SMART BOURSE - L'invité de la mi-journée : Juliette Cohen (CPR AM)

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Mardi 25 avril 2023, SMART BOURSE reçoit Juliette Cohen (Stratégiste, CPR AM)
Transcript
00:00 [Musique]
00:10 Mais d'abord, les prochaines informations macroéconomiques qui vont cristalliser les décisions des banques centrales
00:16 prévues la semaine prochaine pour la Fed et la Banque Centrale Européenne.
00:19 Nous en parlons avec Juliette Cohen, avec nous par téléphone, stratégiste chez CPR Asset Management.
00:24 Bonjour et bienvenue Juliette.
00:26 Merci beaucoup d'être avec nous. Prenons peut-être la partie européenne pour commencer.
00:30 La décision de la BCE sera rendue la semaine prochaine, je le disais, le jeudi 4 mai.
00:35 Entre temps, les investisseurs auront pris connaissance des premières estimations de croissance trimestrielle
00:40 pour les pays majeurs de la zone euro et pour l'ensemble de la zone euro.
00:43 Ces chiffres vont être publiés en fin de semaine.
00:45 Nous aurons également des estimations d'inflation pour le mois d'avril
00:48 pour des économies comme les économies allemandes, françaises et espagnoles.
00:52 Juliette, sur le front de la croissance, ce sont des chiffres qui vont refléter le passé récent
00:58 mais qui vont montrer quand même une dynamique hors norme de l'activité en zone euro au premier trimestre.
01:04 Oui, tout à fait. On a un PIB de la zone euro qui a stagné au quatrième trimestre 2022.
01:12 Et là, quand on regarde les enquêtes de conjoncture, notamment les dernières enquêtes PMI,
01:18 on voit qu'on a une accélération de l'activité en zone euro sur le début d'année 2023
01:24 grâce à la dynamique du secteur des services notamment.
01:27 Et donc on attend un PIB de la zone euro en légère hausse au premier trimestre.
01:32 C'est +0,2% qui est attendu en croissance trimestrielle selon le consensus.
01:39 Donc on voit que sur 2023, on démarre l'année avec une croissance positive.
01:47 On est dans une phase de ralentissement mais que l'effondrement de la croissance qu'on attendait en fin d'année 2022 ne s'est pas réalisé.
01:56 Jusqu'à présent, les inquiétudes portaient essentiellement sur l'industrie manufacturière, sur l'industrie au sens large.
02:04 Juliette, avec des enquêtes d'activité pour cette partie-là qui ont été très négatives, qui restent très négatives,
02:11 mais quand on voit ce qui est réalisé en matière de production industrielle, par exemple,
02:17 les chiffres sont toujours publiés avec un peu de décalage dans le temps,
02:20 mais quand on a quand même une idée de ce qui s'est passé en termes de production d'activité industrielle et manufacturière au premier trimestre en zone euro,
02:27 ça n'est pas "booming" certes, mais en niveau, c'est quand même quelque chose qui fait mieux que bien résister, Juliette.
02:35 Oui, tout à fait. En fait, on a dans les enquêtes un écart historique entre le secteur des services et le secteur manufacturier,
02:43 et les enquêtes dans le secteur manufacturier sont assez mal orientées, notamment du fait des craintes sur les carnets de commandes.
02:52 Mais quand on regarde les chiffres de production industrielle, en fait, on a des effets de base qui sont assez favorables,
02:59 parce qu'il faut se rappeler que la production dans le secteur automobile ou dans le secteur de la chimie ont été très pénalisées l'année dernière
03:07 par des pénuries d'intrants ou par les prix très élevés de l'énergie.
03:11 Et donc, l'amélioration des chaînes d'approvisionnement et la baisse des prix d'énergie ont permis à l'activité de redémarrer assez nettement
03:19 dans ces deux secteurs industriels qui sont majeurs pour l'Europe.
03:23 Donc on va avoir probablement une progression de l'activité industrielle sur l'ensemble du premier trimestre 2023.
03:31 Combien de temps est-ce que ce schéma est soutenable dans le temps d'une certaine manière, Juliette ?
