• il y a 2 ans
Philippe Fardel, CEO, Mousline
Caroline Missika, directrice des affaires publiques, de la communication et de la RSE, Heineken France

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00:00 [Musique]
00:15 On va commencer, ça compte pas dans les cinq questions, un petit mot sur vos structures respectives, Caroline.
00:22 Alors je vous conseille de coller le micro, normalement il est allumé, il faut le coller haut.
00:26 Bonjour à tous, Heineken c'est à la fois en France le premier des brasseurs et le premier des distributeurs.
00:34 On a à peu près 3500 salariés en France, réunis sur nos sites de production, 72 entrepôts France Boisson répartis sur tout le territoire.
00:47 Côté brasseurs c'est la production et la commercialisation de marques de bière qui j'espère sont vos préférées.
00:54 Évidemment Heineken mais aussi Desperados, Afigem, Pelfort, un portefeuille très varié.
01:01 Et côté distribution, on a l'activité France Boisson et un seul chiffre pour résumer notre activité,
01:09 un café hôtel restaurant en France sur quatre est livré par France Boisson.
01:16 J'espère que c'est probablement votre café, votre hôtel ou votre restaurant préféré que nous livrons en boisson de toutes sortes.
01:26 Philippe, quand il y a de la purée mousseline, vous nous donnez un mot ?
01:31 Oui, je ne vais pas vous chanter la chanson mais tout le monde l'a en tête.
01:35 Alors mousseline en un mot, d'abord tout le monde ne le sait peut-être pas,
01:39 mousseline a appartenu pendant 59 ans et demi à Nestlé et depuis début octobre un fonds qui s'appelle FNB qui est un fonds à mission d'ailleurs,
01:48 donc c'est intéressant dans ce cadre là aussi.
01:51 Et moi-même et certaines personnes salariées de l'entreprise, nous avons racheté à Nestlé la société mousseline.
02:01 C'est 80 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2022, c'est un peu moins de 200 salariés et bien évidemment leader en Europe sur le marché de la purée déshydratée.
02:15 Alors on va voir que vous avez des points communs, des différences.
02:18 Le fait est que vous êtes tous les deux de l'agro mais ce n'était pas un souhait à la base.
02:22 Et je pense qu'on va voir que vos messages en fait se portent beaucoup plus large, ce n'est pas sectoriel.
02:28 Alors première question, quels sont vos trois premiers enjeux, les trois choses très importantes l'un et l'autre quand on parle responsabilité ?
02:39 Alors je commence. Alors nos enjeux, ils s'inscrivent déjà et je pense que c'est important de l'avoir en tête.
02:47 Pour nous, la trajectoire, elle est très claire.
02:49 C'est les accords de Paris qui l'ont défini et sur cette base, on a une stratégie RSE.
02:55 Et je reviendrai aussi comme Alexandre sur ce que je pense du mot RSE et de ce qu'il veut dire.
03:01 Mais notre stratégie, c'est de brasser un monde meilleur, donc de contribuer à notre niveau à améliorer le monde et les territoires sur lesquels on opère.
03:13 Et en France, pour vous répondre précisément, nos trois gros enjeux, ils sont je pense très proches de ceux de Philippe.
03:22 C'est la décarbonation de toutes nos activités, la réduction de notre consommation en eau.
03:27 C'est le sujet du moment, d'ailleurs. Je crois que le président de la République va faire des annonces sur le sujet aujourd'hui.
03:34 Et la promotion d'une consommation responsable, c'est essentiel.
03:39 Et si pour l'illustrer sur la partie décarbonation, notamment, ça veut dire réinventer sans cesse nos manières de produire,
03:49 de distribuer nos produits pour réduire de manière durable et responsable et continue, surtout, notre empreinte carbone et notre empreinte sur les territoires qui nous entourent.
04:03 Et on a un objectif assez clair de ce point de vue là. On doit atteindre zéro émission nette de carbone d'ici 2030 pour la production et 2040 pour l'ensemble de la chaîne de valeur.
04:15 Ça veut dire qu'à notre niveau, la FIAL française doit contribuer. Et on parle de zéro émission nette. C'est très important.
04:21 On ne veut pas compenser. On veut réduire durablement notre empreinte.
04:26 Philippe, chez vous, les trois enjeux ?
04:29 Alors nous, on est une PME. On est implanté dans un territoire fort. C'est la Picardie. C'est là que nos pommes de terre poussent.
04:38 Le premier enjeu, il est local. Il est justement avec nos agriculteurs, avec ce réseau local de la Picardie, avec tous les intervenants, que ce soit la partie administrative, mairie, autres et les agriculteurs.
