Mardi 22 avril 2025, retrouvez Florent Martini (Directeur de gestion, Trecento AM), Jeanne Asseraf-Bitton (Directeur de la Recherche et Stratégie, BFT-IM) et Léa Dauphas (Chef économiste, TAC Economics) dans SMART BOURSE, une émission présentée par Grégoire Favet.
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00:00Générique
00:003 invités avec nous chaque soir pour décrypter les mouvements de la planète marché.
00:13Léa Dauphas est à nos côtés, chef économiste de TAC Economics.
00:16Bonsoir Léa.
00:17Bonsoir.
00:17Jeanne Asraf-Biton nous accompagne, directeur de la recherche et de la stratégie de BFTIM.
00:23Bonsoir Jeanne.
00:24Bonsoir.
00:25Florent Martini est avec nous également et lui est directeur de la gestion de Trecento Asset Management.
00:30Bonsoir Florent.
00:30Merci d'être là.
00:32Ravi de vous retrouver tous les trois.
00:34Allons-y sur le match.
00:36C'est plus qu'un match.
00:36Il y avait déjà eu quelques escarmouches évidemment de Donald Trump vis-à-vis de Jérôme Powell.
00:41Mais là on sent quand même que le front, la bataille, le combat de Donald Trump contre Jérôme Powell et la Fed est explicitement ouvert.
00:50Jeanne, quel est le rôle de Powell dans la stratégie de Donald Trump ?
00:54Je pense qu'il a peut-être son rôle principal, c'est d'abord tout d'être le scapegoat, ils disent.
01:03Le bouc émissaire.
01:04Le bouc émissaire.
01:04Merci, je cherchais.
01:05Donc un rôle politique qu'on lui attribue.
01:07Oui, parce qu'on voit bien que, bon là le FMI vient de réviser en baisse, mais la Fed l'avait déjà fait, puisqu'elle avait dit 1,7% de croissance cette année.
01:17Donc on voit bien que ça risque d'être moins, les probabilités de récession augmentent, etc.
01:20Il faut bien blâmer quelqu'un.
01:24Et d'autant que l'environnement n'est pas prêt de se stabiliser, tant en termes de politique commerciale qu'en termes de budget.
01:31On n'a pas encore vu ce qui va se faire.
01:33C'est en train d'être préparé par les Républicains.
01:36A priori, on pourrait avoir des pistes en fin de ce mois-ci, mais bon, c'est pas encore là.
01:41Donc voilà, il faut un bouc émissaire.
01:44Et puis en même temps, c'est pas plus mal du point de vue de Trump, puisque ça fait baisser le dollar, ce qui est quand même une des équations auxquelles il tient beaucoup.
01:51Ça fait baisser le dollar pour quelles raisons, Jeanne ?
01:54Ça fait baisser le dollar parce qu'il y a une perte de confiance et que ça participe de la perte de confiance, globalement, de la perte d'attractivité, je dirais presque,
02:06plutôt que de confiance dans les actifs américains, qui avaient une qualité de valeur refuge, dans le sens que tout était sûr, écrit, etc.
02:15Et que là, tout est remis en cause et ça a l'air d'être des déséquilibres instables, pour le coup, même pas des... Voilà, partout.
02:25Donc voilà, c'est une dépréciation de sentiments, j'allais dire, pour l'instant.
02:32C'est quelque chose qu'on maîtrise, qu'on contrôle ?
02:35Non.
02:36D'accord.
02:37Parce qu'une fois que la confiance disparaît, elle peut partir très vite, elle peut mettre beaucoup de temps à revenir.
02:42Sur le court terme, ça peut être bénéfique parce que le dollar baisse.
02:46Sur le moyen long terme, qu'est-ce que ça donne comme résultat ?
02:50La question, je la tournerai un tout petit peu différemment, parce que pour que ce soit une remise en cause de long terme, il faudrait qu'il y ait des alternatives.
02:59Voilà.
03:00Donc tant qu'il n'y a pas d'alternative crédible, Trump peut se permettre de jouer à ce petit jeu-là ?
03:04Oui, en tout cas, voilà.
03:07C'est-à-dire que si ensuite les choses se normalisent et qu'on revient sur un environnement un peu plus stable, avec un peu de visibilité,
03:14les actifs américains pourraient retrouver de l'attractivité.
03:18On ne peut pas dire...
03:19En Europe, on a beaucoup de bonnes intentions, mais on n'est pas tout à fait encore au rendez-vous.
03:25On est extrêmement endettés.
03:27Bref.
03:27La Chine, elle a du mal à sortir de sa déflation.
03:31Le Japon émerge, mais c'est un peu tôt quand même pour devenir...
03:34Voilà.
03:35Donc on a envie de dire qu'il faudrait qu'il y ait des relais pour les investisseurs.
03:40Je comprends.
03:40Il ne prend pas tant de risques que ça à ce stade, à jouer à ce petit jeu de saper la confiance des investisseurs pour faire baisser sa devise et éliminer la surévaluation du dollar.
03:50Je ne suis pas sûre que son objet ait été de dévaluer sa devise.
03:57Je pense que, comme je l'ai dit en premier, je pense qu'il cherchait avant tout un bouc émissaire pour blâmer.
04:02Il faut bien blâmer quelqu'un sur le fait que l'activité va très probablement...
04:06Il y a un tel choc de confiance qu'on peut penser que le premier ou le deuxième trimestre vont être négatifs aux États-Unis.
04:12Donc le choc...
04:13Et en plus, il y a des effets d'anticipation qui peuvent vraiment précipiter pour le coup un PIB négatif.
04:18Donc il va bien falloir blâmer quelqu'un.
04:22Et il y a un corollaire.
04:24J'entends.
04:26Je ne pense pas.
04:27Je pense qu'il préférerait que le dollar baisse parce que la Fed baisse les taux.
04:32Ce qui ne serait pas évident non plus, je ne sais pas.
04:34Quand la Fed a baissé ses taux ces derniers mois, on a plutôt vu les taux longs en tout cas remonter.
04:40Oui, mais...
04:41Ah oui, vous parlez du côté des taux longs.
04:43Après, il y a des moments où la devise va être quand même relativement influencée par l'évolution des taux courts.
04:50Ou l'évolution attendue des taux courts, disons à deux ans.
04:54Donc on peut penser qu'il y avait quand même un...
04:58Ça aurait pu jouer dans ce sens.
04:59Oui, oui.
05:00Bon, votre lecture, effectivement.
05:01Alors dans le grand plan de Trump aidé par Stephen Myron et d'autres,
05:06quelle est la place de Jérôme Powell et de la Fed dans tout ça, Léa ?
05:10Je pense qu'effectivement, la logique de bouc émissaire, c'est la bonne.
05:14Il faut avoir en tête, et moi c'est un message que je passe depuis plusieurs mois maintenant,
05:18c'est qu'il ne faut plus lire les Etats-Unis dans le cadre normal.
