Déboulonnage des statues - Me François-Henri Briard : "L'idéologie est wokiste est un délire absolu"

  • l’année dernière
Avec Maître François-Henri Briards, avocat

Retrouvez Bercoff dans tous ses états avec André Bercoff du lundi au vendredi de 12h30 à 14h sur #SudRadio.

---
Abonnez-vous pour plus de contenus : http://ow.ly/7FZy50G1rry

———————————————————————

▶️ Suivez le direct : https://www.dailymotion.com/video/x75...
Retrouvez nos podcasts et articles : https://www.sudradio.fr/

———————————————————————

Nous suivre sur les réseaux sociaux

▪️ Facebook : https://www.facebook.com/profile.php?id=100063607629498
▪️ Instagram : https://www.instagram.com/sudradioofficiel/
▪️ Twitter : https://twitter.com/SudRadio
▪️ TikTok : https://www.tiktok.com/@sudradio?lang=fr
———————————————————————

☀️ Et pour plus de vidéos de Bercoff dans tous ses états : https://www.youtube.com/playlist?list=PLaXVMKmPLMDQe5oKZlhHutOQlGCq7EVU4

##LE_FAIT_DU_JOUR-2023-03-10##

Category

🗞
News
Transcript
00:00 - Sud Radio Bercov dans tous ses états.
00:03 Le fait du jour.
00:04 - Retirer ce monument reviendrait à nous daigner.
00:06 Alors de quoi s'agit-il ? Et pourquoi on parle aujourd'hui en fait du jour
00:10 des sables d'Olonne et de la statue de Saint-Michel ?
00:13 Et bien tout simplement parce que
00:16 la Fédération de la libre-pensée
00:20 a décidé, d'ailleurs en général
00:23 ils entendent déboulonner toutes les statues religieuses un peu partout, en tout cas
00:28 ils l'ont fait à plusieurs reprises déjà.
00:30 Et donc le tribunal administratif puis la Cour administrative d'Appel de Nantes
00:34 en septembre dernier ont demandé à la ville des Sables d'Olonne de retirer la
00:38 statue du domaine public.
00:40 L'installation, ont-ils dit,
00:43 de cette statue, c'est un emplacement public, est interdite
00:47 par l'article de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation
00:52 de l'Église et de l'État, la fameuse loi sur la laïcité, la fameuse
00:57 statue de Saint-Michel ?
00:58 - Effectivement, 1905, tout le monde connaît l'histoire.
01:03 Et bien le maire des Sables d'Olonne, Yannick Moreau, a saisi le Conseil d'État
01:08 et pour les représenter, et bien François Ribriard, vous êtes avocat au
01:11 Conseil d'État et à la Cour de cassation,
01:14 donc vous avez effectivement représenté... De quoi s'agit-il en fait ?
01:18 Quel est l'enjeu ?
01:19 - Exactement.
01:20 - Oui, bonjour André, hier matin nous avions au Conseil d'État une séance de
01:25 jugement de filtrage, si vous voulez.
01:27 Quand vous saisissez le Conseil d'État, il y a une première phase de sélection des
01:30 affaires et hier donc le Conseil d'État
01:33 devait décider s'il retient l'affaire ou pas.
01:36 - D'accord.
01:37 Alors c'est ça le filtrage, c'est-à-dire que
01:41 le Conseil d'État a retenu l'affaire ?
01:44 - Pas encore, si vous voulez. On a frappé à la porte pour rentrer.
01:49 Le Conseil d'État admet à peu près 25 à 30 % des pourvois en cassation.
01:53 - D'accord. - Alors c'est important parce que si le Conseil d'État ne nous laisse
01:58 pas rentrer,
01:59 n'admet pas notre pourvoi, l'affaire est terminée et donc la statue doit être déplacée.
02:04 - Ah d'accord, c'est ça, et force reste l'application de la loi de 1905.
02:09 - Et voilà, et de l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Nantes que vous avez mentionné.
02:13 - D'accord, alors quel est l'enjeu en fait ? Parce que je rappelle simplement,
02:17 dit Yannick Moreau, le maire des Sables d'Olonne,
02:20 Saint-Michel c'est aussi l'emblème d'un quartier, cela fait 87 ans que la statue
02:24 veille sur ce quartier.
02:25 Auparavant sur les écoliers de l'école Saint-Michel,
02:28 tous les Saint-Michel devraient-ils disparaître ? C'est toujours
02:31 Yannick Moreau, maire des Sables d'Olonne qui parle.
02:34 Nous ne cèderons pas à ces héritaux-là, la République est laïque, la France est
02:38 chrétienne.
02:39 C'est ça l'enjeu, François-Henri Briard ?
