SMART BOURSE - Planète marché(s) du jeudi 20 avril 2023

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Jeudi 20 avril 2023, SMART BOURSE reçoit Paul Jackson (Responsable mondial de la recherche en allocation d'actifs, Invesco) , Alexandre Taieb (Gérant-analyste, Sycomore AM) et Léa Dunand-Chatellet (Directrice de l'investissement responsable, DNCA Investments)
Transcript
00:00 (Générique)
00:10 Trois invités avec nous chaque soir pour décrypter les mouvements de la planète marché.
00:13 Paul Jackson est avec nous ce soir, responsable monde de la recherche en allocation d'actifs d'Invesco.
00:18 Bonsoir Paul. Merci d'être là. Merci à Léa Dunant-Châtelet de nous accompagner également ce soir.
00:23 Bonsoir Léa. Vous êtes directrice de l'investissement responsable de DNCA
00:27 et à vos côtés Alexandre Tailleb, gérant chez Cicomore. Bonsoir Alexandre.
00:31 Bonsoir Grégoire. Ravis de vous retrouver. Un mot peut-être avec vous pour commencer Alexandre
00:35 du contexte de marché à travers le prisme de la volatilité
00:40 et cette espèce de double régime de volatilité qu'on observe
00:44 avec un affaiblissement de la volatilité sur les marchés actions depuis un mois,
00:49 depuis le stress bancaire du mois de mars.
00:52 On atteint des niveaux effectivement qu'on n'a pas vu depuis longtemps en matière de volatilité
00:56 quand on prend le VIX américain comme référence qui était encore sous les 17 il y a à peine deux heures
01:02 et à l'inverse un régime de volatilité qui reste quand même particulièrement élevé sur les marchés obligataires.
01:09 Sur les deux marchés il y a des vues déjà macroéconomiques très différentes.
01:14 Sur le marché obligataire ce qu'on price aujourd'hui c'est une récession forte
01:18 et un pivot des banques centrales fort cette année.
01:21 Le marché actions c'est différent, il est plus dans une situation attentiste
01:24 où finalement la hausse qu'on a constatée s'est fait essentiellement sur des rachats de short.
01:28 Donc il y a très peu de position longue structurelle.
01:31 Le positionnement est très loin d'être euphorique, il est même assez négatif.
01:35 Donc on attend mais on ne price pas de récession sinon le marché devrait être beaucoup plus bas.
01:39 Donc il y a une vraie déconnexion entre les deux.
01:43 Aujourd'hui en tout cas sur mon opinion je prends plus le parti du marché actions
01:48 dans le sens où je n'attends pas une récession très forte cette année.
01:51 Surtout avec un marché de l'emploi et une consommation qui tiennent relativement bien.
01:56 Même si on l'a mentionné l'indice Philly Fed.
01:59 Alors l'indice Philly Fed c'est un indice manufacturier donc c'est l'activité industrielle
02:03 qui témoigne d'une récession à venir mais sur la consommation et l'emploi on tient bien.
02:07 Donc on a cette déconnexion entre les deux marchés.
02:10 Plus le VIX spécifiquement c'est un reflet de ce qui se passe sur les options sur le S&P 500.
02:17 Comme on a de moins en moins d'acheteurs que ce soit d'options d'achat ou d'options de vente.
02:21 Donc de call ou de put sur ce marché là ça écrase finalement un peu artificiellement le VIX.
02:27 Mais on sent néanmoins que cette tendance haussière est un petit peu fébrile sur le marché actions.
02:31 Elle ne se fait pas comme un seul homme.
02:33 Donc une volatilité faible mais on le sait elle peut remonter très rapidement.
02:38 C'est en général dans ces moments là où on a un signe noir qui arrive.
02:41 Juste avant SVB, juste avant Crédit Suisse on avait une volatilité qui était déjà faible.
02:45 Qui était faible, je comprends.
02:47 Qui est remontée à ce moment là mais qui était déjà faible, qui était autour des 20.
02:50 Donc je ne serais pas surpris que cette volatilité là remonte à court terme.
02:54 Qu'est ce qui vous intéresse dans ce sujet de la volatilité, de la différence de volatilité
02:59 qu'on observe sur ces deux marchés majeurs, obligations et actions aujourd'hui Paul ?
03:04 Moi j'ai étudié beaucoup plus le VIX que l'indice MOVE.
03:10 Mais pour le VIX c'est un indice qui à la base est cyclique.
03:16 Donc plus il y a de la croissance économique, plus il y a de la croissance des bénéfices,
03:23 moins élevé est le VIX.
03:27 Et c'est pendant des périodes de récession que souvent le VIX est beaucoup plus élevé.
03:33 Donc peut-être le VIX il y a trop d'optimisme.
03:37 Mais je crois qu'il y a probablement des éléments techniques côté MOVE, côté obligations,
03:44 qui revient du fait que les obligations c'est un outil utilisé beaucoup par des banques centrales
03:55 depuis la crise financière.
03:58 Et ils sont revenus quelque part, ils ont réimaginé un peu leur politique depuis le mois de mars.
04:06 Donc une expansion des bilans pas prévus pour aider le système financier.
04:15 Mais aussi ces obligations d'aides souverains est très importante dans les bilans des banques.
04:23 Ils ont été obligés d'acheter la dette souverain pour augmenter leur taux de capitalisation.
04:34 Et je me demande si la volatilité qu'on observe en ce moment est liée au fait qu'il y a ce problème de crise dans les banques.
04:46 Un mouvement, une vente des obligations au même temps que les banques centrales étaient en train de vendre.
04:55 Et puis tout d'un coup, est-ce qu'ils vont changer leurs idées ?