04:56 Ça, c'est un vrai enjeu par les temps qui courent. On en reparlera un petit peu tout à l'heure.
05:02 Le deuxième, il est social. Parce que, comme le disait tout à l'heure Olivier, on a cette volonté vraiment d'avoir cette vision sociétale et sociale vis-à-vis de nos salariés dans le cadre de l'ARSE.
05:21 Donc, avec notre fonds, on a mis en place la loi PACTE. C'est l'intéressement pour tous les salariés au bénéfice de l'entreprise le jour où il y aura une revente.
05:31 Et puis, on va mettre en place, on va aller encore plus loin, puisqu'on va mettre en place l'actionnariat salarial pour tous les employés.
05:39 Donc, c'est encore une étape supplémentaire. Mais c'est aussi une étape pour motiver tout le monde.
05:45 Et puis, le troisième enjeu, il est l'impact de notre activité, l'impact environnemental que l'on a sur notre activité.
05:51 On a la chance d'avoir une usine qui est déjà neutre en carbone. On a racheté un outil à Nestlé qui était un peu le flagship pour Nestlé, cette usine.
06:01 Chaque fois que Nestlé faisait de la communication, on amenait les journalistes et autres sur cette usine.
06:07 Et donc, on a la chance d'avoir cette base et puis à nous de continuer à le développer par la consommation de l'eau, la maîtrise d'un certain nombre de choses sur notre environnement.
06:21 On va enchaîner. Qu'est ce qui vous empêche de dormir la nuit dans ce contexte ?
06:26 Alors, je vous rassure, pas grand chose. Mais s'il y a quelque chose qui nous préoccupe en tous les cas en ce moment, c'est vraiment...
06:37 Si j'avais un souhait tout de suite, c'est qu'il pleuve pendant deux mois. Ça, c'est sûr.
06:42 Parce qu'on a une vraie tension hydrique et qui a un impact sur notre matière première qui est la pomme de terre.
06:49 Très clairement, on a connu déjà la sécheresse l'été dernier. On a une pomme de terre qui a manqué dans les récoltes entre 10 et 15%.
06:58 On a un enchérissement de la matière première de la pomme de terre qui a quasiment sur un achat spot qui a quasiment triplé.
07:07 Le coût de la tonne a quasiment triplé. Donc, quand on s'est dit ça, à part qu'il pleuve, il y a aussi d'autres actions à mener.
07:15 Il y a des choses que l'on met en place sur trouver éventuellement des nouvelles variétés de pommes de terre.
07:21 On va mettre en champ cette année nous-mêmes, Mousseline, avec nos agriculteurs.
07:25 On va faire des tests sur des nouvelles variétés de pommes de terre qui seraient plus résistantes justement à la sécheresse.
07:31 Bien évidemment, toujours diminuer les nitrates et autres. Mais c'est vraiment cette action-là qu'il faut que l'on réussisse pour mettre en place,
07:42 je dirais, une sécurité sur nos approvisionnements de matière première.
07:47 Caroline, vous dormez bien la nuit ?
07:50 Plutôt bien. Et comme Philippe, j'essaye de ne pas penser au travail pendant mes heures de repos et donc de bien dormir.
07:58 Mais blague à part, il y a les enjeux que vient d'évoquer Philippe, qu'on partage.
08:04 Mais pour nous, ce que je voulais ajouter, et ça rejoint ce qu'a évoqué Alexandre, c'est qu'on oublie souvent l'ARSE.
08:11 Effectivement, c'est une responsabilité. Et en tant qu'entreprise, la question, c'est de savoir comment on l'exerce.
08:17 D'ailleurs, comme individu aussi, mais comment on exerce cette responsabilité.
08:21 Et dans mon rôle, dans le rôle des équipes, on doit accompagner l'entreprise, le dirigeant qui, de plus en plus, est impliqué sur ces sujets,
08:30 mais aussi le directeur financier. C'est exactement, je fais beaucoup écho à ce qu'expliquait Alexandre, c'est quels choix on fait.
08:37 Et c'est des choix d'investissement qui sont structurants. C'est des choix de long terme.
08:41 Et souvent, cela repose sur des réglementations dont on ne connaît pas encore tous les contours.
08:46 Et on nous demande, à nous souvent, puisqu'on s'occupe aussi de la partie réglementaire, d'orienter ces choix.
08:54 Et moi, ce qui pourrait m'empêcher de dormir la nuit, mais ce n'est pas le cas, c'est comment on accompagne les équipes commerciales,
09:01 les équipes marketing, les équipes industrielles dans ces choix, les équipes financières aussi,
09:06 parce qu'on oublie souvent, mais la RSE, c'est un coût et non négligeable.