05:22En tout cas, il faut être capable d'envisager un cadre différent,
05:25qui est celui d'un changement de régime.
05:27Vers quoi ? C'est une question.
05:28Mais cette logique de bascule vers un régime potentiellement autoritaire, autocratique,
05:35peu importe comment on l'appelle,
05:36quand on regarde en fait plutôt la littérature sur le sujet,
05:39il y a quatre composantes.
05:40La première, c'est le leader, l'homme idéal.
05:42La deuxième, c'est les questions notamment de recherche de bouc émissaire.
05:46Donc on a eu les agences, les médias, la justice.
05:50Maintenant, ce n'est pas compliqué.
05:52Le sud après, ça va être la réserve fédérale.
05:55Et en fait, quand on ajoute tout ça ensemble,
05:57le sentiment que ça donne, c'est surtout de se dire
06:00est-ce qu'on peut faire confiance à Trump
06:04quand on sait que les tarifs arrivent, sont enlevés, reviennent,
06:08quand on sait qu'au final, peu importe le cadre réglementaire dans lequel il utilise,
06:13de toute manière, il n'y en a plus.
06:14Il peut s'en affranchir.
06:16Il peut s'en affranchir.
06:17Et donc même si au bout de 90 jours, ce qui est complètement illusoire,
06:19des tarifs, ça ne se négocie pas en 86 jours,
06:22ça se négocie en 2, 3 ans, voire même encore plus longtemps,
06:25même si on a quelque chose, on sait que de toute manière,
06:28ça pourrait être mis en place, peu importe comment.
06:33Donc tout ça fait que quand vous attaquez les institutions,
06:37quand vous y rajoutez une incertitude qui ne se résoudra pas,
06:40même si quelque chose naîtra au bout des 90 jours,
06:44vous amenez une signature US qui se dégrade.
06:46Exactement ce que disait Jeanne sur le dollar.
06:48Et le point de bascule le plus important qu'on regarde tous,
06:51c'est effectivement pourquoi dans ce contexte-là,
06:53les taux longs ne baissent pas dans le contexte de valeur refuge.
06:56Ce n'est pas parce qu'on a une prime de risque sur la signature US,
06:59une prime de terme, on en parle peu,
07:01Jeanne mentionnait la question du budget,
07:02mais en réalité, le seul moyen que les États-Unis vont avoir pour s'en sortir,
07:07si effectivement ils nous emmènent dans cette logique-là,
07:10c'est la dépense budgétaire.
07:11On ne pourra pas gérer cette problématique-là sans dépense budgétaire.
07:14Vous rajoutez une prime d'inflation,
07:16vous avez prime de terme, prime d'inflation, prime de risque.
07:19Tout ça, en fait, c'est la signature US qui se dégrade.
07:22De combien, c'est impossible à savoir.
07:23Mais quand on est dans ces éléments d'incertitude
07:26et qu'en plus, on commence à remettre en cause la crédibilité de la FEN,
07:30qui est en fait à peu près le seul poudre qu'on peut avoir aujourd'hui
07:34dans cet environnement-là.
07:35C'est un bien commun, dirait certains.
07:37En tout cas, c'est nos points d'ancrage.
07:39Dans l'incertitude qu'on a, on cherche les points d'ancrage.
07:42On a probablement la FEN.
07:44Elle va être testée.
07:45En tout cas, jusqu'où Trump peut aller, c'est une question ouverte.
07:48Mais en tout cas, il va la tester.
07:49Le fait qu'il la teste fait encore sauter une digue supplémentaire.
07:53Et donc, tout ça mis ensemble, oui, effectivement, c'est le dollar,
07:57ça va être les taux.
07:58Et puis, le point, je pense, qui est un point que le marché a encore du mal à voir aujourd'hui,
08:02c'est de se dire que le scénario qu'on va avoir,
08:05ce n'est pas un scénario dans lequel, un moment ou un autre,
08:07la FED va baisser les taux et puis ça va aller mieux.
08:09C'est illusoire de croire ça.
08:11Alors, ça va être un moment où la FED va peut-être baisser les taux, probablement.
08:14Pour quelle raison ?
08:15Parce qu'on va avoir une récession qui va arriver.
08:18L'ampleur, alors, les niveaux du FMI sont encore trop optimistes.
08:22On est probablement dans des ranges entre 0 et 1% cette année.
08:26Mais, quand on est dans cet environnement-là et que derrière, on a une incertitude qui est dominante
08:31et qui va rester, même s'il change, c'est-à-dire que même en baissant les taux,
08:35la politique monétaire est inefficace.
08:37Et je vais être un peu cynique, mais c'est exactement ce qui se passe en Chine aujourd'hui.
08:43Vous avez des problèmes de confiance partout.
08:46La politique monétaire chinoise est inefficace.
08:49Et on va y arriver aussi côté américain.
08:52Pourquoi ? Parce qu'on attaque la crédibilité de la FED.
08:54Et donc, en faisant ça, le risque même, ça va être que même si la FED baisse les taux
08:59pour essayer de soutenir l'économie, derrière, on ne va pas reprendre.
09:02Pourquoi ? Parce qu'on va avoir des questions sur l'investissement, sur l'emploi,
09:05sur la confiance, sur les achats, parce qu'il aura cassé tout le cadre.
09:09Et c'est ça, en fait, le risque qu'on a.
09:10Et la crédibilité de la FED, c'est le point supplémentaire sur l'ensemble de mesures
09:14qu'il est en train de mettre en place depuis son début de mois.
09:16De plus en plus d'économistes que je suis et depuis des mois sont attentifs
09:20au respect de l'État de droit, le respect de la rule of laws.
09:24C'est quelque chose d'important pour les investisseurs, écrivent des économistes.
09:29Un stratégiste, alors c'était à l'issue de la journée mémorable du 9 avril,
09:33stratégiste de Fundstrat à New York aux États-Unis,
09:37qui a un boule historique du marché, est venu faire son mea culpa en disant
09:42« Je me suis trompé. J'ai mal lu et j'ai mal compris ce que faisait Donald Trump.
09:46Il a cassé des covenants de clés du capitalisme. »
09:49C'est quand même des phrases lourdes, je trouve, pour des investisseurs
09:52et pour des gens qui sont en plus réputés être boule américain.
09:56Moi, je l'étais aussi.
09:57Oui, oui, oui.
09:58J'ai le sentiment d'il va y avoir de la régulation.
09:59Mais en fait, quand vous enlevez l'encre qui fixe les règles
10:02et que vous n'en avez plus, derrière, il n'y a plus de confiance.
10:05Et un problème avec le scénario actuel, c'est qu'on ne tient pas du tout compte
10:09de la bascule qu'il va y avoir sur l'ensemble du commerce.
10:12C'est-à-dire que la Chine va essayer de devenir cette puissance d'ancrage.
10:14C'est-à-dire que l'Europe en face va se comporter avec ça.