04:58 Et avec tout ça, je crois qu'il y a beaucoup de doutes et beaucoup de débats sur le chemin des taux des banques centrales,
05:08 la politique des banques centrales.
05:10 Donc moi j'imagine que dans ces périodes de doute, où peut-être il y a un pivot qui arrive,
05:20 je peux facilement imaginer que la volatilité dans les obligations sera plus élevée.
05:25 Donc je crois qu'il y a pas mal d'éléments qui peuvent l'expliquer, mais franchement, j'en sais rien.
05:32 Non mais c'est très honnête de le dire comme ça, Paul, parce que c'est vrai qu'on est tous un peu surpris de voir,
05:39 pour plusieurs mois maintenant, une vol marché actions qui est quand même à un risque plus élevé que le risque obligataire,
05:46 en théorie, être quand même très inférieur et de manière persistante par rapport à ce qu'on observe sur les marchés obligataires.
05:54 Léa, je sais pas si ça vous inspire.
05:56 Ce que vous avez dit est intéressant.
05:58 Moi je crois qu'il ne faut pas négliger ce qui s'est passé en mars avec la crise bancaire,
06:02 qui a en fait un tout petit peu stoppé le mouvement de contraction des liquidités, de retrait des liquidités.
06:07 C'est une forme de quantitative easing déguisé, c'est-à-dire qu'on avait tous très peur de ce retrait de liquidités.
06:13 Par chance, il y a un signe noir que personne n'avait vu qui stoppe le mouvement.
06:17 Et donc effectivement, c'est essentiellement des mouvements de flux sur les obligations
06:21 qui sont très considérables par rapport à ce qu'il y a eu dans le passé qui créent cette volatilité.
06:26 Sur les marchés actions, moi je crois quand même, le vix et la volatilité d'une manière générale,
06:32 c'est aussi un aspect technique de flux.
06:34 Il n'y a pas de flux sur notre marché actions aujourd'hui.
06:36 Vous l'avez très bien dit, on a un marché qui est monté sur des rachats de short et des CTA,
06:41 mais en réalité il n'y a pas d'acheteurs structurels.
06:43 Donc quand il n'y a pas de mouvement, quand il n'y a pas d'acheteurs, quand il n'y a pas tout simplement l'effet d'achat-vente,
06:47 ça ne bouge pas.
06:49 En revanche, ça me fait un peu penser au dicton de "il faut se méfier de l'eau qui dort".
06:54 Je ne sais pas dans quelle mesure, ce n'est pas un signal de confort un petit peu trop évident.
07:00 Mais s'il n'y a pas d'acheteurs, si les acheteurs longs ne sont pas là, quel est leur état d'esprit ?
07:06 Ils attendent un petit retracement, un petit discount ?
07:10 Un petit voire pas très grand.
07:12 Ou est-ce que c'est plutôt la crainte d'un accident un peu plus marqué qu'une simple consolidation ou retracement de 5-10% ?
07:21 Ce qui est la vie normale d'un marché boursier.
07:23 Je pense qu'il y a vraiment les deux.
07:25 Il y a à la fois le trou d'air, le souffle qui pourrait être donné par un événement pas spécialement spectaculaire
07:31 et qui viendrait à corriger les marchés de 5-10%.
07:34 Et ça, ça permettra à beaucoup d'institutionnels de commencer à rentrer parce qu'en fait ils ne sont pas là.
07:40 Et l'allocation en action est très faible et ça les pénalise.
07:44 D'autant plus avec des niveaux de rendement, vu l'inflation après lesquels ils courent.
07:48 Même si côté obligataire c'est mieux qu'avant, c'est quand même difficile.
07:52 Et il y a quand même le spectre d'une problématique économique plus grosse.
07:57 C'est-à-dire des risques qu'on n'a toujours pas contenus depuis l'année dernière.
08:00 Ça fait 18 mois qu'on en parle entre l'inflation qui reste quand même très tendue,
08:04 la situation géopolitique y compris en Asie qui n'est pas très stable.
08:08 Il y a quelques éléments comme ça qui font penser qu'on n'est pas dans un marché tout rose.
08:13 Ce qui est assez fascinant et ce qui rend encore les choses un peu plus schizophréniques,
08:17 c'est qu'à la fois il faut quand même considérer un risque de ralentissement/récession soft,
08:25 peut-être un peu plus dur pour l'ensemble des scénarios macro.
08:29 Et en même temps, quand on voit le positionnement des investisseurs,
08:32 et c'était marqué encore dans la dernière enquête mensuelle que BOFAR réalise auprès des grands allocateurs d'actifs,
08:37 quand on voit la sous-détention des actions par rapport à la surdétention des obligations dans les allocations,
08:43 comme le dit le stratégiste de BOFAR,
08:45 si la récession ne se matérialise pas comme on l'anticipe dans les deux mois qui viennent,
08:51 ça va être un contre-pied majeur pour un certain nombre d'investisseurs
08:54 qui ne pourront pas tenir des positions aussi défensives et aussi bairriches d'une certaine manière.
08:59 Ce risque-là, il faut l'avoir en tête, c'est un risque important, c'est un risque mineur ?
09:05 Non, c'est un risque important, c'est le risque de "fear of missing out", de faux mots.
09:10 Le crash à la hausse, la capitulation haussière des actions.
09:13 Ce qui est déjà arrivé, c'est juste que le 2 janvier, personne n'était prêt,
09:18 mais on a eu un reversal sur toutes les classes d'actifs des actions à euro/dollar en passant par les obligs.
09:24 Donc c'est allé très vite, énormément de monde l'a raté, on le voit avec le positionnement,
09:29 donc aujourd'hui ce qu'on attend c'est une porte d'entrée.
