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4GOOD du 17 février 2025

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00:00C'est l'heure du Top et Flop, et on a donné des devoirs maison à nos invités.
00:08On a demandé à chacun d'entre vous de choisir une entreprise qui a su prendre en compte
00:14les risques climatiques et qui en tire profit aujourd'hui.
00:17Sonia, on commence avec vous.
00:20Quel est votre top ?
00:21Mon top, c'est une société qui s'appelle Bontaz, qui est une société dans le secteur
00:25de l'automobile et qui est un équipementier automobile et qui est très impacté par
00:29la crise automobile qu'on vit, au niveau européen notamment.
00:34C'est une société qui est localisée dans la vallée d'Arves, donc c'est une entreprise
00:39dans les territoires, c'est une entreprise qui a été créée en 1965 et qui fabrique
00:44des équipements qui sont dans les véhicules et qui traitent des fonctions hydrauliques.
00:49C'est très cointu.
00:51Aujourd'hui, cette entreprise, c'est 3500 personnes dans 11 pays et ils ont lancé une
00:56nouvelle activité dans le domaine des piles à combustible pour faire des véhicules qui
01:00fonctionnent avec de l'hydrogène.
01:02Et donc, la façon de tirer parti de ce dérèglement climatique, c'est d'innover et de proposer
01:08des nouveaux produits pour transformer la mobilité, qui est quand même un domaine
01:12qui a un gros impact en termes de gaz à effet de serre.
01:14Merci.
01:15Qui est le suivant ?
01:17Marie ?
01:18Bon, j'y vais.
01:19Alors, moi, je suis une mauvaise élève, donc j'en ai deux.
01:22Trop bon élève.
01:25Mais je vais faire très vite sur le premier parce que c'est le deuxième qui est plus
01:31intéressant par rapport à ce qui arrive.
01:34En fait, j'aime beaucoup citer l'exemple de Patagonia parce que c'est aussi un exemple
01:39de gouvernance.
01:40Et en fait, toute l'évolution de cette entreprise qui a été un des pionniers dans
01:44le monde de la mode pour mettre au cœur l'adaptation au réchauffement climatique, mais plus largement
01:50la soutenabilité de son industrie.
01:52En fait, ce qui est très intéressant, c'est qu'ils l'ont ancré dans toute la manière
01:56de prendre des décisions dans l'entreprise, dans la manière dont était évaluée la
01:59performance des employés, mais aussi même dans l'actionnariat, puisque le fondateur
02:04vient de donner l'intégralité de ses actions à une fondation pour être sûr que cet alignement
02:09aux intérêts de la société et de la planète soit gardé dans le temps.
02:13Donc, on oublie souvent qu'il y a aussi des sujets de gouvernance et c'est pour ça
02:16que je voulais en parler un petit peu.
02:18Mais après, comme moi, je suis une investisseur dans l'innovation et dans les start-up,
02:22je trouvais ça important de montrer aussi qu'il y a des nouvelles entreprises qui
02:24se créent et qui, dès le démarrage dans leur ADN, portent ça en cœur.
02:29Et parler d'une des entreprises qu'on a financées chez 2050 qui s'appelle Pebble,
02:33qui est une entreprise suédoise, mais qui est répartie entre la Suède, la Hollande
02:40et la Finlande.
02:41Donc, c'est une vraie entreprise européenne.
02:43En fait, ce qu'ils arrivent à faire, c'est de produire un matériau qui remplace la pierre
02:49ponce dans la fabrication du ciment et qui fait qu'en bout de chaîne, on a des ciments
02:53qui stockent du carbone, qui stockent du CO2, qui sont des rejets industriels grâce
03:01à un phénomène qui s'appelle la minéralisation du carbone, qui est un phénomène complètement
03:04naturel où il y a des roches, comme des roches olivines, qui captent naturellement ce carbone.
03:09Donc, ils accélèrent et ils augmentent et ils tirent profit des capacités de la
03:12nature à stocker le carbone pour que derrière, on puisse complètement transformer l'industrie
03:17du ciment.
03:18Et ce qui est intéressant, c'est que le modèle économique, du coup, est complètement
03:20aligné avec l'impact environnemental puisqu'il est double.