10:17Et donc, tous les flux que ça va entraîner, les chaînes de valeur,
10:20les problématiques d'inflation, la bascule des flux,
10:23fait qu'in fine, le scénario de marché est probablement trop optimiste
10:26si on continue d'aller dans ce scénario-là aujourd'hui.
10:29Et ça, ce n'est pas du tout craint.
10:30Florent, qu'est-ce que tout ça vous inspire ?
10:32Je trouve, d'un point de vue de comportement de marché,
10:34et c'est vous qui l'avez relevé, effectivement,
10:36j'ai hâte de vous entendre là-dessus, c'est quand même assez fascinant.
10:40On est passé d'un monde où il y a quelques mois,
10:42où il fallait détenir tout ce qui était américain
10:45et tout ce qui était le plus proche des Mag7,
10:47pour dire les choses très clairement sur les actions,
10:50à un monde aujourd'hui où tout ce qui est un actif américain
10:53est devenu quasiment radioactif pour les investisseurs.
10:55C'est impressionnant.
10:58Et la phase de baisse que connaissent les indices américains
11:03est très intéressante d'un point de vue comportemental
11:05parce qu'en fait, les grands mouvements de baisse,
11:09comme ça, ils se décomposent souvent en cinq vagues.
11:12Donc la première vague était deep-sic,
11:14on a eu une correction.
11:16La vague 3 de baisse est celle de tarifs douaniers,
11:21le cœur de la tornade des tarifs douaniers de Trump.
11:25On a eu le soulagement avec la pause des 90 jours.
11:28Et puis là, il me semble que j'ai un certain nombre d'éléments
11:31en termes de psychologie de marché
11:33qui me laissent penser qu'on est dans la vague terminale de baisse.
11:36Donc là, c'est une vague...
11:37C'est la grande capitulation.
11:38Alors, je vais t'expliquer.
11:42C'est une vague où en fait, les nouvelles sont extrêmement mauvaises.
11:46On n'a que des mauvaises nouvelles.
11:48C'est une vague où le positionnement et le sentiment des investisseurs
11:52est hyper pessimiste.
11:53Et c'est une vague où on a un sentiment de fin du monde.
11:56Quand on entend des remises en cause d'intestutions comme la Fed,
12:00quand on entend qu'il y a une perte de confiance
12:03qui est peut-être structurelle sur le dollar,
12:05que tu disais l'analyse de Founstrat,
12:08le stratégiste de Founstrat, voilà.
12:10Quand on a vraiment l'impression d'être dans Armageddon
12:13le moment où ils sont sur l'astéroïde,
12:15ils essayent de percer le trou mais qu'ils n'y arrivent pas,
12:18et qu'il y a la moitié de l'équipage qui meurt,
12:21on ne sait pas où est-ce qu'on va.
12:22Et donc, cet sentiment un petit peu fin du mondiste,
12:26c'est vraiment typique d'une vague 5.
12:29Et tu parlais de capitulation,
12:31alors je pense qu'il n'y a pas eu encore une vraie capitulation
12:33sur l'ensemble du marché.
12:34En revanche, il y a des endroits où ça commence à,
12:37je vois point de scie et là des endroits où il y a de la capitulation,
12:41notamment sur certains endroits de marché
12:43qui avaient très très bien résisté à la baisse.
12:45Il y a les services médicaux par exemple aux Etats-Unis,
12:48donc notamment une valeur emblématique comme United Health,
12:51première capitalisation du Dow Jones,
12:54assureur numéro 1 aux Etats-Unis,
12:56valeur extrêmement défensive,
12:58pas du tout exposée aux tarifs Trump,
13:00donc énormément résisté depuis le début de l'année.
13:02Ils ont publié la semaine dernière,
13:04c'est moins 30 en deux séances.
13:07Donc ça, ce n'est pas des comportements normaux,
13:09quand on se met à vendre des blue chips défensifs
13:13comme composants du Dow Jones,
13:15il y en a 30,
13:17alors sur la base de résultats qui n'étaient peut-être pas très bons,
13:19effectivement,
13:19mais un tiers de perte de capitalisation boursière,
13:23ça dit quelque chose de la psychologie des investisseurs.
13:25C'est que la capitulation...
13:27Ce n'est pas les fondamentaux du United Health
13:28qui ont changé comme ça en deux jours.
13:29Non, ça m'a mis 5-10% de baisse,
13:31mais moins trop.
13:31D'accord.
13:33Donc la bonne nouvelle,
13:34c'est qu'on est dans cette dernière vague de baisse.
13:37La mauvaise nouvelle,
13:38c'est que cette dernière vague de baisse,
13:41elle est très difficile à apprécier,
13:43dans le sens où on ne connaît pas sa temporalité,
13:45on ne connaît pas sa profondeur.
13:46Et je n'ai pas assez d'éléments pour dire
13:50qu'un point bas est en train de se former.
13:52Pour qu'il y ait un point bas,
13:53il faudrait qu'il y ait certaines divergences qui apparaissent,
13:57du style, tu sais que j'aime bien regarder
13:58le taux de participation au marché,
14:01il faudrait que les indices continuent de baisser,
14:02le taux de participation,
14:03donc le nombre de titres qui se comportent bien,
14:05commence à montrer des signes d'inflexion.
14:08Il y a des petites choses,
14:09mais c'est encore trop faiblard.
14:12Il faudrait qu'il y ait un changement de comportement majeur.
14:15Alors j'aime bien l'exemple,
14:16on avait vécu ensemble le retournement du Nasdaq en 2022
14:20sur le bear market,
14:21où il y a eu cette séance,
14:23il y avait un tournant psychologique très fort,
14:25où l'inflation avait été publiée au-dessus des attentes,
14:29les marchés avaient démarré en très forte baisse,
14:32ce renversement,
14:33et c'était vraiment un tournant psychologique très fort,
14:35ou alors il faut qu'il y ait une news,
14:36mais qui soit absolument majeure,
14:38du même acabit que le vaccin de Pfizer pour le Covid,
14:41ou la Fed qui baisse ses taux à zéro en 2009.
14:45Mais pour revenir à la question de la confiance,
14:46alors je comprends,
14:47donc ça c'est une petite dédicace aux éliotistes,
14:50c'est ça ?
14:50Exactement.
14:51Avec les cinq vagues,
14:53Florent,
14:53mais je reviens à la question de la confiance.
14:55Imaginons,
14:56Trump dit,
14:56allez,
14:57j'arrête tout,
14:58j'oublie les tarifs,
14:59etc.
15:00Enfin,
15:00est-ce que le marché reviendrait à la normale ?
15:02Est-ce que le dollar,
15:05les obligations souveraines américaines,
15:06les actions américaines retrouveraient le statut qu'elles avaient antérieurement ?
15:11Il y a une période de flou,
15:13c'est certain,
15:14et avant que la confiance ne se regagne pas comme ça,
15:18donc il va y avoir une période de flou qui est certaine.
