Introduction
Luc Balleroy - Directeur Général, Opinionway
Luc Balleroy - Directeur Général, Opinionway
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00:00Alors pour introduire cette matinée sur la communication à l'ère de la sobriété,
00:10je vous propose de réfléchir quelques minutes ensemble sur une question peut-être un peu
00:15polémique, c'est la sobriété, est-ce que c'est un terme à bannir ou à investir ? Alors la
00:23sobriété c'est pas une idée si nouvelle puisqu'elle traverse l'histoire de la philosophie depuis
00:29les grecs anciens, Socrate nous disait la vraie richesse c'est vivre avec peu, Épicure si tu veux être riche ne cherche pas à augmenter tes biens mais à diminuer ta convoitise,
00:40Sénèque ce n'est pas l'homme qui a peu mais celui qui désire toujours plus qui est pauvre, Taureau au 19ème siècle nous invite à le lutter contre la société du trop-plein
00:51et Ivan Illich nous dit la sobriété est le contraire de la frégulité imposée, c'est un choix libérateur, il faut savoir si on revient aux grecs anciens
00:58que la tempérance, la sobriété faisait partie des quatre vertus cardinales qui proposaient d'organiser la société pour qu'elle soit plus harmonieuse et plus douce.
01:09Et d'ailleurs il est encore écrit au frontispice du temple d'Apollon, Maden Hagan, qui veut dire la tempérance.
01:17Voilà pour cette petite introduction, ce qu'on voit surtout c'est que la sobriété c'est pas une notion qui nous est naturelle,
01:24elle est là pour lutter contre nos passions, nos désirs, ce qu'on appelle l'hubris et donc elle n'est pas du tout naturelle.
01:36Si nous savons collectivement nous comporter de manière plus sobre et nous savons faire des économies d'énergie partout,
01:43alors il n'y aura pas de rationnement et il n'y aura pas de coupure.
01:465 septembre 2022, la sobriété fait le grand retour dans le paysage médiatique, vous voyez les courbes au Google,
01:57d'un seul coup cette notion ressort, on voit qu'ici Emmanuel Macron ne présente pas la sobriété comme une option possible,
02:07mais plutôt comme un devoir, une nécessité.
02:09L'enjeu, il n'est pas tant de lutter contre les enjeux climatiques à l'époque, mais plutôt de lutter contre la crise énergétique qui s'annonce devant nous.
02:20Ce qui est intéressant c'est que c'est quand même une idée qui arrive dans un paysage où quand même depuis quelques années,
02:28plusieurs années, de très nombreuses années, le mot d'ordre c'est la croissance.
02:33Mais la sobriété a un parfum de déjà vu et dans les années 73, très exactement, on doit faire face au choc pétrolier.
02:46Et là à nouveau arrive cette notion dans un climat qui est de révolution culturelle,
02:54qui est aussi de lutte contre cette consommation qui n'aurait pas de sens.
02:59C'est l'année, quelques années après la provocation de ce rapport que vous connaissez tous,
03:05le rapport Meadows qui réunit les scientifiques sur la limite de la croissance dans un monde fini.
03:10Le rapport Meadows, c'est l'ancêtre du GIEC, c'est juste il y a 50 ans.
03:14Et puis les communicants que vous êtes, en tout cas vos pères, ont déjà imaginé que le pull, cher à...
03:22L'ancien chauffage d'appoint avait du charme, enfin disons qu'il chauffait surtout les chevilles.
03:27On en fit donc qu'il ventilait la chaleur.
03:29Très efficace, mais grand dévoreur de kilowatts.
03:33Très apprécié des gaspilles.
03:34Et vous allez maintenant découvrir le dernier prototype, le modèle anti-gaspille.
03:40Efficacité immédiate, poids 200 grammes, consommation nue.
03:47Formidable !
03:48Chassons les gaspilles de chez nous.
03:50Le pull n'était donc pas une idée si nouvelle, assez récemment,
03:54puisqu'il était déjà à la fête et puis après, on oublie la sobriété.
03:58Et elle fait un comeback, comme je l'ai dit, en 2022,
04:02dans un contexte qui est quand même assez différent, un contexte plus dramatique.
04:06C'est la guerre en Ukraine, plus anxiogène,
04:09parce que la chronique annoncée des catastrophes naturelles
04:14et qui s'égrène chaque jour sur nos écrans, génère de l'écho-anxiété.
04:19Saturée d'injonctions souvent contradictoires,
04:22je vous les laisse les lire, et très bien l'incarner par cette petite.
04:26Maintenant, tout est plus clair, on sait ce qu'il faut faire.
04:31Pour ne pas se contaminer, il faut se confiner,
04:32mais pour se déconfiner, il faut être immunisé.
04:34Pour être immunisé, il faut se faire contaminer.
04:35Pour se faire contaminer, il faut se déconfiner.
04:38C'est QFD.
04:39Je pense que vous l'aviez tous vu.
