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Mercredi 15 février à 22h50 sera diffusé sur France 2 "La révolte des vieux", un film co-réalisé par Laure Adler et Jérémy Frey. L'adaptation de "La voyageuse de nuit", un essai sur la vieillesse qu'avait publié la journaliste en 2020.

Retrouvez "L'invité de Sonia Devillers" sur
https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-9h10

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Transcription
00:00 Il est 9h09, Sonia De Villers, votre invitée à 72 ans.
00:03 Bonjour Laure Adler ! C'est une drôle de manière de présenter les gens !
00:07 C'est vous qui me l'avez écrite !
00:09 Mais il le sait Nicolas, j'ai 72 ans !
00:13 J'en ai 51 !
00:15 Laure, d'où vient cette idée que la vieillesse serait un pays ? D'où vient l'idée du pays des vieux ?
00:21 Ça vient de Simone de Beauvoir qui il y a 50 ans a écrit un livre magnifique qui s'intitule
00:27 tout simplement "La vieillesse" où elle avait cartographié absolument tous les paramètres
00:34 pour essayer d'identifier ce qui apparaissait comme un scandale à l'époque, il y a 50 ans,
00:41 c'est-à-dire un pays avec ses règles, avec ses habitudes, avec ses codes, avec ses rides,
00:46 un pays où on était enfermé, un pays dans le pays,
00:52 un pays, la vieillesse, dans ce pays qui s'appelait la France et qui s'appelle encore toujours la France,
00:57 et la vieillesse est encore un pays où on est stigmatisé, où on est marginalisé, où on est invisibilisé,
01:04 moins on voit de vieux, mieux on se porte, paraît-il.
01:07 Peut-on habiter plusieurs pays à la fois ?
01:10 Peut-on habiter le pays des vieux et peut-on habiter le pays de l'enfance ?
01:16 On dit souvent, et ça sous toutes les latitudes et dans plusieurs civilisations,
01:21 que plus on vieillit, plus on s'approche de nouveau du cycle de l'enfance.
01:27 Et je crois que c'est vrai.
01:28 Je crois que c'est vrai dans la mesure où il y a une forme d'abandon,
01:34 une forme d'abandon qui est significative et synonyme pour moi d'une forme d'émerveillement
01:40 que les enfants ont et possèdent naturellement,
01:43 et qu'en vieillissant, nous les vieux, on a de plus en plus,
01:47 c'est-à-dire qu'on peut s'émerveiller d'un paysage, d'un bouquet de fleurs,
01:52 du bleu du ciel qui tout d'un coup se découvre, comme ce matin.
01:56 Quand j'avais 20 ans ou quand j'avais 40 ans,
01:58 je regardais pas le bleu du ciel quand je me réveillais.
02:01 Maintenant, ce matin, je peux vous dire, je vais être en forme
02:05 et vraiment, je vais avoir un sentiment de bonheur,
02:07 parce que voilà, ça va inonder ma journée.
02:11 C'est des choses bêtes comme ça, vieillir.
02:14 La vieillesse, comment vous la définiriez ?
02:17 Quand on a profité, après on peut laisser tomber le reste.
02:21 Ça veut dire quoi, laisser tomber le reste ?
02:23 On peut rester chez nous, on dort.
02:25 Fatigué physiquement, mentalement.
02:27 On est souvent malade, irrité.
02:30 Notre peau, on dirait, est bizarre.
02:34 Il y a eu ce livre, Laura de la Herre, Voyageuse de nuit,
02:36 un best-seller paru chez Grasset.
02:39 Il y a un film, maintenant co-réalisé avec Jérémy Fray,
02:42 qui va être diffusé mercredi soir sur France 2 à 22h50.
02:45 La révolte des vieux, on n'y va pas par quatre chemins.
02:47 La révolte des vieux.
02:48 - Je l'ai choisi ce titre et je suis très contente.
02:50 Parce que le mot vieux devient obscène aujourd'hui.
02:53 On dit « senior », on dit « pré-senior », on dit « post-senior ».
02:56 Nous, on est des vieux et on est fiers de l'être.
02:58 - Et la question de la mise en image,
03:00 quand on dénonce une invisibilisation, c'était pas rien ?
03:04 - Non, ça a été compliqué, mais avec Jérémy, on s'est très bien entendus.
03:09 Parce que ce qu'on voulait, c'était montrer une réalité d'aujourd'hui.
03:13 C'est-à-dire que maintenant, en France, au moment où nous parlons,
03:18 il y a énormément de personnes qui sont des vieilles et des vieux.
