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Xerfi Canal a reçu Norbert Alter, professeur à sciences Po, pour parler de la rencontre entre le consultant et l'académique.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.

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00:00Bonjour Norbert Halter.
00:10Bonjour Jean-Philippe Doutoni.
00:11Pour en finir, vous voyez quand je vous reçois j'ai le sourire, c'est tellement agréable de
00:15vous recevoir. Pour en finir avec le machin, les désarrois d'un consultant en management,
00:20vous êtes professeur à Sciences Po, édition EMS, ouvrage qui nous propose,
00:26qui est issu de décennies de recherches que vous menez, notamment sur l'innovation ordinaire et
00:31la coopération. Évidemment le consultant est en désarroi, et globalement les entreprises,
00:41enfin la discussion. Puis il y a tout un passage sur les académiques. Je lis un passage, le
00:49consultant se rend dans un colloque. « J'avais le sentiment de visiter une expo d'art contemporain,
00:55je ne comprenais rien, je trouvais ça moche parce que mon inculture m'empêchait de frémir
01:04avec les autres. J'avais surtout le sentiment d'entendre l'écho de la langue machinale dont
01:09le principal fondement consistait à oublier le réel. » Quand il nous dit ça, il nous dit qu'il
01:15n'est pas dans le monde de l'entreprise, il n'est même pas dans le monde du conseil,
01:19il est en interaction avec le monde académique. Alors que se passe-t-il quand le consultant
01:25rencontre l'académique ? C'est un drôle de monde qu'il nous donne à voir.
01:29Oui, il faut replacer un petit peu cette situation dans l'histoire que raconte le livre,
01:39qui est l'histoire d'un consultant, d'un cabinet conseil américain, qui à un moment donné de sa
01:44carrière, au bout de 20 ans, se dit « tiens, il faudrait que je fasse des sciences sociales ». Donc
01:50il va à l'université et puis il participe à une chaire articulant les questions de gestion et
01:59celles de sciences sociales, et il participe un petit peu à la vie académique à ce moment-là.
02:05Et il rencontre le monde académique à l'occasion d'un certain nombre de colloques,
02:18et il s'aperçoit que finalement l'abstraction mobilisée par les académiques est à peu près
02:30comparable à celle des dirigeants qu'il côtoie habituellement dans son travail. C'est-à-dire que
02:36dans les deux cas, il n'y a pas d'intérêt pour ce qui se passe sur le terrain autrement que
02:48pour justifier ce qui est mis en avant pour les dirigeants une politique, pour les académiques
02:56une démonstration ou une grille d'analyse. Mais il n'y a pas d'amour des pratiques professionnelles,
03:06des gens qui les mettent en œuvre. Il n'y a pas de subjectivité investie sur le terrain. Il faut
03:17traiter les faits sociaux comme des choses, dit Durkheim bien sûr, mais ça n'empêche pas
03:23de pouvoir regarder le travail d'une caissière avec passion et pas seulement compassion. C'est-à-dire
03:37que ce qui peut être intéressant quand on observe le travail des uns et des autres, c'est de
03:47comprendre ce qui est mobilisé par la subjectivité des personnes qui se trouvent là et pas seulement
03:56de comprendre ce qui les détermine d'un point de vue des analyses sociologiques ou anthropologiques
04:04ou psychologiques. Voilà, et c'est ce qui gêne mon personnage. Ce qu'il gêne, c'est que les
04:11académiques restent perchés dans leur monde de la théorie, même si par ailleurs ils ont des
04:19engagements idéologiques qui sont plus marqués que ceux de mon consultant. Et d'ailleurs, ça le
04:27choque. Mais mon consultant, il est vrai, qui est le personnage, a une histoire sociale un peu
04:35particulière, c'est-à-dire qu'il vient d'un milieu populaire. Et quand il rencontre ou les
04:42académiques ou les dirigeants, il sent bien qu'il n'est pas à sa place. Pour en finir avec le machin,
04:51les désarrois d'un consultant en management. Merci Norbert Alter. Merci.

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