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Cérémonie du Grand Prix de l'Urbanisme et des Palmarès des jeunes urbanistes, 18 décembre 2024, Cité internationale universitaire de Paris.
Table-ronde n°1 - "Une éthique de l’urbanisme"
Avec Claire Schorter et ses invités :
Chris Younès, philosophe
David Sim, architecte urbaniste
Pauline Robert, directrice générale adjointe des services de Pantin
Échanges avec les PJU Tout terrain, Le vent se lève! et l’Atelier de l’Ours.
Projection de la vidéo restitution, jeudi 17 octobre 2024 à Evry-Courcouronnes (Essonne) avec Atelier de l'Ours et Tout Terrain, lauréats des Palmarès de jeunes urbanistes 2024, "Mobiliser le vivant et les usagers au service des la sobriété foncière".
Animation de la cérémonie : Thierry Keller et Yoann Sportouch.

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Transcription
00:00:00Alors on vient de l'entendre, on sent que dans ton équipe, au quotidien, la question de
00:00:07certaines formes d'éthique en fait, pour arriver à
00:00:10à tout ce
00:00:12toute cette dynamique de groupe, toute cette dynamique d'équipe et
00:00:16et d'ailleurs en fait tu as voulu placer cette première table ronde sous le signe de ce mot, l'éthique
00:00:24une éthique de l'urbanisme et alors pour en parler
00:00:27j'appelle nos intervenants à venir nous rejoindre, Chris Youness, qu'on peut applaudir
00:00:35David Sim
00:00:38et Pauline Robert
00:00:45Prenez place, il n'y a pas de plan de table, donc faites comme chez vous. Bonjour, bienvenue.
00:00:52Bonjour
00:00:55Avant d'entamer la conversation avec tes invités, Claire, pourquoi cette thématique ?
00:01:03Vous m'entendez là ?
00:01:07Cette thématique, elle vient d'une crise de sens
00:01:13En fait j'ai travaillé au début de ma vie professionnelle dans des grandes agences d'architecture
00:01:18comme tu l'as dit Johan, j'ai travaillé avec Paul Shemotov et Bora Widobro
00:01:23d'ailleurs j'en profite pour faire un petit hommage à Paul Shemotov
00:01:28architecte décédé cette année
00:01:30Paul Shemotov était un communiste de conviction et il avait un franc parler et un grand courage de ses convictions
00:01:38j'ai notamment travaillé avec lui sur la réhabilitation des grands ensembles
00:01:43et Shem, comme on l'appelait, n'hésitez pas à critiquer cet urbanisme qu'il disait
00:01:49illisible et inégalitaire, les grands ensembles
00:01:52et il était néanmoins farouchement contre les démolitions
00:01:57au risque de priver les familles de leurs maisons et d'une partie de leur vie et de leurs souvenirs
00:02:03donc un positionnement éthique vis-à-vis de l'importance des histoires humaines
00:02:08j'ai ensuite travaillé avec Bernard Reichen
00:02:11et Bernard, je sais pas s'il est là, mais Bernard c'est le plaisir du projet, le plaisir du projet urbain, c'est avec lui que j'ai vraiment
00:02:19appris ça
00:02:20il comparait l'urbaniste, il compare souvent l'urbaniste à un écrivain public
00:02:26en disant c'est moi qui écris mais c'est vous qui aimez, donc en disant
00:02:31à ses maîtres d'ouvrage et avec cette formule il porte une forme aussi d'éthique de l'urbanisme
00:02:38en empathie avec un territoire et ceux qui l'habitent
00:02:43donc durant ces quinze années de pratiques intenses
00:02:47j'enchaînais les projets
00:02:49c'était parfois un peu harassant et le temps partiel que je
00:02:55que j'offre à mes salariés en même en les incitant à faire autre chose est aussi lié à ce temps là
00:03:01d'enchaînement de projets où la vie de salarié prenait vraiment beaucoup de place dans ma vie
00:03:07et dans le même temps je me questionnais
00:03:09face à la nécessité d'une bifurcation écologique
00:03:13qui devenait pressante évidemment au tournant des années 2010
00:03:18et je trouvais que cette bifurcation avait du mal à prendre corps dans les métiers de l'urbanisme et de l'aménagement
00:03:26on construisait toujours plus gros, plus épais, il était plus facile de démolir que de réhabiliter
00:03:32je disais souvent on tartinait la pampa sans se poser de question, le ZAN,
00:03:37le zéro artificialisation net n'était pas encore là
00:03:41et donc toute cette pratique m'a amené à une crise de sens
00:03:48dans ces années 2010
00:03:49et je me demandais mais pourquoi on fait ce métier, à quoi je participe quand je fais des projets urbains comme cela
00:03:57et c'est dans ce contexte
00:03:59que je me suis inscrite au post master architecture et philosophie
00:04:04dirigé par Chris Younes
00:04:06philosophe
00:04:08Chris est une figure féminine
00:04:12empathique et généreuse
00:04:14Chris est une philosophe du soin en théorie et en pratique
00:04:19j'ai trouvé auprès d'elle un écho à mes questions sur la pratique de la fabrique de la ville, sur la responsabilité
00:04:27déontologique et politique de l'acte de construire
00:04:31en mettant l'architecte en responsabilité face à la terre
00:04:35avec l'importance de ménager les milieux de vie avec soin et attention aux vulnérables
00:04:41face à la puissance maîtrise technique du métier et face aux enjeux financiers
00:04:48Les mots d'Anna Arendt
00:04:50participer à quoi ressemble le monde m'ont sorti de cette crise de sens
00:04:56l'architecte urbaniste paysagiste est un acteur privé au service d'un récit commun et collectif
00:05:04son rôle de concepteur dépasse les aspects techniques et conceptuels du métier il a aussi un rôle politique
00:05:11une responsabilité politique
00:05:13pour un monde inclusif
00:05:16hospitalier qui prend soin des humains comme du vivant qui rend heureux et en bonne santé
00:05:22qui offre des milieux de vie équilibrés et qui porte attention à la vie quotidienne
00:05:28en tout cas c'est comme ça que j'ai résolu ma crise de sens
00:05:31et au sujet de la vie quotidienne
00:05:34j'ai une autre personnalité
00:05:36qui a changé ma vie d'urbaniste
00:05:38c'est David Sim qui est ici qui nous fait l'honneur d'être ici. David était grippé au fond de son lit encore hier
00:05:45et il a failli pas venir donc je le remercie encore chaleureusement
00:05:50il est architecte urbaniste, il est écossais
00:05:54il a une agence
00:05:55softer, une agence en Suède
00:05:58et il est un des premiers étudiants de l'architecte danois Jengel donc je pense qu'il va nous en parler
00:06:05puis son associé, il est également enseignant dans le monde entier
00:06:09c'est l'un des héritiers David de la tradition
00:06:12people-oriented architecture and city-planning
00:06:16people-oriented architecture and city-planning comme Jengel et comme Jen Jacobs dont vous avez sans doute entendu parler
00:06:23à ses côtés j'ai appris à rendre tangibles les questions de l'usage dans la conception urbaine
00:06:29et à ce propos je voudrais vous raconter une petite anecdote qui a été comme mon coming out à cet urbanisme de l'usage
00:06:37en 2013 nous avions
00:06:40candidaté avec l'agence Gale pour le dialogue compétitif du projet urbain de Saint-Sauveur à Lille
00:06:47et donc lors de la première
00:06:50réunion du dialogue compétitif donc face à une docte assemblée de
00:06:56des techniciens de l'ASP à Lille, des élus
00:07:01habitués sans doute à entendre parler des grands concepts, des urbanistes, des grands tracés
00:07:07David prend la parole pour l'équipe et dit
00:07:11moi ce qui m'intéresse c'est que les gens puissent dormir la fenêtre ouverte
00:07:17et donc cette histoire de la fenêtre ouverte, de dormir la fenêtre ouverte, sur le coup j'ai été un peu
00:07:22choquée parce que j'avais pas l'habitude de cette approche
00:07:25très banale de la de la fabrique de la ville
00:07:29qui intégrait au coeur de la fabrique les gestes du quotidien
00:07:34et j'ai évidemment admiré tout de suite David qui a osé, qui voilà qui osait, chose que moi j'avais jamais osé
00:07:41souvent je me trouvais un peu en contradiction entre ma pratique professionnelle et ma vie quotidienne
00:07:47ma vie quotidienne dans les quartiers avec mes enfants, aller rendre autonome voilà et depuis ce jour là donc David
00:07:54tu as changé ma vie
00:07:56depuis ce jour là
00:07:58j'ose
00:07:59j'ose parler de ces petites choses là qui font toute la différence dans la conception de la ville et je pense que tu en parleras
00:08:05et donc c'est avec ce bagage que je crée l'agence en 2013
00:08:09l'amour des quartiers on en a parlé avec donc
00:08:13l'idée, l'envie de pratiquer l'urbanisme avec douceur
00:08:17dans le respect du vivant, des grandes et des petites histoires des territoires par et pour l'usage
00:08:22pour participer à la fabrication de quartiers où il fait bon vivre et tu l'as dit Camille où on a nous-mêmes
00:08:28envie d'habiter quand on assure un projet
00:08:31sur lequel on ne se sent pas raccord où on est conduit par des logiques qui nous dépassent sur des choses sur lesquelles nous-mêmes on
00:08:37n'aurait pas envie d'habiter
00:08:39parfois on arrête
00:08:41on pourra peut-être en parler mais voilà donc c'est un engagement, une empathie forte sur nos projets et donc au gré des projets
00:08:49j'ai rencontré des maîtres d'ouvrage, vous allez en voir toute l'après-midi, des personnalités engagées dans la réparation de la ville
00:08:57avec des convictions fortes et en toute simplicité
00:09:00comme Pauline Robert ici présente
00:09:03qui est directrice générale adjointe des services de la ville de Pantin
00:09:08formée aux sciences sociales et aux sciences politiques puis à l'aménagement
00:09:13Oh là là en fait j'ai pas du tout passé les diapos, je suis lancée dans mon truc
00:09:18il faut tout faire. Ah quand on n'a pas son équipe autour de soi il n'y a plus personne
00:09:22en plus ça marche pas. Si si ça marche. Voilà bon ça c'était David voilà
00:09:29C'était l'urbanisme aux pieds nus
00:09:32ou le pied de nez voilà ça c'est Pantin
00:09:35Et donc
00:09:37Pauline est donc urbaniste engagée auprès de son mère Bertrand Kern
00:09:41au service de la ville, au service de la réparation d'une ville historiquement servante, ouvrière, très populaire
00:09:49dont la métamorphose engage forcément, naturellement, une forme de gentrification si près de Paris
00:09:55et la question pour Pantin c'est comment y résister tout en activant les leviers de la création de valeur pour la réparation
00:10:03comment on permet à cette ville de rester populaire, vivante et à l'écoute des plus démunis
00:10:07Donc Chris je te laisse l'honneur d'ouvrir cette table ronde et de démarrer à l'après-midi
00:10:16en revenant peut-être sur cette question d'éthique en philosophie rapportée à la question de la fabrique de la ville
00:10:23Merci Claire tu peux nous rejoindre. Avant Chris de te laisser la parole je
00:10:28vous rappelle mesdames messieurs que c'est le moment de gratter vos post-it
00:10:32et donc des jeunes gens fort attentionnés vont passer parmi vous pour ramasser les copies d'ici une petite demi-heure
00:10:40d'ici 25 minutes. Voilà je me permettais ce petit temps mort administratif. Chris
00:10:46Eh bien merci beaucoup Claire c'est une joie d'être ici et j'étais très heureuse de savoir que tu avais gagné ce prix