15:20Maintenant,
15:21je rejoins un petit peu ce que disait Jeanne,
15:23dans le sens où les entreprises qui sont très innovantes,
15:28qui ont des capacités d'adaptation qui sont majeures,
15:31elles sont beaucoup aux Etats-Unis.
15:33Moi, je gère un fonds d'intelligence artificielle robotique,
15:36trouver des idées en Europe,
15:38c'est quand même assez compliqué.
15:39J'entends.
15:40Voilà.
15:40J'entends.
15:41Non, mais on ne détruit pas tout comme ça aux Etats-Unis en 90 jours.
15:45La gouvernance des Etats-Unis,
15:46ce n'est pas la gouvernance de corporates américains.
15:49C'est deux choses qui sont quand même assez différentes.
15:51J'entends.
15:51On distingue Trump de la cote américaine,
15:54même si aujourd'hui,
15:55tous les actifs américains souffrent sous les 90 premiers jours de Trump.
15:58Jeanne, pardon.
15:59Non, je suis totalement d'accord sur l'aspect qu'il y a,
16:02il y a des entreprises et qu'elles ont eu de voix,
16:04qu'on commence à les entendre, d'ailleurs, aux Etats-Unis comme ici.
16:09Mais je dirais que même en plus,
16:10on a vu jusqu'à présent, entre guillemets,
16:13la partie la plus difficile de la politique...
16:18De Trump ?
16:19... qu'il veut mettre en œuvre, oui.
16:21On a vu le pire ?
16:21Le pire, je ne sais pas comment le caractériser,
16:25si ce n'est qu'il y a quelque chose d'autre qui ferait baisser plus le marché.
16:30C'est possible.
16:30C'est pour ça que le pire...
16:31J'entends.
16:32Mais on a vu la partie dans laquelle il veut,
16:35et en ce moment, on le disait, c'est en discussion,
16:38c'est le budget.
16:39Dans le budget, il veut prendre des mesures,
16:41il l'a déjà annoncé.
16:42Il y a des mesures dont j'ai entendu parler,
16:45qui semblent être des rumeurs comme ça à Washington,
16:48ce sont des mesures dans lesquelles
16:49il permettrait l'amortissement immédiat ou quasi-immédiat
16:55sur les investissements de structures manufacturières.
16:59Normalement, les investissements de structures,
17:01ça s'amortisse sur 39.
17:03D'accord.
17:0439.
17:04D'accord.
17:05Ce n'est pas l'investissement sur un ordi
17:07qui est amortissable en 4 ans ou 5 ans,
17:11et vous dites amortissement total maintenant.
17:14Là, ce serait la possibilité de faire un amortissement complet,
17:17alors peut-être pas en un an,
17:18mais enfin en tout cas...
17:19Sur une période bien réduite.
17:20Ça, ça veut dire possiblement un boost littéralement très très fort
17:25en termes d'investissement.
17:27C'est bien sûr pour favoriser le reshoring.
17:30Et ça, ce serait une vraie incitation tangible
17:32pour des entreprises dont on nous dit
17:34qu'elles ont passé des années, voire des décennies,
17:37voire des siècles pour certaines d'entre elles,
17:39à construire des chaînes de valeur
17:40sur l'ensemble du globe.
17:42Ça, ce serait incitatif pour se dire
17:44« Allez, je vais redédoubler mes chaînes de valeur
17:46pour en mettre en double aux Etats-Unis. »
17:48Déjà, c'est un mouvement qui a commencé déjà depuis un petit moment.
17:51On avait vu quand même un certain nombre d'entreprises
17:53se délocaliser, y compris d'Europe vers les Etats-Unis,
17:57parce qu'il y avait une plus grande visibilité sur l'énergie
18:00qu'on n'avait pas en Europe.
18:02C'est vrai.
18:03Réglementation pareillement.
18:04Donc ça, ce sont quand même des éléments
18:06qui peuvent être favorables,
18:07mais à plus long terme.
18:08Or, toute cette politique,
18:10tout le volant de cette politique
18:11ne peut pas être mis en œuvre
18:12s'il ne dégage pas de marge de manœuvre budgétaire.
18:15Alors, je crois qu'il y a une énorme déception sur le Doge
18:18qui ne donne pas grand-chose.
18:21Alors, quand on regardait les chiffres,
18:22on se doutait bien qu'il n'y aurait pas 1 000 milliards
18:24ou 2 000 milliards d'économies.
18:26Enfin, c'était assez simple en réalité.
18:28Mais bon, ils avaient...
18:30Voilà, donc ça, ça ne donne pas grand-chose.
18:32Ensuite, vu que l'activité va baisser,
18:34ça veut dire moins de recettes fiscales,
18:38ce qui veut dire que...
18:39Ce n'est pas génial non plus.
18:41Donc, il faut qu'ils trouvent des marges de manœuvre.
18:43Et les tarifs ne rapporteront pas autant que...
18:45Les tarifs n'y sont pas encore.
18:47Puisque là, il y a un délai de 90 jours.
18:49Donc, on va peut-être les mettre...
18:51On est en quoi ?
18:51Mars, ça veut dire...
18:52Enfin, il y a 10% pour tout le monde, en attendant.
18:54Enfin, il y a quand même des barrières tarifaires, là, aujourd'hui.
18:57Oui, sauf que déjà, sur la partie nord-américaine, c'était...
19:01Une bonne partie est exemptée ?
19:02Ce qui est une grosse partie du commerce américain.
19:06Donc, tout ce qui est Mexique-Canada est exempté des 10%.
19:09J'entends.
19:10Donc, après...
19:11Bon, on va voir.
19:12Après, il a exempté aussi les semi-conducteurs, il me semble.
19:14Le temps pharma.
19:15La pharma.
19:16Le bois, le cuivre, les métaux.
19:18Enfin, exemptés dans la perspective, voilà,
19:21de résultats d'enquête qui pourraient aboutir à des tarifs.
19:24Mais, en ce moment, ce n'est pas en place.
19:26D'accord.
19:26Donc, il n'y a pas 9 milliards par jour qui ruissellent aux Etats-Unis ?
19:29Non.
19:29Donc, ça veut dire qu'il y a...
19:31Et la problématique est qu'à l'instar, d'ailleurs, de l'Europe,
19:35parce que là-dessus, on n'a pas beaucoup de leçons à donner,
19:39ou de la Chine, pour le coup,
19:41on tourne tous sur des déficits qui sont aux alentours de 6-7% du PIB.
19:46Je crois qu'entre la Chine et les Etats-Unis,
19:48ils se bagarrent entre 7 et 8% chacun.
19:50Donc, déficits colossaux.
19:52Et donc, il sait qu'il ne pourra pas passer un budget
19:56parce que les Républicains ne voudront pas.
19:58Non.
19:58Dans lequel, il y aurait une accentuation du déficit.