04:42Et tout ça arrive aussi dans un contexte politique très tendu,
04:46puisqu'on sort juste de la crise des gilets jaunes,
04:49qui, rappelons-le, a été générée par la taxe carbone.
04:54Donc, le discours d'Emmanuel Macron arrive,
04:59et ce qui est intéressant d'avoir en tête,
05:03c'est qu'il ne le présente pas comme une contrainte,
05:07ni comme une obligation.
05:09Ce n'est pas assorti de sanctions,
05:11c'est plutôt un appel au sens commun,
05:15au double sens du terme,
05:17c'est-à-dire à la fois le bien commun,
05:19l'enjeu pour tous,
05:20et puis aussi le sens commun au terme de...
05:24Enfin, excusez-moi,
05:25le sens commun dans le sens du pragmatisme.
05:29Donc, voilà, c'est une invitation à la sobriété
05:31qui est présentée comme une nécessité d'un changement profond
05:35avec une campagne qui est
05:37« Je éteins, je réduis, je décale ».
05:40C'est un appel au discernement et non pas à la privation.
05:45Alors, c'est un pari qui, normalement, devrait être perdu.
05:49Mais c'est un pari qui a été gagné.
05:51Il aurait dû être perdu, pourquoi ?
05:54Pour trois raisons.
05:55On va comprendre pourquoi il a été gagné,
05:57en fait plus exactement pourquoi il a été gagné.
05:59D'abord, parce qu'on est dans une société
06:03où le moteur aspirationnel de la consommation
06:07est extrêmement fort.
06:08Il est extrêmement fort pour une raison,
06:10c'est qu'il repose sur un principe,
06:12c'est la quête de l'être par l'avoir.
06:14En d'autres termes, je suis bien parce que j'ai du bien.
06:17Et tandis que l'avoir s'inscrit dans un univers fini,
06:26je peux avoir très envie de manger,
06:28mais à un moment donné, je ne peux plus manger.
06:31Je peux avoir envie de bien,
06:34mais à un moment donné, si bien arrive à saturation,
06:38la quête de l'être, elle, elle est infinie.
06:40Si on prend par exemple l'amour,
06:42la quête de l'amour, elle amène à la passion.
06:43La quête de mysticisme, elle amène à l'extrémisme.
06:48La quête de pouvoir, elle amène aux guerres.
06:51Et dans ce cycle de quête de l'être par l'avoir,
06:57on est face à ce que Schopenhauer appelle
07:01le cycle du désir et de l'ennui,
07:02qui est lui un cycle infini.
07:05Et donc du coup, on voit bien qu'on arrive
07:07à des logiques totalement addictives.
07:09Des logiques addictives qui font qu'aujourd'hui,
07:11on a quand même 83% des Français
07:12qui nous disent qu'ils souhaiteraient vivre
07:14dans une société où la consommation
07:16prend moins de place.
07:17C'est un désir, c'est une aspiration.
07:19Ça, c'est la première chose.
07:20La deuxième chose, c'est l'attention
07:22sur le pouvoir d'achat.
07:24Le pouvoir d'achat, c'est un sujet récurrent.
07:27En fait, il n'a fait qu'augmenter.
07:28Par contre, ce qui a énormément augmenté,
07:31c'est ce qu'on appelle
07:32le pouvoir d'achat arbitrable.
07:35Et les dépenses contraintes,
07:36comme vous le voyez aujourd'hui,
07:37elles représentent 30% de nos dépenses,
07:40ce qui effectivement me donne le sentiment
07:42que je n'ai pas d'arbitrage possible
07:45sur mon pouvoir d'achat,
07:46sachant qu'on a quand même 44% des Français
07:48qui nous disent devoir se restreindre
07:50pour boucler leur fin de mois.
07:5144%, c'est un sur deux quand même.
07:53Et puis la troisième chose,
07:55c'est la chronique de la catastrophe annoncée
07:56dont je parlais tout à l'heure
07:58et qui génère de l'éco-anxiété
08:00avec 78% des Français
08:01qui se disent inquiets
08:02face au changement climatique actuel.
08:0427%, un jeune sur cinq
08:06dit avoir du mal à dormir
08:08en pensant au climat.
08:10Donc ces trois facteurs combinés
08:12ont fait que la sobriété,
08:15ce pari qui aurait pu être totalement perdu,
08:18est gagné.
08:19Et il est gagné en générant
08:22plein de choses assez positives.
08:24La première chose,
08:25c'est qu'elle réconcilie le citoyen
08:26et le consommateur.
08:28En moyenne, les Français ont fait
08:3077 euros d'économie
08:32sur leur pouvoir d'achat
08:34en restreignant justement
08:36leur consommation,
08:38en éteignant,
08:39en réduisant ou en décalant.
08:41Et la deuxième chose,
08:42c'est que comme ce n'était pas
08:44une obligation,
08:45mais plutôt un appel au bon sens,
08:47il y a un sentiment
08:48de fierté collective
08:49qui a été généré.