09:10 Et comment on les aiguille pour prendre les bonnes décisions pour l'entreprise et pour notre activité.
09:18 Et si je peux prendre un exemple sur ce sujet, Alexandre en a parlé, typiquement en tant qu'acteur et industriel,
09:25 on met des emballages sur le marché. Et aujourd'hui, il y a de plus en plus de réglementations en la matière.
09:31 C'est un levier important en termes de décarbonation. Et puis, c'est notre responsabilité de mettre des emballages sur le marché qui sont vertueux.
09:43 Et là, se posent des questions toutes simples. Quel matériau choisir ? Privilégier le réemploi ou le recyclage ?
09:50 Quels investissements on doit faire ? Et tout ça en gagnant de la part de marché, en faisant plaisir à nos clients,
09:59 qui sont toujours plus exigeants, en embarquant les salariés dans des choix qui correspondent aussi à leur valeur,
10:06 en réduisant notre empreinte carbone, notre consommation en eau. C'est un peu la quadrature du cercle.
10:12 Et c'est ça le plus grand des défis pour nous aujourd'hui.
10:16 Face à ces défis, à ces enjeux, quels sont vos atouts ? Qu'est-ce que vous allez levier ? Sur quoi est-ce que vous pouvez agir ?
10:25 La manière dont on espère pouvoir agir en écho à ces défis, elle repose sur deux convictions assez fortes.
10:33 La nécessité de toujours apprendre et de jouer collectif quand c'est possible.
10:39 Toujours apprendre, c'est lancer des pilotes. Par exemple, je l'évoquais tout à l'heure, on teste le transport fluvial sur la Seine
10:48 pour distribuer nos clients les cafés, hôtels, restaurants. On teste le réemploi avec des clients de la grande distribution.
10:57 On essaye, si c'est possible, de participer à des projets collectifs qui réunissent des PME comme des grands groupes,
11:06 acteurs privés, entreprises, pour essayer de trouver comment avancer ensemble.
11:12 On a la chance évidemment d'être un grand groupe et d'avoir des moyens, mais on essaye de les mettre aussi au service du collectif
11:19 et de permettre l'apprentissage pour savoir si peut-être telle solution fonctionne du point de vue environnemental,
11:25 mais surtout, parce qu'on reste des entreprises, du point de vue business, pour utiliser un mot qui plaît.
11:32 Philippe, vous disiez que vous êtes un plus petit groupe. Comment est-ce qu'on trouve les moyens ? Comment est-ce qu'on fédère les énergies ?
11:40 Alors nous, on n'est pas un petit groupe, on est une petite société, on n'est même pas un groupe.
11:46 On a un vrai challenge sur la fédération, sur comment fédérer nos équipes.
11:53 On est dans un process de carve-out, donc on a 150 personnes en Picardie, une quarantaine de personnes en région parisienne.
12:02 Qui viennent de s'extraire d'un très grand groupe, c'est ça le carve-out ?
12:06 150 qui viennent de s'extraire d'un grand groupe et 40 qui viennent de nous rejoindre dans l'aventure depuis moins de 6 mois.
12:13 On a, je dirais, à créer cette culture, cette nouvelle culture d'entreprise.
12:18 Et très clairement, alors quand j'évoquais la loi PAC, l'actionnariat salarial et autres, ça aide justement déjà à fédérer tout le monde autour d'un projet et autour d'une direction.
12:29 Mais ça va plus loin parce que c'est aussi la fierté des uns et des autres d'appartenir à une société qui, dans son environnement, justement, dans ses actions au quotidien,
12:42 fait tout pour continuer ce chemin vers, je dirais, produire le plus propre possible, livrer là aussi d'une manière la plus efficace et avec le moins d'impact possible.
12:57 Et localement, d'avoir des projets dans lesquels nos salariés aussi sont fiers.
13:05 C'est ce qu'on appelait la marque employeur. C'est tout ça qui fait que quand on travaille avec la société de distribution des eaux,
13:15 où on est, qui regroupe 84 communes, on est leur plus gros client.
13:19 Tout cet impact là ressurgit aussi sur les gens qui travaillent chez nous parce que quand on fait des actions pour préserver la qualité de l'eau,
13:30 on mène des chantiers sur les nitrates et autres avec cette société.
13:35 On va lancer des projets à partir de juin là dessus. On travaille aussi sur des projets associatifs local.
13:42 C'est des choses nouvelles pour l'entreprise parce qu'il y avait, je dirais, dans le passé des actions sur l'environnement,
13:51 il n'y avait pas beaucoup d'actions sur le local. Et là, on s'est vraiment mis comme objectif d'avoir ces actions aussi sur la vie locale de chacun.