09:32 Juste pour refaire la séquence, les PERF qu'on voit hier today depuis le 1er janvier,
09:36 +5, +10, +15 en fonction des indices, peut-être que 80% de cette hausse,
09:42 elle s'est faite sur 3 semaines en janvier, pour dire les choses.
09:44 5 semaines, au total 5 semaines.
09:46 Ça s'est fait en 5 semaines, donc soit on attend un petit retour pour rentrer,
09:52 soit on a besoin d'un catalyseur plus positif.
09:55 Le seul catalyseur plus positif que je vois pour qu'enfin les longs structurels reviennent sur le marché,
10:01 c'est qu'on ait une inflation qui continue de baisser progressivement,
10:05 avec des indicateurs économiques qui tiennent.
10:08 Si on a ça sur 2-3 mois, le marché va continuer de monter,
10:12 en plus tous les trimestres on a quand même des saisons de publication
10:15 qui trimestre après trimestre sont quand même plutôt bonnes,
10:17 parce que les attentes sont très négatives et à chaque fois on est surpris positivement,
10:20 dans l'ensemble, on a à peu près 2/3 de surprises positives.
10:24 Donc à partir de ce moment-là, oui ce sera pas tenable,
10:27 et à un moment donné les longs vont revenir sur le marché.
10:29 Ce sera à cause d'une baisse ou parce qu'on ne pourra plus tenir ces positions trop faibles sur le marché,
10:34 c'est un point d'interrogation.
10:36 Mais ce que j'attends, là en termes de séquence,
10:39 ce que je vois c'est qu'on a des attentes notamment sur les marges qui sont assez faibles,
10:45 sur la croissance des marges qui sont négatives sur 2 trimestres d'affilée aux Etats-Unis.
10:50 On voit les prix qui sont en train de baisser,
10:52 enfin les coûts pour les entreprises qui sont en train de baisser,
10:54 les prix qui restent stables, donc moi je vois plutôt des marges qui tiennent bien.
10:58 Et ça, ça peut être le catalyseur sur la séquence de 6 mois.
11:01 C'est comme ça que je vois.
11:04 Vous dites que les prix de vente s'ajusteront beaucoup moins vite
11:09 que les coûts d'entrant qui eux ont déjà commencé à chuter de manière significative.
11:14 En ce moment la BCE est en train de hurler du fait que l'inflation maintenant,
11:19 c'est uniquement le fait des boîtes qui ont augmenté leurs prix comme pas possible
11:23 et qui les maintiennent très haut malgré la décélération des prix à nouveau.
11:27 Donc moi je vois plutôt cette séquence.
11:30 Et puis après, plus tard, on a quand même d'autres sujets qui peuvent être à nouveau des signes noirs,
11:34 typiquement le debt ceiling dont on parlait à le plafond de la dette aux Etats-Unis.
11:38 Ça, ça va revenir très fort.
11:40 On est une année avant une élection présidentielle,
11:42 donc les républicains vont être très durs.
11:44 Et ça devrait passer comme à chaque fois, mais au prix d'augmentation d'impôts.
11:49 Donc la consommation qui tient, jusqu'à quand,
11:53 elle va tenir à court terme, mais à un moment donné elle va ralentir aussi.
11:57 C'est quelque chose qu'il faut garder en tête.
11:59 - Sur le plafond de la dette, on reviendra sur les marges,
12:02 mais sur le plafond de la dette, Paul, est-ce que c'est plus grave que les fois précédentes ?
12:07 Tout le monde a les yeux sur le CDS 5 ans américain
12:10 qui monte d'un BP comme ça une fois par jour jusqu'à peut-être 49, 50 points de base aujourd'hui.
12:17 - Je pense que c'est comme l'histoire du triple witching.
12:20 - Ça revient de manière régulière.
12:24 - Les gens ont besoin d'avoir peur de quelque chose.
12:29 Et le plafond de dette, ça revient tous les deux ans et c'est jamais un problème.
12:36 Ça peut nous amener un petit peu de volatilité pendant quelques semaines ou même quelques mois,
12:44 mais ce n'est pas important.
12:46 C'est le seul pays du monde où il y a ce problème.
12:48 C'est un problème qui est imposé par eux-mêmes d'avoir ce plafond.
12:53 Dans n'importe quel autre pays, est-ce qu'il y a ce problème ?
12:57 Et c'est un problème qui sera toujours résolu parce qu'ils ne peuvent pas tenir le plafond.
13:03 Je ne vois pas pourquoi ils ne se débarrassent pas de ce plafond.
13:09 - Oui, évacuent pas le sujet une bonne fois pour toutes.
13:11 - Parce que c'est un rendez-vous politique important à chaque fois pour ceux qui ne sont pas forcément au pouvoir au moment où ça se passe.
13:20 - Mais à mon avis, en considérant les investissements pour les années à venir, ce n'est pas un sujet.
13:28 - Vous n'avez pas de doute que, sans faire trop de politique,
13:32 on ne sera pas dans le moment de forte polarisation du paysage politique, plus que jamais, que ce soit en Europe ou aux Etats-Unis ?
13:43 Vous n'avez pas plus d'inquiétude pour cette fois que les fois précédentes sur cette question du plafond de la dette ?
13:51 Qui pourrait d'ailleurs arriver plus vite que prévu, selon les calculs.
13:54 On pensait peut-être que juillet, août, septembre, ce sera peut-être plutôt dès mi-juin.
13:58 - Ça sera toujours, d'ailleurs, avant de cette fois-ci.
14:00 - Oui, je comprends.