03:23 Et il faudrait ne pas mettre de distinction entre les mots « vieux en bonne santé ».
03:29 Il faudrait dire « vieux en bonne santé d'un seul souffle ».
03:32 Il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de personnes qui vieillissent
03:36 et qui sont en bonne santé.
03:38 Merci au progrès médical.
03:40 Ces gens-là, ils ont envie de vivre, ils ont envie d'aider,
03:45 ils ont envie de participer en tant que citoyens actifs.
03:48 Ils ne sont pas des citoyens de seconde zone.
03:51 Ils sont bénévoles, ils travaillent dans des associations,
03:53 ils donnent du temps aux autres.
03:56 Ils sont amoureux d'une société qui est la société du care, du fragile.
04:01 Ils peuvent essayer de structurer des choses qui ne marchent pas bien
04:07 à l'intérieur de ce qu'on appelle notre vivre ensemble.
04:10 Ils sont là, on les ignore.
04:12 Généralement, on les met un peu trop vite dans des EHPAD
04:16 et on sait ce qui s'est passé dans les EHPAD.
04:18 Vous voulez les montrer.
04:20 Je veux montrer toutes celles et ceux qui...
04:22 C'est mettre des images.
04:23 Oui.
04:24 C'est faire des images.
04:25 On ne voulait pas de l'entre-soi parisianiste pour faire ce film,
04:28 mais on voulait montrer des situations partout en France où ça se passe bien.
04:34 Et oui, il y a beaucoup de choses qui se passent bien.
04:36 On n'est pas toujours dans la discorde, la violence, l'engueulade, les insultes.
04:40 Et vous montrez vous, Laura Delerre.
04:42 Vous êtes, et vous le dites, une des plus vieilles femmes à la télévision française.
04:47 Pour le moment, parce que je ne sais pas si ça va durer.
04:50 Il y a Evelyne Delia, la patronne du service météo de France Télé,
04:53 qui vieillit génialement.
04:54 Oui, je l'adore.
04:56 D'ailleurs, j'aurais voulu toute ma vie, non pas être une hôtesse de l'air,
05:00 mais être une météo-woman.
05:04 Et il y a vous.
05:06 Et faire ce film, c'était aussi assumer votre corps d'une femme de 72 ans à la télévision.
05:13 Donc ce corps, vous l'assumez, presque nu à la télévision.
05:16 Presque nu, je suis en maillot, je nage.
05:18 Mais moi j'ai 48 ans, Laura, je ne me montrerai pas en maillot à la télévision.
05:21 Ah bon, mais pourquoi ?
05:22 Parce que je n'ose pas.
05:23 Vous avez moins de ride que moi.
05:25 Je ne sais pas si vous nagez aussi bien et si vous courez aussi bien que moi.
05:31 Nous vivons dans une conception quasi raciste de l'âge.
05:36 C'est-à-dire que, comme si la jeunesse est une race,
05:41 les adultes une autre race et les vieux une autre race,
05:44 tout à fait séparés, alors que ce sont les mêmes qui sont jeunes.
05:50 Mais les jeunes ne pensent pas qu'ils vont vieillir,
05:54 les vieux oublient qu'ils ont été jeunes.
05:56 Edgar Morin, qui a passé le cap des 100 ans,
06:00 avant que la jeunesse ne devienne…
06:02 D'ailleurs c'est plus difficile d'avoir 101 ans que d'avoir 100 ans,
06:04 parce que les gens s'intéressent beaucoup moins à vous.
06:07 Ou à vous.
06:09 Avant que la jeunesse ne devienne un diktat, Laura,
06:12 il a fallu l'imposer la jeunesse.
06:13 Il a fallu faire entendre sa voix, il a fallu faire reconnaître sa culture.
06:17 Ça, c'est 68.
06:18 C'est vous qui lui avez fait prendre le pouvoir à la jeunesse.
06:23 C'est vous qui avez fait tomber le potentat des vieux.
06:26 Et maintenant que vous êtes vieux,
06:28 vous voulez arracher le pouvoir à la jeunesse pour le rendre au vieux.
06:32 Eh bien, c'est pas tout à fait ça.
06:34 C'est-à-dire que 68, parce que j'ai eu la chance d'être dans la rue en 68,
06:39 et ça a beaucoup construit mon rapport au monde,
06:41 dans la solidarité intergénérationnelle, je le précise.