14:01 Ça nous permet que les gens soient fiers. Et puis, il faut être basique aussi.
14:06 Ça nous permet d'avoir aussi une attractivité en tant qu'employeur parce qu'on est comme tout le monde.
14:11 On cherche des emplois, on cherche des salariés dans l'usine. On manque de personnel.
14:16 Donc, on se bat aussi entre guillemets. On a une compétitivité sociale entre guillemets.
14:20 Alexandre évoquait bien tout à l'heure l'importance de ces aspects-là dans le recrutement et dans l'attraction des talents.
14:26 On est en 2023. Il paraît qu'on n'a pas trop le droit de rêver, mais j'ai envie de rêver un peu quand même.
14:32 Si vous aviez un vœu pour le génie de la lampe, qu'est-ce que vous souhaiteriez qu'il y ait ?
14:37 Alors, promis, il était écrit avant que Alexandre intervienne.
14:43 Mon vœu, c'est qu'à terme et le plus vite possible, les fonctions RSE disparaissent des entreprises
14:51 et qu'elles soient intégrées à chacun, à chaque poste, à chaque fonction.
14:56 Et que finalement, on n'ait plus besoin d'une personne, d'une équipe préférante,
15:01 mais que chacun prenne sa part dans l'entreprise du salarié au patron.
15:09 Philippe ?
15:11 Alors d'abord, personne ne nous interdira de rêver.
15:15 Ça, c'est clair. Un rêve est, entre guillemets, une attention.
15:23 Quand on a besoin de continuer cette prise de conscience collective de partout et pour tout le monde,
15:31 moi, ce n'est pas un rêve, mais c'est une attention.
15:34 Quand je vois, il y a trois semaines, je crois, aux Pays-Bas, les élections qui font que des partis
15:40 qui remettent en cause des chemins contre l'azote et autres viennent à pousser.
15:45 Quand on voit ce qui se passe en Flandre belge aussi, il faut qu'on continue à prêcher la bonne parole,
15:54 à éduquer les gens et à sensibiliser les gens, mais au sens large de la population,
16:00 pour éviter qu'il y ait des retours en arrière sur l'environnement et tout ce qui peut,
16:06 et qu'on continue à se battre d'une manière positive.
16:09 Parce que quand on voit ce qui s'est passé ce week-end, ce n'est pas de la défense de l'environnement non plus.
16:14 Donc mon rêve, c'est que tout le monde prenne ça positivement et s'approprie son bilan carbone personnel,
16:21 entre guillemets, à chacun.
16:23 On arrive presque au terme de notre échange.
16:26 Je vais vous demander quel est le message fort que vous souhaitiez qu'on retienne.
16:33 Pour reprendre le titre de la conférence, je dirais qu'il faut des paroles pour sensibiliser,
16:41 pour embarquer les collaborateurs, les citoyens, les consommateurs, nos clients, nos fournisseurs.
16:47 Donc il faut ces paroles.
16:49 Et les actes, c'est pour avancer, pour ne surtout pas reculer,
16:53 ne surtout pas se dire que le contexte économique, l'explosion des coûts de production, l'inflation,
16:58 doit faire renoncer à nos actions pour améliorer l'environnement dans lequel on opère.
17:04 Donc voilà ce que je dirais.
17:06 Si on résume, des paroles pour sensibiliser, des actes pour avancer.
17:10 Surtout ne pas reculer en tout cas.
17:12 Philippe ?
17:14 En fait, c'est que toutes ces actions peuvent être menées au niveau de chacun.
17:21 C'est-à-dire que au niveau de chacun et au niveau de chaque taille d'entreprise.
17:24 On a deux exemples ici sur scène.
17:26 Un groupe international avec une vraie prise de conscience, une feuille de route et autres.
17:31 Et puis on a une PME qui a la même prise de conscience que si les dirigeants et les accompagnants financiers.
17:41 Parce que si nous, notre fonds FNB, me dit demain il faut faire de la profitabilité,
17:46 et n'a pas cette vocation d'être un fonds à mission.
17:50 On peut vite tomber dans d'autres choses.
17:53 Donc voilà, c'est en tant que PME pour le business.
17:58 Parce que c'est pas philanthropique notre truc.
18:01 Bien évidemment, on a des croyances personnelles.
18:03 Mais c'est aussi parce qu'on croit fondamentalement les uns les autres,
18:07 nos financiers, nous-mêmes, que ça apporte au business quotidien de faire toutes ces actions-là.
18:15 Qu'elles soient salariales ou qu'elles soient locales.
18:17 Merci beaucoup à tous les deux. Je pense qu'on peut vous applaudir.
18:21 [Applaudissements]
18:24 [Musique]

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