02:41 - Alors, on parlera peut-être tout à l'heure André de la question générale du
02:45 déboulonnage des statues sur laquelle j'ai quelques idées mais
02:49 le problème est l'article 28 de la loi de 1905 que vous avez cité.
02:55 C'est un article qui est très sain, qui pose le principe selon lequel dans
02:59 les emplacements publics, il ne peut pas y avoir d'emblème ou de signes religieux,
03:05 quelle que soit la religion concernée.
03:07 - D'accord.
03:07 - Il y a évidemment des limites à cette interdiction, c'est la préservation
03:14 de l'héritage culturel
03:16 et artistique d'un pays, et en l'occurrence de la France.
03:21 C'est ce que dit d'ailleurs Aristide Briand, Aristide Briand dans les débats
03:25 qui ont précédé l'adoption de la loi de 1905, dit bien qu'il faut
03:29 préserver ce qu'il appelle l'historique de la France.
03:34 Et c'est ce que dit aussi le président Jean-Marc Sauvé qui était vice-président
03:39 du Conseil d'État et qui a déclaré en 2016 dans une conférence que
03:43 cet article
03:45 il part de la vindicte de cet article de la loi de 1905, cet article
03:50 ne s'applique pas
03:52 à l'héritage culturel issu des religions.
03:55 Donc la question est de savoir si cette statue,
03:58 cette statue qui mesure moins de 2 mètres, qui est une petite statue discrète
04:02 sur une place dans un quartier modeste des Sables d'Olonne,
04:07 si cette statue est un signe religieux.
04:10 C'est la question, donc il faut analyser la statue.
04:13 Or il se trouve que la statue, c'est celle de Saint-Michel qui est
04:17 beaucoup plus qu'un personnage religieux.
04:21 Saint-Michel c'est un personnage abrahamique
04:23 qui est donc vénéré par trois religions monothéistes.
04:29 Mais au-delà,
04:30 Saint-Michel symbolise dans la civilisation
04:36 occidentale
04:37 les forces du bien contre le mal.
04:41 Et si vous avez cité les parachutistes, pourquoi les parents ont-ils Saint-Michel
04:45 comme emblème ?
04:46 Parce que Saint-Michel c'est un guerrier.
04:48 C'est un guerrier
04:50 qui trucide un dragon avec sa lance, parce que il représente
04:55 les forces du bien.
04:56 Et cette petite statue des Sables d'Olonne ne comporte aucun signe religieux.
05:03 - Il n'y a pas la croix ? - Il n'y a aucune croix. Vous savez,
05:08 le Conseil d'État en 2017 a statué sur la statue de Jean-Paul II à Plohermel
05:13 qui comportait non seulement la statue de Jean-Paul II, mais une arche et une croix.
05:18 Il a bien fait la distinction à l'époque.
05:20 En disant écoutez,
05:22 Jean-Paul II c'est un personnage historique, international, très bien, il peut
05:25 figurer dans un emplacement public.
05:28 L'arche en elle-même ne présente aucun caractère religieux, en revanche
05:31 la croix, c'est pas baissé.
05:33 Et ça serait exactement la même chose pour un signe religieux d'une autre
05:36 religion que la religion chrétienne.
05:39 Mais là, si vous voulez, la caractéristique de Saint-Michel c'est
05:43 qu'on est en présence d'un personnage, je l'ai dit, qui a une signification
05:46 générale,
05:48 des significations multiples,
05:50 et dans cette décision de 2017 concernant le pape Jean-Paul II, la statue
05:56 de Jean-Paul II, le Conseil d'État dit bien
05:59 que ce qui est important c'est que la statue ne manifeste aucune
06:04 préférence religieuse
06:06 ou reconnaissance d'un culte.
06:08 Et quand vous regardez Saint-Michel, c'est un ange, c'est un ange,
06:12 comme vous savez, les anges appartiennent à la culture
06:16 religieuse mais aussi à la culture profane. - Mais François Rémiereyard, c'est
06:19 quand même un symbole de la chrétienté, on ne peut pas le nier.
06:22 - La chrétienté... - Comme Jean-Paul II.
06:24 - La chrétienté l'a utilisé mais il n'est pas présenté comme un personnage
06:29 religieux.
06:29 C'est un ange qui, encore une fois, terrasse un dragon.
06:33 Mais au-delà de ça, parce qu'il y a quand même quelque chose, vous avez raison de
06:36 rappeler effectivement la loi, parce que
06:38 moi je suis, je crois, on est tous pour la laïcité, la séparation de l'église,