00:10:56et qu'il y ait cette célébration et de voir aussi toute l'équipe, toute cette énergie et toute cette singularité qui fabrique un ensemble
00:11:08mais où chacun porte sa propre voix. Donc merci encore. Oui cette question éthique elle est fondamentale parce que l'état du monde
00:11:18aujourd'hui appelle vraiment des pratiques, des inventions, des imaginaires pour pouvoir affronter en fait ce qui se passe
00:11:30et donc l'éthique c'est ce qui est très important avec cette question c'est qu'on ne sait pas définir, on ne va pas définir ce que c'est l'éthique
00:11:38mais par contre on sait que ça n'est pas des solutions, on ne peut pas simplement avoir des solutions technoscientifiques par rapport à l'état du monde
00:11:46et l'éthique elle renvoie, c'est pas une morale, c'est pas du moralisme, c'est pas une doctrine, c'est vraiment une manière, souvent on va dire
00:11:58c'est une manière de vivre, une manière de penser, une manière de faire et je trouve que tel que ça a été évoqué déjà c'est aussi et c'est beaucoup
00:12:08aujourd'hui une manière d'aimer finalement les choses, les êtres et d'en prendre soin. Donc en fait la notion d'éthique aujourd'hui elle renvoie vraiment
00:12:22à cette nouvelle manière. Par contre il y a une résonance avec l'éthologie parce qu'il y a la même racine de l'éthos et l'éthologie c'est vraiment
00:12:34l'étude scientifique des comportements animaux et humains puisque les humains sont des formes d'animaux aussi et que cette résonance, c'est celle qui a beaucoup
00:12:46à travailler Deleuze, ce qui l'intéressait c'était ce que pouvait la puissance d'agir des animaux et donc des humains, donc cette dimension là qui est fondamentale
00:12:58donc je trouve que dans l'éthique c'est vraiment cet appel à une manière de se comporter, de faire qui est absolument déterminante. Alors il me semble que et même je suis
00:13:10certaine que cela engage, c'est un mot qui a été largement évoqué depuis le début de la séance, c'est vraiment un engagement qui dans sa façon de se comporter, c'est du comportement
00:13:22c'est à dire que ce n'est pas des mots, enfin ça peut être des mots, mais c'est des actes aussi, c'est un ensemble de choses qui font que c'est incarné, c'est ça qui est très fort dans la notion d'éthique
00:13:34et donc dans cette période de trouble, certainement que cette éthique de l'urbanisme, elle appelle une éthique du care, une éthique du prendre soin, c'est quelque chose qui a été beaucoup porté
00:13:48qui est porté par tout un mouvement éco-féministe, mais qui travaille toujours cette idée de comment est-ce qu'on peut réunir la nature et la culture, ça a été évoqué aussi dans tout mon parcours
00:14:02ça n'est pas l'un contre l'autre, l'un ou l'autre, c'est que ça ne fait qu'un en fait, et donc cette dimension là est absolument essentielle, et moi j'ai essayé de repérer un petit peu
00:14:12parce que c'était évoqué justement dans tout ce travail de transformation qui est en jeu, où il s'agit finalement d'inventer, d'hériter et d'inventer en même temps, donc je me disais que si on prend au sérieux cette éthique de l'urbanisme
00:14:28qui est une éthique du prendre soin, qui est attentionnée, qui est empathique, je reprends tes mots, qui reconnaît, qui considère chaque chose et être dans ce qu'elle est, et de les faire tenir ensemble
00:14:44c'est vrai qu'il y a une référence qui a été portée par Gattari en philosophie, qui est un grand ami de Deleuze, avec qui il a travaillé sur les mille plateaux, mais aussi qui a écrit cette perle qui ressort aujourd'hui, qui devient une sorte de boussole sur les trois écologies, où il va falloir faire tenir ensemble l'environnemental, le social et le mental
00:15:04et pour moi cette boussole me parle beaucoup parce que les architectes vont bien sûr faire tenir l'environnemental et le social, mais c'est à partir d'une manière d'être, d'un mental, d'une force personnelle, et donc je me disais que pour Claire, je me disais qu'il y a en fait dans la boussole d'une éthique de l'urbanisme, du prendre soin, je trouvais qu'il y avait trois paramètres qui clignotaient dans cette boussole
00:15:32la prise au sérieux des situations, ce que j'appelle le situationnel, et l'expérientiel, donc c'est l'in situ, c'est à chaque fois au cas par cas, c'est du sur-mesure, donc là je trouve que c'est fondamental, c'est expérientiel parce qu'il y a un rapport, et on l'a vu depuis tout à l'heure, c'était trop bien, j'ai fini...
00:15:54C'est pour approcher le micro, pour vous entendre bien au fond. Non, pas du tout, je ne me permettrai pas. Alors, si, si, si, parce que moi je suis un peu distraite, je dois reconnaître pour le temps. On a un timer, tout va bien, on est confort. Non, non, j'ai fini, j'ai très peu à dire. Ah d'accord, tant que c'est pas rouge. Alors, l'expérientiel, parce que c'est cette dimension justement, puisque quand on parle d'éthique, si c'est pas de la morale, si c'est pas de la doctrine, ça veut dire que c'est ressenti, c'est incarné, c'est porté, c'est-à-dire qu'on paye le prix,
00:16:24aussi, de ce qu'on porte. Donc, je pense que ça, c'est un point absolument clé. Donc, le situationnel, l'expérientiel, je pense, avec tous les attachements, les interdépendances qui ont été évoquées, et le fait de parler d'amour des quartiers, c'est à revendiquer précisément tout ça. Je pense aussi, c'est tout ce qui est de la reprise à partir de ce qui est déjà là, c'est-à-dire hérité, mais c'est aussi recommencé. C'est pas simplement reprendre ce qui est là et le reproduire, c'est quelque part l'adopter,
00:16:54et puis l'interpréter. Dans tous les projets, il y a ça. C'est une reprise et un recommencement. Donc, c'est vraiment un entrelace en termes de traces et de recommencements. Je trouve que ça, c'est le deuxième point, puisque le situationnel, l'expérientiel, je les mets en même temps.
00:17:14Après, il y a tout ce qui touche, finalement, à la question du commun. Parce qu'en fait, faire les choses... Quels sont les lieux du commun, en fait ? Et qui sont, dans cette éthique de l'urbanisme, dans cette éthique, finalement, de l'urbanisme qui prend soin, eh bien, la question du commun, de ce qu'on va pouvoir mettre en commun, partager, le bien commun, c'est quelque chose qui est génial,
00:17:42parce qu'on voit que ça prend de plus en plus d'importance et que c'est une lutte pour trouver ces espaces-là du commun qui vont pouvoir être partagés. Et puis, évidemment, tout ce qui va concerner le faire ensemble.
00:17:58C'est cette idée que cette éthique de l'urbanisme, cette manière de faire sentir, penser, aimer, ça va être forcément avec les autres. Et donc, ça va être du débat, de la négociation, de la concertation, de la parole, du conflit, de l'entêtement, des marches arrières.
00:18:20Et c'est donc tout ce qui est là, mais qui fait qu'on prend très, très au sérieux le fait qu'on ait un tournant, qu'on ait une bifurcation. Je préfère d'ailleurs, de loin, le terme que tu as employé de bifurcation. On rentre résolument dans une nouvelle ère de l'urbanisme. C'est fini.
00:18:39Merci. Merci Chris. Effectivement. Merci pour cette première définition et même plus une mise en pratique quelque part de cette éthique. David, je me tourne vers toi. Alors, ça a été dit, tu travailles avec... Déjà, merci d'être là. Je sais que Claire l'a dit, c'était pas facile hier.
00:19:03Tu travailles avec Yann Guel. Tu as rencontré Claire au moment de ton travail à Saint-Sauveur. Est-ce que tu peux nous rappeler, nous dire, nous expliquer, en fait, ce que c'est que cet urbanisme, en fait, des fenêtres ouvertes, en fait, cet urbanisme de la ville tous les jours ?
00:19:23Merci Claire. Félicitations. J'espère qu'avec le Merle-Gorge et l'accent écossais, j'espère que ça va. Je vais parler des photos. Ça va venir. Ça va arriver.
00:19:47Non, non, j'ai juste trouvé qu'elle bouffe mon béton. C'est juste pour dire que je connais bien... Oh là là, mais... Reviens, reviens. Le rouge. Oh oui, c'est juste pour dire que je connais bien la largeur du départ en France. Ce qui est sûr de bouffer mon béton, première éthique, je crois que je ne pourrais pas proposer un quartier dans lequel je ne voudrais pas vivre moi-même. Je bouffe mon béton.
00:20:15Éthique, Jan Gehl, mon parrain en urbanisme, il a 88 ans maintenant. Still going strong. Quand j'avais 19 ans, j'ai lu les conférences de Jan Gehl la première fois. Il a dit plein, plein de choses.
00:20:35Un truc m'a frappé. Il a dit que les enfants qui vivaient au-dessus du troisième étage jouaient beaucoup moins à l'extérieur et beaucoup moins d'amis. Je ne sais pas si c'est une question de moralité ou d'éthique, mais au moins de responsabilité.
00:20:53Jan Gehl était un monsieur sage, un professeur d'évidence. Rapidement, l'histoire de Jan Gehl. C'est un architecte qui est allé dans les années 60. Il s'est tombé amoureux d'un psychologue, Ingrid, et ensemble ils ont fait des recherches pour comprendre où se trouve le bonheur et le bien-être dans l'urbanisme.
00:21:15Ils ont fait plein, plein de recherches, surtout en Italie. Ils ont étudié les places publiques en Italie. Voilà, on est à Venise et c'est très mignon. Les enfants qui jouent au football, ça fait très passionnant.
00:21:30Avec l'église, c'est le profond et le sacré ensemble, le football, le supermarché, l'église. Mais surtout important, c'est l'espace où les parents peuvent prendre leur café ou leur appareil dans le même espace que les enfants jouent au football.
00:21:53Ça fait partager. C'est l'éthique, l'éthique gentille. Il y a des mots, c'est le week-end. Un ville devait être un endroit où un enfant qui marche dans la rue peut ressentir ce qu'il devait être un jour.
00:22:15Je ne sais pas si on dit que si on fait bien pour les enfants, pour les familles, pour les enfants, c'est bien pour tout le monde. Et aussi, je trouve, pour moi, il y a un côté qui est très profond pour moi qui vit en France. Chaque fois, on voit dans le magasin, dans le boulanger, on dit bonjour.
00:22:35Même les enfants, on prend très petit, bonjour, bonjour, madame, bonjour. On est conscients d'être présents. On est là. Je trouve ça, pour moi, c'est très profond. C'est juste l'enfant qui est là, qui participe dans la société.
00:22:54Et à Malmö, je continue avec les images cute. On souhaite que ces petites filles qui vendent des cafés aux touristes, urbanistes français, pour eux, c'est un petit aventure, la vie, c'est une liberté.
00:23:11Mais ça parle aussi de liberté du parent, où une famille peut vivre comme ça. Les enfants peuvent faire ces petites aventures poussant dans la ville. Et dans le même endroit, pour moi, c'est une image.
00:23:26Il faut que je mette ma lunette un peu anthropologue pour voir ce qui se passe ici. C'est la famille qui se prend une pizza le soir. C'est un mardi soir. On voit qu'à côté, il y a le plateau avec l'eau, le robinet. Il n'y a pas de coca. Ce n'est pas le week-end. Et c'est juste que deux heures, un mardi soir, on peut faire la vacances en famille.