20:00Donc, il faut trouver, et vite,
20:04d'où cette impression de chaos et de précipitation,
20:07parce qu'il faut trouver vite des marges de manœuvre budgétaire,
20:11parce que, normalement, le processus bipartisan a commencé
20:14et le vote du budget va être assez rapide.
20:17Ils projettent, semble-t-il,
20:19de l'avoir bouclé avant la pause estivale.
20:24Oui, c'est ce que j'ai vu d'ici cet été.
20:25Oui, c'est ça.
20:26Oui, oui.
20:27C'est très, très rapide.
20:28Très court.
20:29Et donc, de ça dépend la meilleure phase de Trump.
20:33C'est-à-dire que là, on voit le mauvais côté,
20:35mais de ce que vous décrivez là...
20:37C'est pour ça que je rejoins ce qu'il dit à l'instant.
20:39C'est-à-dire qu'on a toujours le sentiment,
20:42parce qu'on a zéro visibilité.
20:44Quand il n'y a pas de visibilité,
20:45le marché, ça a toujours été comme ça.
20:48On voit forcément le pire des possibles.
20:51Oui, oui.
20:52Oui, comme ça.
20:53J'ai mis en usée, est-ce que c'est le possible des pires ?
20:55Mais le pire des possibles.
20:57Et en fait, c'est pas...
20:59C'est pas...
21:00C'est pas gravé dans le marbre.
21:01Non, non, mais bien sûr.
21:02C'est pas obligatoire.
21:04Je crois qu'il y a vraiment...
21:04Le pire n'est jamais certain.
21:06Le pire n'est jamais certain,
21:07mais c'est surtout qu'il y avait quand même,
21:10et ça, c'est peut-être le seul élément rassurant,
21:12tout ce qui est fait en ce moment
21:14avait été quand même annoncé.
21:16Oui.
21:18Est-ce que c'est rassurant ?
21:19Ben non, mais dans le sens que...
21:22On ne peut pas dire qu'on est surpris.
21:26Oui.
21:26Ben, je sais pas.
21:28Les programmes étaient très clairs.
21:30D'accord.
21:31Bon.
21:32La méthode...
21:33On va se tromper sur la façon de faire.
21:34La méthode de calcul des tarifs,
21:35des petites choses comme ça, quand même,
21:36qui n'étaient pas tout à fait explicites
21:38dans les programmes,
21:39qu'on puisse circuler,
21:40que ce soit l'Héritage Foundation ou d'autres.
21:42Non, je suis d'accord,
21:43mais en même temps,
21:44la méthode de calcul des tarifs,
21:45ensuite, c'est juste une...
21:46J'allais dire,
21:47c'est une ouverture avant discussion, quoi.
21:48Enfin, elle n'a pas beaucoup de...
21:50De sens.
21:51Oui, non, ça, je crois que...
21:52J'ai même vu des estimations,
21:54alors je n'ai pas pu les corroborer,
21:56puisque le tarif ne s'applique
21:57qu'à la partie non-US des produits.
22:01Or, sur l'Europe,
22:03certains ont fait des calculs.
22:04J'entends.
22:04Le tarif qui est à 20% sur l'Europe,
22:07il passe à 10...
22:08D'accord.
22:08Si vous prenez...
22:09Des composants US.
22:11Ah non, que...
22:11Oui, c'est ça.
22:12Que la partie non-US.
22:12C'est-à-dire que ça divise par deux.
22:14Oui, je comprends.
22:14Oui, oui, oui.
22:15Il y a beaucoup de flou, quand même.
22:16C'est un cadre encore très mouvement,
22:18le cadre tarifaire.
22:19Vos remarques par rapport à ça, Léa,
22:21et puis je voulais qu'on dise un mot quand même.
22:23Alors là, pour le coup d'une bataille
22:25qui est en cours depuis des années
22:28avant même Trump,
22:29face à la Chine,
22:31on a l'impression que les choses
22:32non seulement se durcissent,
22:33mais s'accélèrent.
22:34Est-ce qu'on va vers...
22:36Est-ce que l'objectif est un découplage total
22:39ou en tout cas le plus important possible
22:43entre ces deux zones économiques ?
22:45Et si oui, qu'est-ce que ça donne ?
22:47Alors, l'objectif n'est pas le découplage,
22:50c'est qui gagne cette rivalité stratégique
22:53sinon américaine.
22:53C'est très clair, depuis des années...
22:55On se coupe de tout.
22:56C'est un embargo total sur tout, quoi.
22:58Alors, il y a plusieurs choses.
22:59Il y a deux actualités qui sont importantes
23:02et qui n'ont pas été un peu vues
23:04dans notre vague d'actualités.
23:05La première, c'est quand même
23:06que la Chine a répondu à ses effets tarifaires
23:08en mentionnant que pour les partenaires
23:11de la Chine, il fallait faire attention
23:12à ce qu'il n'y ait pas de mesures coercitives
23:14envers la Chine avec les deals signés avec les US.
23:16Et le deuxième, c'est la réponse américaine.
23:18Donc, on est noyé dans les tarifs.
23:20Il y a eu une hausse spectaculaire
23:21des tarifs associés sur les panneaux solaires
23:23sur tous les pays de la zone sud-asiatique,
23:26le Cambodge, la Thaïlande.
23:27Alors, avec des tarifs démentiels
23:28à plus de 3000%, plus de 300%,
23:31qui est fait par l'administration américaine
23:33pour contrer en partie la capacité
23:35qu'aurait la Chine à passer par le TIT.
23:36Bien sûr.
23:37Et donc, quand on pose ces deux points de vue-là,
23:41un, je pense que la guerre commerciale
23:43est très forte, que c'est encore une fois
23:44le point d'ancrage par rapport à ce que fait Trump.
23:46On voit bien que c'est vraiment la Chine le problème.
23:49Comment ça fonctionne et qu'est-ce qu'on peut voir
23:51pour le scénario ?
23:52Un, moi j'ai arrêté de faire les calculs
23:54au-delà de 100%, qu'on soit à 100%, 150%,
23:56peu importe.
23:58C'est un embargo, quoi.
23:59C'est important aussi pour l'inflation américaine.
24:01C'est-à-dire que quand vous faites la part
24:03des biens qui sont importés, par quel type de biens,
24:06quels sont les principaux distributeurs,
24:09peu importe ce que vous faites,
24:10même si on baisse à 10% sur l'ensemble du reste du monde,
24:13le fait que la Chine soit à un niveau substantiel
24:14est significatif pour l'inflation américaine.
24:17L'un ne compense pas l'autre.
24:18Entre plus 1,5 à plus 2 sur l'inflation américaine.
24:21Ça ne change pas les perspectives.
24:21Ça ne change absolument pas les perspectives.
24:23C'est cette problématique avec la Chine.