06:46 Mais effectivement, les raisons profondes,
06:50 et d'ailleurs Pierre Viançon-Ponté, qui était patron du journal Le Monde à l'époque,
06:54 avait écrit un article extraordinaire en disant « La France s'ennuie,
06:57 et les jeunes en ont absolument assez que les vieux soient au pouvoir partout. »
07:04 Au pouvoir à l'Assemblée, au pouvoir au Sénat, au pouvoir à la présidence de la République.
07:07 Oui, c'était ça le gaullisme.
07:09 C'était ça, ça a été ça la Deuxième Guerre mondiale, c'était la France gouvernée par un vieil gars.
07:12 Mais aujourd'hui, Macron, il n'a pas l'âge qu'avait le général de Gaulle.
07:16 Donc la jeunesse a triomphé, et c'est tant mieux.
07:19 Moi, en tant que vieille, je trouve ça formidable d'avoir un président jeune,
07:24 actif, et qui représente sa génération.
07:27 Et quand je vois Zelensky en Ukraine,
07:29 je suis admirative de la force que lui donne sa jeunesse.
07:34 Je ne suis pas du tout contre le jeunisme.
07:36 Est-ce que vous êtes la génération qui ne veut pas lâcher ?
07:40 Est-ce que vous êtes la génération qui a pris le pouvoir et qui ne veut pas le lâcher ?
07:43 Est-ce que vous êtes la génération qui ne veut pas mourir ?
07:45 Non. Moi, je vais lâcher bientôt, et je serai très contente de lâcher
07:50 pour pouvoir me consacrer à plus de travail associatif,
07:53 à plus de travail bénévole et à plus de travail
07:56 pour apprendre des choses que je ne sais pas encore,
07:59 pour revenir à l'université, pour pouvoir aller
08:02 essayer de pratiquer des arts comme le piano,
08:06 que je n'ai jamais connu quand j'étais petite.
08:08 Donc, vous voyez, on revient à l'enfance, etc.
08:11 Mais nous ne sommes pas la génération qui voulions
08:14 et qui voulons absolument s'accrocher.
08:16 Nous sommes la génération qui a appris la révolte dans la solidarité,
08:22 qui a appris la résistance à l'oppression, à la domination.
08:27 Et ça, nous ne voulons pas.
08:29 Et ça, je pense que c'est très important, vous avez raison de le souligner.
08:32 Nous, ceux que certains jeunes appellent les "boomers",
08:36 avec beaucoup de morgue et de mépris,
08:39 moi, je ne me sens pas responsable ni coupable de la dégradation bioclimatique.
08:43 Simplement, je n'étais pas informée quand j'avais l'âge de pouvoir y résister.
08:49 Donc, je ne suis pas responsable en tant que "boomer".
08:52 Mais par contre, puisque nous sommes de la génération
08:55 qui nous sommes révoltés contre nos vieux,
08:57 nous sommes aussi de la génération qui nous révoltons avec violence,
09:02 parce que ça, c'est une violence, ça s'appelle du racisme,
09:04 comme l'a dit Edgar Morin, ça s'appelle de l'agisme,
09:07 qui est une forme de racisme.
09:09 Nous nous révoltons contre le sort qui, soi-disant, nous serait échu,
09:14 c'est-à-dire d'être enfermés dans des EHPAD,
09:17 que nos enfants paieraient avec des sommes astronomiques.
09:23 Et nous nous révoltons contre l'idée que nous ne sommes pas des sujets entiers,
09:29 des citoyens entiers.
09:31 Oui, nous conservons nos droits, même quand nous vieillissons,
09:35 et nous ne voulons pas être considérés comme une sous-humanité.
09:40 En fait, on continue le combat, et on continue exactement,
09:43 c'est le prolongement du combat, de la libération de la femme,
09:46 c'est le prolongement du combat qui a fait que le corps
09:49 est un sujet éminemment politique,
09:51 et ça, ça a été le combat des années 60 et des années 70.
09:54 Le corps comme sujet politique, l'intimité comme sujet politique,
09:58 le droit à disposer de son corps, de son désir, de son intimité...
10:02 - Et de sa sexualité. - Et de sa sexualité,
10:04 c'est le prolongement ? C'est cette génération qui s'est battue
10:07 pour que les femmes aient ce droit-là,
10:09 qui se bat aujourd'hui pour que les vieux aient ce droit-là ?
10:11 - En tout cas, on n'est pas tout seuls à se battre,
10:13 on est très nombreux à vouloir que ça change.