00:23:51Les gens se baignent ?
00:23:53Oui, les gens se baignent. C'est des vikings. On peut même baigner. C'est l'esprit vacances dans la vie quotidienne. Et ça, ça parle de la générosité dans la ville. Et on peut regarder cet endroit. Et c'est une question éthique par rapport à l'esthétique.
00:24:15C'est moche, mais ça marche. Et pour moi, c'est une image qui ne parle pas de l'architecture. Ça parle de démocratie. Ça parle d'intégration. Ça parle de la santé publique. C'est les gens à l'extérieur, en compagnie de l'autre homme.
00:24:36Pour moi, c'est l'essence de l'éthique. Et c'est l'essentiel. C'est les cinq sens.
00:24:57Les cinq sens, c'est juste en passant le boulangère. Tous les sens, même le sourire du boulangère. Et c'est un petit fenêtre qui doit la rue. Et ce petit fenêtre donne ses possibilités, son bonheur, ses expériences sensuelles et sociales.
00:25:19Même chose, c'est un banque. C'est simplement un banque. Mais ça change complètement l'esprit de la vie dans la rue. Et c'est pour moi, les réponses. Souvent, dans les débats de l'architecture, l'urbanisme, c'est l'architecture est un grand A. C'est le grand axe.
00:25:38Mais pour moi, c'est des tout petites choses. Je crois que c'est le meilleur projet d'urbanisme que j'ai vu de ma vie. C'est la maison de la retraite au Japon. C'est à côté d'un lycée.
00:25:57Les architectes ont coupé un trou dans l'aile, un trou dans les grillages, pour que les personnages puissent regarder les jeunes jouer au basket. C'est le plus simple possible. Mais ça, pour moi, c'est l'éthique de l'urbanisme. C'est une réponse ?
00:26:19C'est une réponse. On va peut-être poser la question à Pauline. Merci, David.
00:26:25Comment ça marche, je me pose, tourne vers vous, Pauline, à Pantin ? Comment vous faites vivre l'éthique, concrètement ?
00:26:42On ne dit plus Pantine, on dit Pantin.
00:26:46Oui, mais Pantin vibre encore dans mon cœur. Et l'œuvre de Pantin se poursuit. Claire, tu parlais d'urbanisme de vie, d'urbanisme de lien. Tu disais que tu viens plutôt des sciences sociales et des lettres.
00:27:04Si je me contentais de regarder la définition de l'urbanisme telle qu'on la trouve aujourd'hui dans le dictionnaire, à savoir les sciences et les techniques qui organisent l'espace, je pense que je ne serais pas venue à l'urbanisme.
00:27:16Et en fait, qu'est-ce qui se joue dans tout ce que j'entends et dans ce que tu promets, dans ce que tes équipes ont évoqué tout à l'heure ? C'est bien plus grand que tout ça.
00:27:32Et derrière l'urbanisme, il y a la question de la vie, il y a la question des vies humaines, il y a la question des interactions humaines, des interactions sociales, de l'interaction avec le vivant.
00:27:42Et en ça, derrière l'urbanisme se pose la question de quelle société on veut faire et comment on fait société. Et l'urbanisme ne fait pas société, mais en tout cas, il s'y attelle, il y contribue.
00:27:58C'est sans doute pour ça qu'on a la chance d'avoir des philosophes comme toi, Chris, des sociologues, qui viennent questionner l'urbanisme, qui viennent questionner la matière et qui viennent la challenger et qui viennent montrer et travailler et questionner les liens entre l'urbanisme et la question de quelle société on veut faire à travers ça.
00:28:20Et puis, je trouve que c'est ce qui rend aussi cette discipline et cet ensemble de disciplines extrêmement passionnantes et extrêmement politiques, tu le disais dans ton introduction. Et donc, évidemment, je suis invitée à parler de Pantin.
00:28:35Et à Pantin, l'urbanisme, il est au service de ce projet politique et de ce projet de société qui est porté en l'occurrence par un maire qui est quand même maire depuis plus de 20 ans. Donc, en plus, on a une certaine constance du projet et qui est un projet qui est incarné, comme tu le disais, dans une ville qui, en fait, a une histoire assez forte de territoire servant de la capitale parisienne.
00:29:00Et donc, avec ce territoire servant, un territoire qui est fracturé, qui est fragmenté. Le maire, il dit souvent, Pantin a hérité des poubelles, des morts et des usines de Paris. Et donc, en fait, on est sur une ville qui, socialement, est une ville extrêmement populaire.
00:29:16Et donc, le projet politique derrière lequel l'urbanisme contribue, il est un projet de refaire ville, refaire quartier, refaire ville qui est une ville dans laquelle on se sent bien, une ville qui est ouverte à tous, qui est une ville populaire et qui est une ville où, qui qu'on soit, d'où qu'on vienne, et quels que soient ses niveaux de ressources, on est le bienvenu à Pantin.
00:29:43Et on y trouve une manière de cohabiter. Et je pense que le projet du maire, il est sincèrement...
00:29:50Attendez, monsieur Gors, qu'est-ce que vous faites là ?
00:29:53Monsieur Gors, il a rien compris.
00:29:56Monsieur Gors, qui vit lui-même en banlieue.
00:29:59Je ne dirais pas au maire que sa ville est moche.
00:30:04En plus, ce n'est pas vrai. Elle est hyper belle.
00:30:06Je trouve qu'elle a beaucoup de charme et d'entière grande diversité. Mais il y a sans doute des choses qui sont très moches à Pantin.
00:30:14Le maire dit souvent qu'il faut qu'on soit fier à Pantin de la diversité et de vouloir faire une ville qui est forte de sa diversité et forte de toute la richesse de sa population.
00:30:29Et de promouvoir une ville où il fait bon vivre les uns avec les autres.
00:30:35Et donc, je le disais, l'urbaniste, il est au service de ce projet-là.
00:30:39Et pour moi, ça se traduit et ça me permettra d'atterrir sur cette question des valeurs et de l'éthique.
00:30:45Mais c'est un urbanisme, je dirais, dans un premier temps, qui est un urbanisme d'apaisement et de réparation, comme tu le disais.
00:30:51Parce qu'on est sur des territoires qui sont fragmentés, qui sont lacérés par une histoire urbanistique aussi de grandes routes nationales, de grandes infrastructures.
00:31:02Et donc, on est sur un urbanisme de réconciliation, d'apaisement.
00:31:05Et puis aujourd'hui, de réconciliation avec le vivant, parce que souvent, encore plus dans les villes, nos villes se sont construites en s'exonérant complètement des milieux naturels et vivants sur lesquels elles se sont bâties.
00:31:20Donc, je pense qu'il y a vraiment un double enjeu de réconciliation et d'apaisement et de réparation.
00:31:26Après, c'est aussi un urbanisme où on vient recréer du service public, réamener du service public, recréer des lieux communs dans les quartiers.
00:31:35Je pense que l'échelle des quartiers, elle est importante à Pantin.
00:31:39On n'est pas forcément sur une ville avec une logique de centre-ville et une sorte de périphérie.
00:31:43On est vraiment sur une ville qui vit par quartier.
00:31:45Et donc, comment dans chaque quartier, à travers notre politique urbaine, on ramène des lieux communs, des espaces publics, des espaces où les gens se rencontrent et puis du service public.
00:31:54Parce que, comme le dit souvent le maire de Pantin, quand il n'y a plus de service public, c'est le dernier rempart avant l'exclusion.
00:32:01Et donc, c'est une dimension qui est très importante pour nous.
00:32:05C'est un urbanisme aussi de mixité, mixité au pluriel, mixité, mixité sociale.
00:32:13Mais ça, c'est évident avec la ville, avec les populations qu'on a.
00:32:17Ça se traduit dans une politique de logement qui est pleinement assumée et pleinement volontariste sur la question de produire toute la diversité des types d'habitats qu'on peut produire.
00:32:29Et à Pantin, on avait l'objectif d'arriver à 40% de logement social.
00:32:33On y est atteint. On va continuer de le faire.
00:32:35Mais c'est évident pour nous qu'il faut produire du logement accessible à toutes les populations, selon toutes les conditions de ressources.
00:32:44Et puis, c'est aussi une ville qui assume, je pense, pleinement la question de la mixité fonctionnelle
00:32:49et le fait que dans une ville, il faut qu'on puisse retrouver l'entreprise du CAC 40, l'industrie, l'artisanat,
00:32:57et travailler de manière volontariste et engagée à assumer qu'une ville, ça comporte toutes ses fonctions urbaines.
00:33:04Et souvent, une partie de ces fonctions-là, elles sont soit exclues volontairement de par des choix politiques,
00:33:11soit parce qu'on a des logiques de marché, etc., qui tendent à exclure une partie de ces acteurs-là de la fabrique de la ville.
00:33:19Et puis, il y aurait beaucoup de choses, beaucoup de facettes à abrasser, mais peut-être une dernière,
00:33:25parce que je sais qu'on y travaille avec Claire, mais c'est aussi un urbanisme qui fait le lien entre les générations.
00:33:31Et dans l'urbanisme, on travaille aussi sur le patrimoine, on travaille sur la dimension mémorielle.
00:33:36Et en fait, à travers l'urbanisme, on a la chance, et avec Claire, sur le projet d'écoquartier,
00:33:41on travaille notamment sur la question d'une trace d'un quai de la SNCF, qui est à la fois un quai qui a une histoire industrielle
00:33:48en lien avec les abattoirs de la ville de Paris, et on a aussi un quai qui est, tous en partie,
00:33:53les 4 derniers convois de la déportation de la Seconde Guerre mondiale, et donc où se joue, à cet endroit-là,
00:33:58à cet endroit-là de la ville bien précis, une trace mémorielle, une occasion pour, d'une génération à l'autre,
00:34:04transmettre cette mémoire, mémoire politique, mémoire de la résistance, mémoire de l'industrie.
00:34:09Et donc, en fait, à travers l'urbanisme, il se joue. Tu parlais de cette question du lien.
00:34:14Eh bien, il y a la question du lien aussi, pour moi, entre les générations.
00:34:17Et pourquoi je parle de toutes ces facettes ? C'est parce que je pense que derrière, évidemment,
00:34:22là, j'ai parlé de beaucoup de choses qui sont des valeurs, des valeurs dans lesquelles on croit,
00:34:26des valeurs qui sont des moteurs au quotidien pour accomplir les tâches et les métiers que nous portons.
00:34:36Et donc, pour en revenir à l'éthique, pour moi, je dirais qu'à travers l'urbanisme, on a une première dimension de l'éthique
00:34:47qui est une dimension, je l'ai entendue tout à l'heure, et qui est la question de l'engagement.
00:34:51Je pense qu'on est sur des métiers d'engagement.
00:34:53Et ce n'est pas parce qu'on est fonctionnaire et qu'on est tenu à l'impartialité, la neutralité,
00:34:58qu'on n'est pas engagé. Je pense que ce soit, d'ailleurs, les personnels de public engagés sur les questions de santé,
00:35:05de social, d'urbanisme, etc. On est sur des personnels qui sont engagés.
00:35:09On ne peut pas faire ces métiers-là si on n'est pas engagé et pas, en tout cas, sensible à ces valeurs-là.
00:35:16Donc, c'est des métiers d'engagement. C'est parce qu'on est, tu l'as dit, c'est des métiers qui sont durs.
00:35:21On est dans la lutte. On est sur des jeux d'acteurs complexes avec des enjeux particuliers.
