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Jeudi 1 juin 2023, SMART ÉDUCATION reçoit Florence Cathala (Présidente, L’ÉCOLE)

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00:00 ...
00:07 -Bonjour à toutes et à tous.
00:09 Bienvenue dans ce nouveau numéro de "Smart Education".
00:12 C'est un magazine dédié à la formation,
00:15 aux nouvelles pédagogies, aux nouveaux métiers.
00:17 C'est le rendez-vous qui donne un futur à la jeune génération.
00:21 Aujourd'hui, nous recevons Florence Cattala,
00:24 fondatrice de l'école.
00:25 Comme son nom l'indique, c'est une nouvelle école
00:28 qui, comme sa première classe, s'ouvre en septembre 2023.
00:31 L'objectif de cet établissement, c'est d'apporter
00:34 une pédagogie collaborative aux enfants.
00:37 Nous allons voir avec sa fondatrice
00:39 quels sont les enjeux derrière cette nouvelle pédagogie.
00:42 Florence Cattala, bonjour. -Bonjour.
00:44 Merci de me recevoir. -Merci d'être avec nous.
00:47 J'ai parlé de pédagogie collaborative.
00:50 Sur quoi est-ce que ça repose, exactement ?
00:52 -La pédagogie collaborative,
00:54 elle repose sur la croyance et la conviction, surtout,
00:58 que, à plusieurs, on apprend plus vite, mieux,
01:03 et on fait de meilleures choses ensemble.
01:05 Ca permet, ça offre l'opportunité aux enfants de réussir.
01:09 Je veux que tout le monde ait 20 sur 20.
01:11 C'est mon objectif.
01:12 Je refuse l'idée d'avoir des échelles de différence
01:15 dans une classe, entre celui ou celle qui a 5 de moyenne et 20.
01:19 La pédagogie collaborative a le vice.
01:21 C'est-à-dire tendre vers le "tout le monde réussit".
01:24 -Il y aurait des notes individuelles à chacun,
01:27 mais les travaux sont réalisés... -On renverse la table.
01:31 Ce qui compte, c'est que les enfants décident,
01:33 quand la classe est prête, à être évaluée,
01:36 car ils savent qu'ils vont tous avoir 20 sur 20.
01:38 -Quand tout le monde est prêt. -Tout par-delà.
01:41 Toute la pédagogie tourne sur comment, ensemble,
01:44 on s'organise et on s'aide.
01:46 C'est vraiment, on sort de l'apprentissage siloté.
01:49 L'objectif, c'est que tout le monde soit en position de réussite.
01:52 -L'idée, c'est de ne pas être le dernier ni le premier.
01:56 -Exactement, parce que je souhaite
01:58 que tout le monde ait accès au succès, en fait.
02:01 C'est vraiment l'objectif de l'éducateur,
02:03 de l'enseignant, du professeur,
02:05 qui est de permettre, je dis éducateur,
02:08 parce qu'on va appliquer cette volonté
02:10 sur l'ensemble des matières,
02:12 que ce soit des matières sportives, artistiques,
02:15 et sur les principes des matières fondamentales,
02:18 comme le français, les mathématiques.
02:20 C'est fondateur dans ce qu'on cherche à faire.
02:23 -De quoi est né ce constat ?
02:25 -Le projet... -Le projet, pardon.
02:27 -Le projet est né d'une expérience de trois choses.
02:30 Une expérience personnelle.
02:32 J'ai deux garçons que j'ai dû déscolariser
02:34 parce que les écoles normales,
02:36 je ne vais pas dire normales,
02:38 mais les écoles actuelles ne pouvaient pas répondre
02:41 à leur bien-être à l'école et à leur réussite.
02:43 Donc, ça, c'est le premier vécu,
02:45 le chemin de croix du parent qui cherche des solutions.
02:48 Le deuxième, c'est ma vie professionnelle.
02:51 Ca fait 20 ans, 25 ans, que dans ma vie professionnelle,
02:54 à fois en entreprise, puis en cabinet de conseil,
02:57 puisque j'ai été cofondatrice et fondatrice
03:00 de deux sociétés de conseil dédiées à la transformation
03:03 des organisations et aux approches collaboratives
03:07 pour faire réussir ces projets.
03:10 -Dans le milieu professionnel. -Exactement.
03:12 Et donc, pour tout vous dire,
03:14 quand je me suis vue, 20 ans plus tard,
03:16 toujours à la cuillère, essayer de vider l'océan,
03:19 car c'est compliqué de faire changer les gens,
03:22 d'apprendre aux gens à mieux travailler ensemble,
03:25 je me suis dit que c'était comme le ski,
03:27 il fallait commencer dès le plus jeune âge.