08:50Ce qui explique pourquoi
08:52quand on demande aux Français,
08:53quand je vous parle de sobriété,
08:54dites-moi si vous avez des évocations
08:58extrêmement positives,
08:59très positives,
09:00assez positives
09:01ou à l'inverse négatives,
09:02on a 73% des Français
09:04qui nous disent que pour eux,
09:06ce terme est un mot
09:07qui est un principe positif.
09:11C'est un chiffre assez important.
09:13D'habitude, quand je le fais,
09:14je laisse chacun réfléchir
09:15sur quels chiffres
09:16les Français nous ont donné.
09:18Normalement, effectivement,
09:19on est loin de cette idée.
09:21Ce qu'il faut avoir aussi en tête,
09:22c'est quand on leur demande
09:22quelles sont les vocations
09:24qui sont associées à ce mot,
09:26on retrouve tout ce que j'ai dit
09:27tout au début sur la philosophie
09:29et sur les philosophes.
09:31C'est-à-dire,
09:31on est dans des principes d'harmonie,
09:34de retour au bon sens,
09:36au bien-être.
09:37Donc on a là, effectivement,
09:39premier début de réponse,
09:40un principe extrêmement porteur.
09:45Mais un principe
09:46qui doit être manié
09:48avec beaucoup de précautions.
09:50Et pour plusieurs raisons.
09:51D'abord parce qu'on s'inscrit
09:54dans un climat
09:54de défiance générale
09:56assez fort.
09:57Aujourd'hui,
09:58alors, défiance vis-à-vis des politiques,
10:00mais aussi,
10:01comme vous le voyez,
10:01vis-à-vis des entreprises,
10:04avec ce chiffre
10:05de 84% des Français
10:07qui nous disent
10:09qu'ils ont besoin
10:12de preuves tangibles
10:13pour croire que les marques
10:14communiquent sur leur engagement.
10:17Deuxième chose,
10:18c'est une quête d'authenticité
10:19des collaborateurs
10:20qui sont aussi des citoyens
10:23et qui ont aussi besoin
10:25dans leur travail
10:26de trouver de la sincérité
10:27dans l'engagement
10:28des entreprises,
10:29notamment,
10:30et de manière encore plus forte
10:31pour les jeunes.
10:32La troisième chose,
10:33c'est qu'il y a aujourd'hui
10:34des vigies,
10:35de plus en plus nombreux,
10:36sur ces sujets de la RSE
10:37et qui sont un peu
10:39les nouveaux gladiateurs
10:41de la reine de la RSE.
10:43Et puis,
10:44le dernier,
10:45et non des moindres,
10:46c'est l'hyperexposition médiatique.
10:47C'est-à-dire que les réseaux sociaux
10:48fonctionnent comme des caisses
10:49de résonance extrêmement fortes
10:52sur lesquelles,
10:54effectivement,
10:54il est risqué
10:56d'être en dissonance
10:59entre ce que je dis
11:00et ce que je fais.
11:01Donc, en fait,
11:02c'est là où on peut se dire
11:03que ce terme
11:05est à manier avec précaution
11:07et que si jamais
11:08on n'est pas dans
11:09l'exemplarité
11:10et la sincérité
11:12sur ces engagements,
11:13c'est un terme
11:14qu'il faut manier
11:14avec beaucoup de précaution.
11:16Pour autant,
11:19pour autant,
11:22excusez-moi,
11:23hop,
11:23on ne va pas parvenir en arrière,
11:24mais ce n'est pas très grave.
11:25Pour autant,
11:26la sobriété,
11:27c'est un véritable levier,
11:30un véritable levier stratégique
11:31parce qu'elle s'inscrit
11:32dans une logique
11:35d'économie de moyens.
11:37Et l'économie de moyens,
11:38en dépit des indicateurs
11:39ultra-courts thermistes
11:40que sont notamment la croissance,
11:42la croissance demandée
11:43aux entreprises,
11:43elle va être
11:46un enjeu majeur
11:47pour toutes les entreprises
11:48face à la raréfaction
11:50des ressources.
11:51Donc,
11:51c'est un vrai enjeu stratégique
11:53et un vrai axe de progrès.
11:55Mais,
11:55effectivement,
11:57c'est effectivement
11:57un enjeu,
12:00je dirais,
12:01difficile
12:02parce qu'il faut
12:02effectivement combiner
12:03aujourd'hui
12:04les attentes
12:06de rentabilité
12:08court-termiste
12:09avec l'inscription
12:10dans l'avenir.
12:11Voilà ce que
12:12j'aurais pu vous dire
12:13ce matin
12:14sur cet enjeu
12:16à bannir
12:16ou pas,
12:18à vous de choisir.
12:19La vie en rose
12:26Le rose qu'on nous propose
12:30dans l'avenir.
12:31Merci.
12:32Merci.
12:32Merci.