00:35:26On est sur une fabrique de la ville qui est très, très fortement ancrée dans un mode de production
00:35:35qui est très financiarisé. Et donc, du coup, je pense qu'on est aussi sur des métiers d'engagement.
00:35:42Je pense que dans cette notion d'engagement, il y a une deuxième dimension dans l'éthique
00:35:46qui est accepter la complexité, embrasser la complexité inhérente à l'urbanisme,
00:35:52parce que c'est une complexité qui est inhérente à la société.
00:35:55Et donc, il faut, je pense, lutter en permanence contre la tentation du simplisme, de la simplicité,
00:36:01d'une fabrique de la ville standardisée. Je sais que quelqu'un l'a dit tout à l'heure aussi.
00:36:05Et donc, je pense qu'il y a une dimension de la complexité qu'il faut embrasser,
00:36:10mais qui fait partie de la richesse de ce métier et, je pense, de son côté passionnant.
00:36:16Une dimension, à mon avis, de sobriété. Mais ça, je pense que ça parlera à tous les urbanistes
00:36:24et les personnes qui se retrouvent, je pense, dans ce que tu portes aujourd'hui, Claire.
00:36:28Et puis, alors, peut-être une dernière dimension éthique, plus personnelle pour le coup,
00:36:33mais qui est, je pense, une forme d'humilité aussi par rapport à ce qu'on fait,
00:36:39qui peut vraiment dire aujourd'hui ce que sera la société dans 50 ans, dans 100 ans,
00:36:46qui est une échelle de temps sur laquelle on travaille aujourd'hui.
00:36:49Quand on crée un écoquartier, on espère qu'il va durer, qu'il va vivre, pour les 50, 100 prochaines années,
00:36:55et qu'on ne va pas produire quelque chose qui, finalement, dans 20 ans, sera le prochain en rue.
00:37:00Et en même temps, on voit bien que si on est face à des exemples extrêmement nombreux,
00:37:08de choses qu'on corrige aujourd'hui après, finalement, peu de temps.
00:37:12Ça fait 80 ans qu'on construit les villes et qu'on construit l'aménagement du territoire
00:37:16uniquement sur le modèle de la voiture.
00:37:19Tu parlais des grands ensembles tout à l'heure. Aujourd'hui, on corrige les urbanismes de dalles.
00:37:24Je pense qu'il faut être assez humble par rapport aussi à ce qu'on propose en urbanisme
00:37:33et qu'on soit dans un urbanisme qui permette et pas qui impose.
00:37:36Et tu disais tout à l'heure sortir de l'architecture avec un grand A
00:37:42et peut-être de l'architecture avec un grand E qui serait une architecture de l'égo.
00:37:47Moi, je pense que c'est aussi quelque chose qui doit être assez questionné au quotidien.
00:37:54Et en tout cas, moi, je trouve que tu incarnes toutes ces valeurs-là.
00:37:59Claire et félicitations pour ce grand prix qui, pour moi, est une évidence
00:38:05et je pense est une réjouissance aussi par rapport à la manière dont la profession reconnaît à travers toi
00:38:13toutes ces valeurs-là.
00:38:16Claire, merci à tous les trois.
00:38:23Claire, en deux minutes, peut-être une réaction sur ce que chacun et chacune a pu dire.
00:38:29Il y a eu beaucoup de choses. J'ai vu que tu avais gratté plein de notes, mais tu n'as pas beaucoup de temps.
00:38:35J'ai beaucoup aimé l'image de la petite fenêtre qui change tout.
00:38:41Tu as passé vite, mais en fait, ce que j'ai appris avec David, c'est ça,
00:38:46c'est des toutes petites choses dans le dessin.
00:38:50Alors là, c'est d'une façade, mais parfois, c'est aussi l'angle d'une rue, une chicane
00:38:54qui permet de faire en sorte que les voitures ne roulent pas trop vite, un angle coupé, une haie ouverte.
00:39:02Il y avait ça aussi. Cette petite fenêtre qui change tout, qui permet aux boulangers d'avoir un rapport avec la rue,
00:39:08de dire bonjour aux gens qui passent, de dire bonjour.
00:39:12Je trouve que c'est vraiment très important de parler de ces toutes petites choses qui changent tout.
00:39:18Parfois, il y a des grandes choses qui changent tout. Pauline, tu n'as pas parlé du renoncement.
00:39:24Je pense que c'est important que tu en parles aussi. Je pense que Chris aura envie de rebondir là-dessus aussi.
00:39:31Si on a le temps. Si on a le temps, mais on va faire très, très vite.
00:39:35Renoncement à des choses que dans la vie des projets, il faut tout le temps se remettre en question.
00:39:40Moi, j'ai appris à l'école et je ne sais pas si c'est des choses qu'on apprend vraiment.
00:39:45Mais j'avais un professeur, Michel Conant, qui nous disait qu'il ne faut jamais être sûr de ce qu'on a fait.
00:39:50Il faut être toujours ouvert à la critique. La critique, elle peut venir de gens.
00:39:55Elle peut venir d'un territoire. Elle peut venir d'une situation où on se rend compte que ce qu'on a dessiné,
00:39:59ce n'est pas adapté. Et donc, d'abord, on n'est pas seul.
00:40:04Donc, évidemment, on est on est multiples urbanistes autour d'un destin, d'une réparation.
00:40:10Et ça aussi, c'est bien parce qu'on n'est pas seul à se tromper.
00:40:13On s'auto corrige, on se corrige à plusieurs. Thierry sera là tout à l'heure.
00:40:18Et en fait, ce jeu de débats, de questions, c'est ça la richesse du projet urbain.
00:40:22À l'agence, on passe notre vie à ça, à travailler autour et à se questionner sur ce qu'on fait.
00:40:30Voilà. Donc, je voulais juste peut être te demander, Pauline, de parler de cette question du renoncement.
00:40:37Rapidement. La parole à Chris. Non, non, mais c'est très dur de renoncer.
00:40:44C'est très dur de renoncer et pas. Je pense parce que renoncer à un projet.
00:40:49Enfin, je pense qu'on en entend beaucoup parler. J'ai quelques exemples antinois.
00:40:53Mais il y a une dimension humaine au renoncement qui est que je pense à mes collaborateurs,
00:41:00qui à moi-même, quand ça fait quatre ans, cinq ans qu'on porte un projet à bout de bras.
00:41:06Et puis que finalement, pour une raison X ou Y, voilà, crise immobilière, changement de paradigme, etc.
00:41:13Il faut prendre la décision de renoncer.
00:41:15Je pense que c'est aussi dur pour un élu qui en parle depuis des années à sa population.
00:41:20C'est très dur de renoncer. Mais je pense qu'il faut qu'on apprenne à le faire et à le transformer en quelque chose de positif.
00:41:28Et évidemment, quand sur le projet, le grand projet d'éco quartier à Pantin, on a on a on a retenu clair.
00:41:38Et son équipe, finalement, on a mis à plat.
00:41:42On a fait le choix d'abandonner complètement un projet qu'on avait dessiné depuis 2012.
00:41:48Premier concours de maîtrise d'œuvre en 2012 sur l'éco quartier.
00:41:51Et puis, en fait, à faute d'aboutissement des négociations foncières, etc., ce projet ne s'est pas fait.
00:41:58Et donc, quand il a été question de renouveler le contrat de maîtrise d'œuvre, de changer d'urbanisme,
00:42:03on s'est posé la question avec le maire de est ce qu'on autorise finalement les candidats à réinterroger notre projet
00:42:09ou est ce qu'on leur demande finalement de mettre en œuvre le projet qu'on avait préalablement choisi et négocié et concerté avec la population ?
00:42:18Et bien, finalement, on a retenu, je pense, la personne qui a eu le rapport d'étonnement le plus dur sur le projet de 2012.
00:42:25Mais en même temps, je pense que tu as eu raison d'avoir ce rapport d'étonnement extrêmement dur,
00:42:30de nous sortir de ce espèce d'aménagement un peu à la papa, un peu simple et un peu déconnecté de son milieu.
00:42:40Et je pense que toi, tu as réintroduit un rapport au déjà là, un rapport à l'existant.
00:42:45Et je pense que c'est ce qui a fait aussi le côté séduisant de ton propos, parce que tu as su aussi aller chercher des choses
00:42:53qui sont l'ADN de Pantin, finalement, de faire avec le déjà là. Et donc, finalement, ce renoncement, il est passé très, très simplement.
00:43:03Et je pense qu'il va donner un projet qui est plus riche, plus sensible, plus fertile.
00:43:08Et de ce point de vue là, je pense que la crise immobilière qu'on traverse tous et qui vient fragiliser beaucoup de projets.
00:43:17Moi, je trouve cette période assez intéressante parce que je pense qu'elle vient mettre à mal un mode de production de la ville,
00:43:23qui peut être est en peine de se réadapter, peut être de s'adapter aux enjeux plus contemporains.
00:43:31Et voilà, moi, je suis assez curieuse de voir ce que ça va donner.
00:43:35Merci, Pauline. Chris, je t'ai vu réagir sur la notion de renoncement.
00:43:39Après ça, on va laisser la place parce que j'ai l'impression qu'il y a eu pléthore de questions.
00:43:44Non, mais je pense que justement, ce qui a bien été souligné depuis tout à l'heure, c'est qu'en fait,
00:43:51dans ce territoire de vie où on va prendre en compte la diversité, l'altérité, l'éthique, c'est aussi savoir dire non.
00:43:59Même quand c'est rentable, parce que c'est un sujet quand même.
00:44:03C'est créé, oui, mais c'est parce que c'est aussi savoir qu'il y a vraiment des territoires qui sont irremplaçables.
00:44:11Tout à l'heure, tu parlais justement du vivant.
00:44:13Quand on voit la chute de la biodiversité ou bien si on va détruire toute une mémoire, ça a été beaucoup évoqué.
00:44:21C'est à dire que c'est quelque chose qui va être irréversible.
00:44:24Donc, c'est fondamental aussi que l'éthique, c'est pas forcément aller dans ce qui sera le plus facile,
00:44:31puisque forcément, ça va être s'opposer, résister parce que pour préserver des territoires irremplaçables.
00:44:39Et on hérite aussi d'une culture qui n'a pas assez préservé.
00:44:43Et on a voulu à un certain moment, et c'est certain, il y a des progrès de toutes sortes que tout le monde souhaite, bien entendu.
00:44:51Mais il y a aussi l'irremplaçable.
00:44:54Et une fois qu'on aura détruit des milieux du vivant, et bien ils sont irremplaçables.
00:44:58Donc, c'est prendre la mesure aussi de cette responsabilité, non seulement de ces actes, mais de ce qui nous appelle en fait.
00:45:07Et je trouve que la grande bifurcation, c'est vraiment qu'on repart du quotidien, mais des petites choses,
00:45:16des vulnérabilités, du vivant, de tout ce qui est très fragile en fait.
00:45:22Et que cette fragilité, c'est ce qui va finalement redonner une énergie pour tout le monde.
00:45:27Réellement, c'est ça l'objectif à atteindre.
00:45:29C'est ce qu'on attend bien sûr des architectes, urbanistes, paysagistes.
00:45:34C'est bien commun, c'est pour tous.
00:45:36Mais c'est finalement à partir de la vulnérabilité.
00:45:38Parce qu'aujourd'hui, on a conscience de cette vulnérabilité.
00:45:42C'est passionnant. J'aimerais te poser encore plein de questions.
00:45:45Mais je crois qu'il y a des questions, j'ai vu passer pas mal de post-it.
00:45:49Est-ce que le dessinateur, au lieu de troller notre table ronde...
00:45:54Ah, ben voilà.