10:17 C'est un enjeu politique,
10:19 que le gouvernement ignore pour le moment,
10:21 alors que des rapports ont été remis au plus haut niveau,
10:25 mais pour le moment, on met la poussière sur le tapis.
10:29 C'est un enjeu démographique, parce que nous sommes de plus en plus nombreux,
10:33 et c'est un enjeu de civilisation.
10:35 Il y a des pays en Europe où les vieux ne sont pas traités de la même manière,
10:39 il y a des pays dans le monde où les vieux ne sont pas méprisés de cette manière,
10:44 et d'autre part, je crois, mais vraiment très profondément,
10:48 que ça ne correspond pas à une aspiration de la jeunesse aujourd'hui.
10:51 J'en veux pour preuve ce qui s'est passé lors du premier confinement,
10:55 mais aussi du deuxième confinement,
10:57 où énormément de jeunes sont allés dans les mairies
11:01 sans que personne ne leur demande en disant "qu'est-ce qu'on peut faire ?"
11:04 Il y a des personnes âgées dans notre quartier,
11:07 "qu'est-ce qu'on peut faire ? Est-ce qu'on peut aller les aider ?"
11:10 Et j'en veux pour preuve aussi,
11:12 tous les mouvements, qu'ils soient architectes, urbanistes,
11:15 parce que c'est un enjeu aussi architectural,
11:18 il faut introduire des maisons des vieilles et des vieux à l'intérieur de chaque quartier.
11:22 - Il faut repenser les villes.
11:23 - Il faut repenser les villes.
11:24 Il faut que de l'intergénérationnel
11:26 naisse une possibilité de continuer à nous aimer,
11:31 à nous respecter, à nous admirer.
11:32 Et ça, les jeunes, ils le veulent aujourd'hui.
11:34 - Laura Adler sur France Inter à 9h20.
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13:59 - France Inter, le 7 9 30, l'interview de Sonia De Villers.
14:05 - J'y pense, mais ça ne m'effraie pas tellement, non.
14:11 Tout le monde y passe, il faut bien y aller vers la mort.
14:15 Ils ne me laissent pas battre, c'est pas ça.
14:19 Irène, qui rit quand elle se démène.
14:23 - Elle vous a fait beaucoup rire, Irène, parce qu'avec la caméra de Jérémie Frey,
14:28 vous êtes allée partout en France et ça donne ce film, "La révolte des vieux".
14:32 Film éminemment sensible, généreux, populaire et lumineux, Laura Adler.
14:38 C'est un film pour tout le monde.
14:42 C'est un film très joli.
14:44 Oui, parce que, je l'ai dit, quand on parle d'invisibilisation,
14:47 la question de comment on met en image la question de vieillir,
14:51 c'est un film très joli.
14:54 Évidemment, vous y allez et vous ne l'éludez pas.
14:58 Il y a la question de votre âge, vous avez 72 ans.
15:02 Il y a la question de l'âge de votre mère, qui a passé les 90.
15:06 Donc, vous y allez à l'EHPAD.
15:09 Votre mère qui peut à peine parler, qui est en fauteuil roulant.
15:13 Il semble que quand vous la regardiez, quand vous êtes face à elle,
15:18 vous vous posiez la question de "Et moi dans 20 ans ?".
15:22 "Et moi face à la mort qui s'approche ?"
15:25 - Excusez-moi, je suis très émue, parce que c'est les dernières images de ma mère qu'on voit dans ce film.
15:32 J'avais dit que je ne voulais pas qu'on filme ma mère.
15:35 Jérémy, qui est le chef opérateur qui co-signe ce film avec moi,
15:38 et avec qui je me suis très bien entendue, a filmé, pas à mon insu, mais beaucoup.
15:44 Quand on a fait le montage, il m'a dit "Tu sais, j'ai filmé ta mère, tu ne veux pas regarder ?"
15:50 J'ai regardé les dernières images de ma mère et j'ai dit "Bon, d'accord, 30 secondes".
15:59 Voilà, c'est les dernières images de ma mère et le film est dédié à ma mère.
16:06 Mais quand j'étais avec ma mère, tous les jours, à l'Ehpad, dans un Ehpad magnifique à Paris,
16:13 dirigé par une femme qui s'appelle Romy, qui est dans le film et qui explique son rapport à la vieillesse.
16:19 Un Ehpad où, quand on ouvre la porte de l'Ehpad, à gauche il y a la crèche et à droite il y a l'Ehpad.
16:27 Quand on rentre dans le jardin de l'Ehpad, il y a un lapin, il y a des fleurs, il y a un jardin potager.
