Vladimir Poutine, homme de pouvoir et d'espionnage, pourrait souhaiter un cessez-le-feu en Ukraine. Sa méthode de négociation, basée sur des menaces et des exigences, vise à reconquérir l'influence perdue de la Russie.
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00:00Une fois n'est pas coutume, on va essayer de déplier tout ça, déplier cette vision du monde,
00:04cette vision aussi de la guerre en Ukraine, et puis d'anticiper avec prudence les prochaines réactions du Kremlin,
00:10tout ça sans psychologiser, sans parler de paranoïa ou de gangstérisme.
00:16Vladimir Poutine, c'est ma première intention, est un homme forteresse.
00:20C'est un homme qui ne fait confiance qu'à des gens qu'il connaît depuis une vingtaine d'années,
00:25parfois un peu plus, avec qui il travaille encore une fois depuis des décennies,
00:31mais surtout des hommes qui sont peut-être dix à pouvoir avoir un accès à son corps.
00:37Et on parle d'ailleurs en Russie d'accès au corps, ça fait partie des privilèges.
00:44Et il a une vision aussi de la Russie et de sa place dans le monde, une vision qui s'ancre dans une tradition.
00:50Alors hier, on le dit évidemment, il y a cet accord trouvé entre Américains et Ukrainiens pour un cessez-le-feu,
00:55un cessez-le-feu de 30 jours.
00:57Ce que nous disent les Américains aujourd'hui, c'est que maintenant ils vont envoyer des émissaires auprès des Russes
01:02pour leur proposer cet accord également.
01:04Que peut répondre Vladimir Poutine ? Est-ce qu'un cessez-le-feu est souhaitable pour lui ?
01:08Non seulement, et c'est véritablement ma conviction, il est souhaitable, mais il est souhaité.
01:13Je vous montre pourquoi en deux cartes.
01:15La première carte, c'est celle de l'Europe au moment de l'existence de l'Union soviétique.
01:21L'Union soviétique, 15 États, l'Europe occidentale au milieu, le bloc des pays d'Europe continentale
01:28qui sont en fait sous le joug du bloc soviétique sans appartenir à l'Union soviétique.
01:33Et puis, chute de l'URSS, apparition de la Russie et apparition d'une théorie d'États qui sont libérés de son joug.
01:44Et qui sont aussi autant d'États, Géorgie, Ukraine et Moldavie,
01:48où la Russie non seulement commence des conflits ou soutient des mouvements qu'elle présente comme séparatistes,
01:53mais où elle conclut aussi, devinez quoi, des cessez-le-feu.
01:56Des cessez-le-feu, oui, on revient effectivement au cessez-le-feu.
01:58Vladimir Poutine est aussi peut-être d'abord un espion ?
02:03D'abord et avant tout, oui, c'est un homme formé à la dissimulation
02:07et donc il sait très bien déguiser d'une part quels sont ses objectifs
02:12et il sait aussi jouer des hommes.
02:14Et c'est pour ça que je parle d'un cessez-le-feu qui est non seulement souhaitable, mais souhaité.
02:18Parce que dans cette affaire de cessez-le-feu, toute la Russe consiste à nous convaincre
02:23que la Russie ne veut pas de cessez-le-feu, alors que c'est le minimum de ce qu'elle veut.
02:28C'est la méthode russe de négociation ?
02:30Oui, c'est une méthode russe de négociation.
02:32Elle est très bien résumée par l'ancienne première ministre estonienne,
02:36bien placée pour connaître la Russie, c'est un voisin immédiat avec une très grande diaspora russe.
02:41Elle l'a résumée à la conférence de Munich en 2023 et ça tient en trois points qu'on va voir.
02:46Premier point, c'est la technique de l'ancien ministre des Affaires étrangères soviétique Andrei Gromyko.
02:53Il dit plusieurs choses.
02:54Ah non, ça ce sera un petit peu après.
02:56Bon, ça c'est ce que veut la Russie.
02:58C'est-à-dire que si elle consent à un cessez-le-feu,
03:01elle voudra au moins les cinq territoires qu'on vient de voir.