03:30 Comment on fait de cette puissance,
03:32 le collaboratif, un outil pour l'éducation,
03:34 ayant vu que, déjà, quand les enfants sont ensemble,
03:37 il y a plus de joie quand ils travaillent ensemble,
03:40 ça commence par le sport, et pourquoi pas dans l'éducation ?
03:44 Donc, c'était de transposer tout ce qu'on a développé
03:47 avec notre équipe depuis 20 ans sur les pratiques collaboratives
03:50 au service de l'éducation.
03:52 -Le collaboratif, c'est quelque chose qui touche au fond
03:55 et/ou à la forme ?
03:56 -Les deux. -Les deux.
03:58 -Les deux. Anne-Sophie Pic,
04:01 qui est une grande chef française,
04:03 traduit très bien ça, c'est-à-dire que le collaboratif,
04:06 elle a très bien compris, c'est pas seulement de la forme,
04:10 c'est-à-dire un état d'esprit, c'est du fond,
04:12 ce sont des méthodes, on n'obtient pas des étoiles
04:15 de bazar, ça demande une très grande rigueur de méthode.
04:18 Ce qu'on apprend aux enfants, c'est un cadre,
04:21 à travailler dans un cadre, qu'ils vont ensuite développer
04:24 et qui va être teinté, de chaque groupe va créer,
04:27 que ce cadre va être sublimé, mais ça nécessite des règles.
04:30 Quand vous êtes en cuisine, il faut apprendre à couper les légumes,
04:34 à monter des sauces, etc. Dans la collaboration,
04:37 contrairement à ce que l'on pense en général,
04:40 ça implique des règles collectives,
04:42 principalement, des règles individuelles
04:45 et des savoir-faire, effectivement, managériaux, etc.
04:47 On va me dire que je veux rapprocher l'entreprise de l'école.
04:51 Non, c'est les pratiques, les méthodes qu'on va essayer
04:54 de mettre au service de l'éducation
04:56 pour apprendre plus facilement, avec plus de plaisir.
04:59 Des journalistes ont travaillé sur l'école du bonheur,
05:02 c'est exactement ça, c'est comment on vient aider
05:05 à développer l'école heureuse, l'apprentissage heureux.
05:08 -Parce que là, concrètement,
05:10 vous allez ouvrir des classes, donc, grandes sections,
05:14 jusqu'à tout le primaire. -Oui, jusqu'à CM2,
05:16 pour commencer. -Pour la rentrée prochaine.
05:19 Comment vont se dérouler les journées ?
05:21 Quelques exemples de cours selon les matières ?
05:24 -Là aussi, on renverse un peu la table.
05:27 Il y a quatre jours suivis d'école.
05:30 Ca commence à 9h,
05:31 les enfants sont accueillis de 8h15 à 9h.
05:34 A 9h, ça commence par une mise en forme, on va dire.
05:38 C'est-à-dire qu'on va travailler sur l'éveil de son corps,
05:43 la prise d'espace, la conscientisation qu'on est là,
05:47 qu'on va faire des choses ensemble, etc.
05:49 On travaille beaucoup avec les sophrologues
05:52 sur l'appréhension de son corps, sa respiration, etc.
05:55 Ensuite, on va avoir quatre grands temps.
05:58 Le matin, il y a découverte des savoirs,
06:00 en mode projet.
06:02 Ensuite, il y a l'exploration des savoirs,
06:04 en mode expérimental.
06:06 Je vais y revenir juste après, je donne les grandes tendances.
06:10 Ensuite, on part deux après-midi par semaine,
06:13 sport tout l'après-midi,
06:16 un après-midi dédié à la connaissance de soi
06:19 et un après-midi dédié aux arts,
06:21 qu'ils soient de la sculpture, de la peinture, de la culture,
06:24 où les enfants vont expérimenter, réexpérimenter
06:27 des savoirs fondamentaux au travers de l'art,
06:29 du sport et de la connaissance de soi.
06:32 Je tiens beaucoup, je vois en entreprise
06:35 le nombre de gens qui ne sont pas à leur place,
06:38 parce que l'environnement social, familial,
06:40 les a amenés sur des chemins qui n'étaient pas faits pour eux.
06:43 Je veux aussi travailler, mettre les gens à la bonne place.
06:47 -Mais de ce que j'entends, il n'y aura pas de classe de français ?
