Xerfi Canal a reçu Hélène Löning, professeure associée, HEC Paris, pour parler de la finance verte et de l'ESG face aux investisseurs.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
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00:00Bonjour Hélène Lenig. Bonjour Jean-Philippe. Hélène, vous êtes professeure associée à HEC Paris,
00:13vous êtes spécialiste de comptabilité contrôle, mais dans une perspective organisationnelle et
00:18c'est ça qui est très important. Alors dans cette perspective précisément organisationnelle,
00:22spontanément on se dit l'ESG, les critères ESG, donc le social, la gouvernance, l'écologie,
00:29donc environnemental, c'est important. En Europe, on sait que ça nourrit la directive CSRD,
00:34il y a vraiment cette obligation de rendre compte. Et puis là, il y a Donald Trump qui est élu
00:41président des États-Unis et on sait qu'aux États-Unis, il y a beaucoup d'investisseurs
00:45qui se rebellent contre les critères ESG en disant arrêtons un peu la blague. No country
00:52for woke men circule sur les réseaux avec la tête de Donald Trump et d'Elon Musk. Qu'est-ce qu'elles
00:57doivent faire les entreprises ? Qu'est-ce qu'elles doivent en penser ? Est-ce que c'est fini l'ESG ?
01:00Est-ce que les investisseurs s'en moquent ? Est-ce qu'au contraire, ça peut devenir plus important
01:06que jamais ? Alors je vais à la fois abonder dans votre sens et puis en même temps apporter un
01:11contrepoint parce que c'est quand même ça l'idée. Abonder dans votre sens parce que je pense comme
01:15vous, enfin comme ces allégations que les investisseurs sur le fond la planète, ils n'en
01:21ont pas grand-chose à faire, ils s'en moquent, ce n'est pas leur sujet. Donc bien sûr, ils vont
01:26se conformer, s'ils sont en Europe, ils vont se conformer à la réglementation parce qu'on ne peut
01:29pas ne pas se conformer à la réglementation. Une réglementation qui est devenue exigeante,
01:34parfois c'est vrai aussi pointilleuse. Ils vont aussi faire beaucoup attention à leur réputation
01:39parce qu'un investisseur, ça vide la confiance que ça inspire, donc la réputation c'est quelque
01:44chose qui est essentiel pour eux. Mais en réalité, quand on va en venir à des décisions concrètes
01:48d'investissement, ce qui va primer sur les critères environnementaux et sociaux, c'est toujours le
01:54profit ou la capacité à avoir la rentabilité. Donc ça c'est un fait. Est-ce que pour autant,
02:03il faut s'arrêter là ? Je ne crois pas. Je ne crois pas, ça serait une vision un peu simple des
02:07investisseurs parce que les investisseurs sont quand même très sensibles à certaines choses
02:12qui sont en particulier la valeur de leurs actifs. Donc c'est là qu'on en vient à cette notion de
02:17actifs échoués, « stranded assets » en fait en anglais. Donc ça c'est quand même un contrepoint
02:24je pense assez lourd pour eux. Et puis ce sont des actifs échoués, cette matérialité financière,
02:31donc on ne parle pas de matérialité d'impact, on parle bien de matérialité financière, c'est-à-dire
02:36des risques financiers encourus liés à la dégradation des conditions climatiques et
02:41environnementales. Ça c'est quelque chose qui leur parle de plus en plus parce qu'on les voit
02:46arriver en fait, on les voit se matérialiser ces risques-là. Alors juste pour prendre quelques
02:49exemples, ça pourrait être des implantations industrielles le long du bassin de la Seine par
02:55exemple, mais de façon plus large si on prend des rives, des deltas de fleuves. Avec l'élévation du
03:01niveau de la mer, on peut s'attendre à ce qu'il y ait des zones qui soient submergées. Ce sont souvent
03:05des zones sur lesquelles il y a des installations portuaires, logistiques, industrielles non
03:10négligeables. Et d'ailleurs c'est assez intéressant parce que vous avez cité les États-Unis, alors
03:14c'est vrai qu'aux États-Unis, on est très très sensible au bâton des actifs échoués, mais la Chine
03:20est également quand même un acteur majeur sur la Seine, surtout quand on parle de gaz à effet de
03:25serre et d'émissions de gaz à effet de serre. La Chine, elle, a une vision très intéressante parce
03:30qu'elle voit tous ces sujets-là comme des opportunités, des opportunités commerciales.
03:34Elle est déjà le leader des solutions climatiques en fait, vraiment au niveau mondial, que ce soit
03:42sur les panneaux solaires, que ce soit sur les véhicules électriques, pour ne mentionner que
03:46ces deux-là, ils ont une avance considérable. Les Européens se sont un peu laissés, voilà, distancés,
03:53en se centrant sur la réglementation et en oubliant peut-être qu'il y avait aussi des
03:58opportunités de business. Donc voilà, on est quand même dans une perspective là un peu à nuancer je
04:05pense. Je mentionne ça, ça ne vient pas de moi, ça vient de mes participants en cours, donc j'aime
04:14toujours beaucoup citer les personnes qui nous apprennent autant que nous leur apportons, je
04:19l'espère. On m'a dit un jour, il s'agit de faire « make accounting great again ». Voilà, donc je
04:24pense que cette cause de la comptabilité environnementale me tient à cœur, vous l'avez
04:29compris, mais elle est effectivement essentielle. Merci à vous Hélène. Merci.