14:02 - Oui, mais dans le passé, la politique américaine, c'était toujours très tendu.
14:13 Oui, bien sûr, peut-être le côté droit républicain est plus extrême que dans le passé,
14:21 mais les républicains n'ont jamais joué le jeu avec les démocrates.
14:26 Quand c'était les démocrates, on pouvait, et vice-versa.
14:30 Donc, c'est toujours un problème, c'est un point de négociation, mais toujours, c'est quelque chose qui est résolu.
14:38 Et je pense que ce sera pareil cette fois-ci, parce que s'il y a vraiment des problèmes dans l'économie à cause de ça,
14:45 ce qui sera à faute, qui sera blâmé, ce sont les républicains.
14:51 Donc, ils n'osent pas pousser ce...
14:54 - Le Biden default, ce n'est pas une stratégie que l'ensemble du parti républicain peut tenir.
15:01 - Oui, à mon avis.
15:03 - Oui, et puis ce ne serait pas juste un sujet pour l'économie américaine,
15:06 ce serait quand même là un sujet très vite mondial, j'imagine,
15:09 si ce genre de blocage amenait effectivement un défaut technique sur la dette américaine.
15:16 Si on revient aux marges, peut-être, Léa, effectivement,
15:20 les marges peuvent tenir encore quelques mois, trimestres, nous dit Alexandre,
15:24 avec l'effet CISO un peu favorable toujours aux entreprises.
15:27 - Non, non, je souscris tout à fait à cette analyse.
15:30 Avec un bémol, c'est les volumes.
15:32 Parce que dans le chiffre d'affaires, il y a deux effets, il y a l'effet prix et il y a l'effet volume.
15:37 L'effet prix, il a été très, très marqué en 2022.
15:41 Il l'a été encore plus au quatrième trimestre.
15:44 La plupart des entreprises ont bien montré que si elles arrivaient à maintenir leur croissance de chiffre d'affaires,
15:49 top line, comme on dit, c'est parce qu'elles arrivaient à passer des prix.
15:53 Donc, effectivement, tant qu'on a le volume qui tient ou en tout cas le mix préservé,
15:58 sauf que, sauf que elles nous ont toutes dit, les volumes, ça commence à devenir compliqué.
16:03 Elles l'ont dit au Q4, elles l'ont dit au dernier trimestre de l'année 2022.
16:06 Elles sont un peu en train de le confirmer.
16:08 Et moi, dans les discours que j'entends des management et des analystes aussi,
16:12 c'est finalement, regardons un peu plus loin, parce qu'en fait, il va y avoir un moment où il va y avoir un mismatch.
16:18 Donc, est-ce que ça se caractérisera ou pas ? Est-ce que finalement, les effets bas seront bons et ça va être lissé ?
16:23 Par contre, quel est le carnet de commandes qui est en train de se construire là, en ce moment,
16:28 chez ces entreprises-là, pour avoir une vue sur 2024 ?
16:31 Parce qu'on ne sait pas très bien comment vont réagir ces marges.
16:34 Il pourrait peut-être y avoir des petits creux Q2, Q3 et encore.
16:38 Par contre, si le carnet de commandes ne se reconstruit pas correctement,
16:41 en particulier dans les secteurs qui sont structurellement conduits par leur carnet de commandes,
16:45 je pense à la construction par exemple, ça veut dire que 2024 sera très compliqué.
16:50 Et je pense que c'est ça, pour moi, le catalyste.
16:52 Et effectivement, les marges sont moins à risque.
16:55 C'est plus la vision. Est-ce qu'on va construire un bénéfice et une croissance des bénéfices sur les 2-3 prochaines années ?
17:01 Toute la question étant, effectivement, combien d'offres est-ce qu'il faut qu'on rattrape en matière de production,
17:06 dans des secteurs comme la construction ou l'automobile ?
17:08 Oui.
17:09 Là aussi, on peut imaginer quand même qu'ils sont plutôt dans une phase où l'offre se normalise
17:14 et donc les volumes de sorties vont pouvoir augmenter dans ces secteurs-là.
17:18 Absolument. Et c'est toute l'attente.
17:20 C'est pour ça que ces chiffres sur les carnets de commandes vont être regardés, à mon avis,
17:24 de très très près par les investisseurs sur le premier trimestre et le deuxième trimestre.
17:28 Comment vous regardez ces histoires de marges aujourd'hui, Paul ?
17:32 Partant de l'idée, effectivement, que le phénomène inflationniste,
17:35 l'esprit inflationniste de 2022 a permis à toutes les industries,
17:39 tous les secteurs d'avoir un pricing power que certains n'avaient pas forcément structurellement.
17:45 Si le phénomène se renverse, avec notamment une baisse des prix de production,
17:49 des coûts d'entrant, qu'en est-il du pricing power de certains secteurs ?
17:55 Je crois que, probablement comme la plupart des gens, j'étais surpris l'année dernière
18:01 par la rentabilité qui est restée aussi élevée.
18:07 Mais on a fait une analyse parce que moi, dans ma tête, j'ai une modèle qui veut dire
18:11 que prix de consommation accélère par rapport au prix de production.
18:15 Voilà, il y a une augmentation de marge et vice-versa.
18:21 Mais en fait, ça ne marche pas comme ça dans la réalité.
18:25 C'est plutôt l'inverse.
18:28 Et en essayant d'expliquer pourquoi, je crois que cet modèle qu'on a dans nos têtes,
18:34 oui, ça marche pour, par exemple, les boîtes comme Carrefour,
18:40 les fabricants de voitures, mais ça ne marche pas pour la plupart de la capitalisation boursière.
18:52 Donc, par exemple, le secteur tech, ce n'est pas le même modèle.
