans une démocratie.
23:57Vous me ramenez à votre première question,
23:59et je vous ai répondu que je ne
24:01pouvais pas commenter un acte de justice.
24:03Mais vous avez un avis personnel en tant que responsable politique.
24:05Je ne vais pas vous en faire part.
24:07Mais en tant que responsable politique.
24:09Mais une fois de plus, je suis un responsable politique qui a
24:11une responsabilité particulière au sein du gouvernement.
24:13Je suis le ministre de la justice,
24:15je dois veiller à l'indépendance
24:17et garantir cette indépendance
24:19à la fois vis-à-vis des magistrats,
24:21vis-à-vis des citoyens aussi, et des responsables
24:23politiques aussi.
24:25Et vous avez dit ministre des victimes
24:27également. Je suis aussi le ministre des
24:29victimes, et on doit
24:31apporter toute l'attention.
24:33Vous savez, c'est une de mes
24:35préoccupations, la crise de défiance
24:37des citoyens envers
24:39les institutions, y compris envers
24:41la justice. Et lorsque dans une démocratie
24:43vous avez une telle défiance vis-à-vis
24:45des institutions et de la justice, il y a
24:47un problème. Donc il faut pouvoir
24:49le traiter, et mon rôle,
24:51et je considère en tout cas que
24:53c'est mon rôle, c'est justement de faire en sorte
24:55que la confiance des citoyens dans la justice soit
24:57plus forte qu'elle ne peut l'être aujourd'hui.
24:59Et j'essaierai de
25:01leur démontrer qu'ils peuvent faire confiance dans la justice.
25:03Merci Didier Migaud, merci d'avoir été
25:05notre invité ce matin pour la grande interview.
25:07Je vous dis à bientôt avec grand plaisir.
25:09Merci.