03:05Et Kayak Halas insiste sur cette méthode.
03:08D'abord, il faut poser des exigences et proférer des menaces.
03:12Nous, nous pensons, OK, on va les calmer.
03:14On va leur donner un petit quelque chose.
03:17Mais le deuxième point arrive.
03:21Voilà.
03:22Demandez, menacez vos interlocuteurs, donnez-leur des ultimatums.
03:25Et ne cédez pas un centimètre de terrain.
03:30À la fin, vous ressortirez toujours avec quelque chose de plus que lorsque vous avez commencé la négociation.
03:38Ne serait-ce que la moitié de ce que vous avez demandé au début de cette négociation.
03:42Vous partez toujours de l'existant.
03:44Vous demandez plus.
03:46Vous exigez, vous menacez.
03:47Vous ne cédez rien.
03:49Et vous repartez avec quelque chose.
03:50C'est ce qui a marché dans ces territoires que nous avons vus.
03:54Les territoires du Donbass qui ont été pris.
03:57La Crimée, annexée par la Russie et que nous ne demandons même plus vraiment à ce qu'elle rentre.
04:03C'est même plus au chapitre des négociations.
04:04Oui, tout le monde vous dit, ce n'est pas réaliste.
04:06Et en réalité, en Géorgie et en Moldavie, on a aussi enterriné l'ébut de guerre de Vladimir Poutine.
04:14Et Vladimir Poutine, ce sera mon troisième point, c'est un nostalgique.
04:18Il est fidèle à ses maîtres.
04:19Il a grandi à l'époque de l'Union soviétique, formé au KGB qui contrôlait l'État derrière l'État.
04:25Et il a été formé par un homme qu'on ne connaît pas toujours, qui s'appelle Evgeny Primakov.
04:29Qui est considéré comme le Kissinger russe.
04:32Evgeny Primakov, on le voit là, à côté de Vladimir Poutine, très jeune.
04:35Il est le premier à avoir formalisé une doctrine.
04:38L'étranger proche, tous les anciens pays de l'Union soviétique sont la zone d'influence naturelle de la Russie.
04:44Donc pas touche.
04:45Donc pas touche.
04:46Et surtout, comme ils ont été perdus, rentrés dans l'UE, parfois dans l'UE et dans l'OTAN.
04:50Vladimir Poutine, lui, ne cache pas quelle est sa vision de cette évolution.
04:55Il dit carrément en 2005 que la disparition de l'Union soviétique et la perte de statut qui s'est accompagnée,
05:01c'est la plus grande catastrophe géopolitique du siècle pour Vladimir Poutine.
05:07Il s'agit de reconquérir cette puissance.
05:10Et s'il se met d'accord sur le cessez-le-feu, nous aurons contribué à lui donner son premier objectif pour la paix.
05:17Il demandera encore plus à nous de demander des garanties de sécurité pour l'Europe.
05:22Christophe, Amélie ?
05:23J'entends quand on parlait de la proximité et presque de la complicité entre Vladimir Poutine et Donald Trump.
05:32Quand on vous écoute, on la comprend, cette méthode, alors peut-être moins dissimulée de Donald Trump,
05:38où il affiche davantage, mais cette technique de demander beaucoup, de déstabiliser et de faire preuve de force
05:45et de ne rien lâcher pour derrière obtenir tout en sachant qu'on n'obtiendra pas jusqu'au bout.
05:49Effectivement, on peut entendre, là, quand on vous écoute, ce style et cette proximité et donc peut-être ce respect.
05:55Bien sûr, il faut qu'on change notre jeu.
05:57Néanmoins, en trois ans de guerre, des centaines de milliers de morts pour obtenir peut-être une grosse moitié du don basse,
06:02où tout le don basse, c'est quand même cher payé, il faudrait qu'ils vivent 150 ans pour obtenir la reconstitution de l'ex-URSS.
06:09C'est vrai, à ce temps-là.
06:11Mais grignotage par grignotage, les leviers sont là.