00:45:56Je t'en prie.
00:45:58C'est pour toi Pauline.
00:46:00Quelles sont les qualités attendues d'un maître d'ouvrage pour un projet réussi ?
00:46:04Est-ce que c'est à moi de répondre à cette question ?
00:46:06Ou est-ce que c'est à Claire de dire ce qu'elle attend de son maître d'ouvrage ?
00:46:11Vu de l'urbaniste, et ça aussi je l'ai appris avec David, c'est de faire équipe, ensemble.
00:46:18C'est-à-dire qu'il n'y a pas le maître d'ouvrage, il y a les termes.
00:46:23Mais en fait, on est tous urbanistes au service d'un territoire.
00:46:28Et on a tous nos points de vue, nos approches, nos questions.
00:46:32On est dans des équipes souvent pluridisciplinaires, et ça c'est très bien.
00:46:35Et l'enjeu du maître d'ouvrage, d'autant plus si c'est...
00:46:40Alors là, ça rappelle ce que disait Bernard.
00:46:43D'autant plus si c'est des maîtres d'ouvrage implantés dans les territoires,
00:46:48c'est eux qui connaissent le mieux les territoires.
00:46:50Sur Saint-Sauveur, on a mis en place ce qu'on a appelé les séminaires inter-services.
00:46:58C'est-à-dire qu'on passait une journée entière à échanger sur le projet
00:47:04avec nos maîtres d'ouvrage, au pluriel, c'est-à-dire l'aménageur,
00:47:07c'est-à-dire les services des villes, mais pas dans des tables rondes thématiques
00:47:12avec M. Poubelle d'un côté et Mme Espace-Vert de l'autre.
00:47:15L'objectif, c'était de parler tous ensemble, M. Poubelle et Mme Espace-Vert,
00:47:19d'un même sujet parce que chacun a son regard, a son faisceau de contraintes.
00:47:24Et en parler ensemble, c'est cette complexité-là qui conduit à un bon projet.
00:47:30Et donc, pour moi, la qualité attendue d'un maître d'ouvrage,
00:47:33c'est vraiment de faire équipe tous ensemble
00:47:37et d'apporter la meilleure connaissance d'un territoire.
00:47:41Alors, il y a évidemment les habitants qui...
00:47:44Et donc, peut-être aussi une autre qualité d'un maître d'ouvrage,
00:47:46c'est de ne pas avoir peur de questionner et d'entendre les habitants.
00:47:52À Pantin, en particulier, et j'en ai parlé dans l'ouvrage
00:47:56parce que c'est assez remarquable pour le choix d'un équipement public.
00:48:01Lors d'un concours, la ville de Pantin a organisé une consultation publique,
00:48:05c'est-à-dire que les habitants avaient accès au panneau de concours
00:48:10avec un petit laius explicatif.
00:48:12Et ils avaient trois boules, une boule pour voter sur...
00:48:15Alors, je ne me souviens plus, tu pourras en parler.
00:48:17Enfin, voilà.
00:48:18Et donc, en fait, le projet qui a été choisi,
00:48:20après, d'un point de vue administratif, c'est le jury qui était souverain,
00:48:23mais il y a eu un débat dans le jury
00:48:26de prendre le projet qui avait choisi les habitants,
00:48:29qui avait en majorité choisi les habitants.
00:48:31Il y a eu un débat entre certains élus.
00:48:34Et c'est finalement, effectivement, le projet choisi par les habitants
00:48:37qui a été choisi.
00:48:39Et donc, c'est cette confiance aussi,
00:48:41je pense qu'on a souvent peur, je ne sais pas pourquoi,
00:48:44mais le temps aussi du moment
00:48:48où les habitants parlent de leur bagnole
00:48:52et des crottes de chien, il est largement dépassé.
00:48:55Moi, j'ai connu ça.
00:48:56Mais maintenant, on est sur des habitants,
00:48:58la plupart des gens qui vivent dans un quartier,
00:49:00ils connaissent les problématiques,
00:49:01ils sont vraiment partie prenante des sujets environnementaux.
00:49:05Et donc, je pense qu'on a tout intérêt à les entendre.
00:49:07C'est aussi une qualité du maitre d'ouvrage.
00:49:09Pardon, merci.
00:49:10Désolé, évidemment, moi, j'ai le mauvais rôle.
00:49:13Johan aussi.
00:49:15Le mauvais rôle, c'est de tenir dans le temps.
00:49:19Alors, peut-être qu'on va se tourner
00:49:23sur quels critères choisissez-vous vos projets ?
00:49:26Pose quelqu'un dans le public qui veut répondre, j'imagine, Pauline.
00:49:31Rapidement, je suis vraiment désolé.
00:49:33Oui, très rapidement.
00:49:34Et je rajouterais juste à ce que tu as dit, Claire,
00:49:36c'est que je pense que notre rôle,
00:49:37il est d'ouvrir le champ des possibles.
00:49:40Même sur une toute petite échelle,
00:49:41le champ des possibles, il est important.
00:49:44Et je pense qu'on a cette responsabilité
00:49:46en tant que maître d'ouvrage, maître d'oeuvre,
00:49:48aménageur, etc., d'accepter que le champ des possibles est vaste.
00:49:52Après, sur les critères de choix des projets,
00:49:59il y en a plein, je ne vais pas les égrener.
00:50:01Après, ce que je dis souvent quand je rencontre,
00:50:06j'échange avec des promoteurs qui viennent nous solliciter,
00:50:10c'est de dire, à Pantin, le foncier, il est rare, il est fini,
00:50:13il n'y en a plus.
00:50:15Et donc, chaque projet qui sort à Pantin,
00:50:18il doit, évidemment, il y a des intérêts inhérents au projet,
00:50:22à l'opérateur qui le porte,
00:50:24mais chaque projet d'avoir une contribution sociétale,
00:50:29territoriale au territoire de Pantin.
00:50:33Et cette contribution-là,
00:50:35elle peut être de différentes natures.
00:50:38On va, évidemment, classiquement regarder
00:50:41la qualité architecturale, l'ambition environnementale, etc.,
00:50:44mais qu'est-ce que tel projet apporte réellement
00:50:46au territoire de Pantin ?
00:50:48Est-ce qu'il restitue une partie, finalement, de l'espace
00:50:51pour de l'usage public ?
00:50:53Est-ce qu'il vient créer un pied d'immeuble
00:50:55dans lequel on va pouvoir créer un espace
00:50:58collectif, commun, associatif, artisanal ?
00:51:01Est-ce qu'il s'inscrit dans une logique
00:51:03de programmation à vocation sociale ?
00:51:05Je pense que, voilà, on aurait tort de vouloir
00:51:08forcément cocher toutes les cases
00:51:10dès qu'un projet se présente,
00:51:12mais c'est de se dire, voilà, comment, y compris,
00:51:14chaque projet va s'inscrire dans le récit pantinois ?
00:51:18Et moi, je dis souvent, mettez-vous à la place
00:51:21du maire de Pantin qui, devant sa population,
00:51:23va aller présenter un projet.
00:51:25Comment il le connecte avec son récit à lui ?
00:51:28Et comment il le connecte avec les attentes
00:51:30de sa population ?
00:51:32Et pour moi, je pense que c'est ce travail-là
00:51:34de, voilà, de...
00:51:37qui se coélabore avec les maîtres d'ouvrages
00:51:40et l'architecte, etc., et les opérateurs,
00:51:42qu'on peut justifier
00:51:44à un moment qu'un projet, plutôt qu'un autre,
00:51:47finalement, se fasse
00:51:49à tel endroit du territoire,
00:51:51sur un foncier qui est quasi, aujourd'hui,
00:51:53inexistant.
00:51:55Merci. On va prendre une autre question.
00:51:57Et j'aimerais bien t'entendre, David,
00:51:59si tu souhaites revenir sur cette question.
00:52:01Je vais vite.
00:52:03Ah, là, là, voilà.
00:52:05Ça, c'est une bonne question pour toi, David.
00:52:07Mais je peux prendre la question ?
00:52:09Oui, on peut revenir.
00:52:11Les Écossais ont tous les droits, aujourd'hui.
00:52:13Je trouve que l'éthique a changé
00:52:15dans ces derniers dix ans.
00:52:17Maintenant,
00:52:19quand on commence un projet,
00:52:21on a ces questions.
00:52:23Premièrement, on ne touche pas les terrains verts.
00:52:25Je ne sais pas le mot pour ça, maintenant.
00:52:27On démolit
00:52:29le moins possible.
00:52:31Troisièmement,
00:52:33et c'est un triangle,
00:52:35on voit le plus bas possible.
00:52:37Pas plus que cinq étages.
00:52:39Cinq, six étages.
00:52:41Sinon, les enfants ne vont pas jouer.
00:52:43Pour moi, c'est l'éthique.
00:52:45On peut faire sortir
00:52:47l'écran, aussi.
00:52:49Peut-être dernièrement, l'idée de...
00:52:51Même si le projet, c'est juste une fenêtre,
00:52:53comment faire la ville ?
00:52:55C'est toujours l'ambition de faire la ville.
00:52:57Même si c'est un projet tout tout petit,
00:52:59l'ambition de faire la ville.
00:53:03Le plus grand obstacle à la profession d'urbaniste ?
00:53:05Tu peux continuer sur
00:53:07les obstacles.
00:53:13Les développeurs
00:53:15qui veulent construire
00:53:17les Graciel.
00:53:21C'est la même réponse,
00:53:23parce qu'on a toujours
00:53:25plein de projets
00:53:27sur les terrains verts.
00:53:29On veut démolir les bâtiments parce que c'est compliqué.
00:53:31C'est plus facile à démolir
00:53:33et construire à nouveau.
00:53:35C'est sûrement plus dense si on construit
00:53:37plus haut. Je trouve que c'est
00:53:39les mêmes obstacles.
00:53:41Il y aura un débat au cocktail, je pense, avec Claire,
00:53:43sur cette question de la hauteur.
00:53:45Jeune homme, monsieur Gorce,
00:53:47on a deux minutes encore
00:53:49pour une dernière question.
00:53:51Deux questions ?
00:53:53D'accord.
00:53:55Maintenant, c'est le dessinateur qui décide.
00:53:57Quel est le plus grand
00:53:59obstacle externe
00:54:01à un projet qui prend soin des gens
00:54:03et de la planète ?
00:54:05Claire, à côté de moi,
00:54:07brûle de répondre,
00:54:09mais ça ne va pas être son tour.
00:54:11Surtout qu'on a quelque chose sur la finance tout à l'heure
00:54:13et je pense qu'on aura l'occasion.
00:54:15Qui parmi vous ?
00:54:21Je rejoins Claire.
00:54:23Je pense que
00:54:25on a un mode
00:54:27de production de la ville qui,
00:54:29parce qu'il a besoin
00:54:31de moyens,
00:54:33est un mode de production qui est très financiarisé.
00:54:37Je ne jette pas la pierre
00:54:39aux opérateurs d'être pris
00:54:41dans ce mécanisme-là
00:54:45de financement,
00:54:47de capitalisation, mais qui fait rentrer la ville
00:54:49dans des grilles.
00:54:51Il faut que les projets, les programmes,
00:54:53les produits immobiliers rentrent dans des grilles
00:54:55pour obtenir les financements, etc.
00:54:57Forcément, quand ça ne rentre pas dans les grilles
00:54:59ou qu'on va toucher au commun
00:55:01ou à la non-spéculation,
00:55:03on rentre moins
00:55:05dans les grilles de ce mode de production
00:55:07de la ville.