24:26Quand on regarde la croissance chinoise aujourd'hui,
24:28alors le parti fixe la croissance à 5% cette année,
24:31s'il y avait une marche arrière
24:33qui serait plutôt dans le cadre des négociations initiales
24:36où on a quelque chose entre 20 et 30% de tarifs sur la Chine
24:39qui ne seraient plus marqués que les autres
24:40mais dans un niveau plus agréable,
24:42c'est plutôt des perspectives de croissance
24:43de l'ordre de 4% cette année pour l'économie chinoise.
24:47Il faut voir que dans les composantes du PIB chinois,
24:49une grosse partie est liée au commerce extérieur
24:51depuis ces dernières années.
24:52Ça a permis de compenser la faiblesse
24:54de la consommation et de l'investissement.
24:55Donc quand on soustrait cette partie-là,
24:58déjà de fait, suivant le niveau où sont mis les tarifs,
25:00mais ça nous ramène à une croissance chinoise qui est faible.
25:02La Chine a des marges de manœuvre budgétaires,
25:05elle a le contrôle du change,
25:06elle a des questions politiques,
25:07à cela près que sa politique monétaire ne fonctionne plus
25:09et donc il faut relancer la confiance.
25:11C'est ce qu'ils font avec leur plan,
25:12ils sont en train de les accélérer.
25:14Le problème qu'on a, c'est un peu l'effet de second tour,
25:16c'est-à-dire si on n'est pas juste dans une guerre commerciale
25:21à la première guerre commerciale, à 2018-2019,
25:24mais qu'on rentre vraiment dans une vraie guerre commerciale
25:26avec une bascule, les réroutages, les mesures ou autres,
25:29là, c'est des scénarios de croissance chinoise.
25:31Alors, pour l'instant, c'est du calcul de point de cas,
25:33mais on prend le poids du commerce extérieur dans le PIB chinois,
25:36on y soustrait les Américains en disant qu'on ferme totalement le marché.
25:40Là, c'est des scénarios de croissance chine,
25:41on a un PIB chinois autour de 3%.
25:44D'accord.
25:44Un PIB chinois autour de 3%.
25:46C'est la récession.
25:46Ce n'est pas un scénario USA 1 et ce n'est pas un scénario zone euro à 0,5%.
25:51Et c'est là où, en fait, le point de bascule...
25:53Alors, je vais faire le Roubini de la bande aujourd'hui,
25:55mais globalement, je pense qu'on essaye de s'auto-convaincre,
26:01moi, la première, que ça va bien se passer,
26:04que Trump va effectivement faire une marche arrière,
26:07qu'il va y avoir des solutions.
26:09La manière dont la Chine est en train de se positionner aujourd'hui,
26:11dans sa manière stratégique, dans sa manière de parler,
26:15montre qu'on a déjà passé un stade
26:16et qu'on voit bien les discussions.
26:20Aujourd'hui, quand vous avez...
26:21Ça revient à la discussion de la confiance.
26:23Quand vous avez une puissance américaine
26:25sur laquelle vous ne pouvez plus faire confiance,
26:27que la Chine sait que c'est son moment à elle
26:29pour essayer, en fait, de tirer avantage de cette rivalité
26:33si nos stratégies, qui devaient, en gros, durer 10 à 20 années,
26:37qu'elle utilise ce push-là,
26:39que l'Europe est en train de réfléchir à la Chine,
26:41que l'Espagne se positionne par rapport à la Chine,
26:43c'est l'accélération des scénarios de fragmentation.
26:47Les conclusions de ces scénarios-là,
26:48c'est de dire qu'il y a deux zones qui sont lésées,
26:50l'Europe et les États-Unis, la Chine, le reste du monde.
26:53Non, au contraire.
26:55Et donc, c'est un peu ça, ce scénario.
26:56C'est qu'en fait, on est dans une transformation du commerce
26:59que Trump est en train d'accélérer.
27:01Et c'est nous qui avons le plus à perdre.
27:02Et c'est nous qui avons le plus à perdre.
27:03L'Occident.
27:04Les Américains et les Européens.
27:06C'est la question.
27:07Est-ce qu'on se considère aujourd'hui dans un bloc avec les Américains ?
27:09C'est le vrai sujet.
27:10Mais globalement, ce scénario-là...
27:13Et c'est pour ça aussi que Trump...
27:14La Chine demande un renforcement des relations avec l'Union européenne au plus haut niveau.
27:18Et elle a un intérêt.
27:19Oui, mais il faut qu'on oublie quelque chose quand même.
27:21Il faut qu'on oublie la Chine.
27:23Là, on fait un tableau magnifique.
27:26Elle n'a pas de marge de manœuvre budgétaire.
27:28Elle a un déficit colossal, déjà.
27:31Et ensuite, on a oublié qu'il y a encore quelques mois,
27:34tout d'un coup, ils ont changé toutes les réglementations,
27:36si vous vous souvenez bien.
27:37Et tout le monde s'était dit, oulala, la Chine n'est plus investissable.
27:41Oui, oui, bien sûr.
27:42Alors là, tout d'un coup, on a oublié que c'est un régime qui est...
27:46Et donc, je ne suis pas convaincue que les Européens ou le reste du monde...
27:49J'entends.
27:50...veuillent absolument courtiser maintenant la Russie et la Chine.
27:55La Russie, ils ont compris.
27:57La Chine, je ne crois pas du tout que ça irait dans ce sens-là.
28:00Et surtout pas en termes de commerce mondial, parce que si on regarde ce qui s'est passé
28:04depuis que la Chine est rentrée dans l'OMC, je ne suis pas sûre que ce soit à l'avantage de tout le monde.
28:09Non, non, mais c'est sûr.
28:09On y a gagné en termes de désinflation.
28:12C'est une réalité.
28:14La vraie problématique, c'est que la désinflation, elle a eu, à la fin,
28:19elle a commencé à avoir des inconvénients avec les risques déflationnistes.
28:24Et qu'on n'a pas su gérer ça, les gouvernants n'ont pas su gérer, etc.
28:28Mais je ne suis pas totalement convaincue de l'idée que tout d'un coup, la Chine va être l'objet de la confiance des Européens.
28:34Pour l'Europe, c'est l'enclume et le marteau.
28:37En fait, vous avez trois cadrages de scénario aujourd'hui.
28:39C'est qu'en fait, les Etats-Unis ont une question sur la confiance qu'on a.
28:44La Chine voit son rôle pour devenir une puissance d'ancrage, à tort ou à raison.
28:48Et l'Europe face à ça, qu'est-ce qu'elle fait ?
28:50Il faudrait que ce soit l'Europe la puissance d'ancrage.
28:52Mais l'Europe n'a pas la capacité politique de cette puissance d'ancrage.
28:55Et sur les questions budgétaires de la Chine, encore une fois, il y a un problème d'endettement des collectivités,
29:00il y a un problème d'endettement des banques locales, il y a un problème d'endettement.
29:02Le déficit aujourd'hui pour la Chine fait par le parti, c'est 4% cette année.
