Retrouvez "En toute subjectivité" sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/en-toute-subjectivite
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00:00 toute subjectivité ce vendredi avec la présidente de la Fondation des femmes.
00:04 Bonjour Anne-Cécile Maïfert.
00:05 Bonjour.
00:06 Ce matin, nous allons à Mayotte.
00:08 Une île française qui évite la Première Ministre car une opération du ministère
00:12 de l'Intérieur dite « Wambushu » est en cours.
00:14 Gérald Darmanin souhaite lutter contre la délinquance qu'il attribue à la surpopulation
00:19 étrangère.
00:20 Alors il expulse les étrangers en situation irrégulière, détruit leur habitat précaire
00:24 et sort l'artillerie.
00:25 Par la force et la violence et au risque d'aggravation des tensions, de fractures sociales et d'atteinte
00:29 aux droits humains, l'État français cherche ainsi à contrôler la démographie de ce département
00:34 extrêmement pauvre.
00:35 Cette politique a son penchant féminin, le contrôle des ventres par la stérilisation
00:40 des jeunes femmes comoriennes rendues responsables elles aussi de cette surpopulation redoutée.
00:45 Que voulez-vous dire ?
00:46 L'État ne souhaite pas investir plus de moyens pour assurer les services publics d'éducation
00:50 ou de santé ou même d'accès à l'eau qui permettraient de suivre la forte croissance
00:53 de la population qui pourrait doubler dans les 30 prochaines années.
00:56 Alors l'idée est de limiter les naissances, entre autres, via les ligatures des trompes,
01:00 une méthode de stérilisation définitive conseillée par le personnel médical lorsque
01:04 les femmes viennent accoucher.
01:05 Olivier Braik, directeur général de l'Agence régionale de santé, l'assume dans une interview
01:10 en mars dernier.
01:11 Cette politique néocoloniale, raciste et sexiste n'est pas sans faire écho aux stérilisations
01:16 et avortements, forcés pour le coup au siècle dernier dans l'île toute proche de la Réunion,
01:21 mis à jour par le journal Libération dans les années 70 et plus récemment par Françoise
01:26 Vergès dans son livre « Le ventre des femmes ». Même s'il n'est pas prévu que les
01:30 stérilisations à Mayotte soient imposées, il est clair que les bébés nés là-bas
01:34 sont des bébés dont l'État ne veut pas.
01:36 Il est clair aussi que les femmes de Mayotte n'auront pas accès à la même politique
01:39 de santé sexuelle que les autres françaises.
01:41 Car ici, sur le continent, il est à l'inverse difficile pour les femmes en âge de procréer
01:46 d'avoir une ligature des trompes alors même qu'elles l'auraient demandé.
01:49 Dans son livre « Mes trompes, mon choix » sorti en février dernier, Lorraine Lévy
01:54 analyse l'histoire de la ligature des trompes et explore les obstacles qui empêchent encore
01:58 certaines femmes d'accéder à cette opération pourtant légale en France depuis 22 ans,
02:02 à condition d'être majeure et consentante.
02:04 Que traduit selon vous ce deux poids deux mesures ?
02:07 L'État, ou plutôt en l'occurrence le patriarcat, a un avis sur quelles femmes
02:12 peuvent faire des enfants et combien d'enfants.
02:14 Pourtant, avortements, contraceptions, stérilisations aux familles nombreuses, l'État n'a
02:18 pas à se mêler des choix reproductifs des femmes, que ce soit pour les empêcher d'enfanter
02:23 ou pour les empêcher d'avorter.
02:24 Il doit les informer et leur procurer les services auxquels elles ont droit.
02:28 Bref, leur permettre de maîtriser leur fécondité par un choix libre et éclairé.
02:32 Sur cette antenne, il y a une semaine, un député Rassemblement National revendiquait
02:36 sans phare une politique nataliste pour financer la retraite à 60 ans s'ils étaient élus
02:41 en 2027.
02:42 Concrètement, faire faire plus d'enfants aux femmes françaises.
02:45 Et la meilleure manière de le faire quand on est à la tête de l'État, c'est de
02:48 renier sur leurs droits.
02:49 Cette liberté des femmes est un âpre combat jamais terminé qu'il faut continuer à
02:53 mener partout qu'on habite Paris ou Mamoudzou.
02:55 Il reste à conquérir un monde où ni les enfants ni les femmes ne sont des objets utiles
03:00 à quiconque mais des humains en entier et d'égale dignité.
03:03 Merci à vous.
03:04 Anne-Cécile Maifer, je vous dis à vendredi prochain.