18:58 Donc, les secteurs pour lesquels cet modèle s'applique sont très...
19:06 - Sont des poids très réduits, vous dites, dans les marchés boursiers, au final.
19:09 - Exactement. Et donc, je crois que pour ça, c'est beaucoup plus compliqué.
19:14 Avec les salaires qui s'accélèrent, qui s'est accéléré l'année dernière et au début de cette année,
19:23 ça peut réduire les marges. Dans certains secteurs, c'est un coût qui est très important.
19:31 - Bien sûr.
19:33 - Normalement, cette année, en expliquant tout ça sur le modèle de rentabilité,
19:39 normalement, cette année, j'attendrai avec une décélération économique.
19:45 Normalement, il y a une décélération de bénéfices. Et ça, c'est quelque chose qui est assez clair.
19:51 Donc, normalement, j'attendrai une décélération de bénéfices.
19:55 Mais en même temps, il y a cette baisse des prix des matières premières.
20:02 Et normalement, ça doit aider certains secteurs.
20:09 Mais dans l'ensemble, je crois que la décélération économique gagnera.
20:15 Et donc, il doit y avoir une décélération de bénéfices.
20:18 - Est-ce qu'on voit cette décélération aujourd'hui ? Il n'y a plus ou moins que les U.S.
20:22 Où on voit que les bénéfices descendent. - Oui.
20:25 - Mais pas ailleurs. Mais je crois que ça va suivre ailleurs.
20:30 - C'est une question de séquence. C'est ça. Il y a un décalage.
20:32 Mais ce qu'on voit aux États-Unis sur les marges et la profitabilité des entreprises,
20:37 on va le retrouver pour une zone comme l'Europe un peu plus tard.
20:42 - À mon avis, oui.
20:43 - Je croyais que l'exemple du secteur automobile était quand même intéressant.
20:46 Alexandre, dans un secteur où l'intensité concurrentielle a toujours été très forte,
20:51 ça devient une clé de lecture intéressante à ce stade, l'intensité concurrentielle.
20:56 C'est-à-dire à partir du moment où les chaînes de valeur de production se sont détendues.
21:00 Est-ce qu'on est encore dans l'idée un peu de la trêve Covid ?
21:04 Le secteur auto, Elon Musk d'un côté, les Chinois et BYD de l'autre nous disent
21:09 « Non, non, non. Là, c'est maintenant. On va jouer les gains de part de marché.
21:14 Et on va faire en sorte que… On sacrifiera peut-être un peu nos marges,
21:18 mais on sera leader sur l'automobile électrique. »
21:21 - Absolument. L'intensité concurrentielle est revenue très fort et très vite.
21:26 Je ne dis pas que le pricing power du secteur automobile est faible,
21:29 mais en tout cas, il a été de courte durée à mon avis.
21:31 - Oui.
21:33 - Mais c'est ce que vous disiez.
21:35 Quand le marché chinois attaque avec un modèle qui est deux fois moins cher
21:39 que notre modèle le moins cher, forcément, ça va faire des dégâts.
21:43 Je ne sais pas à quel point ça va se développer, à quel point on va avoir des BYD chez nous.
21:48 On a quand même certains standards de qualité.
21:52 Et puis, on sait que les barrières à l'entrée peuvent être parfois élevées.
21:58 Donc, bon, typiquement, on verra ce que ça donne.
22:01 Ça ne plaît pas au secteur en termes boursiers.
22:05 Quand on a des baisses de prix aussi fortes, ça joue surtout.
22:09 On a cité Renault, on a cité Tesla, mais Stellantis, c'est pareil.
22:12 Les équipements entiers, c'est pareil.
22:14 D'ailleurs, tout est lié. C'est assez drôle.
22:16 Mais vous parliez de la baisse du prix des matières premières.
22:18 Typiquement, un secteur duquel je parlais sur la stabilité des marges, c'était la chimie.
22:23 Mais là, je rejoins ce qu'a dit Léa juste avant.
22:26 La chimie est liée à la construction.
22:28 Si la construction n'a pas de bonne perspective pour 2024,
22:31 les volumes de la chimie vont être catastrophiques.
22:33 Donc, voilà, tout est lié.
22:36 - Il y a des secteurs qui pourraient avoir une intensité concurrentielle qui revient.
22:39 Il n'y a pas que l'automobile.
22:41 Vous parliez de Carrefour, effectivement.
22:42 Tout ce qui est hypermarché, food and beverage de manière générale.
22:45 À partir du moment où ça se détend, on a des promotions de partout.
22:48 Et la concurrence revient assez fortement.
22:51 Est-ce que c'est une tendance générale ?
22:53 Je ne sais pas. Je pense que c'est limité à certains secteurs.
22:56 - Oui, j'entends.
22:57 - Typiquement, ceux qui ont un pricing power très, très fort.
23:00 Si on prend l'exemple du luxe,
23:03 là, on ne verra pas d'intensité concurrentielle revenir très fortement.
23:08 L'augmentation des volumes augmente aussi les marges.
23:11 Typiquement, LVMH, c'est comme ça que ça fonctionne.
23:13 Il y a un modèle de ça qui fonctionne très bien.
23:15 Ils augmentent le prix très, très fort.
23:17 Donc, voilà.
23:18 En fait, le point principal de tout ça, c'est que par secteur,
23:22 en fait, on ne peut même plus avoir une analyse par secteur.
23:25 C'est-à-dire qu'à l'intérieur de chaque secteur,
23:27 il faut regarder les marchés cibles de chaque entreprise.
23:30 Un exemple qui est très parlant, et je terminerai là-dessus,
23:34 c'est sur les semi-conducteurs qu'on a un peu évoqué.