06:50 -Non. -30 minutes de français ?
06:53 -Non, ça ne se passe pas comme ça.
06:55 On part de situation de l'enfant.
06:57 Un enfant, il vit tous les jours dans son monde,
07:00 et on va partir de situation réelle qu'ont les enfants,
07:03 qu'ils vont proposer et qu'on va décortiquer.
07:05 C'est l'exemple de cette expérimentation,
07:08 de ce mode projet sur ces sujets qu'ils vont amener.
07:11 Les Jigs olympiques de 2024, ils vont dire
07:13 "C'est quoi, pourquoi on fait les Jeux olympiques ?"
07:16 On va traiter au travers des Jeux olympiques
07:19 des sujets, des disciplines fondamentales.
07:22 Autre exemple,
07:23 toute la pédagogie est centrée sur le sens,
07:26 donner du sens. Pourquoi dois-je apprendre quelque chose ?
07:29 La grande difficulté qu'on les enseigne aujourd'hui,
07:32 c'est le pourquoi.
07:33 C'est important pour nous, avec John,
07:35 avec qui nous développons ce projet.
07:37 Pourquoi, par exemple, on doit apprendre à écrire ?
07:41 Pourquoi doit-on apprendre à écrire ?
07:43 On a développé, par exemple, une approche qu'on a testée,
07:47 qui était de dire "On apprend à bien écrire, pourquoi ?"
07:50 Ca donne envie aux gens de vous lire,
07:52 de vous écouter, de vous comprendre.
07:54 Donc, la formulation de ce que vous allez écrire
07:57 va donner envie.
07:58 "Pourquoi lisez-vous un livre et pas un autre ?"
08:01 Et donc, on part de ça, on les rend journalistes,
08:04 ils sont journalistes pendant une demi-journée,
08:07 et ils vont apprendre les formes de phrases,
08:09 à identifier les différentes formes de phrases
08:12 en étant journalistes pendant une journée
08:14 et en ayant comme objectif commun de délivrer...
08:17 "Délivrer", c'est un mot d'entreprise,
08:19 mais à créer... Excusez-moi.
08:21 A créer un journal digital, un journal papier
08:24 et un journal télévisuel, comme on le fait aujourd'hui.
08:27 -A travers ces exercices, vous intégrez tout ce qui pourrait
08:31 être la pédagogie, dites classiques,
08:33 courantement d'autres... -C'est ça.
08:35 -Est-ce que tout peut être collaboratif,
08:37 toute la journée ?
08:38 C'est du collaboratif ou il y aurait quand même des temps
08:42 pour un travail individuel ou des exercices individuels ?
08:45 -Bien sûr, il y a une petite part, j'allais dire,
08:48 de temps de pause individuelle, d'assimilation, de compréhension.
08:51 Il y a toute une rythmique, en fait.
08:53 Mais ce qui compte le plus, c'est de se faire aider des autres
08:57 et de dire "Je ne reste pas tout seul quand j'ai assimilé
09:00 "quelque chose, je viens m'aider de l'autre pour me vérifier
09:03 "que je l'ai bien compris."
09:05 C'est tout ce travail, ce mélange entre "J'ai mon temps
09:08 "d'assimilation, mais j'ai le groupe qui vient m'aider
09:11 "à m'assurer que je ne suis pas sur la mauvaise route
09:14 "et que j'ai bien compris."
09:16 Ce qui est important aussi, c'est qu'on l'a vu
09:19 dans les expériences que nous avons faites,
09:21 il y a des enfants qui ne sont pas adaptés
09:24 pour un travail collectif ou collaboratif
09:26 toute la journée. -Oui.
09:28 -Ca, les enfants vont les aider à avoir leur temps individuel.
09:31 C'est évident, parce qu'il y a des gens
09:34 qui sont plus relationnels que d'autres.
09:36 L'autre fait peur, donc il faut apprendre à rentrer
09:39 dans la relation avec l'autre.
09:41 Comment je tue ces peurs vis-à-vis de l'autre ?
09:44 C'est là qu'on change et qu'on renverse la table aussi
09:47 du rôle de l'enseignant, qui va être un observateur,
09:50 qui va mettre les enfants en connexion les uns avec les autres
09:53 et qui va mieux appréhender les étapes individuelles
09:57 que chaque enfant va devoir faire,
09:59 mais il ne les adresse pas uniquement individuellement
10:02 toute la journée, il va s'aider du groupe
10:04 pour leur faire franchir des étapes.