03:24Ils sont à la fois un modèle économique pour stocker le carbone dans les matériaux
03:28qu'ils produisent et puis un modèle économique de vente du matériau final pour la construction
03:35des bâtiments, ce qui montre bien qu'on peut avoir des modèles gagnants-gagnants
03:39économiques et environnementaux et qu'en plus, dans la manière dont ils prennent
03:43les décisions, là encore, c'est en chœur, comme Patagonia, en chœur de décision dès
03:48le démarrage avec la mission inscrite dans les statuts, même si ce n'est pas une entreprise
03:51à mission, et des décisions qui, dans les choix des produits ou même de l'emplacement
03:56de l'usine, prennent en compte les derniers résultats du laboratoire de recherche qu'est
04:00le Stockholm Resilient Centre pour savoir, dans la décision de là où mettre l'usine,
04:05quel est l'endroit dans lequel ils vont avoir l'impact environnemental composé entre
04:09l'utilisation du sol, les émissions carbone et l'utilisation de l'eau, qui heurte
04:13le moins et qui fait le moins de mal possible à l'environnement dans lequel ils vont
04:16s'implanter.
04:17Alix, peut-être avant de laisser la part à la Pascale, je ne peux m'empêcher de
04:20faire un rebond sur le premier point soulevé par Marie, puisqu'il a déjà été évoqué
04:23par un autre invité.
04:24Parce qu'il est assez iconique, mais il se trouve qu'il y a quinze jours, mon entreprise
04:28Norsys a fait une annonce qui est une grande première, au moins à l'échelle européenne
04:32je pense, sur le modèle de gouvernance, puisque nous avons créé un fonds actionnaire à
04:36qui on a transmis une partie du capital et qui sera désormais présidé par un représentant
04:40de la nature en nom de Franz Goldt, qui aura un siège au conseil d'administration et
04:45un droit de vote, voire un droit de veto sur certaines décisions.
04:47Mais on va aussi créer un Haut conseil pour la nature qui sera composé d'autres représentants
04:51de la nature dans nos autres organes de gouvernance.
04:53Et ça, on le fait pourquoi ? Parce que même si notre entreprise de services numériques
04:58n'est pas directement impactée aujourd'hui par le dérèglement climatique, on veut vraiment
05:01se donner les moyens d'anticiper, d'accompagner nos clients et notre écosystème, et ça
05:05on ne le fera que si on crée des mécaniques de décision, de réflexion collectives qui
05:09permettent à la nature, aux vivants, représentés par différentes formes, qui peuvent être
05:13des experts, qui savent aussi faire les liens avec notre métier dans le numérique, de
05:17nous aiguiller dans le bon sens.
05:18Et c'est exactement ce qu'on a fait sur le 2050 à la Fondation aussi.
05:22Bon, donc il faudra qu'on se reparle avec Marie-April.
05:25Pascal ?
05:26Alors, je sais qu'on considère souvent que « small is beautiful », mais moi j'ai
05:31fait un choix peut-être un petit peu provocateur.
05:34J'ai choisi une entreprise du CAC 40 qui est Veolia.
05:38Alors Veolia, c'est une immense entreprise, c'est 45 milliards d'euros de chiffre d'affaires,
05:43plus de 200 000 salariés, avec trois secteurs principaux d'activité, le traitement des
05:49eaux, l'énergie et le traitement des déchets.
05:52Et sur chacune de ces activités, Veolia a énormément investi pour qu'on réutilise
06:00les eaux usées, notamment dans les villes, pour détruire les rues, etc.
06:05Donc, ça veut dire quand même des investissements très lourds.
06:07Il faut prévoir un système bis de circulation de ces eaux et d'utilisation.
06:16Pareil dans l'énergie, avec le développement notamment de microstructures parallèles
06:24aux réseaux principaux, y compris pour améliorer la résilience en cas de coupure.
06:29Et puis, évidemment, dans le traitement des déchets, un énorme travail sur le
06:34recyclage, y compris le recyclage de déchets complexes, soit industriels,
06:39industries automobiles, etc., soit même déchets nucléaires, etc.
06:45Et tout ça, manifestement, crée de la croissance pour Veolia.
06:50Ils ont un plan stratégique, la 24-27, avec une hypothèse de croissance de 70% de
06:57leurs chiffres d'affaires, ce qui, évidemment, vu la taille déjà de
06:59l'entreprise, est complètement considérable.
07:02Merci à tous les trois pour ces exemples.
07:04Thomas, quant à toi, tu t'attelles au flop et tu me parles de l'incapacité des
07:10Etats à créer un cadre favorable pour les entreprises.
07:14Oui, je vais surtout lancer, je pense que c'est un sujet qui devrait faire réagir
07:17parce qu'on sort tout juste de deux COP successifs sur la biodiversité et sur le
07:21climat qui ont plutôt été qualifiés d'échecs.