23:37 ST Micro et Infineon, c'est très lié à l'auto.
23:42 C'est très lié au PC, au smartphone.
23:44 Là aussi, on peut avoir une intensité concurrentielle qui revient.
23:47 Un AMD, un Nvidia, c'est très lié à l'intelligence artificielle,
23:51 qui est quand même une thématique qui est en train d'être boostée assez fortement.
23:55 On voit des différences de performance entre les deux dans le même secteur,
23:58 mais qui sont hallucinantes.
24:00 Donc l'analyse aujourd'hui financière doit être extrêmement fine,
24:08 et entreprise par entreprise.
24:10 On ne peut même plus donner de vue générale sur un secteur aujourd'hui.
24:13 Je voudrais rajouter un point très important sur cette notion de pricing power.
24:17 Pour moi, il y a quelque chose qui est complètement nouveau,
24:19 et c'est parfaitement caractérisé dans l'industrie automobile.
24:22 Le pricing power, lorsque vous avez des entreprises
24:25 qui n'ont plus la liberté de leur choix technologique,
24:28 et pour lesquelles les régulateurs peuvent arriver du jour au lendemain
24:32 pour changer les règles du jeu,
24:34 là on voit bien que le luxe, on n'y est pas du tout.
24:37 Donc c'est très bien, ça ne bouge pas.
24:39 Par contre, les constructeurs automobiles européens notamment,
24:41 ont largement tiré la sonnette d'alarme sur ce qu'on est en train de vivre aujourd'hui.
24:44 C'est-à-dire qu'ils l'ont dit, ces plans à horizon 15-20 ans sont absolument inaccessibles,
24:50 les technologies ne sont pas matures.
24:52 Vous ne nous laissez pas, nous constructeurs, choisir chacun indépendamment les uns des autres
24:56 la technologie qui nous semble être la bonne.
24:58 Donc on fait tous la même chose, et on est dépendants d'une chaîne de valeur qui n'est pas en Europe.
25:02 Donc on va se faire totalement massacrer sur les prix, et on est en plein dedans.
25:06 Et là, si vous regardez depuis effectivement 18 mois,
25:09 les secteurs pour lesquels l'Etat devient interventionniste à la dernière minute,
25:13 il y a eu l'énergie, il y a l'automobile, il y a effectivement les bâtiments,
25:16 avec les normes de rénovation, etc.,
25:18 deviennent des secteurs où le pricing power est compliqué,
25:21 et ça va être de plus en plus compliqué.
25:23 Pour moi, c'est un signal d'alerte très fort en tant qu'investisseur.
25:26 J'ai toujours pensé que les secteurs régulés étaient dangereux.
25:28 Jusqu'à présent, c'était des secteurs ou des entreprises dans lesquelles l'Etat était fortement présent,
25:32 la défense, les télécoms, etc.
25:34 Mais là, ça s'est largement élargi parce que la régulation est partout.
25:37 Et en même temps, vu le poids des politiques publiques dans le mix économique aujourd'hui,
25:44 si l'argent va là où l'Etat le décide, en tant qu'investisseur,
25:50 c'est un peu bête, mais suivre l'argent là où il va, ce n'est pas inutile.
25:55 Et c'est pour ça qu'Elon Musk permet cette baisse des prix,
25:57 parce qu'il sait très bien qu'il va l'avoir le marché en face,
25:59 puisque ça y est, les incitations sont présentes au niveau de son gouvernement.
26:03 Donc le marché final est là.
26:06 Sur l'histoire de l'inflation au sens macroéconomique du terme, Paul,
26:11 est-ce qu'on est sur des histoires simplement décalées
26:16 entre ce qu'on observe aux Etats-Unis et en Europe,
26:19 où de plus en plus s'estime que ce sont deux histoires qui prennent des chemins différents désormais ?
26:26 C'est vrai que l'exemple de l'inflation britannique qui a été publiée hier ou avant-hier,
26:31 je crois pour le mois de mars, avec le côté exacerbé du laboratoire britannique
26:36 qui cumule les chocs depuis le Brexit,
26:39 mais quand même, plus d'un an, 15 mois après la première hausse de taux de la Banque d'Angleterre,
26:44 on a encore une inflation globale à deux chiffres,
26:47 une inflation alimentaire qui est quasiment à 20% et une inflation cœur qui est à plus de 6%.
26:52 On retrouve quand même quelques schémas un peu communs en zone euro,
26:58 avec notamment le prisme de l'inflation alimentaire,
27:01 qui devient le sujet cœur du phénomène inflationniste chez nous,
27:06 contrairement à ce qu'on observe aux Etats-Unis.
27:09 Je crois qu'il y a, pour moi, l'histoire en Europe, c'est quelque chose qui est décalé
27:20 par peut-être trois, six mois par rapport aux Etats-Unis.
27:24 L'inflation a été plus élevée en Europe l'année dernière. Pourquoi ?
27:30 Il y avait peut-être deux raisons importantes.
27:32 D'abord, l'énergie. C'est une histoire européenne avec le prix du gaz naturel
27:40 qui s'est explosé en Europe et qui a eu des impacts, mais avec un lag dans certains pays
27:47 parce que les gouvernements se sont intervenus.
27:51 Et maintenant que le prix dans les marchés est en train de se normaliser,
27:58 il y aura l'impact inverse où il y aura une tendance vers le bas de l'inflation en Europe.
28:05 Mais encore une fois avec un lag parce que les gouvernements, avec les actions...
28:11 - Ont atténué, adouci ce phénomène.
