Mort de Louise : les difficultés de l'enquête. Écoutez Frédéric Péchenard, vice-président de la région Île-de-France en charge de la Sécurité, ancien chef de la brigade criminelle de Paris.
Regardez Les trois questions de RTL Petit Matin avec Jérôme Florin du 11 février 2025.
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00:00Et c'est donc l'information de la nuit, si vous nous rejoignez à l'instant, il est 6h13, un troisième suspect est en garde à vue dans l'enquête sur la mort de Louise en Essonne, c'est un homme de 23 ans.
00:14Il a été interpellé hier soir à Épinay sur Orges, là où habitait la victime et c'est la piste la plus sérieuse pour les enquêteurs, c'est ce que nous disait Sophie Neumayer, notre experte tout à l'heure dans le journal de 6h.
00:24Deux autres personnes sont déjà entendues depuis hier après-midi. Bonjour Frédéric Péchenard.
00:29Bonjour.
00:30Ancien patron de la PJ parisienne, ancien directeur général de la police nationale, comment travaillent les enquêteurs dans une affaire aussi sensible que celle-ci puisque la victime, on le rappelle, est une enfant de 11 ans, qui a une grosse pression médiatique et politique, c'est ce qu'on va voir avec vous.
00:45D'abord là, il est 6h14, tout se joue en garde à vue en ce moment ?
00:49Oui absolument. Visiblement, il y a deux suspects qui ont été interpellés, soit ça veut dire qu'il y avait peut-être deux assassins, soit plus vraisemblablement, les enquêteurs ont identifié deux profils qui leur paraissent correspondre à un assassin éventuel.
01:07Alors il y a un homme de 23 ans et sa mère qui sont entendues depuis hier après-midi et puis un homme de 23 ans, donc il y a trois suspects en garde à vue. Comment est-ce qu'on les fait parler pour éventuellement obtenir des aveux ? Comment on procède ?
01:21Ça dépend évidemment de ce qu'on a, selon l'expression policière, à leur servir, c'est-à-dire qu'il y a tout un travail en amont. Quand vous avez un homicide volontaire, vous avez d'abord un travail sur la scène de crime proprement dit, la gestion de la scène de crime qui est extrêmement importante puisqu'on va rechercher des indices, on va chercher l'arme, on va chercher les vêtements, on va chercher les téléphones et puis bien sûr on va faire des recherches de police scientifique, des empreintes digitales et surtout de l'ADN.
01:47On va chercher du sang, du sperme, de la sueur pour avoir éventuellement de l'ADN. Une fois qu'on a l'ADN, si il y a de l'ADN bien sûr, on peut faire des comparaisons avec d'éventuels suspects et quand vous avez des suspects, vous devez les placer en garde à vue parce que c'est pour leur propre sécurité, ça veut dire qu'ils ont des droits, ils ont vraiment le droit d'avoir un avocat.
02:08Dans le même temps, et c'est là où on voit qu'il faut beaucoup d'enquêteurs spécialisés, vous avez une centaine de personnes qui vont faire l'enquête de voisinage, c'est-à-dire qu'on va interroger les promeneurs, les voisins et puis surtout rechercher la vidéoprotection et du travail sur la téléphonie.
02:25Et puis après, on va exploiter tout ça, le tout dans un temps contraint. Chacun peut comprendre que quand il y a une scène de crime, surtout si elle est à l'extérieur, il faut aller vite parce que cette scène de crime va se dégrader et les indices peuvent se perdre.
02:39Et puis naturellement, dans des affaires aussi graves, aussi importantes, avec autant d'impact que l'assassinat d'une petite fille, il faut aller vite et donc il faut exploiter les renseignements qu'on va avoir, soit les renseignements de police scientifique, soit les renseignements grâce à un voisin, un promeneur, etc.
02:57C'est là où je pense que l'identification de ces suspects, soit d'ailleurs directement par l'enquête de voisinage, soit par des recherches d'antécédents, là aussi on va vérifier un petit peu tous les gens qui habitent aux alentours. Voilà comment les choses se passent et voilà ce qui a probablement amené à la garde à vue de ces trois personnes.
03:17La victime est une enfant de 11 ans. Est-ce que la pression politique, parce que même Bruno Retailleau a dit que c'était un crime abominable, la pression médiatique, la pression de l'opinion publique, est-ce que ça dessert l'enquête ? Est-ce que c'est plus difficile de travailler dans ces conditions ?
03:33On ne peut pas dire que ça dessert l'enquête parce que c'est toujours comme ça. J'ai passé plusieurs années à l'appui des criminels de Paris. Le chef de l'enquête à Versailles, Christophe Descombe, a été mon adjoint. C'était un enquêteur très habile, très expérimenté et il a travaillé sur des dizaines de cas avec d'énormes pressions.
03:55La première pression, bien sûr, c'est une pression médiatique et puis derrière il y a une pression politique et puis il y a la pression qu'on se met à soi-même, la pression de la famille au sens large, c'est-à-dire que tous les enquêteurs de la police judiciaire de Versailles sont revenus, c'est-à-dire qu'il y en avait qui étaient en vacances, qui étaient en week-end et tout le monde revient parce que tout le monde se sent impliqué.
04:17Donc la pression est très forte et c'est là où il est important d'avoir des enquêteurs qui sont spécialisés, qui ont l'habitude de travailler sous la pression parce qu'il faut à la fois aller très vite et en même temps ne pas se lanter. Il faut passer à côté de rien. C'est probablement pour ça qu'il y a deux suspects en garde à vue parce qu'ils ont un doute sur les deux donc ils sont en garde à vue tous les deux en même temps et non pas successivement parce qu'il faut aller vite pour rien laisser passer.
04:43Ils sont trois depuis hier soir. Juste une précision, la jeune Louise a été frappée avec un objet tranchant une dizaine de fois. Ça nous dit quoi du profil de l'auteur ?
04:53Ce que je sais c'est par la presse. Je n'ai pas une connaissance parfaite de la scène de crime proprement dit mais apparemment il n'y a pas eu de violence sexuelle et il y a eu plusieurs coups de couteau. Ce que ça dit c'est que c'est un fou. La première impression que vous avez c'est que c'est un fou.
05:13Maintenant il peut s'agir d'autres choses. Il est très important quand vous avez une enquête comme ça de ne pas se focaliser sur une idée de départ précise. Toutes les erreurs qui ont pu être commises dans le passé par des enquêteurs qui n'étaient pas des enquêteurs aguerris c'est d'avoir une piste, penser qu'elle est bonne, se focaliser sur cette piste et laisser tomber les autres.
05:33Il faut avoir l'esprit ouvert et prendre toutes les possibilités. Le monstre qui a fait ça c'est un fou, c'est un schizophrène mais ça peut être quelque chose d'autre. Il faut absolument garder l'esprit ouvert et exploiter toutes les pistes en même temps. C'est ce qu'on appelle fermer toutes les portes.
05:53Merci beaucoup Frédéric Péchenard, ancien patron de la PJ parisienne, ancien directeur général de la police nationale et aujourd'hui vice-président du conseil régional d'Ile-de-France. Merci d'avoir été avec nous ce matin en direct sur RTL. Je rappelle donc qu'il y a un troisième suspect qui était en garde à vue depuis hier soir dans l'enquête sur la mort de Louise.