00:55:09Je pense que c'est ça
00:55:11notre principal frein.
00:55:13Je pense que c'est indépendant
00:55:15des gens qui les portent.
00:55:17Je côtoie des gens qui sont dans
00:55:19toutes ces professions de l'urbanisme
00:55:21et de la promotion.
00:55:23Au final, quand on discute, ils sont portés
00:55:25bien souvent par toutes ces valeurs
00:55:27dont on a parlé.
00:55:29Ils sont aussi un peu prisonniers
00:55:31de modèles
00:55:33de production qui doivent se réinventer.
00:55:35Chris a un petit mot.
00:55:37Je pense qu'il y a
00:55:39beaucoup d'obstacles
00:55:41au prendre soin.
00:55:43Il y a déjà
00:55:45le fait que si on veut rentabiliser,
00:55:47si on veut gagner de l'argent,
00:55:49il y a vraiment
00:55:51cette dimension-là
00:55:53qu'il y a un capitalisme sauvage
00:55:55qui est vraiment
00:55:57un grand obstacle au prendre soin
00:55:59des lieux, des choses, des êtres.
00:56:01Et puis il y a vraiment
00:56:03cette idée
00:56:05que c'est vrai que cette dimension
00:56:07de changer la manière de voir les choses,
00:56:09c'est fondamental.
00:56:11C'est pour ça que
00:56:13c'est sûr que partir de l'éthique,
00:56:15ça peut paraître
00:56:17pas assez...
00:56:19C'est abstrait en fait.
00:56:21Comme ça relève
00:56:23de la responsabilité, comme on l'a dit,
00:56:25de quelque chose d'incarné.
00:56:27C'est très singulier l'éthique.
00:56:29C'est quelque chose qui peut être partagé
00:56:31mais ce n'est pas quelque chose
00:56:33qui va pouvoir être ramené
00:56:35en tableau Excel. Ça ne marche pas ça.
00:56:37Et donc,
00:56:39je pense que c'est vraiment cette double entrée.
00:56:41C'est une entrée qui n'est que financière
00:56:43ou que technique
00:56:45ou
00:56:47qui ne reconnaît pas
00:56:49que nous sommes à une période
00:56:51où il va falloir vraiment prendre soin
00:56:53de ce qui est en train de disparaître.
00:56:55Je pense que là, réellement,
00:56:57il y a un changement de mentalité.
00:56:59C'est pas pour rien
00:57:01qu'on voit qu'il y a plein de boussoles
00:57:03de toutes sortes qui sortent
00:57:05dans les ouvrages. C'est super
00:57:07parce que
00:57:09on ne sait plus trop
00:57:11comment hiérarchiser les valeurs, les priorités.
00:57:13Vraiment, je pense que ça,
00:57:15ça compte énormément aussi,
00:57:17cette dimension-là.
00:57:19Merci. Alors, Xavier Gorce nous offre
00:57:21la possibilité de faire une autre table ronde
00:57:23sur le patriarcat.
00:57:25Je pense que là, il y aurait besoin
00:57:27d'une journée entière. Tu veux répondre,
00:57:29David, sur le patriarcat ?
00:57:31Juste.
00:57:33Très court.
00:57:35Tu auras le mot de la fin.
00:57:37C'est pour célébrer
00:57:39le patriarcat. C'est à toi que revient
00:57:41le dernier mot.
00:57:43Dès que je dis que tu es champion
00:57:45de casting, tu as vraiment
00:57:47compris que
00:57:49le travail de faire la ville,
00:57:51c'est un travail d'équipe.
00:57:53Il y a un truc d'Aristote qui dit que
00:57:55les hommes similaires n'arrivent pas
00:57:57à construire une ville.
00:57:59C'est très important.
00:58:01Les gens similaires
00:58:03n'arrivent pas à construire une ville.
00:58:05Ce n'est pas le bon français,
00:58:07mais c'est du bon grec.
00:58:09Écoutez. Tout le monde aime
00:58:11bien bavarder, parler,
00:58:13mais écoutez.
00:58:15C'est important pour faire cette ville.
00:58:17Et troisième,
00:58:19dans ton nom, c'est la clarté.
00:58:21C'est complexe.
00:58:23C'est complexe de faire la ville.
00:58:25De temps en temps compliqué,
00:58:27de temps en temps confusant,
00:58:29mais je trouve
00:58:31qu'il faut toujours
00:58:33chercher les fondamentaux.
00:58:35C'est un des
00:58:37premiers mots français que j'ai appris
00:58:39par toi, Claire. Les fondamentaux.
00:58:41Qu'est-ce que sont les fondamentaux ?
00:58:43Ceux-ci parlent des valeurs.
00:58:45Je crois que c'est
00:58:47sa superpuissance.
00:58:49Merci
00:58:51beaucoup.
00:58:53Merci à vous
00:58:55trois.
00:59:01Merci à
00:59:03vous trois. Je vais vous inviter
00:59:05à regagner vos sièges.
00:59:07Nous, on va se lever. C'est le protocole,
00:59:09chère Claire.
00:59:11Messieurs,
00:59:13merci Xavier pour les
00:59:15questions. La dernière, surtout. Je suis vraiment désolé,
00:59:17mais on ne va pas pouvoir la traiter.
00:59:19C'est le moment de faire connaissance
00:59:21avec, comme on les appelle dans le
00:59:23jargon, nos petits PJU.
00:59:25De faire connaissance
00:59:27avec les lauréats, les premiers lauréats
00:59:29du palmarès des jeunes urbanistes.
00:59:31J'appelle à venir nous
00:59:33rejoindre sur scène Adèle Sorge
00:59:35et Arthur Poiret de l'agence Tout Terrain.
00:59:37Karim Layani.
00:59:39Karim, pour Le Vent Se Lève.
00:59:41Bravo, oui.
00:59:43Clément Dex.
00:59:45Clément Dex et
00:59:47Clémentine Coulon-Leblanc
00:59:49pour l'atelier
00:59:51de l'ours.
00:59:53On va
00:59:55se mettre bien.
00:59:57Venez, c'est vous
00:59:59qui êtes à l'honneur.
01:00:05Non, on ne s'assoit pas.
01:00:07Vous êtes jeunes,
01:00:09vous n'avez pas le droit de vous asseoir.
01:00:11Déjà, félicitations.
01:00:13Johan, je te laisse la main.
01:00:15C'est lui l'urbaniste.
01:00:25Adèle
01:00:27Sorge.
01:00:29Adèle est là.
01:00:31Arthur Poiret.
01:00:33De l'agence Tout Terrain.
01:00:35Ce qui vient d'être dit sur l'éthique,
01:00:37évidemment, j'imagine que ça vous parle.
01:00:39La question du déjà-là,
01:00:41la ressource,
01:00:43l'immersion pour comprendre le contexte local,
01:00:45c'est un peu ce que vous faites au quotidien.
01:00:47J'aimerais bien vous entendre par rapport à tout ce qui vient d'être dit.
01:00:55Non, ça ne marche pas.
01:01:01Ici? Oui.
01:01:03Effectivement,
01:01:05c'est des notions qui résonnent en nous.
01:01:07Alors, nous, on n'a pas eu
01:01:09autant d'années d'expérience que toi, Claire,
01:01:11pour poser toutes ces questions.
01:01:13En tout cas, on s'en est posé,
01:01:15que ce soit par, déjà,
01:01:17se dire quelle approche on désirait pratiquer,
01:01:19plutôt sociale, environnementale,
01:01:21de pratiquer
01:01:23par une démarche narrative
01:01:25aussi qu'on emploie
01:01:27au quotidien.
01:01:29Une évidence, par notre nom,
01:01:31c'est qu'on aime être sur le terrain
01:01:33et enfin,
01:01:35avoir une pratique
01:01:37qui nous enchante
01:01:39parce qu'on passe beaucoup de temps,
01:01:41comme ça a été dit, dans notre pratique
01:01:43et donc trouver
01:01:45dans notre quotidien
01:01:47des formats qui nous plaisent.
01:01:51C'est un vrai métier super.
01:01:53C'est ça qu'il faut dire, c'est ce que j'entends.
01:01:55On peut choisir
01:01:57la forme qui nous plaise pour que ça soit super.
01:01:59Nous, effectivement,
01:02:01tout terrain, on est à trois endroits différents.
01:02:03Les Vosges,
01:02:05le Pays Basque et la région francilienne.
01:02:07Si vous faites le lien dans votre tête,
01:02:09ça fait une diagonale assez lointaine
01:02:11mais qui nous demande, effectivement,
01:02:13de créer des formats
01:02:15comme des immersions, des résidences
01:02:17pour être sur le terrain
01:02:19au plus proche de la réalité
01:02:21pour comprendre
01:02:23le déjà là qui est pour nous
01:02:25le point de départ de tout projet.
01:02:27Merci à vous.
01:02:29Peut-être un petit mot
01:02:31pour compléter.
01:02:33C'est vrai qu'on se retrouve bien
01:02:35sur cette question de l'éthique
01:02:37qui a été vraiment
01:02:39une chose qu'on s'est posée.
01:02:41Je crois que notre article commence par
01:02:43tout terrain, c'est des questionnements.
01:02:45C'est vrai qu'après quelques années de pratique,
01:02:47on s'est vraiment demandé comment on avait
01:02:49envie de travailler
01:02:51à la fois pour ne pas tartiner,
01:02:53mais aussi pour avoir
01:02:55nos vies
01:02:57personnelles que peut-être
01:02:59on n'arrivait pas trop à voir en sortant
01:03:01de l'école d'archi, comment on pouvait avoir une vie
01:03:03et travailler en agence,
01:03:05peut-être même monter son agence.
01:03:07Et puis être sur le terrain,
01:03:09c'est aussi une manière de rencontrer plein de gens,
01:03:11de plein de domaines,
01:03:13plein de compétences différentes
01:03:15des habitants, mais pas que.
01:03:17Du coup, c'est une vraie manière
01:03:19de continuer à se former,
01:03:21s'ouvrir à plein de choses,
01:03:23des sujets sociaux, techniques, écologiques.
01:03:25Je pense que ça nous donne
01:03:27envie de poursuivre
01:03:29pendant pas mal d'années.
01:03:31Je vais passer la parole à Karim Layani.
01:03:33Karim, le vent se lève,
01:03:35c'est déjà une prise de conscience,
01:03:37une certaine forme d'éthique.
01:03:39Ça part de là.
01:03:41Oui, tout à fait.
01:03:43Ce mot, je l'ai choisi
01:03:45pour deux raisons.
01:03:47La première, c'est pour m'ancrer dans un territoire,
01:03:49puisque ce sont des mots
01:03:51du poète Paul Valéry.
01:03:53Moi, je suis Occitan et cette envie
01:03:55de revenir sur le terrain,
01:03:57de s'ancrer quelque part et de retrouver
01:03:59un attachement au lieu qu'on aime,
01:04:01pour moi, c'est absolument essentiel.
01:04:03Et puis aussi, il y a Miyazaki
01:04:05qui m'inspire énormément aussi
01:04:07dans ma manière de voir le monde
01:04:09et notamment de s'emparer de sujets
01:04:11sur lesquels on ne nous attend pas
01:04:13et de nouveaux sujets qui viendront plus tard.
01:04:15Je pense notamment à toute la question aérienne
01:04:17qui me ramène aussi à Toulouse,
01:04:19la ville où j'exerce...
01:04:21Capitale de l'aéronautique.
01:04:23Voilà.