03:36 L'idée que l'offre a encore de la place pour rattraper ce qui a été perdu ou mis entre parenthèses pendant la période Covid,
03:44 face à une demande qui reste, au moment où on se parle, sans doute toujours relativement résiliente, mais qui peut soulever aussi des interrogations sur la suite ?
03:53 Alors quand même sur la suite, on a plus d'interrogations puisqu'on voit quand même globalement au niveau mondial un ralentissement du commerce mondial qui est assez net.
04:04 Quand on regarde les indicateurs avancés comme les exportations coréennes, elles sont en zone de contraction de façon assez nette.
04:13 Quand on regarde aussi le redémarrage chinois, on voit que c'est tiré par la consommation de déménage, mais du côté du secteur industriel, ça reste encore relativement modeste.
04:24 Donc c'est vrai qu'on a plutôt dans l'idée que l'on va avoir passé cette période de rattrapage un ralentissement plus marqué de l'activité dans le secteur industriel.
04:36 Pour la décision de la Banque Centrale Européenne jeudi prochain, Juliette, à ce stade, il faut estimer que l'inflation, le cœur de l'inflation en zone euro va rester la préoccupation première des banquiers centraux européens ?
04:50 Oui, Philippe Leyne a évoqué trois chiffres majeurs selon lui. Le PIB du premier trimestre, la dynamique d'inflation évidemment, et là on aura le chiffre pour l'ensemble de la zone euro mardi prochain.
05:06 Il devrait être un très léger ralentissement. Il faudra aussi regarder comment se comporte l'inflation des services.
05:14 Et puis le dernier élément c'est l'évolution de la dynamique de crédit en zone euro pour voir l'effet du referment monétaire sur les prêts du secteur bancaire.
05:27 La traduction en matière de hausse de taux va être de savoir s'il faut faire 50 comme le meeting précédent ou 25.
05:37 C'est un peu la même discussion que la BCE avait déjà eu en décembre avec des termes un peu différents puisque la question à l'époque était de savoir s'il fallait continuer de faire 75 ou revenir à 50.
05:48 Comment est-ce que les termes de la discussion vont se poser pour la BCE de ce point de vue-là la semaine prochaine, Juliette ?
05:56 Alors il nous semble que la BCE va faire une hausse de 25 points de base la semaine prochaine, mais elle pourrait faire comme en décembre, c'est-à-dire conserver un discours assez dur
06:07 avec l'idée qu'il y aura d'autres mouvements dans les prochains mois. Et également il y a toute la question du quantitative tightening qui va se poser.
06:21 Donc là aussi il est possible que la BCE annonce la fin totale des réinvestissements de titres à compter du mois de juillet.
06:31 Donc ça aussi ça pourrait contribuer à porter un discours peut-être un peu plus dur que ne le laisserait penser la hausse de 25 points de base.
06:40 Si j'ai bonne mémoire en termes de price action, la décision de décembre alors en première intention qui nous faisait passer de 75 à 50 avait été perçue quand même avec le discours de Christine Lagarde à l'époque comme une réunion plutôt au quiche.
06:54 Oui tout à fait et on pourrait avoir un peu la même séquence cette fois-ci encore.
07:01 Décision pour la BCE jeudi prochain le 4 mai. Avant cela la Fed aura elle rendu sa décision sur ce que tout le monde attend comme étant la dernière hausse de taux de ce cycle.
07:12 Une hausse de taux de 25 points de base qui viendra peut-être terminer ce cycle historique de resserrement monétaire de la réserve fédérale américaine.
07:20 Juliette est-ce que c'est votre avis également chez CPA Asset Management et d'un point de vue tactique est-ce que la Fed a intérêt la semaine prochaine à dire clairement que sa hausse de taux de 25 points de base sera la dernière ?
07:33 Alors il nous semble que la Fed devrait aussi faire un mouvement de 25 points de base de hausse et qu'elle devrait aussi annoncer la fin du cycle de resserrement monétaire.
07:43 Donc ça pourrait passer par un communiqué qui dirait que le conseil prévoit de maintenir les taux sur le niveau actuel mais qu'il serait prêt à augmenter davantage les Fed Funds pour ramener l'inflation à 2% si cela était nécessaire.
