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00:00Mets d'abord place à Eugénie Bastier. Bonjour Eugénie !
00:03Bonjour à tous !
00:04Eugénie, alors que Richard Ferrand est auditionné aujourd'hui par les commissions des lois
00:09afin de devenir le prochain président du Conseil Constitutionnel,
00:12vous voudriez revenir sur le rôle que joue cette institution dans notre pays
00:16qui n'était pas tout à fait celui prévu à l'origine ?
00:20Oui, on entend beaucoup ces jours-ci des responsables politiques et des juristes
00:23déplorer la nomination d'un proche du chef de l'État par ce même chef de l'État
00:27à la tête de la plus haute juridiction de notre pays.
00:29C'est vrai que ce copinage, alors que Richard Ferrand n'a pas de compétences juridiques particulières,
00:33n'est pas très glorieux.
00:35On est loin du Nouveau Monde et des promesses d'exemplarité faites par Emmanuel Macron en 2017.
00:40Mais dire que Richard Ferrand serait trop politisé,
00:43ce serait sous-entendre que le reste du Conseil Constitutionnel serait neutre.
00:47Ce n'est pas le cas, les sages sont politisés et ils ont depuis 50 ans un rôle politique.
00:52Nous avons en France imité sans le dire le modèle de la Cour suprême américaine.
00:57Le juge n'est plus simplement la bouche de la loi comme le souhaitait Montesquieu,
01:00l'inventeur de la séparation des pouvoirs, mais il est devenu lui-même producteur de droits.
01:05Deux ans seulement après la mort du général de Gaulle,
01:08alors que jamais il n'avait conçu ainsi cette institution,
01:11le Conseil Constitutionnel, donc en 1971, s'autorisa à juger une loi non conforme,
01:16non plus sur la forme mais sur le fond,
01:18en extirpant un principe du préambule de la Constitution de 1946.
01:22Ce coup d'état juridictionnel ouvrait la voie à une dérive vers le gouvernement des juges.
01:28Quelles conséquences cela a-t-il sur notre droit, Eugénie ?
01:31Les sages de la rue de Montpensier s'arrogent désormais le pouvoir de censurer les lois
01:36qui ne seraient pas conformes à une interprétation extensive des droits individuels.
01:40Cela a des effets très concrets en matière migratoire, par exemple.
01:43La loi immigration votée en 2024 a été censurée d'un tiers par le Conseil Constitutionnel
01:48sur des motifs spécieux de cavalier législative.
01:51Prenons un autre exemple.
01:53Vous savez que Robert Ménard risque une peine de 5 ans de prison
01:56pour avoir refusé de marier un clandestin sous OQTF.
01:59Eh bien, le Conseil Constitutionnel a établi à plusieurs reprises
02:02que le droit au mariage était une liberté fondamentale
02:05en extrapolant ce droit de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789,
02:10rendant impossible l'interdiction du mariage d'un étranger.
02:13Au terme d'une évolution aussi insidieuse qu'irrésistible,
02:17la loi a été abaissée en France.
02:19Ce sont désormais les juges qui la fabriquent,
02:22au point qu'on peut se demander s'il est possible de légiférer sur l'immigration dans notre pays.
02:26Tout de même Eugénie, le référendum est encore possible sur l'immigration,
02:29ce qui permettrait de contourner le Conseil Constitutionnel.
02:32Ce n'est même pas sûr.
02:34Laurent Fabius, l'actuel président du Conseil Constitutionnel,
02:37a laissé entendre qu'il ne laisserait pas Marine Le Pen utiliser l'article 11 de la Constitution
02:41pour faire un référendum sur l'immigration.
02:43Rappelons que le général de Gaulle avait utilisé cet article
02:46pour faire un référendum sur l'élection du président de la République au suffrage universel.
02:50À l'époque, les sages avaient laissé faire.
02:53« N'est pas le général de Gaulle qui veut ! » a prévenu Fabius.
02:56Que disait-il le général de Gaulle déjà ?
02:58« En France, la cour suprême, c'est le peuple.
03:01C'est ce conflit entre la volonté populaire et le gouvernement des juges
03:05que Marcel Gaucher a appelé le « nœud démocratique ».
03:09Il faudra un jour ou l'autre le dénouer. »
03:12C'est dit sur Europe 1 et c'est signé Eugénie Bastier.
03:15Merci Eugénie, très bonne journée.