07:25Et si je prends le volet de la COP du climat, notamment avec les pays du Sud
07:29qui sont en attente de financements pour pouvoir s'adapter aux dérèglements
07:31climatiques provoqués par les pays de l'hémisphère nord, qui ont qualifié
07:35d'insultants le résultat, c'est-à-dire le peu de financements qui ont été validés
07:39lors de cette COP. Et plus largement, si je ne parle pas que de l'ensemble des
07:44Etats, mais des Etats à leur échelle individuelle, par exemple l'Etat français
07:47ou l'Etat américain, on voit bien la difficulté que peuvent avoir ces Etats à
07:51se mettre à la hauteur de l'enjeu et à créer un cadre.
07:53Et là, on se remet à l'échelle de l'entreprise qui soit stable et qui
07:56permette aux entreprises d'anticiper, de planifier à long terme ce qu'impose la
08:00lutte contre le dérèglement climatique.
08:01Le cas en particulier que je voulais souligner, qui est très, très actuel,
08:06c'est l'élection très récente de Donald Trump qui annonce, comme lors de sa
08:10première élection, vouloir sortir des accords de Paris.
08:12Ça, c'est un flop au sens global du terme.
08:15Ce qui m'intéressait dans ce cas très récent, c'est qu'il y a eu un contre
08:19pouvoir qui s'est initié, assez inattendu en tout cas de ma fenêtre, qui est la
08:23réaction du patron d'Exxon, qui est quand même une des plus grandes compagnies
08:27oil and gas au monde, qui réagit publiquement à cette volonté de Donald
08:31Trump de sortir de l'accord de Paris en disant, nous ne souhaitons pas, nous
08:34Exxon, que nous sortions en tant qu'Etat de l'accord.
08:36Pourquoi ? Parce que nous devons planifier des investissements en dizaines de
08:39milliards dans les années qui viennent et que pour que cela marche et que nos
08:42actionnaires acceptent un plan de transition aussi ambitieux, il faut que le
08:46cadre dans lequel nous opérons, national et plus global, soit stable.
08:50Donc, c'est extrêmement intéressant en partant de ce flop de voir que des
08:54acteurs qui sont peut-être ceux qui sont les moins attendus aujourd'hui pour se
08:57positionner en faveur de la lutte contre les règlements climatiques, commencent à
09:00dire, là, nous, on a besoin de stabilité pour y aller parce qu'on veut y aller.
09:05Oui, oui, des flops, on en a tous beaucoup.
09:08Alors, il y a un peu sur le même registre, il y a un flop qui est en train de naître
09:12là, en Corée du Sud, autour des réglementations et des accords mondiaux
09:17autour des emballages.
09:19Et alors, je ne sais pas si ce sont les gouvernements, pas tant, plutôt les
09:24industriels qui ont débarqué en masse avec beaucoup de lobbyistes dans le
09:30domaine de la pétrochimie, de la chimie, etc., pour contrer des accords qui
09:36pourraient se mettre en place pour réduire, en fait, les emballages, mais le
09:40plastique de façon beaucoup plus large.
09:41Et on sait que le sujet du plastique, on est addict au plastique, on est drogué
09:46au plastique, mais on va avoir besoin de se désensibiliser du plastique et les
09:51réglementations vont être essentielles pour qu'on le fasse.
09:54Et là, on a un autre exemple en France, en fait, dans le cadre de la
09:58réglementation sur les emballages pour les fruits et légumes.
10:01Je ne sais pas si vous avez vu ça.
10:02La France a été retoquée parce qu'en fait, on avait mis en place des
10:05réglementations, mais qui allaient contre des réglementations qui sont en
10:09cours d'élaboration au niveau européen.
10:11Donc, les réglementations, il en faut de la vision à long terme, il en faut.
10:15Et en même temps, ça peut aussi nous empêcher d'avancer, comme c'est l'exemple
10:18des emballages en France, voilà.
10:20Pascal ?
10:22En écoutant Thomas, je me disais, oui, bien sûr, il y a l'élection de Trump.
10:27Chez nous aussi, il y a quand même un certain nombre de flops macro, pour ne pas
10:32parler simplement d'entreprise.
10:33Mais et alors en particulier, moi, celui qui me désespère un petit peu, c'est la
10:37multiplication des prises de parole, parfois au plus haut niveau.
10:41Je pense au MEDEF, je pense au patron d'une grande banque.