29:07Il y a des marges de manœuvre énormes.
29:09Le problème chinois, c'est un problème de système bancaire et un problème d'endettement des collectivités et des niveaux autonomes.
29:15Elle fera ce qu'elle a envie et elle a l'effet change.
29:17Il y a pas mal d'orbilan quand même aussi.
29:18On est à 8% de déficit à peu près à calculer.
29:21Mais elle ira et elle a la capacité à le faire.
29:22Comme les Etats-Unis, ça ne change rien.
29:25Avec le statut de valeur refuge du dollar et des taux longs.
29:28Le mouvement de janvier de cette hausse de primes de terre, moi c'est ça qui me fait peur.
29:33C'est que la hausse de primes de terre a été normalisée à zéro.
29:36Je ne dis pas que les Etats-Unis n'ont pas...
29:38Visiblement, le rôle de valeur refuge a été remis en cause.
29:41Je ne pense pas une seconde que la Chine va devenir valeur refuge du Cédric.
29:44Un valeur refuge.
29:46Mais elle va chercher à se positionner.
29:48Elle peut le devenir pour certains de ses partenaires locaux dans une zone...
29:52Mais ça, ça fait longtemps que c'est le cas.
29:54Je suis d'accord, mais c'est un statut qui peut se renforcer.
29:57Oui, je ne sais pas.
29:59À mon avis, il est très bien ancré en réalité comme statut déjà.
30:02Bon, parmi toutes ces considérations, que vont nous dire les entreprises, Florent ?
30:06Puisque là, on entre dans le dur de la période de publication de résultats.
30:11Il y a déjà eu quelques objets intéressants de ce point de vue-là.
30:16Qu'est-ce qu'on attend des entreprises dans ce contexte ?
30:19C'est un peu tôt pour tirer un enseignement des publications.
30:24C'est vrai qu'il y a eu quelques enseignements intéressants la semaine dernière.
30:28Alors, ce qui est intéressant, c'est...
30:29Là, l'enjeu, c'est de maintenir sa guidance.
30:32On est vraiment sur...
30:35L'enjeu, il est là.
30:36Donc, déjà, c'est ça.
30:37Donc, le jeu, ça va compter les entreprises qui sont capables de confirmer...
30:41Enfin, de maintenir des perspectives.
30:43Je ne dis pas de les confirmer ou de les abaisser ou de les rehausser,
30:46mais de simplement donner des perspectives, quoi.
30:48Ceux qui les maintiennent, qui ne touchent pas leur guidance, c'est déjà...
30:51Là, c'est le top du top.
30:52Voilà, c'est le top.
30:54Après, sur le discours des entreprises,
30:56la semaine dernière, il y avait ASML, TSMC.
30:59Ils ne savent pas plus que nous.
31:01Non.
31:01Ils sont dans le flou.
31:02Ils disent qu'on ne spécule pas sur la politique tarifaire de Trump.
31:05Donc, là, il n'y a pas de...
31:07Il n'y aura pas dans le discours...
31:09On ne va pas apprendre des choses dans le discours sur la politique tarifaire de Trump.
31:13Ils seront dans le flou.
31:14Non, mais on va apprendre combien ça peut coûter pour une entreprise exposée à des tarifs.
31:19C'est difficile à pricer, même pour les entreprises.
31:22Parce que, de toute façon, ils ne peuvent pas raisonner, toute chose étant égale par ailleurs.
31:26C'est tellement volatil.
31:27En un tweet, il peut effacer tout ce qu'il a fait.
31:29Donc, c'est très difficile.
31:31Après, il y a une manière de se positionner en amont.
31:35Et nous, c'est vrai qu'on a identifié vraiment trois catégories d'entreprises
31:39qu'on a favorisées jusque-là.
31:40La première, évidemment, c'est celles qui sont un petit peu isolées des politiques tarifaires.
31:46Soit parce qu'elles sont tournées vers leur économie domestique.
31:49Soit parce que leur cœur business fait qu'elles ne sont pas exposées aux tarifs.
31:53Dans la tech, il y a Netflix, par exemple.
31:55Voilà, ça traverse complètement.
31:57C'est quasi au plus haut historique.
31:58Ça fait partie d'entreprises qu'on avait identifiées.
32:00Ça veut dire...
32:01Non, mais intéressant, Netflix.
32:02Parce qu'on parle beaucoup de la balance des biens déficitaires des États-Unis vis-à-vis de l'Europe.
32:09Mais ils sont très exécutaires en termes de services.
32:11Et Netflix est l'emblème.
32:12C'est-à-dire que l'Europe fait les fins de mois du trésor américain.
32:16Et en échange, on est devant Netflix le soir quand on rentre du boulot.
32:21Il n'y a pas de crainte.
32:22Il y en a toujours, mais si vous avez toujours peur, vous ne faites rien.
32:28Mais effectivement, oui, ça fait partie des risques qu'on a identifiés dans le scénario d'investissement.
32:32Si ça se matérialise, on avisera.
32:35La deuxième catégorie, c'est qu'il me semble qu'il faille rester quand même positionné sur des acteurs globaux,
32:41exposés à des chaînes d'approvisionnement mondiales.
32:45Mais on va aller chercher des entreprises de grande qualité qui ont des très fortes barrières à l'entrée.
32:49Et donc du pricing power, qui vont être capables de traverser la période soit en répercutant les hausses de prix,
32:55soit parce qu'ils ont ce pricing power pour être capables de le faire.
33:00Et la troisième catégorie, c'est les entreprises qui sont très agiles, qui ont des facilités de production.
33:05Alors on a parlé du Mexique, du Canada, l'Amérique latine, ça peut être intéressant.
33:09Ou des entreprises qui aident les autres à optimiser leur chaîne logistique.
33:13Je prends souvent l'exemple de Palantir qui a aidé Heineken à réorganiser une partie de sa chaîne logistique.
33:22Et le boss de la logistique d'Heineken disait qu'il a été bluffé parce qu'étant donné la complexité de la chose,
33:29en trois mois, ils avaient réussi un travail qui met d'habitude trois ans à se faire.
33:32Palantir, c'est le raffinage de données.
33:34Exactement, tout à fait.
33:35Donc voilà, on est plutôt sur ces entreprises-là.
33:39Après, il y a des thématiques qu'on aime bien.
33:41Et dans toutes les zones, il y a des choses intéressantes.
33:43La tech chinoise est très intéressante.
33:45Il y a eu un renversement complet du gouvernement chinois sur la tech.
33:48Ah oui, ça y est, on a vu Jack Ma de retour.
33:51Alibaba, c'est un titre qu'on continue de porter.
33:55En Europe, il y a la défense qui est très intéressante.
33:57Et d'ailleurs, toute la thématique de sécurité, on aime beaucoup ce sous-thème-là.
34:01Pour un investisseur moyen-long terme, ce n'est pas surjoué encore ce thème-là ?