28:13 - Oui. Et donc, au Royaume-Uni, le mois d'avril, il y avait la menace d'une augmentation
28:22 du prix de l'électricité et du gaz pour nous, les consommateurs,
28:29 parce que l'aide qui a été offerte par le gouvernement...
28:36 - Arrivé à expérimenter, c'est énième.
28:39 - Donc, il y aura, je crois, un impact négatif sur l'inflation en Europe, venant de l'énergie,
28:48 mais avec un lag qui va se différencier par pays.
28:53 Le deuxième facteur qui a poussé l'inflation plus élevée en Europe, c'était le dollar.
28:59 Donc, un dollar fort l'année dernière, euro et livre-star, faible, ça augmente l'inflation en Europe.
29:07 Et surtout, quand on regarde quelque chose comme l'alimentation, au Royaume-Uni,
29:12 où on dépend sur le reste du monde pour 50 % de notre alimentation,
29:20 avec un élément idiosyncratique britannique l'année dernière, avec les struts et quasi-quartang,
29:30 donc avec une baisse du sterlingue prononcée, qui a poussé vers le haut l'inflation importée.
29:39 Mais maintenant, on est dans une situation différente où le dollar est en train de s'affaiblir.
29:45 Donc, prix des gaz naturels qui est en train de descendre, dollar qui est en train de s'affaiblir aussi.
29:52 Ça veut dire pour moi qu'à terme, en Europe, l'inflation va descendre beaucoup plus rapidement qu'aux U.S.
30:02 - Ah ! - À terme, à terme.
30:04 - Je comprends.
30:06 - Regardons aujourd'hui... - Les marches à la baisse seront plus rapides en Europe.
30:10 - Les prix de production en Allemagne, par exemple.
30:14 Je crois que le mois précédent, le taux d'inflation était à peu près 15 %.
30:21 Pour ce mois-ci, c'était 7 %. - Ça va très vite.
30:25 - Il y a quelque chose qui peut aller très vite.
30:28 Mais partout, aux U.S., au Royaume-Uni et probablement dans l'Asie en Europe,
30:34 il y a un problème dans l'inflation encore venant des prix de logement, le coût de logement.
30:43 - Oui, oui. - C'est quelque chose aux U.S.
30:45 C'est le seul élément aux U.S. qui continue à avancer.
30:50 Mais il y a une corrélation assez importante avec les prix de ménage, avec les prix des maisons.
30:57 Il y a une corrélation avec un délai.
31:00 Le prix des maisons est en train de descendre.
31:03 Pareil au Royaume-Uni.
31:05 Au Royaume-Uni, il y avait deux problèmes cette fois-ci dans l'indice d'inflation.
31:10 C'était l'alimentation et le prix de logement.
31:16 - Oui, le prix du loyer, le loyer implicite, etc.
31:18 - Mais le prix des maisons est en train de descendre.
31:21 Donc, ce problème-là va se régler aussi.
31:24 Donc, je crois que les gens franchement, ils surestiment le problème d'inflation sur les prochaines 12 et 24 ans.
31:34 - D'accord. Donc, du point de vue des banques centrales, vous dites qu'il ne faut pas qu'elles se remettent à craquer aujourd'hui
31:39 ou à paniquer face à une inflation qui serait encore un peu trop collante.
31:44 - Le problème de la Fed est que la Fed est toujours en train de regarder dans le rétroviseur et ne regarde pas assez en avant.
31:53 Heureusement, la Banque d'Angleterre n'a pas été brillante dans les derniers 12 mois.
32:02 Mais au moins, la Banque d'Angleterre a des prévisions sur deux ans.
32:10 Et elle a tendance à faire des décisions en fonction de ces prévisions.
32:18 - Oui. C'est logique différente.
32:21 Bon. Sur les décisions de banques centrales, est-ce qu'on peut encore être surpris par un degré d'agressivité supplémentaire aux Etats-Unis ?
32:32 En Europe, Alexandre ? Ou est-ce qu'on arrive quand même au bout de l'histoire ?
32:39 - Toutes choses égales par ailleurs, non. On ne peut pas s'attendre à un excès de hawkishness ou d'agressivité maintenant.
32:46 Ceci étant dit, je suis d'accord. L'inflation est en train de décélérer.
32:51 On est dans une situation plus avancée aux Etats-Unis qu'on l'est en Europe.
32:55 On commence à avoir un petit mouvement de décélération de l'inflation core, mais c'est minime. Il faudrait que ce soit confirmé.
33:05 L'élément que je retiens, c'est que la Fed et la BCE regardent dans le passé.
33:09 Elles regardent dans le passé. Elles regardent leurs erreurs du passé.
33:12 Il faut voir que l'inflation était transitoire. Elles ont compris que ça ne l'était pas.
33:18 Aujourd'hui, elles ont peur de lâcher la bride trop tôt et de faire une nouvelle erreur.
33:24 Ce qui est compréhensible, surtout pour la BCE, puisque si l'inflation vient des prix de l'énergie, on sait qu'ils peuvent repartir à la hausse très fort à un moment donné.
33:33 Ce n'est pas forcément sur les 12 mois qui viennent, mais on va avoir des prix qui repartent.
33:37 Une inflation qui se retend.
33:42 A court terme, on voit le mouvement d'inflation qui est plutôt la décélération.
33:47 Ce que j'attendrais, c'est probablement une à deux hausses de 25 points de base pour la Fed, suivi d'une pause.
33:54 J'insiste sur le mot "pause". Pas de pivot.
33:57 Pareil pour la BCE.
33:59 Même si la situation est décalée, et elle l'a toujours été, il y a un an, sur ce même plateau, on disait "est-ce qu'il va y avoir une dichotomie entre la politique de la BCE et la politique de la Fed ?"