01:04:25Et puis, il y a une volonté, effectivement,
01:04:27éthique,
01:04:29de mener un peu un combat
01:04:31au XXIe siècle
01:04:33en se réappropriant aussi
01:04:35tout le caractère terrestre,
01:04:37on va dire,
01:04:39de ce que doit être une démarche aujourd'hui
01:04:41face aux logiques du XXe siècle
01:04:43qui étaient des logiques plus industrielles.
01:04:45Merci.
01:04:47Clément et Clémentine.
01:04:49Alors Clément Dex.
01:04:51Dex ?
01:04:53On prononce le X.
01:04:55De l'atelier de l'ours.
01:04:57Vous êtes quatre paysagistes
01:04:59au sein de votre structure.
01:05:01L'éthique, pour vous,
01:05:03ça passe par notamment la question
01:05:05de la frugalité, peut-être,
01:05:07sur les revitalisations des espaces ?
01:05:09Oui, notamment, je pense que
01:05:11tout à l'heure,
01:05:13tu parlais des responsabilités.
01:05:15C'est des choses
01:05:17qu'on a beaucoup en tête
01:05:19quand on intervient sur des sites.
01:05:21Tu parlais de responsabilités politiques,
01:05:23avant tout politiques qu'on peut avoir.
01:05:25On se pose beaucoup de questions
01:05:27sur les ressources qu'on mobilise
01:05:29dans nos projets,
01:05:31que ce soit les matériaux
01:05:33qu'on va utiliser, les ressources sur lesquelles
01:05:35on intervient, l'eau, le sol,
01:05:37et aussi, d'une certaine manière,
01:05:39le degré
01:05:41d'interventionnisme qu'on peut se permettre
01:05:43aujourd'hui. Quel héritage
01:05:45on va laisser demain ? Quel matériau
01:05:47on va retrouver suite à nos
01:05:49interventions ? Il y avait un exemple
01:05:51de simples piquets
01:05:53battus dans le sol qu'on peut retirer
01:05:55demain, qui ont été mis dans une ville nouvelle.
01:05:57Donc voilà, ça écoe aussi à la notion
01:05:59de recommencer les choses
01:06:01sur un site sur lequel il y a déjà eu des écritures
01:06:03qui sont un peu usées.
01:06:05En termes d'éthique, c'est quelque chose
01:06:07qui est assez transversal,
01:06:09important pour nous de
01:06:11s'interroger sur ces ressources
01:06:13qu'on s'est affinies, et de savoir
01:06:15comment on peut
01:06:17les employer au mieux, comment est-ce qu'on décide
01:06:19collectivement la quantité qu'on
01:06:21utilise, la juste mesure
01:06:23des projets.
01:06:25Clémentine, un petit mot
01:06:27peut-être ? J'ai l'impression, en vous écoutant,
01:06:29que vous faites
01:06:31super attention
01:06:33à votre empreinte, et que
01:06:35vous passez votre temps à vous
01:06:37poser des questions. Est-ce que ce n'est pas un métier
01:06:39complètement dingue, au bout du compte ?
01:06:41Ça, c'est une vraie question de journaliste, et pas d'urbaniste.
01:06:43Je peux répondre
01:06:45peut-être,
01:06:47d'un point de vue, en tout cas. Effectivement,
01:06:49c'est un peu un métier plein de
01:06:51contradictions, puisqu'on aménage, et
01:06:53en même temps, on se pose toujours la question de la
01:06:55justesse de ce qu'on fait.
01:06:57On dépense des matières premières,
01:07:01et on se demande si ça
01:07:03vaut le coup, parfois. Mais c'est
01:07:05tous les allers-retours qu'il est
01:07:07nécessaire de faire dans notre métier, je pense.
01:07:09Pardon,
01:07:11je t'en prie.
01:07:13Tout à l'heure, il y avait une question
01:07:15qui n'a peut-être pas assez abordé la question
01:07:17du choix des projets.
01:07:19On a entendu la maîtrise d'ouvrage
01:07:21répondre. J'aimerais bien vous entendre là-dessus.
01:07:23Karim, peut-être.
01:07:25Karim, en plus de ça,
01:07:27t'es un peu considéré comme un militant.
01:07:29D'ailleurs, tu t'assumes
01:07:31comme un militant.
01:07:33Parfois, on ne sait pas trop où est la frontière.
01:07:35Oui, alors, on a parlé
01:07:37d'éthique, de politique
01:07:39un petit peu, et puis moi, la troisième
01:07:41idée qui m'anime dans
01:07:43ma volonté de poursuivre ce métier,
01:07:45c'est la dimension politique que
01:07:47je trouve qu'on n'assume pas assez
01:07:49dans nos métiers, puisque nos métiers,
01:07:51en réalité, ont des conséquences
01:07:53énormes, puisque nous pensons la
01:07:55matérialité, la transformation du réel.
01:07:57Et donc, en fait, ils ont des conséquences
01:07:59sur l'humanité, dans le champ
01:08:01social, sur le vivant.
01:08:03Et en fait, ces conséquences, elles sont invisibilisées.
01:08:05Finalement, on dilue un peu notre
01:08:07action. Et moi, je crois maintenant
01:08:09qu'il faut absolument sortir de cette
01:08:11structure de boucle
01:08:13fermée, entre guillemets, de nos métiers,
01:08:15pour aller vraiment au contact et mettre
01:08:17nos projets en place publique.
01:08:19Ça, c'est très important. Ça veut dire vraiment
01:08:21les rediscuter démocratiquement
01:08:23et
01:08:25de ne pas avoir peur du
01:08:27dissensus. Parce qu'en fait, aujourd'hui,
01:08:29dans un monde en crise, le dissensus,
01:08:31il doit venir pour pouvoir, justement,
01:08:33faire surgir des solutions
01:08:35alternatives, redonner espoir
01:08:37à un monde meilleur. Je crois que c'est hyper important.
01:08:39Et donc, la question
01:08:41d'aller sur le terrain comme ça pour
01:08:43aller au contact dans une
01:08:45controverse de choses
01:08:47qui échappent au regard du concepteur,
01:08:49elle est sans doute source d'une
01:08:51très grande richesse pour l'avenir de nos métiers
01:08:53et en s'appuyant
01:08:55aussi, bien sûr, sur une éthique,
01:08:57une philosophie, sur des utopies
01:08:59qui peuvent être plus ou moins concrètes
01:09:01et source de mobilisation politique
01:09:03pour plus tard faire changer
01:09:05la nature de nos projets.
01:09:07Peut-être juste pour compléter,
01:09:09du coup, ça s'incarne sans doute dans plusieurs
01:09:11projets en France. Donc, un projet
01:09:13sur lequel j'ai travaillé avec
01:09:15des collectifs à Nantes,
01:09:17qui est de re-questionner
01:09:19la ZAC des Gohars et notamment
01:09:21toute la question de la valeur des terres agricoles
01:09:23autour de la notion de commun.
01:09:25Et puis, un projet sans doute
01:09:27très contesté aujourd'hui, qui est
01:09:29l'autoroute A69, avec le collectif
01:09:31La Voix et Libre, où là, nous proposons ce projet
01:09:33Une Autre Voix, qui essaye d'ouvrir
01:09:35de nouvelles perspectives sur la mobilité
01:09:37en ré-ancrant
01:09:39les pratiques de la mobilité sur un territoire
01:09:41et en essayant de dépasser
01:09:43tout cet imaginaire du XXe siècle
01:09:45qui nous mène à la catastrophe.
01:09:55Adèle et Arthur,
01:09:59au-delà de
01:10:01cet engagement politique
01:10:03fort qu'on trouve
01:10:05chez Carême, vous, vous assumez le
01:10:07côté politique de votre travail ?
01:10:13Oui, c'est
01:10:15une réalité du quotidien.
01:10:17Nous, on travaille beaucoup
01:10:19sur la notion de mise en récit.
01:10:21Tu as parlé des controverses.
01:10:23C'est un outil qu'on n'a évidemment pas
01:10:25inventé, mais qu'on aime bien
01:10:27parce qu'on a parlé de complexité
01:10:29un peu juste avant.
01:10:31C'est un outil qui permet de poser
01:10:33que, dans le métier
01:10:35qu'on fait, les choses sont très complexes
01:10:37qu'on n'est pas, nous, tout seuls
01:10:39à même de savoir toujours
01:10:41ce qu'il faut faire. Et du coup,
01:10:43la controverse, comme d'autres outils
01:10:45de mise en récit, sont des moyens
01:10:47de créer du débat,
01:10:49faire participer des gens,
01:10:51les informer aussi, et puis
01:10:53essayer de les faire rentrer dans le projet,
01:10:55leur donner envie de
01:10:57s'investir pendant longtemps.
01:10:59C'est une manière,
01:11:01peut-être plus sur l'individu,
01:11:03mais d'aussi assumer
01:11:05une dimension politique, ou en tout cas
01:11:07de travailler
01:11:09le rôle sociétal
01:11:11de l'architecte et d'être capable de raconter
01:11:13aux gens ce qu'on fait et pourquoi on le fait
01:11:15et avec quelle conviction.
01:11:17On entend le mot « dissensus »,
01:11:19on entend le mot « controverse ».
01:11:21Au bout d'un moment, il faut atterrir
01:11:23sur quelque chose qui, en réalité,
01:11:25va être du domaine du commun.
01:11:27Est-ce que
01:11:29à l'aboutissement d'un projet,
01:11:31il y a un contentement ?
01:11:33Il y a une forme de frustration ?
01:11:35Est-ce que c'est toujours tel que vous l'aviez imaginé ?
01:11:37C'est un peu une question à la cantonade
01:11:39que je vous pose.
01:11:41J'ai une autre question.
01:11:43Quels sont
01:11:45vos maîtres d'ouvrage ?
01:11:47Pour qui vous travaillez ?
01:11:49Est-ce que vous travaillez pour
01:11:51des aménageurs outillés
01:11:53ou des collectifs ?
01:11:55Comment on vient vous chercher ?
01:11:57Ou est-ce que vous-même, vous cherchez
01:11:59la manière de pratiquer l'Ubernice
01:12:01ou vous cherchez vos « clients » ?
01:12:03Vos interlocuteurs.
01:12:05Je commence
01:12:07et je passe le relais.
01:12:09Nous, on travaille avec des maîtres d'ouvrage
01:12:11très différentes,
01:12:13que ce soit des collectivités,
01:12:15des agglomérations,
01:12:17mais aussi des maîtres d'ouvrage privés
01:12:19comme des communautés Emmaüs
01:12:21qui sont
01:12:23financées par des subventions
01:12:25mais qui arrivent à monter des projets
01:12:27par exemple d'architecture
01:12:29comme on a pu le voir
01:12:31sur une des photos tout à l'heure
01:12:33où quand on a une maîtrise d'ouvrage privée
01:12:35très engagée,
01:12:37qui est aussi politiquement engagée,
01:12:39on arrive à faire avancer des sujets
01:12:41comme le réemploi
01:12:43parce qu'ils peuvent se le permettre,
01:12:45parce qu'ils y croient fondamentalement.
01:12:47À ce moment-là, les maîtres d'ouvrage
01:12:49viennent nous chercher.
01:12:51Pour apporter un petit complément,
01:12:53c'est vrai que plus que la nature du projet,
01:12:55le montant de travaux,
01:12:57ce qui nous intéresse surtout
01:12:59et ce qu'on essaye de déceler,
01:13:01c'est s'il y a une vraie motivation à faire le projet
01:13:03de la part du maître d'ouvrage
01:13:05parce que dans les choix qu'on a fait
01:13:07quand on a monté notre structure,
01:13:09travailler dans des contextes
01:13:11où on sait que le projet est vain
01:13:13ou que les objectifs qui sont affichés
01:13:15ne sont pas les vrais ou pas les bons,
01:13:17on n'avait plus envie de le faire
01:13:19Nous, on passe vraiment beaucoup de temps
01:13:21à choisir nos projets.