07:57 Oui donc c'est plutôt il y aura toujours cette option dans le communiqué ou dans le wording de la réserve fédérale américaine et une option plutôt à la hausse sur les taux d'intérêt toujours ?
08:11 Oui tout à fait les banques centrales restent très data dépendantes et on voit qu'il y a quand même des incertitudes très fortes sur l'évolution de l'inflation.
08:21 Il y a plusieurs membres de la Fed qui ont parlé la semaine dernière avant la période de blackout et qui disaient qu'il y avait évidemment beaucoup d'incertitudes encore.
08:30 Donc évidemment la Fed ne voudra pas se lier trop et maintiendra cette optionnalité pour faire face à d'éventuelles données d'inflation notamment qui seraient moins favorables que prévues.
08:45 Un mot peut-être également du plafond de la dette américaine, le feuilleton qui revient régulièrement avec la dramaturgie politique au congrès dont on commence à avoir l'habitude.
08:56 Juliette néanmoins visiblement ce plafond de la dette 2023 génère un peu plus de stress dans le marché que les épisodes précédents habituels.
09:07 Juliette qu'est-ce qu'on peut dire de ce stress ? Comment est-ce qu'on peut le mettre en perspective par exemple ?
09:12 Et qu'est-ce que ça peut impliquer effectivement dans la recherche d'un compromis ?
09:17 Parce qu'il y a toujours le scénario extrême du défaut, du Biden default. Il y a surtout le scénario central qui est de dire qu'il va falloir trouver un compromis politique avec peut-être des conséquences économiques pour gérer cette question du plafond de la dette cette fois-ci.
09:32 Alors déjà ce qu'il faut dire c'est qu'il y a eu beaucoup moins de recettes fiscales sur la première quinzaine d'avril que ce qui était prévu ou ce qui avait eu lieu l'année dernière.
09:44 Et donc l'idée qu'on pourrait atteindre plus rapidement la limite au fonctionnement du trésor, c'est-à-dire peut-être en juin-juillet et pas à la fin de l'été, ça contribue à raviver le stress.
09:59 En termes de données de marché, ce qu'on a pu voir c'est que le spread souverain CDS américain s'est écarté et qu'on a un écart qu'on a rarement vu et qui s'est creusé entre les petits bips à trois mois et à un mois
10:14 à cause de craintes plus fortes d'un éventuel défaut de paiement de l'État américain dès le mois de juin s'il n'y avait pas de relèvement du plafond de la dette.
10:26 Alors ce qu'il faut dire c'est que depuis les années 60, le Congrès a relevé 78 fois le plafond de la dette.
10:32 C'est généralement comme ça que ça se termine, oui.
10:38 Oui. Après, parfois ça s'est fait dans des conditions beaucoup plus tendues, notamment en 2011 où les Républicains avaient demandé des baisses de dépense assez fortes au président Barack Obama.
10:53 Et donc le stress qui avait été assez durable avait conduit à une hausse des coûts d'empreinte de l'ordre de 1,3 milliard de dollars sur l'année selon les estimations du département du Trésor américain.
11:09 Donc on voit que en termes budgétaires ça peut avoir des impacts significatifs.
11:13 Ce que l'on peut dire c'est que les Républicains ont proposé des baisses de dépense mais d'un montant qui sont très très importants, 4 500 milliards de dollars.
11:27 Et en échange, ils s'engageraient à augmenter le plafond de la dette de 1 500 milliards de dollars, soit jusqu'en mars 2024.
11:34 Donc ça c'est la base de la proposition républicaine et pour l'instant les négociations sont un peu au point mort mais on espère que les choses vont s'activer dans les semaines qui viennent.
11:47 Bon, rappel effectivement avec une situation de déclatement du paysage politique assez extrême puisque je crois que les Républicains n'ont qu'une poignée de voix de majorité à la Chambre des représentants aujourd'hui.
11:59 Et même le plan emmené par le speaker de la Chambre républicain n'est pas sûr d'avoir une majorité républicaine à la Chambre des représentants.
12:08 Merci beaucoup Juliette. Juliette Cohen qui était avec nous par téléphone, stratégiste de CPR Asset Management.

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