06:43 d'ailleurs de l'église, de la mosquée, de la synagogue et de l'État,
06:47 on est tous d'accord là-dessus.
06:50 Mais le problème quand même, on est en France et vous avez raison de la poser,
06:54 mais là on va non pas généraliser,
06:56 mais enfin en France il n'y a pas trois kilomètres qu'on fait de la campagne,
06:59 ça veut dire des prix Dieu.
07:00 À ce moment-là, est-ce qu'il faut, non mais c'est une question que je pose
07:03 à l'homme de droit,
07:05 est-ce qu'il faut au nom de la laïcité et de la séparation de l'église et de l'État
07:09 supprimer tous les prix Dieu, à ce moment-là il faudrait les supprimer
07:12 qui parsèment les campagnes de France et même les villes.
07:16 - Les calvaires, les statues de la Vierge Marie,
07:19 dans mon village en Normandie il y a trois statues de la Vierge Marie,
07:24 alors si vous voulez, là vous évoquez, et je l'ai dit d'ailleurs à la barre du
07:28 Conseil d'État hier au cours de la séance publique,
07:31 vous évoquez une dimension qui est plus large qui est celle du patrimoine
07:35 et de l'héritage culturel et de la mémoire.
07:38 - Et de la mémoire. - Et si vous voulez, et vous soulignez à juste titre que l'article
07:42 28 de la loi de 1905 est une très bonne chose, la neutralité des
07:46 personnes publiques est un principe fondamental.
07:49 Mais attention, il ne faut pas non plus jeter le bébé avec l'eau d'humain.
07:53 Nous avons une identité, nous avons une mémoire,
07:57 nous avons une histoire,
07:59 et il faut absolument la préserver.
08:02 La préserver, sinon,
08:04 vous savez ce que c'est,
08:05 sinon on sombre dans ce que l'on appelle l'iconoclasme.
08:09 - Oui, l'iconoclasme et la perte d'identité totale. - L'iconoclasme,
08:13 c'est un phénomène qui existe depuis très longtemps, depuis l'Antiquité,
08:18 qui consiste pour une génération, une majorité politique ou je ne sais qui,
08:23 à détruire
08:24 ce que les prédécesseurs ont fait. - Bien sûr.
08:28 - Et vous savez... - Tu passais faisant table rase. - Tu passais faisant table rase.
08:32 L'iconoclasme a connu des extrêmes effroyables à Mossoul.
08:37 À Mossoul, Daesh ne faisait rien d'autre que de détruire des statues.
08:40 - Et les Bouddhas de Bamiyan en Afghanistan, etc. - Absolument, et les
08:44 révolutionnaires
08:45 dans notre pays, ce qui a été fait dans les années 1790, évidemment, a causé
08:51 un préjudice irréparable.
08:53 Irréparable à notre patrimoine, à notre héritage culturel.
08:57 Donc il faut faire attention, il faut
08:58 évidemment être attentif aux signes religieux.
09:02 Mais je pense qu'une statue comme celle-ci, Saint-Michel, avec des significations
09:06 multiples,
09:07 une signification patriotique, vous l'avez dit,
09:11 il faut évidemment les préserver et je pense personnellement
09:15 que cette statue a sa place sur le domaine public,
09:19 tel qu'elle est actuellement. Donc c'est au Conseil d'État de décider s'il
09:23 ouvre la porte, s'il accepte de débattre de ce dossier ou pas.
09:28 - Mais alors justement, creusons un peu la chose, c'est très simple, parce que vous dites
09:32 c'est vrai, il y a la dimension patriotique,
09:34 il y a la dimension identitaire, mais il y a la démission aussi, mémorielle.
09:38 C'est-à-dire, est-ce qu'un pays doit garder, on en a parlé,
09:42 ces signes, je dirais, ces signes culturels,
09:46 ces signes civilisationnels, ça fait partie de ça.
09:49 C'est à ce moment-là...
09:50 Et il y a eu la polémique, et je voudrais avoir votre avis aussi,
09:54 François Ribriat,
09:56 sur les crèches. Est-ce que c'est différent, parce que vous savez
10:00 qu'il y a eu plusieurs maires
10:01 qui ont laissé, on l'a vu encore à Noël, à la fin de l'année,
10:07 ont fait des crèches qu'elles ont mis
10:11 effectivement à l'intérieur de la mairie, en tout cas dans le hall d'accueil,
10:16 et elles ont été forcées de les enlever au nom de cette loi de 1905,
10:21 et on les a mis, certains les ont mis effectivement devant le parvis,