10:06 Il faut dire qu'on fait des classes à 15 élèves.
10:09 -C'est ce que je veux dire. Ca nécessite un professeur
10:12 pour une classe plus petite et peut-être même
10:15 une organisation des tables de la classe environnante.
10:18 -Exactement. Et un professeur pour 15 élèves.
10:21 Alors, en mode découvert des savoirs,
10:25 en revanche, en mode exploratoire,
10:27 on les met en groupe de 30 parce qu'ils travaillent en groupe de 5.
10:31 On peut avoir des classes par nom plus grandes
10:33 et quand ils vont avoir à fabriquer, je sais pas,
10:36 une cage à oiseaux pour comprendre
10:39 la division, la relation des mesures,
10:41 les unes vis-à-vis des autres, qu'est-ce qu'un triangle, etc.,
10:44 ils sont en groupe de 5, mais ils peuvent être dans des groupes de 30
10:48 parce qu'il y a encore plus d'émulation et de partage, surtout.
10:52 Partage de pratiques et de savoir.
10:54 -C'est aussi une pédagogie collaborative
10:56 des professeurs en eux-mêmes, des maîtres d'école ?
10:59 -Oui. -Comment ils se forment
11:01 à ça, à cette nouvelle pédagogie ?
11:03 -C'est le rôle du directeur de l'école.
11:05 Ca va être d'intégrer au sein de nos écoles,
11:08 on va faire des modules de formation continue,
11:11 de façon à ce que les enseignants eux-mêmes
11:13 apprennent à travailler ensemble.
11:15 Lorsque nous avons fait en 2021 et 2020
11:17 des formations d'enseignants pour tester tout ce qu'on faisait,
11:21 au-delà de ce que faisait John dans sa classe,
11:24 on a pu voir cette difficulté d'enseignants
11:26 qui, même dans un même établissement,
11:28 ne s'étaient pas parlé.
11:30 Ca veut dire qu'il y a un énorme chantier de travail
11:32 d'apprendre aux enseignants à travailler ensemble.
11:35 C'est une des difficultés des approches projets.
11:38 C'est pas seulement dire qu'il faut travailler en mode projet,
11:41 mais ça veut dire apprendre aussi aux enseignants
11:44 à adopter ces pratiques collaboratives
11:46 comme on travaille ensemble.
11:48 -C'est vrai qu'on se projette bien ce type d'exercice
11:51 pour des jeunes enfants.
11:53 Comment l'appliquer ?
11:54 Est-ce que vous avez volonté de l'appliquer
11:56 pour le lycée et peut-être même des systèmes
11:59 éducatifs supérieurs ? -Tout à fait.
12:01 C'est une des premières questions qu'on me pose.
12:04 Quand mon enfant sort du CM2,
12:05 on a commencé à réfléchir au collège.
12:07 On veut d'abord travailler sur la partie primaire,
12:10 mais évidemment, on va essayer de proposer des choses
12:13 pour le collège,
12:14 et toujours en essayant de renverser les codes
12:18 et de changer les façons de faire.
12:20 J'insiste aussi, on en a moins parlé,
12:22 mais le rôle des parents est essentiel.
12:25 Il y a... Mon rêve, c'est l'école sans couture
12:28 pour l'enfant entre la maison et l'école.
12:30 C'est-à-dire qu'il va vivre un système,
12:33 un cadre à l'école,
12:35 et il va falloir que les parents qui rejoignent l'école
12:38 acceptent que ce cadre vive à la maison.
12:41 Voilà. Et ça, c'est une deuxième chose.
12:43 Les parents ont...
12:45 Ce que j'ai vécu en tant que parent,
12:47 c'était le tunnel noir où je mettais l'enfant
12:49 dans la classe et je ne savais pas ce qui s'y passait.
12:52 Non pas pour... On n'est pas là pour contrôler,
12:55 mais pour comprendre comment son enfant à l'école,
12:57 il n'est pas à l'école comme à la maison.
13:00 C'est aussi de faire rentrer les parents dans l'école,
13:03 avoir un rôle actif, venir partager plein de choses
13:05 dans l'école et venir construire surtout l'école avec nous.
13:09 C'est très important.
13:10 -Merci, Florence Katala, pour ces explications.
13:13 Merci de nous avoir présenté l'école.
13:15 Vous êtes fondatrice de cette nouvelle institut, l'école.
13:18 Quant à nous, on se retrouve demain
13:20 pour un autre numéro de Smart Education.
13:23 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
13:25 Générique
13:27 ...