10:45Je ne la citerai pas, qui s'est exprimé sur le sujet récemment, les prises de
10:48parole négatives à l'encontre de CSRD.
10:52Alors, c'est vrai que CSRD, il y a sûrement des choses à regarder, et en
10:55particulier pour les entreprises de plus petite taille, celles qui sont soumises,
11:02mais ne sont pas des grands groupes.
11:04En revanche, que des patrons de grands groupes, moi, je vois très bien ce qui se
11:09passe à la Maïf et c'est évidemment pareil dans l'ensemble des grands groupes.
11:14Ça fait plus d'un an qu'on a des équipes projets qui bossent avec des
11:18consultants et là, on arrive au bout et on va mettre en place.
11:22On y est, remettre en cause quand on est à la tête d'un grand groupe.
11:25Aujourd'hui, CSRD, je crois que ça n'est pas raisonnable et c'est un signal
11:30extrêmement négatif qui est donné.
11:33Ce qu'on peut peut-être dire, pour toutes les dirigeantes et les dirigeants qui nous
11:36écouteront sur ce sujet et qui verraient peut-être d'un mauvais oeil aussi cette
11:40lourdeur administrative qui est souvent rappelée, c'est que l'étape, peut-être
11:45cœur de la CSRD, qui s'appelle la double matérialité, est un formidable exercice
11:49d'anticipation, de planification des risques que fait peser l'entreprise sur le
11:53climat, mais que le climat fait peser sur l'entreprise.
11:55Et ça, c'est peut-être le meilleur outil qu'elle pourrait utiliser demain pour
11:58planifier les bons investissements et s'adapter.
12:00Je vois Marie qui a l'air d'avoir envie de réagir.
12:02Oui, absolument. En fait, de manière un peu générique, je vais dire qu'on a un
12:06flop général sur la compréhension du temps.
12:11C'est-à-dire que j'ai été à la, il y a à New York tous les ans, ce qu'ils
12:17appellent la Climate Week.
12:18C'est la semaine où tous les grands scientifiques, industriels, ONG, etc.,
12:25parlant du climat, se retrouvent pour essayer de faire avancer.
12:28C'est beaucoup plus informel qu'une COP ou autre chose, mais il y a vraiment tous
12:32les acteurs. Il y avait Johan Rockström qui parlait et qui exposait.
12:37Johan Rockström, c'est celui qui a l'origine des limites planétaires, de
12:40ce modèle où on sait qu'il y a à peu près neuf limites planétaires à ne pas
12:46franchir si on veut que la Terre soit en résilience, c'est-à-dire qu'elle puisse
12:50continuer à offrir les services naturels dont on a besoin en tant qu'humanité pour
12:56survivre dans le temps. Il y en a neuf.
12:58Il y a la signification des océans.
13:01Il y a évidemment les gaz à effet de serre dans l'atmosphère, etc.
13:07Il y en a neuf comme ça et on en a déjà franchi six.
13:10Et tous les ans, il fait ce qu'il appelle un chèque de la santé de la planète.
13:16Et aujourd'hui, cette année, c'était la première fois où ils arrivaient à quantifier
13:21à peu près quand les autres limites planétaires seraient franchies et quand on
13:25sortirait de ce qu'il appelle le corridor de la vie, qui est les zones de
13:28température dans lesquelles la planète a toujours fonctionné avec des hommes dessus.
13:33Et on ne sait pas ce qui se passe quand on sort du corridor de la vie.
13:36Et Johan Rockström disait qu'on a en réalité estimé le temps qu'il nous
13:41fallait pour qu'il nous restait pour arriver à rester dans le corridor de la
13:45vie sans qu'on en sorte de manière irréversible.
13:48Et c'est cinq ans.
13:51Voilà. Et donc, en fait, le flop générique, moi, que je ressens au quotidien,
13:55c'est cette espèce de temporisation sur des sujets où on met toujours d'autres
14:03choses en priorité alors qu'on ne comprend pas les conséquences réelles
14:07des décisions qu'on est en train de prendre et l'ampleur,
14:12ou en tout cas, l'ampleur qu'on devrait y donner, en fait,
14:17et qu'on ne donne pas suffisamment d'ampleur à ces sujets.
14:20Et on est toujours en train de mettre
14:22d'autres sujets en priorité alors qu'on n'a pas de temps.
14:26Voilà.
14:27Merci, Marie, pour ce flop improvisé.
14:29Ça valait le coup.
14:30Il est temps de passer au débat.

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