10:25 est-ce que c'est la même chose ou c'est un problème différent à votre avis ?
10:28 - Non, c'est tout à fait proche, c'est la même problématique, d'ailleurs hier à la séance publique,
10:34 le rapporteur public a évoqué la jurisprudence sur les crèches,
10:37 alors c'est un problème que je connais assez bien parce que, et c'est public là aussi,
10:42 j'ai représenté la région lyonnaise dans ce dossier,
10:50 et le conseil d'état et de jurisprudence, très équilibrés,
10:54 considèrent que les crèches sont possibles si elles se rattachent à des traditions locales,
10:58 et vous voyez les centeniers, par exemple, les centeniers dans le milieu de la France,
11:03 ou en Auvergne, c'est une tradition, et donc c'est acceptable.
11:08 Donc là aussi, il y a une ligne de partage.
11:11 - Oui, c'est très intéressant, en fait,
11:13 mais est-ce que ce problème, d'après vous ça fait quand même quelques temps,
11:17 est-ce que ce problème se posait, parce qu'on a l'impression,
11:20 alors je me trompe peut-être, corrigez-moi, si,
11:23 il y a l'impression que ce problème se pose depuis quelques années, et qu'avant,
11:27 en tout cas il ne se posait pas de la même façon.
11:29 Est-ce qu'il y a eu cette association Libre Pensée et d'autres,
11:33 qui dit non, non, non, il faut appliquer absolument tout ça, il faut être...
11:36 Est-ce qu'il n'y a pas eu quand même une recrudescence,
11:39 ou quelque chose de plus aiguisé depuis quelques années ?
11:42 - Je pense que le débat sur les signes religieux dans l'espace public
11:48 était aussi très vif, dans les années 1900, au moment du vote de la loi de 1905.
11:53 Quand vous regardez les débats, c'est quand même presque violent parfois.
11:57 Donc ce n'est pas une question nouvelle, et on a tous connu dans nos familles,
12:00 des réfusards, antiréfusards, des républicains, des laïcs,
12:04 des religieux, des monarchistes, voilà.
12:06 Donc c'est une question qui divise les Français,
12:09 et c'est bien d'ailleurs d'en parler.
12:11 Ce qui, en effet, a peut-être accentué la pression aujourd'hui,
12:16 c'est ce mouvement terrifiant,
12:19 terrifiant de vouloir faire table rase du passé,
12:23 vous l'avez dit, et de reconstruire une identité qui ne correspond pas du tout à notre histoire,
12:29 de réécrire l'histoire,
12:30 et là on débouche sur le problème plus large du déboulonnage des statues
12:35 du général Lee, de Thomas Jefferson,
12:37 je suis un peu surpris d'ailleurs qu'elles soient encore à Paris, ces statues, voilà.
12:41 - Non, mais parce que justement, ça n'est pas laïcité,
12:43 puisque vous avez vu qu'on veut débouler Voltaire, Napoléon, bien sûr,
12:47 Colbert, n'en parlons pas, pour des tas de raisons.
12:50 Alors, soit on dit "oui mais attention, il faut être égal dans toutes les religions",
12:54 soit effectivement, l'esclavage, ceci, cela,
12:57 c'est-à-dire, on veut, est-ce qu'on ne veut pas, quelque part,
13:00 François-Henri Briard, et c'est ma dernière question,
13:02 est-ce qu'on ne veut pas revisiter le passé avec le regard du présent,
13:08 ce qui n'a rien à voir ?
13:10 - Oui, oui, absolument, je pense que c'est très lié aussi à l'idéologie wauquiste,
13:15 à ce délire absolu qui consiste à vouloir réécrire l'histoire.
13:21 Sur la statue de Saint-Michel, je voulais vous dire autre chose André,
13:24 c'est que hier matin, je n'ai pas représenté que la commune des Sables-de-Laune.
13:28 J'ai représenté un officier parachutiste,
13:32 qui s'appelle Abdul Rahman,
13:33 qui a le culte musulman, et qui a dit au Conseil d'État "moi je suis très attaché à Saint-Michel".
13:40 - Oui, et il s'appelle Abdul Rahman, comme quoi ce n'est pas une question absolument...
13:43 - Il est tenu absolument à être présent, donc la statue ne manifeste aucune préférence religieuse.
13:48 - Oui, oui, non mais il était important de le dire.
13:51 Merci François-Henri Briard, et nous suivons l'affaire,
13:54 vous me direz si le filtrage réussit au Conseil d'État.
13:58 - Merci.

Recommandée