34:12 Il n'y en a pas eu. Il n'y en a jamais eu. Je ne vais pas dire qu'il n'y en aura jamais, mais elles se suivent quand même beaucoup.
34:18 Je pense que la BCE, au bout d'un moment, va faire pareil.
34:22 Les effets de second tour, ça a pu être une crainte parce que l'inflation salariale a été élevée.
34:27 Mais l'augmentation des salaires en réel...
34:30 Oui, négative.
34:31 Mais oui.
34:32 C'est focalisé sur les salaires quand l'inflation a été tirée par les marges.
34:36 Exactement. De voir un surplus de consommation lié à l'augmentation des salaires qui amènerait un second tour d'inflation, je suis assez d'accord.
34:44 On surestime peut-être un petit peu à court terme le problème de l'inflation.
34:47 Comment on se positionne en matière d'investissement face à des scénarios où un champ des possibles...
34:55 Est-ce qu'il s'est réduit ? Est-ce qu'il reste quand même très ouvert ?
34:59 On parle de récession, mais on parle aussi toujours d'un risque d'une récession peut-être toujours plus lointaine que ce qu'on imagine, etc.
35:08 Comment on gère ça dans les portefeuilles ?
35:10 Ça reste très ouvert. La lecture est hyper compliquée.
35:15 La façon dont je gère ça, ce serait... En allocation, on revient à quelque chose de diversifié.
35:27 Parce qu'aujourd'hui, les rendements obligataires redeviennent quand même attractifs à long terme.
35:32 Même sur la partie court terme de la courbe, on a des rendements qui sont quand même assez sympas, entre 3 et 5 %, donc on va aller les chercher.
35:40 Même si c'est moins que l'inflation.
35:43 Et ensuite, sur la partie action, c'est peut-être assez bête ou assez simpliste, mais je me concentre finalement sur les méga-cap partout.
35:55 Ce sont celles qui font la perf !
35:58 On a des flux, les flux qui arrivent sont quand même en grande partie sur la gestion passive, ce qui alimente encore ces méga-cap.
36:06 Donc GAFA aux Etats-Unis, Granola en Europe...
36:12 C'est Goldman ça, mesdames, messieurs !
36:15 C'est bien cité la sorte !
36:18 On va chercher ces méga-cap et finalement on n'essaie pas de trouver des petites valeurs, concepts qui vont faire de l'alpha maintenant.
36:29 On cherche à rester simple et à un positionnement, même si l'exposition est assez défensive en termes séculaires.
36:37 C'est quoi Granola ? Parce que je sais que Goldman, ils m'en ont parlé il y a déjà un moment, mais il pousse aujourd'hui ce...
36:44 Il y a beaucoup de santé, il y a GlaxoSmithKline, Roche, Nestlé, ASML pour la taille...
36:52 D'accord, je vais refaire précisément l'acronyme.
36:55 C'est les méga-cap européennes, croissance plutôt difficile.
36:58 C'est à côté petits biscuits, petits gâteaux...
37:00 C'est la croissance traditionnelle.
37:02 Qu'est-ce qui vous intéresse dans l'allocation, la stratégie en ce moment ?
37:08 On est défensif à cause de la crainte d'accélération continue dans l'économie mondiale,
37:17 mais je suis d'accord, le risque est que tout le monde est positionné comme ça.
37:22 On est sous-pendré côté actions, mais ça s'exprime plutôt aux USA.
37:27 D'accord.
37:28 J'aime bien toujours la Chine, côté actions, marché émergent...
37:35 Chine, il peut y avoir un nouveau souffle ? Parce que ça a été un peu alaborieux quand même.
37:40 Il y a eu le grand mouvement de fin d'année ?
37:43 Il y a un momentum économique qui est plus intéressant, mais plus que ça, il y a une valorisation que je trouve attrayante.
37:52 Moi, je travaille plutôt sur les valorisations.
37:55 Je peux me tromper sur les aspects économiques, et probablement je vais me tromper sur les aspects économiques,
38:03 mais les valorisations, c'est quelque chose sur lequel on est sûr.
38:08 Côté obligations, malgré la crainte de la décélération, je trouve que crédit, côté « investment grade » et « high yield »,
38:19 ça reste intéressant, même si on attend une augmentation de « spread » et une augmentation de taux de défaut.
38:29 Même avec ces prévisions-là, ça reste assez intéressant.
38:35 Et au maximum, côté liquidité.
38:39 Pas de volatilité, pas de corrélation avec les autres classes d'actifs, et avec un rendement qui est intrusif.
38:47 Léa, pour finir, avec vous, sur la stratégie actions, pour le coup, peut-être ?
38:51 Les deux, je conclue exactement de la même manière que mes deux collègues du jour, très défensifs sur les actions.
38:57 Plutôt à réduire la voilure, d'ailleurs, sur les stratégies que j'ai, qui sont mixtes,
39:01 à reprendre un peu de duration sur les obligations, avec un sujet qualité très important,
39:06 vous l'avez dit, les taux de défaut, on s'attend à ce qu'ils augmentent,
39:09 mais c'est effectivement plutôt des compositions avec des valeurs de grande qualité et liquides.
39:13 J'insiste sur la liquidité aussi.
39:15 Des marchés qui temporisent, donc, avant les prochaines échéances,
39:21 et une échéance technique, déjà, demain, sur les marchés avec la journée des Trois Sorcières.
39:25 Merci à vous trois, merci d'avoir été les invités de « Planète Marché » ce soir.
39:27 Paul Jackson, Yves Vesco, Léa Dulanchet, la DNCA et Alexandre Tailleb, Sycomore Assets Management.

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