34:06Il y a une visibilité qui est trop forte en fait.
34:08Ça a rendu un peu d'ailleurs, le thème a un peu rendu.
34:11Mais c'est vrai qu'on a vu Rye Metal à 62 PE.
34:13On se demandait quand même si on n'était pas allé un peu loin.
34:15Peut-être que Rye Metal, on va un peu loin, je vous l'accorde.
34:18Mais il y a une visibilité qui est tellement forte.
34:20Et puis c'est un thème plus large que simplement Rye Metal.
34:22Voilà, tout à fait.
34:23Et puis vous cherchez des poches de visibilité.
34:26Et dans la défense et la sécurité, il y a la sécurité physique des personnes
34:30qui pour l'instant n'est pas touchée par les coupes budgétaires Trump par exemple.
34:34Il y a la cybersécurité qui est très intéressante
34:37puisque la guerre technologique avec DeepSync s'est complètement réaccélérée avec les Chinois.
34:41Donc ça c'est des poches intéressantes.
34:43Et on continue de pousser notre thématique d'IA et de robotique
34:46parce qu'étant donné la démondialisation qui est en cours
34:49et la démographie qui est la situation dans laquelle on connaît dans les pays occidentaux,
34:55nécessairement les entreprises vont continuer à faire des gains de productivité
35:01et de continuer à automatiser.
35:02Malgré l'incertitude Trump, y compris sur des domaines technologiques très importants,
35:07vous dites que c'est quand même des thématiques qui offrent encore de la visibilité tout simplement.
35:10Oui, parce que c'est l'issue qu'on trouve à cette guerre tarifaire
35:12parce que je pense qu'il a fait avaler à tout le monde que les 10% c'était le cas de base.
35:16Et donc même s'il ne revient que sur 10%, les entreprises pour conserver un niveau de marge important
35:25et un buffer, il faut qu'elles continuent de faire des gains de productivité et d'automatiser.
35:33Bon, sur ces marchés, comment on se positionne effectivement ?
35:36Est-ce qu'il y a quand même des traînes, des tendances ?
35:38Alors déjà la défiance vis-à-vis des actifs américains, comment est-ce qu'on se positionne par rapport à ça ?
35:44On a eu plutôt tendance, parce qu'il n'y avait pas de visibilité, enfin on est d'accord,
35:49plutôt tendance à diminuer les budgets de risque globalement
35:55et à préférer avoir des positionnements tactiques quand on les trouve possibles,
36:01notamment sur la base d'analyse technique.
36:03Parce que ce sont des marchés qui sont plus des marchés de sentiments, des marchés techniques
36:07et tant que ça ne se stabilise pas un peu, il nous semble très difficile de faire des paris tendanciels.
36:15sur, voilà, très compliqué d'avoir une vision, bon on sent bien qu'on va avoir un peu moins de croissance,
36:22sur l'inflation ça se discute parce qu'on va avoir un choc de prix,
36:26mais un choc de prix peut être inflationniste ou déflationniste derrière,
36:30donc ça reste une question que la Fed a ouverte d'ailleurs, elle a dit l'un ou l'autre,
36:34on ne sait pas de quoi, qui sera la tête de la Fed demain, enfin bref.
36:40Donc dans ce cas-là pour nous, budget de risque limité, sauf il y a des poches qui nous semblent intéressantes
36:44parce qu'il y a la possibilité de capter un rendement qu'on trouve relativement intéressant.
36:49Donc on peut penser au high yield qu'on trouvait très cher à un moment,
36:53qui s'est quand même, voilà, un petit peu écarté et qui offre, on peut capter une rentabilité à 3 ans du plus tôt du court terme.
37:03– Et c'est un rendement qui couvre quand même une partie des risques potentiels encore à venir de ce point de vue-là.
37:08– En tout cas en tant qu'Européen en plus, ce qui est quand même relativement intéressant par rapport à la baisse des taux.
37:13Après sur le pari US-États-Unis, nous on a aujourd'hui, enfin depuis un petit moment,
37:18on a neutralisé le call entre les deux, sauf effectivement sur des paris techniques, presque.
37:27– Oui, oui, j'entends, oui, bien sûr.
37:29– Pareil sur le dollar, on a été long à un moment sur l'euro,
37:33puis on s'est dit non, voilà.
37:34– Oui, non mais il y a plein d'indicateurs de survente partout, le dollar doit être survendu comme jamais.
37:39Je voyais qu'en avril, la baisse de Wall Street par rapport au reste du monde,
37:43je prends le MSCI ex-US, bien sûr, a jamais été aussi importante.
37:49– Et si vous prenez le MSCI Chine par rapport au CSI 300, c'est le grand écart, vraiment.
37:55Donc voilà, il nous semble que là, les fondamentaux, la stratégie est un peu plus compliquée,
38:02il vaut mieux être relativement peu risquée en termes stratégiques, mais savoir prendre des paris plus tactiques.
38:07– Oui, bon, peu de prise de risque à court terme, vous êtes d'accord avec cette idée ?
38:11Sur le plan des marchés de l'investissement, on le serait à moins ?
38:14– Le point, je note le fait qu'on ne peut plus raisonner toute chose égale par ailleurs,
38:20donc quand on n'a pas un peu plus de situation, oui, je pense que c'est le premier point.
38:24– Oui, mais quand on réfléchit, bon, c'est vous qui avez déroulé le scénario,
38:27effectivement, de crise institutionnelle, si je peux l'appeler comme ça, aux États-Unis.
38:32– En fait, le risque à être humétrique, c'est ça aujourd'hui qu'il faut tenir.
38:34On peut très bien monter des scénarios, Trump paraît de tout,
38:37Powell reprend, on a de la dérégulation, on a une révolution dans la tech,
38:41on fait des dépenses fiscales, on peut rebasculer sur ce scénario-là.
38:45La question, c'est que quand on a pénalisé longtemps la confiance
38:47et qu'on ne peut plus faire confiance aux institutions,
38:49je pense que le scénario de stagflation est probablement le meilleur des scénarios qui arrivent,
38:54avec un risque qui sera probablement le scénario asymétrique.
38:58Et la crainte toujours, c'est de dire attention,
39:00les chaînes de valeur, tarifs et le commerce mondial, ça, on l'a oublié,
39:04c'est pas du tout encore dans les scénarios.
39:07– Oui, bon, on va suivre ça, on arrive quasiment aux 100 jours de Trump,
39:11ce sera techniquement, je crois, la semaine prochaine, 29 ou 30 avril,
39:15tout dépend comment est-ce qu'on compte depuis son installation à la Maison Blanche le 20 janvier dernier.
39:19Merci à vous trois d'avoir été les invités de Planète Marché ce soir,
39:21Léa Dauphin, Stack Economics, Jeanne Asraf-Biton, BFTIM et Florent Martini,
39:26Trecento Asset Management.
39:27– Sous-titrage Société Radio-Canada –