16:33 Ce n'est pas un Ehpad modèle, il n'y a pas beaucoup d'argent, c'est un Ehpad associatif,
16:37 mais c'est un Ehpad où le personnel soignant, dont je voudrais parler ce matin,
16:42 parce que j'ai rencontré, j'ai été dans énormément d'Ehpad en France,
16:47 et je dois dire que malgré les Ehpad terribles et le bouquin génial de Victor Castaner,
16:52 nous a attiré l'attention à nous tous, ce scandale terrible qui se passe dans certains Ehpad,
16:58 généralement où les familles payent d'ailleurs le plus cher pour que leurs parents soient le plus maltraités possible.
17:04 Mais généralement dans les Ehpad, il y a des personnels soignants qui travaillent de manière extraordinaire
17:10 et qui regardent les yeux dans les yeux les résidents. On les appelle les résidents.
17:14 Et quand j'étais avec ma mère, je pensais à elle tout le temps.
17:18 J'essayais de garder un contact avec elle, j'espère et je pense personnellement que je l'ai gardé jusqu'au bout.
17:25 Et je crois qu'on est très nombreux, nous les familles, il y a un moment, vieillir c'est ça aussi.
17:31 Vieillir, c'est pas tous les jours marrant, je fais pas Youp la Boum parce que je vieillis.
17:36 Vieillir, c'est perdre, c'est perdre la mémoire, c'est perdre ses cheveux, c'est perdre beaucoup de choses.
17:45 - C'est perdre la boule, c'est perdre l'honneur, c'est perdre les gens qu'on aime, vous dit Mona Ozouf.
17:51 - Voilà, c'est perdre les gens qu'on aime. Et là ça c'est vrai, Mona Ozouf le dit magnifiquement, ça c'est vrai.
17:57 Mais c'est aussi devenir les parents de ses propres parents. Vieillir.
18:04 Et c'est ce qui se passe pour beaucoup de gens de mon âge, on devient les parents de ses propres parents.
18:10 Et dans les Ehpad, dans l'extrême vieillesse, il y a des personnes qui se sont dédiées à cet art, à cette subtilité, à cette intelligence de ce que ça veut dire vivre.
18:26 Quand on est encore en vie, il nous reste du regard, il nous reste de la perception, il nous reste du sensible, il nous reste de la luminosité et il nous reste du lien.
18:38 Ce lien, on ne sait pas très bien comment l'appréhender, on ne sait pas très bien comment le décrire, y compris les médecins, y compris par rapport à Alzheimer.
18:48 Les médecins sont en train de beaucoup changer par rapport à Alzheimer. Ils pensaient que les personnes qui avaient Alzheimer n'y comprenaient rien. Ce n'est pas vrai.
18:56 Donc on arrive, avec les progrès de la médecine, à définir un nouveau territoire.
19:02 Tout le monde a le droit à sa propre dignité jusqu'au dernier moment de sa vie. C'est aussi un éloge de la vie.
19:09 Il y a une question que vous n'abordez pas dans le film et pourtant elle est là, en sous-texte, c'est la question de la fin de vie.
19:18 Comment imaginer qu'on puisse bien vieillir sans prendre le pouvoir sur cette question de la fin de vie ? Et vous, la génération qui avait lutté pour que les femmes aient le pouvoir de disposer de leur corps,
19:34 vous, la génération qui avait lutté pour le corps des hommes et des femmes en prison en France, vous, la génération qui avait lutté pour le corps des hommes et des femmes atteints du sida en France,
19:46 est-ce que vous serez la génération qui va imposer le droit à choisir la manière dont on va mourir ?
19:53 On est en train d'y travailler. J'appartiens, comme beaucoup de gens, à cette association pour le droit de mourir dans la dignité.
20:01 Ma mère aussi y avait adhéré avec beaucoup d'enthousiasme et quand elle s'est agie et que les médecins ont dit qu'il n'y avait plus rien à espérer et que je lui ai proposé,
20:09 elle m'a dit non. Alors qu'est-ce qui se passe là ? Moi je travaille là-dessus depuis longtemps, je me suis moi-même intégrée dans une formation d'éthique clinique à l'hôpital public.
20:18 Plus j'avance sur ce sujet, plus je réfléchis. Moi je sais.
20:23 Merci Laura Adler.
20:25 Merci à vous Sonia.
20:26 Le film 22h50, La révolte des vieux, France 2, co-réalisé avec Jérémie Ifray.
20:31 Merci Sonia.

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