01:13:23C'est un travail qui est important.
01:13:27Moi, c'est dans des contextes
01:13:29assez variés finalement
01:13:31parce qu'il y a eu par exemple
01:13:33les concours Europe 1
01:13:35où j'ai participé, Europe 1-16, Europe 1-17
01:13:37où on a une belle liberté
01:13:39aussi en tant que jeune concepteur
01:13:41pour pouvoir développer des idées,
01:13:43pointer du doigt des problèmes
01:13:45et essayer de montrer des solutions
01:13:48Les projets alternatifs,
01:13:50je les ai faits avec eux.
01:13:52Sur la 69, c'est moi qui suis allé voir le collectif
01:13:54puisque c'était un peu mon territoire
01:13:56et puis maintenant il y a des collectifs
01:13:58qui viennent me voir.
01:14:00C'est le cas à Nantes, c'est le cas aussi
01:14:02dans ce magnifique territoire du Cantal
01:14:04où on mène actuellement un projet
01:14:06d'extraction minière
01:14:08pour préserver une zone humide magnifique
01:14:12et puis des appels à idées
01:14:14pour des fondations par exemple.
01:14:17Clémentine, ce sera le mot de la fin pour vous.
01:14:21Soyez pas timide, c'est votre moment.
01:14:23Pour les maîtrises d'ouvrage,
01:14:25je pense que c'est des processus
01:14:27un peu similaires
01:14:29et les projets, ça dépend aussi des commandes politiques
01:14:31qui sont à l'origine des projets
01:14:33et certains programmes qui vont vous attirer
01:14:35un peu moins que d'autres.
01:14:37Il y a eu aussi une question
01:14:39tout à l'heure sur
01:14:41la manière dont on recevait
01:14:43les projets terminés une fois qu'ils étaient livrés
01:14:45et finalement
01:14:47nous concernant,
01:14:49le projet qui se termine
01:14:51c'est une première version
01:14:53d'un site à considérer
01:14:55qu'il n'y en a pas eu d'autres avant
01:14:57et tout particulièrement en paysage
01:14:59il y a toute une évolution du site avec le temps
01:15:01qui va changer
01:15:03le projet s'inscrira
01:15:05dans un temps plus ou moins long
01:15:07il va vivre et ça pose la question
01:15:09de la gestion de ce site-là
01:15:11et nous c'est quelque chose
01:15:13qu'on aime bien travailler le plus en amont possible
01:15:15comme un élément de projet
01:15:17qui va s'emparer de la gestion du site
01:15:19qu'est-ce qu'on attend de cette gestion
01:15:21quelle image on doit maintenir
01:15:23et c'est vraiment ça qui nous importe
01:15:25et ne pas forcément chercher non plus à figer
01:15:27par des gestes interventionnistes
01:15:29trop forts, d'accepter
01:15:31que ça puisse vivre, qu'il y ait des lignes
01:15:33mais qu'elle puisse évoluer
01:15:35avec le temps
01:15:37il n'y a pas forcément la déception d'un objet
01:15:39qui serait terminé et pas comme on l'imaginait
01:15:41un vrai métier du fer
01:15:43merci beaucoup à tous
01:15:45on se retrouve à la fin
01:15:47vous restez bien avec nous
01:15:49merci à tous
01:15:51c'est le moment
01:15:53où justement
01:15:55on va voir sur le terrain
01:15:57ce qui s'est passé concrètement
01:15:59et je vous propose qu'on visionne une première vidéo
01:16:01on se retrouve juste après
01:16:03d'ici 7 minutes environ
01:16:05à tout de suite, merci beaucoup
01:16:11Le Palmarès des jeunes urbanistes
01:16:23Le Palmarès des jeunes urbanistes
01:16:25c'est aussi l'occasion bien entendu
01:16:27en s'appuyant sur des jeunes talents
01:16:29de faire émerger de nouvelles pratiques
01:16:31au coeur
01:16:33des enjeux, j'ai l'air de demain
01:16:35mais vous allez voir, surtout d'aujourd'hui
01:16:37et trouver des solutions
01:16:39avec les acteurs locaux
01:16:41et c'est le sens aussi
01:16:43de faire des journées in situ
01:16:45avec les lauréats
01:16:47Nous sommes à Évry-Courcouronne
01:16:49et la journée est organisée par deux de ces lauréats
01:16:51que sont Tout Terrain
01:16:53et l'Atelier de l'Ours
01:17:01L'Atelier de l'Ours, c'est un bureau d'études
01:17:03composé de quatre paysagistes
01:17:05issus de l'école de la nature
01:17:07et du paysage de Blois
01:17:09Aujourd'hui, on est sur la Place de la Résistance
01:17:11à Évry-Courcouronne
01:17:13C'est un projet qui a été lancé par l'ECAUE91
01:17:15et la ville d'Évry-Courcouronne
01:17:17et Grand Paris Sud
01:17:19qui avait pour objectif
01:17:21de lancer à plusieurs endroits de la ville
01:17:23dont ce site-là, des opérations d'urbanisme tactique
01:17:25visant à tester des usages
01:17:27et nous, on a été sélectionnés
01:17:29pour la Place de la Résistance
01:17:31sur laquelle on a proposé un projet
01:17:33qui tient plus de la réversibilité
01:17:35l'objectif, nous, c'était de pouvoir
01:17:37avec assez peu de matériaux
01:17:39et plus de matières grises que de matières premières
01:17:41pouvoir donner une nouvelle orientation
01:17:43à cette place
01:17:45avec les futurs massifs, l'implantation
01:17:47d'un terrain de pétanque, l'implantation
01:17:49de mobiliers, de bancs, de tables
01:17:51de pique-niques
01:17:59L'intention au CIE, ça a été
01:18:01de rentrer par les usages
01:18:03d'interroger les étudiants
01:18:05qui étaient les personnes
01:18:07qui observaient cet espace
01:18:09mais qui étaient aussi potentiellement
01:18:11les usagers de cet espace historiquement
01:18:15Il y a des personnes qui viennent de plus en plus dans la journée
01:18:17pour déjeuner sur les tables de pique-niques
01:18:19pour se poser là
01:18:21pour venir avec leurs enfants, etc
01:18:23ce qui n'était plus le cas avant
01:18:25parce que c'est vrai que c'était une place qui ne donnait pas tellement envie
01:18:27elle était complètement minérale
01:18:29très sèche
01:18:31donc on a envie vraiment de revitaliser la place
01:18:37C'est un matériau
01:18:39très très blanc
01:18:41encore pierreux
01:18:43avec une assez grosse granulométrie
01:18:45donc c'est très bien
01:18:47parce qu'on voit que la mousse s'installe
01:18:49et il y a quelques plantes qui vont commencer
01:18:51à coloniser
01:18:55Et en gros, pour faire un centimètre
01:18:57de sol, il faut un siècle
01:18:59C'est pour ça que c'est précieux
01:19:01parce qu'à l'échelle humaine
01:19:03c'est quelque chose qui n'est pas renouvelable
01:19:05donc on devrait prendre soin
01:19:07Les plantes sont capables
01:19:09de s'adapter à des situations extrêmement différentes
01:19:11elles ont des ressources
01:19:13qui nous dépassent complètement
01:19:15et qui devraient nous laisser mieux d'admiration
01:19:23Nous sommes sur un territoire qui a connu au XXème siècle
01:19:25des transformations
01:19:27radicales
01:19:29avec une croissance urbaine tant précédente
01:19:31ce qui explique la diversité actuelle
01:19:33des très grandes villes
01:19:35des villages
01:19:37des espaces naturels, agricoles et forestiers
01:19:39remarquables
01:19:41certains fortement protégés
01:19:43et finalement, ce qu'on voit c'est que ce modèle extensif
01:19:45qui a été mis en place au XXème siècle
01:19:47il a atteint ses limites
01:19:49et clairement, l'un des enjeux forts, c'est bien désormais
01:19:51la sommabilité foncière
01:19:53Créer du logement
01:19:55c'est aussi, certes, donner un toit à une famille
01:19:57mais c'est aussi
01:19:59créer une non-valeur
01:20:01puisqu'en réalité, il est probable
01:20:03qu'à échéance très courte
01:20:05le logement créé crée des difficultés
01:20:07notamment les grandes copropriétés dégradées
01:20:09donc on est plutôt dans la mesure
01:20:11de réparer la ville et réparer l'habitation
01:20:13plutôt que d'en créer de nouveau
01:20:17Terrain, c'est une coopérative d'architecture et d'urbanisme
01:20:19qui a été créée
01:20:21en 2021
01:20:23par 4 associés
01:20:25et donc c'est une coopérative qui défend
01:20:27une approche sociale et écologique
01:20:29des projets
01:20:31d'urbanisme et de maîtrise d'oeuvre
01:20:33et de médiation
01:20:35et on est attaché aux démarches culturelles et méritatives
01:20:41La sommabilité foncière, c'est un préalable
01:20:43dans chaque démarche de projet
01:20:45c'est-à-dire que ça soit un projet
01:20:47par exemple de construction
01:20:49ou de rénovation
01:20:51La première chose qu'on se pose comme question
01:20:53c'est est-ce qu'on peut faire avec le déjà-là ?
01:20:55Est-ce que si le déjà-là est existant
01:20:57par exemple n'est pas suffisant
01:20:59est-ce qu'on peut faire avec ce qu'il y a autour ?
01:21:01Questionner la ressource
01:21:03C'est surtout intervenir dans des tissus existants
01:21:05et habités
01:21:07et donc pour ça, nous on aime prendre le temps
01:21:09de venir sur le terrain
01:21:11de faire des immersions
01:21:13de comprendre l'état des choses
01:21:15et aussi ce que chacun et chacune
01:21:17a à défendre dans le projet
01:21:19Ce qu'on vous propose
01:21:21c'est de débattre un peu
01:21:23sur les perspectives d'action
01:21:25en contexte de sobriété foncière
01:21:27au travers d'un tribunal des controverses
01:21:31On vous propose aussi
01:21:33avec les groupes qu'on vous a proposé
01:21:35de rejoindre, de défendre un point de vue
01:21:37qui n'est peut-être pas le vôtre
01:21:39dans votre pratique actuelle
01:21:41mais qui amène à se décentrer
01:21:43Il faut continuer
01:21:45à loger les gens
01:21:47lutter contre la précarité
01:21:49on a besoin de relocaliser
01:21:51l'industrie
01:21:53donc on a aussi besoin
01:21:55de construire des zones industrielles
01:21:57autour des villes
01:21:59On pense qu'il est important
01:22:01d'orienter tous les budgets
01:22:03d'aménagement
01:22:05vers une restructuration
01:22:07des filières
01:22:09Ceux qui feront la ville
01:22:11ce sont les aménageurs, les institutions
01:22:13les architectes, les urbanistes
01:22:15mais c'est aussi les acteurs économiques
01:22:17les associations
01:22:19et les habitants évidemment
01:22:21Il y a quand même besoin
01:22:23de dialogues, d'échanges, de débats
01:22:25d'écoute entre toutes ces différentes personnes
01:22:27et ça, on a souvent
01:22:29tendance à minimiser
01:22:31le temps que ça prend
01:22:33pour mobiliser, écouter
01:22:35et potentiellement mettre
01:22:37toutes ces personnes-là
01:22:39autour de la table

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